Normalement un article du MONDE* retrace le positif ou le négatif d’un événement quelconque. Mais quand on offre à un journaliste un tour du monde en avion, on a droit à un éloge exclusivement dithyrambique d’une excursion touristique : « Les lions sont bien là, mais aussi les gazelles, les hippopotames et les zèbres, les grues royales et une immense colonie de flamants roses. Les animaux offrent leurs déambulations aux photographes amateurs. L’après-midi, quand un éléphant solitaire passe à deux mètres de la voiture, ses défenses immaculées et son allure souveraine imposent le silence. Un safari en Tanzanie ? Pas seulement. Cette journée africaine n’est qu’une des neuf escales d’un voyage autour du monde. De quel tour s’agit-il exactement ? De Phileas Fogg au skippeur François Gabart, le tour du monde est une passion française. Ici, c’est un voyage « cartes postales », Grand Canyon et Las Vegas, puis les plages paradisiaques d’Hawaï, des Fidji et de Melbourne, Angkor au Cambodge, puis Colombo, la Tanzanie, Addis Abeba et enfin Jérusalem avant le retour à Paris. Les chiffres donnent le vertige : 21 jours, 46 555 kilomètres parcourus, 66 heures de vol, soit plus de deux jours et demi dans les airs. Tarif de base de la version « première classe », 48 900 euros. Deuxième catégorie, 30 900 euros pour des hôtels 4 étoiles. Ont-ils vécu leur rêve, ces passagers du tour du monde qui reçoivent le dernier jour un passeport d’opérette qui résume leur périple ? « Cent fois oui », disent-ils en cœur. » Un écologiste n’a qu’une envie, dégueuler à la lecture d’un tel exploit. Les commentateurs sur le monde.fr confirment (presque tous) :
Philippe : Pour être un peu moins nul, cet article devrait indiquer le nombre de tonnes de CO2 pour ce voyage bien tristounet.
Eric Richard : Notre maison brûle et nous regardons ailleurs… La raison prendra-t-elle enfin le dessus !!!
Taraxacum : C’est vraiment de l’argent gâché, et ils ne méritent pas leurs cartes postales. C’est la négation du voyage. Aucun contact avec la population, c’est méprisant pour les habitants et leur mode de vie.
BJ : Quel triste gâchis. Quel intérêt y-a-t-il à dépenser autant dans un séjour qui ne procure rien de plus, à part un jetlag monumental, que la sensation vaine et superficielle d’avoir visité une carte postale, d’avoir « fait » un pays? Quel rapport y-a-t-il avec une authentique aventure qui vous plonge dans une autre culture, qui vous dépayse vraiment et vous fait véritablement changer de regard? Ce tour du monde ridicule n’offre que ce l’argent peut offrir.
G.A. : Cela montre à quel point on s’emm… quand on a des ronds à ne plus savoir qu’en faire. L’inanité du vide. Petit ghetto volant.
ROGER WENDLING : le réchauffement climatique n’est pas vraiment leur tasse de thé, pour eux l’extase, pour nous les exilés climatiques !
Pinpon : Cette « consommation » est au voyage ce que la prostitution est à l’amour.
tokolosh : Bon, ce type de voyage n’est certainement pas ma tasse de thé, mais, ouh la la, quel déferlement de haine, de bile et d’auto-satisfaction de la part des prêchi-prêcha du « bon » tourisme. Du moment que vous prenez l’avion, c’est mauvais pour la planète ; les AirBnB, ça fout en l’air le marché de l’immobilier et l’industrie hôtelière ; les autochtones ne sont pas dans un zoo pour que des touristes puissent leur parler…
* LE MONDE du 24-25-26 décembre 2017, Le tour du monde en… 21 jours
@ hurte
Vous avez très bien fait de nous rappeler le soit disant intérêt du voyage spatial.
D’autre part, je suis d’accord avec vous, la « pensée écologique de notre époque » a cruellement besoin de « décoloniser son imaginaire ».
Nicolas Hulot a vanté le tourisme exotique avant d etre ministre ecolo. Yanus Bertrand de même avant de pleurer sur notre sort. Gilles Boeuf n’arrete pas dans ses conferences de vanter ses voyages tout en nous disant qu’on doit pas. Ce tour du monde en 21 jours est donc parfaitement à sa place dans la pensée écologique de notre époque. On nous dit même désormais qu’aller dans l’espace rend plus vert, fait comprendre des choses écolo.
Il faut, je pense admettre, que c’est la pensée écologique (actuelle) qui est « débile », bien avant celle du tourisme.
Nicolas Hulot a vanté le tourisme exotique avant d etre ministre ecolo. Yanus Bertrand de même avant de pleurer sur notre sort. Gilles Boeuf n’arrete pas dans ses conferences de vanter ses voyages tout en nous disant qu’on doit pas. Ce tour du monde en 21 jours est donc parfaitement à sa place dans la pensée écologique de notre époque. On nous dit même désormais qu’aller dans l’espace rend plus vert, fait comprendre des choses écolo.
Il faut, je pense admettre, que c’est la pensée écologique (actuelle) qui est « débile », bien avant celle du tourisme.
En effet c’est à vomir. Inspiré par Pinpon, je dirais que cette consommation est au voyage ce que la pornographie est à l’amour.
Autre chose, pourquoi donc le voyage serait-il synonyme d’avion ? Ne peut-on pas voyager dans son canapé ? Et même sans télé ? Faut-il aller à l’autre bout de la planète pour rencontrer l’Autre ? En tous cas le comble serait d’y aller pour seulement faire la sieste.