Et si Malthus finissait par avoir raison ?

Thèse :

1) Un écologiste se doit de traiter l’enjeu démographique. Avant même d’être le choix d’un couple, le nombre d’enfant a des conséquences collectives si importantes qu’il faut en délibérer démocratiquement.

2) La façon de consommer des populations a certes des répercussions néfastes sur l’environnement, mais le nombre d’hommes et de femmes présents sur la planète fait problème. La question démographique est aussi importante que le mode de vie des Américains qui, s’il était généralisé, nécessiterait plusieurs planètes. Par exemple le Bangladesh, hormis les très petits pays tels que Singapour, est le pays le plus densément peuplé au monde. Il n’y avait que 42 millions d’habitants en 1951, il y en a plus de 150 millions aujourd’hui : la situation est ingérable.

3) Le rythme auquel s’est accru la population mondiale au cours des cinquante dernières années est préoccupant. Le nombre d’êtres humains a plus que doublé en quarante ans, la baisse de la mortalité infantile ayant été associée à des taux de natalité encore élevés : il n’y a pas transition démographique pour de nombreux pays. Le nombre des femmes en âge d’avoir des enfants demeure supérieur à ce qu’il était pour la génération précédente. D’où un nombre absolu de naissances qui demeure très élevé.

Antithèse : Avec le texte ci-dessus, nous nous opposons point par point au chapitre « Démographie » du petit livre « L’économie verte en trente questions »* :

1) Les écologistes n’assument pas toujours de traiter de l’enjeu démographique. Pour des raisons de respect des libertés individuelles : la décision d’avoir ou non des enfants est d’abord une affaire personnelle, même si les décisions prises par les femmes et les hommes à ce sujet ont des conséquences collectives.

2) Mais une autre raison peut conduire à considérer la question démographique comme secondaire. Ce  ne serait pas tant le nombre d’hommes et de femmes présents sur la planète qui ferait problème, mais la façon dont consomment les plus riches d’entre eux. Ainsi, si un pays peut être considéré comme surpeuplé aujourd’hui, ce n’est pas le Bangladesh, mais les Etats-Unis d’Amérique, au vu du mode de vie des habitants de ces deux pays

3) Pour autant, le fait que la croissance de la population mondiale ralentisse est tout de même une excellente nouvelle, au vu de la pression sur les ressources qu’imposera dans tous les cas la satisfaction des neuf milliards d’habitants que la Terre comptera en 2050.

Synthèse : Ce hors-série d’Alternatives économiques se termine par des considérations avec lesquelles nous ne pouvons qu’être d’accord : « Le mouvement de baisse de la fécondité sera d’autant plus rapide qu’on parviendra à élever les niveaux de vie, à étendre les systèmes de protection sociale – et notamment l’éducation des filles – et à mettre à déposition de tous les moyens contraceptifs permettant d’éviter les grossesses non désirées. »

Le problème, c’est que les négociations internationales ont toujours échoué à traiter de front la question démographique, croyant que le « développement » suffirait à faire baisser la fécondité. La vulgate anti-malthusienne aura fait beaucoup de mal, contribuant à l’explosion démographique actuelle : 1 milliard d’habitants s’ajoute en moyenne tous les douze ans depuis quarante ans sur une planète dont les ressources se raréfient. Comme le dit ce hors-série, « Crise écologique, crise économique, crise sociale, il faut changer de cap ». Le malthusianisme, c’est-à-dire une politique volontariste de maîtrise de la fécondité, est une nécessité. Vous pouvez adhérer à l’association « Démographie responsable »

* Hors-série poche n° 61 (Alternatives économiques, mars 2013)

8 réflexions sur “Et si Malthus finissait par avoir raison ?”

  1. Un conseil : éviter le qualificatif « malthusien » et préférer « néo-malthusien ».

    Concrètement : se battre contre la fermeture de centres IVG, renforcer considérablement les moyens des associations de planning familial, ne rien céder sur le droit des femmes à l’éducation, à la contraception et à l’avortement, en finir avec toute politique nataliste (allocs : quelque chose pour le premier, moins pour le deuxième, plus rien à partir du troisième).

    Idéologiquement : les débiles et/ou les salauds sont les natalistes de tous les bords. Ne jamais hésiter à leur dire en face et à interpeller les écolos mystiques et/ou carriéristes sur leur totale incohérence intellectuelle.

  2. Ludvigvonprinn

    « Le plus désolant, ce sont les tartuffes écolos qui déclarent la main sur le coeur qu’ « en changeant de méthodes agricoles, la planète pourrait porter une population bien plus importante ». Même si ça pourrait être exact (hors de toute  »

    Théorie défendue par ce bon Ziegler , vieille pleureuse tiersmondiste de l’ ONU ,qui affirmait que la production agricole dite organique suffirait à nourrir 12 milliards d’ habitants sur Terre ; il me semble que le pourtant respecté P.Rhabbi défendait la même thèse .
    Hulot et les zozos de EELV en font de même : quelle crédibilité ont ces pastèques ?

  3. Je crains que la méthode dite « humaniste » ne soit trop longue à mettre en oeuvre : il faudra bien que des guerres et des famines aident les dénatalistes à accèlérer le processus .

    1. Marcel,
      Un « humaniste » écolo recherche toujours le dialogue avec les anti-malthusiens, pour la généralisation du planning familial, pour l’éducation des filles, etc. Cette méthode est longue à mettre en œuvre, pas toujours suivie d’effets et un néo-malthusien peut même être pourchassé. Mais là est la voie de la non-violence. Si les humains se font la guerre parce qu’ils n’ont pas écouté les conseils de bon sens, au moins l’« humaniste » écolo aura fait ce qu’il devait faire : peu importe le résultat tant que la méthode est bonne.

  4. Le plus désolant, ce sont les tartuffes écolos qui déclarent la main sur le coeur qu’ « en changeant de méthodes agricoles, la planète pourrait porter une population bien plus importante ». Même si ça pourrait être exact (hors de toute considération sur la qualité de vie), je n’ai encore jamais rencontré quelqu’un dont la consommation se limite strictement à la nourriture, et encore moins dans nos sociétés quelqu’un qui l’accepterait. Et le petit détail oublié au passage, c’est que le droit à la vie n’a pas de raison d’être réservé aux hommes.

  5. Il me semble que sur le point démographique, Malthus avait raison. Le problème est de savoir comment freiner de manière humaniste cette croissance en respectant les vies existantes. Dans les « grands » médias et dans beaucoup de cercles, suggérer que Malthus avait au moins partiellement raison vous disqualifie définitivement. Et pourtant…

  6. Je crois en effet qu’il faut désormais se convaincre que Malthus n’a pas eu tort mais qu’au contraire, il a eu raison avant les autres en comprenant tout simplement que sur un monde de surface finie, une croissance infinie de la population était impossible.
    Sur le plan moral aussi, beaucoup l’ont accusé de lutter contre les pauvres. Tout à l’inverse, ses préconisations visaient à lutter contre la pauvreté. Les natalistes qui clament leur amour des plus démunis et les encouragent à se reproduire sans limites ne seront pas ceux qui, demain, leur offriront de quoi vivre dignement.

  7. Malthus finira par avoir tôt ou tard raison. Ce n’est pas une question d’opinion, c’est mathématique. On a beau se creuser la cervelle, à part l’intervention d’un deus ex machina comment pourrait-il en être autrement sur une planète finie?

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