J’ai éprouvé une véritable souffrance devant la présentation faite par LeMonde* de la motorisation chinoise. Car j’ai maintenant la certitude que la civilisation thermo-industrielle se précipite de plus en plus vite en voiture vers son effondrement (et les difficultés sociales que cela entraînera). En page 3, le Chinois devient un « Homo automobilus » inconsistant : on achète une auto pour montre qu’on en a (du fric), on se précipite sur la berline de luxe puisque sa sœur vient d’acheter une BMW, on croit donner une image de soi glorieuse alors qu’on vient de se faire kidnapper par l’industrie automobile. Le Salon de Shanghai (page 13) s’ouvre sur ce qui est devenu le premier marché automobile du monde. C’est une grande première pour la Chine, passée de 600 000 voitures particulières en 2000 à 14 millions en 2010. Cette expansion forcenée du marché repose sur les ingrédients habituels de la publicité commerciale, imitation et ostentation : on achète une voiture pour faire comme les autres, on achète un super-modèle pour se différencier du voisin ! L’aliénation peut commencer.
En effet, un statut social qui relève d’une possession matérielle n’est que le signe d’une société matérialiste qui a abandonné toute sagesse. L’automobiliste croit renforcer son sentiment de liberté sans limites, décider où aller et à quelle vitesse, alors qu’il n’est que le prisonnier des infrastructures routières, des règlements et des embouteillages, des ressources pétrolières et de leur rareté croissante. A Pékin existe déjà un rationnement à l’immatriculation automobile pour enrayer son engorgement routier. On pense déjà hybride et voiture électrique sans se rendre compte que les centrales thermique au charbon accélèrent la pollution et les émissions de gaz à effet de serre. La Chine rentre dans une impasse, elle possède peu de ressources pétrolières et l’Arabie Saoudite commence à garder son pétrole pour ses propres ressortissants (déjà 15 % de sa production à l’heure actuelle). Le « juste » prix du pétrole n’existe pas. Le pétrole est un miracle volé par les humains à la nature, le prix du baril ne peut qu’exploser.
Bientôt l’homo automobilus va être obligé de suivre une cure de désintoxication. Déjà la Chine a mis en place des centres chargés de guérir ses malades du jeu vidéo… elle interdira un jour les véhicules individuels après avoir suivi la sinistre pente du gaspillage des ressources fossiles.
* LeMonde du 21 avril 2011,
– Le Chinois, « Homo automobilus »
– les constructeurs automobiles rêvent en chinois
– Le juste prix du pétrole saoudien