LeMonde a besoin de toi

Je suis en manque cette semaine, pas de parution mardi du journal Le Monde pour fait de grève. Rebelote vendredi. Pourtant la précédente et première grève a eu lieu le 21 mai 1976, visant à obtenir des patrons de presse la signature d’une convention collective des journalistes. Autant dire que mon quotidien n’est pas un habitué des jours de grève !  Le samedi 19, LeMonde s’adresse à moi, c’est-à-dire à ses lecteurs : « Jamais les finances du Monde n’ont été aussi calamiteuses, avec sept exercices consécutifs déficitaires (…) Il s’agit de supprimer 129 postes dont 89 à la rédaction, nous avons l’intention de céder plusieurs entités du groupe, Fleurus-presse, Les Cahiers du Cinéma… »

Pourtant la diffusion progresse, LeMonde est la première vente de presse généraliste, le taux de satisfaction est élevé. Alors ? C’est la faute à la publicité ! Le fondateur du Monde, Hubert Beuve-Méry parlait de « l’indispensable, la bienfaisante publicité » à une époque où elle représentait 40 % des recettes. Dans les années 1970, cette proportion est passée à plus de 60 % du chiffre d’affaires, pour retomber aujourd’hui à 20 %. La publicité était un délice, elle est devenue un cauchemar, prompte à se déplacer vers la télévision, Internet et maintenant les journaux gratuits. Alors ? On ne pourra pas augmenter le nombre de lecteurs ; la jeunesse ne lit plus, elle se détourne même du petit écran pour surfer sur Internet. On ne pourra pas diminuer le prix de vente, LeMonde ne coûte déjà que le quart du prix d’un paquet de cigarette, ce n’est pas la ruine.

Le plan de redressement parie sur une nouvelle vision journalistique, un journal « plus ramassé, plus dense, plus sélectif ». Là j’ai peur, on ne risque de sélectionner que les articles qui font plaisir aux annonceurs. Il suffit de pointer le nombre de pages du Monde vouées à la gloire de l’automobile pour s’en rendre compte. Alors ? Je ne peux que déclarer ma fidélité, je suis abonné depuis 35 années et scotché à la lecture quotidienne. Je ne peux que déclarer ma flamme, je suis membre de la société des lecteurs depuis l’origine, nous pouvons toujours subventionner une cause qui en a besoin. Je ne peux que déclarer ma confiance, mon journal parle de mieux en mieux de notre avenir, écologique dans sa page « Environnement & Sciences, bien analysé avec les articles d’Hervé Kempf et de tant d’autres, bien pourvu avec ses sources d’information toujours pertinente et ses dessinateurs impertinents. Je ne peux que conseiller le monde entier d’acheter le journal Le Monde chaque jour…