austérité et relance, une grève générale pour rien !

L’histoire nous le démontre, la grève générale n’a qu’une vertu symbolique, elle ne change absolument rien au cours des choses. Mais on peut toujours essayer !  Pour la première fois en Europe, une grève générale était organisée le 14 novembre par les mouvements sociaux du Portugal, de l’Espagne, de la Grèce, de Chypre et de Malte. Ce même jour, la Confédération Européenne des Syndicats (CES) appelait à une « journée d’actions » en Europe. Pourquoi ? Ce n’est pas pour l’emploi, ce n’est pas pour le pouvoir d’achat, c’est contre l’austérité. La  thématique est ambiguë : les travailleurs seraient-ils d’accord pour qu’un pays continue de vivre à crédit ? Ne faudrait-il pas reconsidérer le niveau de vie dans un monde occidental qui vit au-dessus des possibilités de la planète ? Cette grève ne serait-elle pas un soutien indirect au patronat qui s’acharne à nous vendre de la merde après avoir vidé nos cerveaux grâce à la pub ?

                Le PPLD, parti pour la décroissance, est bien embarrassé : « Ensemble en Europe le 14 novembre contre l’austérité… et aussi contre la relance par la Croissance* ». Le PPLD nous explique que « L’objectif de l’austérité est de retrouver la croissance économique ». Nous avions cru jusqu’à présent qu’une politique d’austérité était le contraire d’une relance, un frein à la croissance ! Serions-nous naïfs ? Le PPLD ajoute que « le système capitaliste n’a jamais fait la preuve de sa capacité à faire évoluer l’humanité en harmonie avec la planète ». On pourrait ajouter que le système socialiste non plus, qu’il soit communiste ou socio-démocrate ! François Hollande président a toujours voulu la croissance pour la croissance (go)… et il applique une politique d’austérité (stop) dans le même temps. La politique actuelle ne se soucie nullement de l’harmonie de la planète en utilisant les vieilles recettes, le stop and go.

En fait, il faut se méfier des slogans, il faut déterminer de quelle austérité il s’agit, de quelle (dé)croissance on parle. Prenons la potion Mélenchon contre le « potage de l’austérité »**. Le député européen a présenté son budget, le seul qui « tienne la route », fondé sur la relance, « la clé de la solution à nos malheurs ». Le contre-budget du Front de Gauche est résumé dans un petit livret d’une vingtaine de pages. Ce n’est pas encore le paradis sur terre, mais cela commence à y ressembler : Smic à 1700 euros, revalorisation du point d’indice des fonctionnaires, retraite à 60 ans pour tous, construction de 200 000 logements sociaux, augmentation des places de crèches… On dépense à tout-va et on disposerait encore d’un excédent (30 milliards) pour réduire la dette ! Les intentions sont généreuses, leurs conséquences seront désastreuses. Les riches ne payent pas pour les pauvres pour financer une telle relance, l’argent se contente de changer de main et l’endettement perdure.

La relance à la Mélenchon est une nouvelle variante de l’endettement sans risque et sans fin. Elle ne peut que déboucher sur la reprise de l’inflation à laquelle succédera la déflation dans un contexte de déplétion pétrolière. Une relance repose nécessairement, selon le schéma keynésien, sur deux choses : un déficit budgétaire qui permet de créer des revenus ex nihilo et donc d’augmenter le niveau d’activité (du secteur public principalement). Une politique monétaire laxiste qui permet non seulement de financer le budget par la planche à billet, mais aussi de favoriser l’activité des entreprises par des taux d’intérêt très bas. Un « contre-budget » de relance est obligé de suivre ce schéma quel que soit l’habillage qu’on puisse faire des comptes. C’est le mirage de l’endettement qui a échoué une première fois avec la stagflation à partir du milieu des années 1970 : STAGnation de l’activité économique (et  donc hausse du chômage) et forte hausse de l’inFLATION. Les méthodes encore plus pernicieuses du tournant libéral dans les années 1980 consistent à financiariser l’endettement grâce à des « innovations » qui ont créé les emprunts toxiques. D’où la crise des subprimes en 2008 dont nous ne sommes pas encore sortis malgré le refinancement des banques par les gouvernements. La croissance à crédit est impossible.

Toute relance est devenue inopérante. Il faut le répéter, nous vivons au-dessus des limites de la planète, la crise est nécessaire, elle est inéluctable, les décroissants disent vrai, le Front de Gauche se trompe. Refuser le « potage de l’austérité » qui découle nécessairement d’un surendettement ne peut être qu’une formule électoraliste, pas un programme économique. Faire une grève générale contre l’austérité, c’est croire naïvement à la relance… d’un surendettement ! Un écologiste sincère se positionne au contraire pour une politique d’austérité partagée, liant la réduction de l’endettement public à un dégraissage de la fonction publique tout en relocalisant fortement les activités publiques et privées. L’Etat ne peut pas se substituer à l’initiative citoyenne. Les citoyens ne devraient pas défiler dans les rues mais bâtir des communautés de résilience.

* http://www.partipourladecroissance.net/?p=7771

** LE MONDE du 14 novembre, La potion Mélenchon contre le « potage de l’austérité »

ou http://gauche.blog.lemonde.fr/2012/11/13/le-contre-budget-du-parti-de-gauche/