rapport Gallois, compétitivité et nationalisme guerrier

Il n’y a pas loin entre choc de compétitivité, affrontement commercial, célébration du nationalisme et risque de guerre des ressources et des débouchés. C’est dans l’air du temps de chercher le choc final à force de croissance qu’on veut aller chercher avec les dents. Que ce soit Sarkozy, Hollande, Obama et tant d’autres politiques, ils sont vraiment mal conseillés.

La course à la compétitivité telle que voulue par Louis Gallois* n’est pas durable. En fait cet ancien patron d’EADS et de la SNCF, aujourd’hui commissaire général à l’investissement, est un dirigeant qui ne sait que répéter en boucle croissance-croissance (tirée par les exportations). Il ressemble comme un frère à Jacques Attali qui a commis un rapport sur « la libération de la croissance » ! La baisse du coût du travail est censée enrayer la dégringolade du déficit commercial de la France. Or la recherche de la compétitivité internationale est un jeu à qui perd gagne. Prenons un seul exemple de la situation actuelle. La Chine est devenue l’atelier du monde, ses compétences dans tous les domaines ne peuvent qu’écraser la concurrence. Même si l’ouvrier français était payé aussi peu que l’ouvrier chinois, nous serions obligés d’acheter à la Chine puisque notre tissu productif s’est effrité après des années de délocalisation. De plus la Chine est en concurrence avec les pays anciennement développés dans la captation des ressources fossiles et des métaux, la raréfaction s’accentue, c’est le plus fort qui va imposer sa loi sur une planète dont nous avons dépassé les limites.

Rappelons que l’invention du libre-échange au XIXe siècle par David Ricardo n’était qu’un moyen de transgresser la finitude de la Terre. L’augmentation de la population en Angleterre exigeait la culture de terres de moins en moins fertiles, engendrait une hausse des coûts de production et donc des prix de l’alimentation. Les céréales étant la base de la consommation ouvrière, la baisse des profits devait être retardée par le libre-échange et l’importation de céréales à bas prix. La libération du commerce fut ainsi la réponse donnée à la limite des ressources en un lieu, limite qui pourrait être compensée par des échanges avec un ailleurs. Ricardo appuyait son raisonnement théorique sur les avantages comparatifs, les pays échangeaient des produits différents. Aujourd’hui, non seulement nos échanges avec les autres pays portent pour une grande partie sur des produits similaires, mais la Terre, exploitée jusque dans ses confins les plus lointains, est soumise à l’extraction sans merci de ses ressources (lire Geneviève Azam).

En termes clairs, le choc de compétitivité est un choc des nations dont ni la France, ni la Chine, ni personne ne peut sortir gagnants… L’exportation ne devrait pas être le but premier d’un pays, mais la recherche de l’autonomie productive. Le gouvernement socialiste ferait mieux de soutenir les communautés de résilience plutôt que d’augmenter la TVA !

* LE MONDE du 6 novembre 2012, Rapport Gallois, l’impossible choc de la compétitivité