WWF (le spécialiste du panda) ou l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature) privilégient des espèces emblématiques. On abandonne à leur sort ce qui n’est pas jugé gros et mignon : l’ours polaire attire plus l’attention que le ver de terre. Les grands prédateurs sont à l’image de l’homme, ils focalisent la sensibilité, donc les financements. Encore une dizaine de millions d’euros* qui viennent s’ajouter aux autres depuis des dizaines d’années pour des résultats insignifiants. Or l’équilibre de la biosphère tient non seulement à la richesse en espèces animales d’un bout à l’autre de la chaîne alimentaire, mais aussi au nombre de ver de terre et aux microbes. Charles Darwin a fait un récit fascinant sur le ver de terre qui participe activement à la vie complexe du sol. L’humus, qui résulte du processus croissance et décomposition, peut aussi être considéré comme un être vivant. Sans humus et ver de terre, il n’y a plus d’agriculture productive, il y a la famine. Or nous détruisons l’humus et les vers de terre aussi bien que les tigres. Chaque fois que vous mettez un grain de potasse sur un ver de terre, il est mort. Il faut prendre le point de vue des défenseurs de la nature pour qui toutes les espèces même les plus humbles sont essentielles.
Le problème de fond, c’est que les ONG comme WWF ou l’UICN veulent inciter les entreprises privées à contribuer à un fonds mondial pour la conservation des espèces. Autant dire au bourreau de ne pas faire son œuvre ! Nous devrions tous savoir que la perte de biodiversité est le fait de l’expansionnisme humain. Il faut donc limiter les activités humaines, donc limiter l’emprise des entreprises, mais pas seulement. La croissance de l’urbanisation, la multiplication des voitures et de leurs autoroutes, tout contribue à réduire l’habitat des autres espèces. La croissance de l’espèce humaine (1 milliard d’êtres humains ces 12 dernières années) a aussi pour conséquence l’élimination programmée de la biodiversité.
Il faut que WWF et UICN disent haut et fort que les humains sont responsables et coupables et qu’ils doivent changer, retrouver l’humilité, retrouver l’humus de la Terre. La simple défense des espèces emblématiques ne peut nous faire prendre conscience de la chose.
* L’UICN) s’apprête à lancer son programme SOS (Save Our Species, Sauvons nos espèces). Une initiative lancée en collaboration avec la Banque mondiale, le Fonds pour l’environnement mondial qui réunit déjà la somme de 13 millions de dollars (9,9 millions d’euros)