biosphere

le manque de culture des socialistes

Les socialistes s’égarent, ils confondent promouvoir la culture et aller au spectacle. Le projet du PS* soutient (à peine) la « création », mais les présidentiables se bousculent au festival d’Avignon ou défendent les Francofolies de La Rochelle. Ils restent les partisans d’une société du spectacle qui transforme le citoyen en voyeur de ce que font les autres et l’empêche ainsi de vouloir faire par soi-même. On soutient la « création », c’est-à-dire quelques artistes, on ne promeut en rien la multiplication des chorales et des orchestres amateurs. Martine Aubry veut soutenir les jeunes artistes, elle veut que chaque enfant se rende deux fois par an à un spectacle et se momifie dans un musée : société du spectacle ! François Hollande veut développer l’apprentissage des pratiques culturelles à l’école.  Mais le dessin et la musique sont depuis des années au programme des établissements scolaires et cela n’a pas changé grand chose à la passivité des élèves. Ségolène Royal veut doter chaque lycée d’un médiateur culturel : il s’agit seulement de créer des emplois pour quelques-uns !

Rien de très socialiste dans tout cela, l’autonomie individuelle dans la participation collective n’est pas recherchée. Rappelons à ces présidentiables que la culture, c’est notre comportement au quotidien, ce n’est pas faire des singes savants qui ne connaissent que l’art pratiqué par d’autres. Ces socialistes soutiennent le sens bourgeois du mot culture, faire des êtres « cultivés ». Ils oublient le sens sociologique du mot culture, des êtres qui agissent par eux-mêmes et cherchent à s’épanouir dans la société. Seul Arnaud Montebourg s’approche de la véritable culture socialiste en voulant associer la population à des lieux coopératifs d’artistes, en renouant avec le rôle social de la culture, « l’ensemencement des âmes ».

Notons que LeMonde a également une conception bourgeoise de la culture, id est la société du spectacle. Il suffit de lire leur page « Culture » ce jour** : Le musée des arts décoratifs offre une rétrospective à un styliste londonien ! La langue des Beatles triomphe aux Francofolies ! Rencontre avec l’ex-étoile de l’Opéra de Paris ! Villeréal reçoit les artistes du conservatoire ! Un baiser de théâtre finit devant un tribunal !

* LeMonde du 16 juillet 2012, Les socialistes promettent de ne pas oublier la culture en 2012

** LeMonde du 16 juillet 2012

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liste des saloperies à ne pas acheter

le gros équipement superflu : la bombe nucléaire ; le yacht  ; la résidence secondaire ; le pavillon ; le TGV ; l’hélico ; la moto  ; le quad ;  la mini-moto…

les équipement inutiles : le « Home Cinema » ; l’ascenseur ; l’escalator ; l’aspirateur ; la tondeuse à gazon ; le climatiseur ; la fontaine à eau…

les appareils électroniques à jeter : l’appareil photo numérique ; l’ordinateur ; le Ipod ; le cadre-photo numérique…

les trucs électriques dont on peut se passer : le vélo électrique ; la radio ; la chaîne stéréo ; la machine à pain ;  la machine à expresso ; moulins à sel et à poivre électrique ; la brosse à dents électrique ; le cornet à glace motorisé…

les gadgets attrapes-couillons : le chien ; le chewing-gum ; le jus de fruit Unicef ; le chocolat ; le pot de Nutella  ; le stylo à bille ; le costard ; la cravate ; la montre…

…….. La liste n’est pas close !

(exemples tirés du journal La décroissance, entre 2004 et aujourd’hui)

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la fable de la mondialisation heureuse

Notre inénarrable secrétaire d’Etat chargé du commerce extérieur, Pierre Lellouche, n’a qu’un seul argument à la bouche, croissance, mondialisation, croissance. Voici une analyse succincte de ses thèses croissancistes* :

« Le rapport du CAE Crise et croissance : une stratégie pour la France apporte une contradiction remarquable aux chantres de la « démondialisation ». »

Þ Le CAE – repaire d’économistes ultra-libéraux – écrit exactement ce que Lellouche veut entendre : hors de la globalisation, point de salut. C’est un catéchisme, et tant pis pour la planète, et tant pis pour ses habitants. « Le bilan de la dernière décennie de mondialisation est un désastre pour ceux qui n’ont d’autres ressources que leur travail : délocalisation en série, destruction d’emplois et d’outils de travail, diminution des revenus du travail par la pression à la baisse. Si l’on voulait résumer les quinze années écoulées, il ne serait pas excessif de dire que la mondialisation a fabriqué des chômeurs au Nord et augmenté le nombre de quasi-esclaves au Sud. ** »

« La France n’a pas d’autre choix que de partir à la conquête de la croissance dans le monde réel. »

Þ C’est du fatalisme devant les forces du marché, l’abandon des prérogatives du politique qui devrait savoir réguler la compétition internationale. Et comment conquérir le marché contre des salaires huit fois moindres ? En fait le « réel » pour Lellouche se résume à l’existant actuel, il n’a aucune conscience que la hausse inéluctable du prix du pétrole (la « réalité » des ressources fossiles limitées) va faire basculer brutalement notre monde dans la crise économique, donc dans le protectionnisme sauvage.

« L’Europe devrait péniblement atteindre les 2 % de croissance du PIB en 2011, les économies émergentes (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), devraient augmenter leurs richesses de 6,5 % en moyenne, jusqu’à 10 % pour la Chine. »

Þ  Comparer notre croissance à celle de pays qui ne sont pas du tout au même niveau de « développement » est une imposture. Au début c’est facile de croître, après cela devient de plus en plus difficile, surtout dans la dernière étape où la population préfère consommer plutôt que produire. Ah oui, la Chine et sa faramineuse croissance ! Alors que la Chine est en crise. La Chine est un chantier à ciel ouvert, le Brésil également, avec un saccage environnemental sans précédent et des inégalités sociales insupportables. Et c’est devant cela que s’extasie Lellouche !

« Le modèle allemand a su combiner au tournant des années 2000 gains de productivité et maîtrise des coûts salariaux, pour les résultats spectaculaires que tout le monde connaît : des exportations qui représentent 40 % du PIB, une croissance de 3,5 % en 2010. »

Þ D’abord le protectionnisme éducateur de List remonte à la Prusse du XIXe siècle ; la puissance des champions industriels allemands n’a pas été créée en 10 ans. Ensuite les lois Hartz, réforme du marché du travail qui a eu lieu entre 2003 et 2005, conduisent tout droit au travail forcé. Pourquoi ne pas parler de l’explosion du taux de pauvreté en Allemagne qui a doublé ces 10 dernières années ? Les travailleurs pauvres allemands seront heureux de savoir que le gouvernement français les prend pour modèle. De plus, l’extraversion d’une croissance veut dire qu’en cas de réduction des échanges internationaux, le pays sera plus touché que d’autres.

« Les orientations de politique économique prises par le gouvernement avant et pendant la crise vont justement dans le sens d’un renforcement de notre potentiel de croissance. »

Þ  Ah, la fable d’un gouvernement qui sert à quelque chose ! L’Etat n’a même plus de pouvoir économique au niveau interne, alors au niveau du commerce extérieur ! Lellouche est un ministre qui ne sert à rien et qui ne le sait pas encore.  On veut encourager la productivité des PME ? Il aurait fallu y penser avant plutôt que de les livrer à la concurrence déloyale des multinationales. « Reconstruire une santé industrielle » quand tout est délocalisé ? Et pour finir la pensée magique qui lie réforme des universités et parts de marché à l’export !

« Le seul juge de paix de notre stratégie de croissance à moyen et à long terme sera le redressement effectif et durable de notre balance commerciale. »

Þ Si tous les pays misent sur l’exportation, il n’y a plus de gagnants mais la concurrence sauvage. C’est ce que l’Allemagne va être obligée de comprendre en mettant la main au portefeuille pour sauver la Grèce. On ne peut pas entrer dans le jeu perdant-perdant de la concurrence libre et non faussée avec des tricheurs sociaux et environnementaux. De plus, si on comprime partout les coûts, donc les salaires, à qui exportera-t-on puisque la demande globale fléchira ?

« Dans un monde où les sources de croissance sont situées hors du territoire national »

Þ  La France produit des voitures et en importe, parfois fabriquées à l’étranger sous la marque nationale. Mais à quoi sert d’échanger des voitures contre des voitures et des Airbus contre des Boeing si ce n’est gaspiller nos ressources et fragiliser nos emplois ? A quoi sert de vendre des centrales nucléaires aux pays émergents ? Aujourd’hui des grands pays comme la Chine et les USA contournent les règles de l’OMC et laissent flotter leurs monnaies : les autres  protègent leur croissance nationale ?

Faudrait que LeMonde nous conte un jour la fable de la mondialisation heureuse, qui en un siècle a multiplié le nombre de pauvres par trois, provoqué les empoisonnements de la biosphère et entraîné des destructions d’emploi par millions… Il n’y a pas de mondialisation heureuse à l’heure où on bouffe son big mac d’un bout à l’autre de la planète.

* LeMonde du 7 juillet 2011, La fable de la « démondialisation » heureuse selon Pierre Lellouche

** Votez pour la démondialisation d’Arnaud Montebourg (Flammarion, 2011)

 

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Martine Aubry, la retraite et l’écologie

Le départ à la retraite à 60 ans a vécu, ce sera bientôt 65 ans. Retour à la case départ, avant Mitterrand. Dans son premier septennat, celui-ci aurait du pourtant savoir que le baby boom des années d’après-guerre mettrait à mal le système des retraites au début du XXIe siècle. Les lycéens, « mitterrandiens », étaient dans la rue en octobre 2010… pour la retraite à 60 ans ! Les jeunes ne s’imaginent pas du tout que dans cinquante ans les chocs systémiques auront fait leur effet. Quand les lycéens arriveront à l’âge de la retraite, la désindustrialisation sera galopante, les caisses de l’Etat seront vides, les réfugiés climatiques nombreux, les chômeurs encore plus nombreux qu’après la crise de 1929. Beaucoup trop d’ayants droit pour les rares actifs occupés, le système de redistribution sur lequel reposent les retraites en France sera exsangue. Mais le réalisme du poids des retraités sur les actifs ou la charge actuelle de l’endettement de la France n’est qu’un aspect du problème. Il faut ajouter les raisonnements écologistes, fondés sur la raréfaction de l’énergie extracorporelle.

Comme l’exprime Jean-Marc Jancovici, « Retraites et études longues sont assises sur des consommations d’énergie importantes, et c’est bien ainsi que se lit la géographie actuellement : il n’y a beaucoup de retraités et d’étudiants que dans les pays qui consomment beaucoup d’énergie. Evidemment, ce lien de cause à effet est porteur d’une très mauvaise nouvelle pour tous ceux qui ont cru que le problème des retraites était en bonne voie d’être réglée après la réforme initiée en 2010. En effet, la contrainte sur l’approvisionnement énergétique futur, qui va venir contrarier la productivité physique de manière forte, aura pour conséquence que le niveau relatif des retraites baissera, et que l’on va probablement pour partie revenir à un système de gestion des personnes âgées économe en énergie, c’est-à-dire… les garder chez leurs enfants. La question n’est pas de savoir si cette organisation est désirable ou non. Les bons sentiments sans kilowattheures risquent d’être difficiles à mettre en œuvre ! »

Les présidentielles de 2012 se joueront sur le courage politique de regarder les réalités écologiques en face. Or la gauche, c’est plutôt la politique du moindre effort. Dans l’annonce de candidature à la primaire socialiste de Martine Aubry, ce qui préoccupe Roland Muzeau, porte-parole des députés communistes, c’est la phrase « Nous aurons des efforts à réaliser » : C’est inquiétant, parce que ce à quoi nous souhaitons nous attendre si la gauche gagne, c’est à une nouvelle répartition des richesses entre capital et travail et non pas à des efforts qui seraient demandés à tout le monde, même s’ils sont justement répartis. Les limites de la Planète et de nos finances publiques sont superbement ignorées. Les contradictions entre l’écologie et la conception dominante du progrès social (toujours plus…) sont trop frontales pour se résoudre dans un compromis.

* Changer le monde, tout un programme de Jean-Marc Jancovici (2011)

NB : une version de cet article a été déjà publié dans « Chroniques d’abonnés » sur lemonde.fr

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l’enfer américain : télé, pub, voiture et misère intellectuelle

– Vous ne pouvez pas imaginer – n’essayez même pas ! – la médiocrité crasse, la profonde misère intellectuelle de la télévision américaine. J’ai vu Barbara Walters interviewer des gens morts il y a douze ans et qui n’étaient même pas intéressants de leur vivant.

– Comme me l’a expliqué un ami, ici on ne regarde pas la télé pour voir ce qu’on diffuse sur une chaîne mais pour aller voir sur d’autres chaînes s’il n’y aurait pas par hasard autre chose… Et le seul avantage de la télé américaine c’est qu’il y a toujours autre chose.

– Avec des chaînes aussi nombreuses et si également dépourvues d’intérêt, on ne regarde rien, en fait. Et c’est bien là le plus déprimant.

– Le problème avec les publicités américaines, c’est qu’elles sont omniprésentes et envahissantes. La plupart des chaînes en passent toutes les cinq ou six minutes. CNN, d’après moi, se compose exclusivement de pauses publicitaires.

– Je viens de consacrer une demi-heure (je ne vous compterai pas de supplément) à suivre attentivement un programme typique de CNN. En 30 minutes, la chaîne a interrompu l’émission cinq fois pour diffuser vingt spots publicitaires.

– On n’échappe pas à la publicité – et pas seulement chez soi. Des milliers d’écoles américaines dépendent en partie de matériaux éducatifs fournis par de grandes entreprises, si bien que les enfants suivent des cours de nutrition financés par McDonald’s et découvrent la protection de la nature grâce à Exxon.

– La journée était superbe. Pourtant toutes les voitures roulaient vitres fermées. Dans leur habitacle hermétiquement clos, tous les automobilistes avaient réglé la température pour reproduire un microclimat identique à celui du monde extérieur.

– Promenez-vous dans n’importe quelle banlieue américaine en été, et vous aurez peu de chances d’y voir des enfants jouer au ballon ou faire du vélo : ils sont tous à l’intérieur. Et le seul bruit qu’on entend, c’est le bourdonnement des climatiseurs à l’unisson.

– Pourquoi les Américains n’éteignent pas leurs ordinateurs ? Pour la même raison qui pousse tant de gens à laisser tourner leur moteur pendant leurs emplettes, à laisser toutes les pièces de leur maison éclairées et à mettre le thermostat de leur chauffage central à un niveau que ne supporterait pas un sauna finlandais. Parce que l’électricité, l’essence et toutes les autres formes d’énergie ont toujours été tellement bon marché que personne dans ce pays n’aurait l’idée d’adopter un autre comportement.

– Les Américains sont entourés d’appareils qui font tant de choses à leur place que ça en devient ridicule. Distributeurs automatiques de croquettes pour chat, brosses à dent déjà garnies de pâte dentifrice, tourniquet automatique à cravates avec éclairage : les gens sont devenus des accros du confort au point de s’être laissé entraîné dans un cercle vicieux. Plus ils accumulent ces gadgets destinés à économiser le temps, plus ils ont besoin de travailler ; plus ils travaillent, plus ils ont besoin d’acquérir de nouveaux gadgets pour gagner du temps.

– Je me rappelle être allé au supermarché et avoir découvert que les rayons n proposaient pas moins de 18 variétés de couches pour incontinents. Dix-huit ! Seigneur, c’est Byzance ! Plus il y a de choix, plus les gens en veulent. Et plus ils en veulent, plus ils en veulent, euh… encore.

– J’ai enfin compris pourquoi rien ne va. On en a trop. Je veux dire qu’on a trop de tout ce qu’on peut vouloir, nécessaire et superflu. Mais on n’a pas assez de bons plombiers, et pas assez de gens polis qui disent merci quand on leur tient la porte.

– Je suis certain – sérieusement persuadé, en fait – qu’il y a quelque chose dans la vie américaine moderne qui tend à supprimer tout effort de réflexion, même parmi les gens plus ou moins normaux.

Bill Bryson in American rigolos (Petite bibliothèque Payot, 2003)

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José Bové choisit Nicolas contre Eva

A la veille du second tour de notre primaire je tiens à réaffirmer mon soutien à la candidature de Nicolas Hulot.

Etre « pour » quelqu’un ne signifie pas mécaniquement  être « contre » quelqu’un d’autre, en l’occurence Eva Joly dont la personnalité et le travail sont indispensables à notre mouvement. Mais, dans les circonstances d’une difficile élection présidentielle, je considère que Nicolas Hulot présente les meilleurs atouts pour permettre à l’écologie politique d’élargir encore son audience.

–          C’est lui qui porte le mieux le projet global de la transformation écologique. Aux yeux de la société, il possède cette légitimité qu’il a su bâtir à sa façon.

–          C’est lui qui incarne le mieux l’autonomie politique de l’écologie qui doit rester notre colonne vertébrale dans le cadre d’une participation au pouvoir.

–          C’est lui qui assure le mieux le lien entre les impératifs écologiques et les nécessités sociales, au Nord comme au Sud.

–          C’est lui qui maîtrise le mieux le registre du dialogue et de la conviction pour aller chercher ceux et celles qui ne sont pas comme nous.

Nicolas Hulot, dont j’ai pu apprécier personnellement la sincérité et la détermination, représente une chance collective. Pourquoi s’en priver ?

José Bové, le 3 juillet 2011

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Eva Joly, de gauche avant d’être écolo !

L’alliance écologistes/PS n’est pas la conséquence d’un choix délibéré, mais de circonstances exceptionnelles en 1997. L’échec des Européennes fin 1994 sanctionnait la division de l’écologie politique, complètement parcellisée à l’approche de l’élection présidentielle de 1995. Les Verts sont redevenus le principal parti de la mouvance, mais entouré de multiples petits groupes issus de leurs rangs ou de Génération Ecologie. Ils doivent aussi compter avec la concurrence du MEI (mouvement écologiste indépendant) d’Antoine Waechter ou CAP 21 de Corinne Lepage. Jacques Chirac est élu.

Mais le 21 avril 1997, il dissout l’Assemblée nationale à la surprise de tous. Pour l’opposition, la campagne des législatives arrive très vite. L’idée d’une alliance rouge-rose-vert est évoquée. Dans l’urgence, elle est conclue en quelques jours. Les Verts dépendent du bon vouloir socialiste, qui leur laisse seulement une dizaine de circonscriptions gagnables. Ils obtiennent 7 élu-es. Le soir même, Lionel Jospin insiste pour que Dominique Voynet rentre au gouvernement. Malgré le refus du parti, signifié par un vote du CNIR à plus de 80 %, elle accepte. Avec la gauche plurielle, la cote de popularité des Verts dans l’opinion progresse, ils deviennent le parti quasi-unique de l’écologie. Etre « écolo de gauche » leur tourne la tête, surtout quand il y a des postes à la clé !

Aujourd’hui Eva Joly n’arrête pas de répéter « je suis de gauche » sans d’ailleurs bien savoir ce que « de gauche » veut dire (étatique ? autogestionnaire ? stalinienne ? Strauss-Khanienne ?, etc.). Elle est de gauche surtout parce qu’elle ne sait pas très bien ce qu’être écologiste veut dire…

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Hulot/Joly au second tour

L’affrontement entre Nicolas Hulot et Eva Joly n’est pas seulement celui qui oppose une écologie consensuelle et ouverte (vendue aux multinationales, disent ses adversaires) et une écologie radicale et « de combat » (sectaire, disent ses adversaires). Il met face à face une écologie (celle d’Eva Joly et d’une partie de l’appareil vert) qui considère l’alliance à gauche comme naturelle et automatique, et une écologie (celle de Nicolas Hulot) qui, tout en prenant acte du partenariat actuel entre les Verts et le PS (notamment dans les régions), ne juge pas un tel accord comme inconditionnel et scellé pour l’éternité. Une démarche proche de celle des Verts allemands, qui n’excluent pas des alliances régionales avec les chrétiens-démocrates.

En d’autres termes, la démarche de Nicolas Hulot, loin d’être « naïve » comme le dénonce Eva Joly, est éminemment politique. Elle nous rappelle que l’écologie politique française, avant de s’allier à la gauche à partir de 1993, a longtemps refusé de s’inscrire dans le clivage droite-gauche, qu’à sa manière, Dany Cohn-Bendit a lui aussi tenté de dépasser.

A coup sûr, cette volonté de promouvoir une écologie indépendante, quoiqu’ouverte à des alliances programmatiques, dérange certains militants, et plus encore de nombreux élus soucieux sans doute de garder leurs sièges.

Un positionnement qui est en tout cas l’une des raisons qui poussent l’auteur de ce billet à soutenir la candidature de Nicolas Hulot et à voter pour lui dans ces primaires.

Laurent Samuel

 

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La démondialisation contre le quotidien Le Monde

Après avoir donné la parole aux contempteurs de la démondialisation, Zaki Laïdi le 30 juin et Pascal Lamy le 1er juillet, l’éditorial* du Monde (2 juillet 2011) abonde dans leur sens en reprenant le même argumentaire : Aujourd’hui les frontières entre le commerce international et le commerce domestique s’effacent puisque les chaînes de production sont globalisées. » La notion même d’importation et d’exportation perdrait ainsi de son sens traditionnel. Il n’y a donc rien à faire. Comme s’il était normal qu’une chaîne de fabrication de voiture soit bloquée parce qu’elle ne reçoit plus des composants d’un pays lointain comme le Japon. Comme s’il était normal d’échanger des voitures, des tomates et des vêtements entre pays parfois éloignés de milliers de kilomètres. Le faible coût actuel de l’énergie a bien tourné la tête de nos penseurs médiatiques.

Mais le plus grave est la conclusion de cet éditorial : « Débattons des conséquences de la mondialisation. Mais pas en termes simplistes. » D’accord, sauf que c’est cet éditorial qui simplifie à outrance ses adversaires :

– « Chômage et inégalités, tout serait de la faute de la Chine, cette monstrueuse machine à exporter. »

«  Dans l’atelier du monde (la Chine), trimerait une armée de malheureux avec laquelle nos salariés ont été brutalement mis en concurrence. »

– « La mondialisation relèverait d’un gigantesque dumping social et environnemental. »

La théorie du protectionnisme est assez complexe pour ne pas avoir besoin d’être caricaturée à outrance comme le fait le quotidien Le Monde. Rappelons qu’un libre-échange basé sur le va-et-vient de produits similaires est une absurdité qui va à l’encontre de la théorie du libre-échange. Que la complexité des montages technologiques croisés entre nations différentes les rendent d’autant plus fragile quand le prix du baril s’envole. Que le libre-échange est un rapport de force qui fait quelques gagnants et beaucoup de perdants. Que la descente énergétique qui nous attend va entraîner une contraction des échanges. Que la souveraineté alimentaire et énergétique des peuples deviendra une nécessité vitale… Mesurons le parti pris simpliste d’un journal « de référence » qui est pour le libre-échange avec un seul argument résumé ainsi  par Pascal Lamy : « freiner ses importations revient à pénaliser ses exportations.

* LeMonde du 2 juillet 2011, Bienvenue au grand débat sur la mondialisation

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la démondialisation contre Pascal Lamy

D’un jour à l’autre, les excommunications du protectionnisme se poursuivent dans LeMonde. Après l’absurde démondialisation selon Zaki Laïdi*, voici le directeur général de l’OMC  qui passe à l’offensive : « La démondialisation est un concept réactionnaire »**.  En fait Pascal Lamy n’a que deux arguments :

1. « Le protectionnisme est un débat franco-français. La mondialisation est une transformation gigantesque dont on avait sous-estimé l’ampleur et la rapidité. Le phénomène est parti pour durer. » Mais le fatalisme de ce raisonnement est absurde. Si une chose peut advenir et s’amplifier brutalement, son contraire peut faire de même. L’histoire nous indique que les crises économiques entraînent des contractions phénoménales du commerce international. Après la crise des subprimes, la Chine avait commencé à renvoyer dans leur campagne d’origine ses ruraux exploités par les usines à exporter. Après le prévisible choc pétrolier qui nous attend, une démondialisation sera nécessaire et durable.

2. « Les moteurs de la mondialisation sont technologiques : le porte-conteneurs et Internet. Gageons que la technologie ne reviendra pas en arrière. » Mais nous sommes dans une économie mondialisée parce que l’idéologie libérale a pris le dessus dans les années 1980 avec Reagan, Thatcher et l’impuissance du keynésianisme à enrayer la crise qui suivit le choc pétrolier de 1973. De plus, nous ne pouvons avoir comme idéologie que ce que le niveau des richesses naturelles nous procure. La multiplication des échanges est surtout la conséquence d’un baril de pétrole qui a baissé à partir du milieu des années 1980. Or la raréfaction du pétrole va renchérir ses coûts, que ce soit pour le porte-conteneurs transporteur mais surtout le contenu carbone des produits transportés (les ordinateurs…). N’oublions pas la révolte des peuples contre la paupérisation et la montée des inégalités qui accompagne la mondialisation.

Nous attendions mieux de Pascal Lamy, qui indiquait dans le Nouvel Observateur du 14 décembre 2006 : « L’histoire nous a donné une leçon, quand il y a perception du danger, les hommes s’organisent pour y faire face. De ce point de vue, le mouvement écologique a apporté sa contribution à la perception de ces dangers.  Cette conscience est plus forte qu’hier et elle progresse. Dans ses principes, l’OMC prévoit que le développement des échanges doit contribuer au développement durable. Vous avez donc le droit, au nom de la protection de l’environnement, d’instituer certains obstacles aux échanges. C’est parfaitement légal dans le système de l’OMC. Même si, comme partout en politique, il y a des arbitrages à faire entre les différentes urgences, entre la liberté et la sécurité, entre la pauvreté et le développement, entre l’environnement et la croissance (…) Les pays ne peuvent aboutir à un accord que si les uns et les autres font des compromis. C’est compliqué et difficile. Mais nécessaire si on veut que cette planète préserve elle-même son intégrité, notamment environnementale. »

C’est d’ailleurs ce que revendique Arnaud Montebourg dans sa brochure à deux euros Votez pour la démondialisation : « Le moment est venu de faire payer le juste coût de l’atteinte à l’environnement aux transports maritime et aérien des produits fabriqués hors d’Europe, par la taxation massive et kilométrique des marchandises acheminées en Europe. »

* LeMonde du 30 juin 2011, Absurde démondialisation.

** LeMonde du 1er juillet 2011, La démondialisation est un concept réactionnaire.

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Eva Joly contre le désarmement nucléaire

Le 9 avril 2010 Eva Joly déclarait  : « le Président américain rêve d’un monde qui serait débarrassé de ses armes nucléaires. La récente Nuclear Posture Review indique notamment que les Etats-Unis renoncent à partir d’aujourd’hui à utiliser l’arme atomique contre des Etats qui n’en auraient pas et ne chercheraient pas à en avoir. Saisir au bond la balle que nous envoie Obama aurait donc, en plus de servir la paix, l’intérêt de démontrer que nous sommes capables de redéfinir les doctrines qui ont été les nôtres. Le désarmement, notamment nucléaire, est une solution de paix. En tant qu’écologiste, en tant que Présidente de la Commission du Développement du Parlement européen, je suis résolument favorable à une telle orientation. Mais je ne suis pas naïve, je vois bien les dangers qui existent dans le monde, je sais que beaucoup verraient dans un tel saut l’abandon d’une part de souveraineté. » Presque candidate verte avec 49,75 % des voix après le 1er tour de la primaire socialiste, Eva Joly confirme le 30 juin 2011 à la radio son statut de présidentiable orthodoxe : « Pas de sortie unilatérale de la dissuasion nucléaire. » Ainsi Eva reste bien en retrait des pensées des historiques des Verts.

Marie-Christine Blandin* : « L’arme nucléaire transcende toutes les autres en ce qu’elle a de puissant et de définitif. Alors oui, il est du devoir de  chacun de s’engager pour un désarmement nucléaire unilatéral. L’alibi de l’attente d’une grande décision unilatérale n’a que trop duré. Les signataires du Traité de non-prolifération ne sont pas audibles quand ils prêchent pour les autres l’évitement d’une menace qu’ils gardent par-devers eux. Ils ne sont pas crédibles quand ils mandatent l’AIEA pour veiller à ce qu’aucune entreprise illicite n’émerge sur la planète, alors qu’ils ne se font pas inspecter. Ni naïve, ni suicidaire, je fais le pari de la raison et de l’humain en soutenant le désarmement unilatéral. »

Dominique Voynet* : « Le nucléaire militaire est par nature antagonique avec la démocratie. Que dire de sa pertinence dans un contexte géopolitique radicalement différent, où les principales menaces ne se trouvent plus dans l’au-delà d’un rideau de fer. L’arme nucléaire n’est d’aucune utilité face à un chef d’Etat voyou, face à un chef de guerre rebelle, face à un groupe terroriste mobile ! L’arme nucléaire ne protège d’aucun des nouveaux risques, son anachronisme est flagrant. Je considère que la France aurait tout intérêt à montre le chemin en prenant des initiatives fortes vers un désarmement unilatéral à l’instar de la Suède ou de l’Afrique du Sud. »

* Alternatives non-violentes n ° 157 (4e trimestre 2010)

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la démondialisation contre Zaki Laïdi (suite)

Ce qui est extraordinaire, c’est que Zaki Laïdi* connaît bien les défauts du libre-échange : « L’ouverture des marchés n’est pas socialement neutre. Elle crée des perdants qui sont souvent les travailleurs non qualifiés des secteurs à faible valeur ajoutée. Au sein même des gagnants, la répartition des gains de la mondialisation demeure très inégale. Les multinationales en profitent plus que les petites entreprises et les actionnaires bien davantage que les salariés. »

Mais ces défauts sont pour lui quantité négligeable. Pourquoi ? Parce que Zaki Laïdi  est dans la secte des croissancistes : « Plus le commerce mondial se développe, plus la croissance mondiale s’intensifie. » Parce que Zaki Laïdi  ignore la question sociale alors que nos salariés sont en concurrence avec des quasi-esclaves ou parfois des enfants. Parce que Zaki Laïdi ne voit pas que la concurrence est injuste et faussée. En Chine ont fait 12 heures par jour quand on n’en fait pas 8 en Europe. En Corée on a honte de prendre 15 jours de congés par an. Parce que Zaki Laïdi  ignore le monde dans lequel nous vivons. Certains peuvent renouveler leur Ipad quand d’autres n’ont même pas du maïs pour se nourrir. Et tout cela parce qu’on a voulu échanger des Ipad contre du maïs (Ricardo disait « du drap contre du porto »).

La démondialisation est au programme d’Arnaud Montebourg. Face à l’absurdité de la mondialisation, le retour au protectionnisme semble nécessaire. D’ailleurs  Zaki Laïdi défend la taxe carbone sur les produits nationaux ou importés !?

LeMonde du 30 juin 2011, Absurde démondialisation

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la démondialisation contre le gauche-droite de Zaki Laïdi

Idéologue en cour qui va se répétant de tribune en tribune, Zaki Laïdi a trouvé un nouvel os à ronger : la démondialisation. Il la pense « absurde »* sur le seul exemple de l’imbrication des composants Airbus et Boeing produits un peu partout dans le monde. Or la multiplication des kilomètres que parcourt un yaourt ou la construction d’un avion n’est pas soutenable. Ces kilomètres ont besoin d’énergie fossile, d’où l’absurdité de ces va-et-vient puisque le pétrole est en voie de disparition. Dans le cas des avions le kérosène est indispensable : Boeing et Airbus sont comme les dinosaures, voués à une mort certaine. Zaki Laïdi ne sait pas tout cela, il se contente de réciter son catéchisme libre-échangiste.

Zaki Laïdi trouve la démondialisation « politiquement effrayante » car sa « modernisation » à lui se résume à l’acceptation de l’économie de marché. Depuis quelque années, la conviction de Zaïdi est simpl(ist)e : « le PS ne pourra gagner que lorsqu’il aura cessé de faire du marché un épouvantail »… ce qui équivaut en fait à une ouverture à droite ! Zaki Laïdi affirme que « La démondialisation est une idée absurde qui n’a de surcroît aucune chance de voir le jour ». Il ne se rappelle pas que le libre-échange imposé par l’Angleterre au XIXe siècle ne l’a été que pour soutenir le pouvoir des industriels contre les agriculteurs en interne et en externe au moment où le pays dominait de façon militaire le reste du monde. Avant cela l’Angleterre était protectionniste. Elle redeviendra protectionniste, comme l’Europe et les Etats-Unis, quand la Chine aura terminé sa remontée des filières pour maîtriser l’ensemble de choses à vendre, y compris les avions. Ce qui ne saurait tarder.

Cependant Zaki Laïdi donne de la démondialisation une bonne définition : « Une forme de déconnexion par rapport à l’économie mondiale au travers de la réduction des échanges commerciaux et l’autocentrage économique. » Or la descente énergétique va imposer cette contraction des échanges. Mais Zaki Laïdi vit encore aux temps du libéralisme triomphant, il n’a pas encore pris conscience que l’économie a dépassé les limites de la biosphère et que les contraintes géophysiques sont plus fortes que les vaines spéculations.

LeMonde du 30 juin 2011, Absurde démondialisation

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bioéconomie : l’économie comme sous-partie de l’écologie

Deux discours se rejoignent sur le monde.fr pour se retrouver en symbiose avec ce blog biosphere. En résumé :

Julia Marton-Lefèvre*, directrice générale de l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature) : La nature est la base essentielle qui permet et entretient la vie sur notre planète. Nourriture, eau, médicaments, abri, air non pollué… tous ces produits et services indispensables à la vie, et beaucoup d’autres, proviennent de la nature. Cependant, les organismes internationaux d’aide au développement et les gouvernements donateurs ont largement négligé le rôle de la nature, se tournant plutôt vers des programmes de « développement » à grande échelle, portant parfois atteinte à l’environnement, pour aider les pays à sortir de la pauvreté.

René Passet**, membre du Collegium : Il n’est désormais d’économie viable qu’une bio-économie au sens propre, c’est-à-dire une économie ouverte aux lois de la biosphère. Le paradigme qui s’impose aux sociétés n’est plus celui de la mécanique, mais celui de la biologie et des systèmes complexes régissant la survie évolutive de l’humanité et de la biosphère. Dire que l’humanité consomme plus d’une planète est une façon d’affirmer qu’elle a franchi les limites de la capacité de charge de la biosphère. Or, la généralisation des standards européens ou étatsuniens actuels, exigerait une quantité de ressources représentant 4 à 7 fois celles dont peut disposer notre planète sans épuiser son patrimoine productif.

D’un rapport du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), publié le 12 mai, il ressort qu’une croissance mondiale viable, impliquant un retour aux consommations de ressources naturelles de l’année 2000, exigerait une division par trois des consommations actuelles de ces ressources pour les pays industrialisés, et une stabilisation pour les autres. Les auteurs de l’étude soulignent eux-mêmes que cela ne pourrait être obtenu que moyennant une quantité de contraintes qui « peut être difficilement envisagée ».

Il s’agit d’un tournant décisif. L’économie se trouve confrontée à sa vraie nature d’activité transformatrice de ressources et d’énergies réelles ; elle ne saurait se reproduire elle-même dans le temps que dans la mesure où ses règles d’optimisation restent subordonnées au respect des fonctions assurant la reproduction à très long terme de la nature ; elle est amenée à se penser dans la reproduction du monde. Or, en dépit des crises et des catastrophes qu’il ne cesse de provoquer, le paradigme néolibéral reste encore dominant. L’humanité continue son chemin sur la pente fatale.

Il nous faut réhabiliter les économies de proximité, assurer le droit des peuples à satisfaire par eux-mêmes leurs besoins fondamentaux. En un mot, réinventer le monde dans un temps limité. « There is no alternative… »

* LEMONDE.FR | 28.06.11 | La nature, une solution pour de nombreux enjeux mondiaux

** LEMONDE.FR | 28.06.11 | La bioéconomie de la dernière chance

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Martine Aubry à l’image de son parti

Le parti socialiste n’a jamais été écolo. Pas un mot sur l’urgence écologique dans la Revue Socialiste n°42 (2e trimestre 2011)  qui brosse héritages et espérances sur la période 10 mai 1981 – 10 mai 2011. Trente ans à ne pas s’apercevoir que la température monte, que les eaux baissent, que le pétrole rejoint les espèces en voie de disparition. Si on analyse l’enquête menée à l’occasion du trentième anniversaire de l’élection première de François Mitterrand, on s’aperçoit que les références idéologiques des adhérents restent toujours traditionalistes. Les idées sociales-démocrates l’emportent par 76 % d’accord contre 18 %. L’altermondialisme par 57 % contre 28. Mais il y a encore 10 % d’adhérents tentés par le libéralisme économique et même 71 % pour estimer que les entreprises doivent faire des profits pour que l’économie marche bien. Personne ne s’interroge si la croissance va encore durer longtemps  alors que le rapport du club de Rome sur les limites de la croissance date de 1972, bien avant qu’on ne « change la vie » avec Mitterrand pour mieux faire du surplace.

Ce mardi 28 juin, Martine Aubry, première secrétaire du PS, annonce sa candidature après plusieurs semaines de faux suspense. Ce sera encore une fois la guerre des chefs et aucune réflexion sur notre avenir commun. Jusqu’à présent la feuille de route de Martine, « Elections cantonales, préparation du projet, accord avec la gauche, primaire » était d’une banalité à pleurer. Aujourd’hui Aubry veut prendre le relais d’un Sarkozy qui cherchait la croissance avec ses dents. « Une offensive de civilisation est fondée sur un autre modèle de croissance… Sans croissance on ne peut rien… »*. Martine parlait encore de construire des logements sociaux, mais pas un mot sur l’efficacité énergétique de cet habitat. En définitive, rien sur le blocage énergétique que va rencontrer prochainement notre société. Ce n’est pas ainsi qu’un Parti dit de gouvernement nous prépare des lendemains qui chantent. A croire que Martine n’a pas écouté les avertissements de Jean-Marc Jancovici et Yves Cochet lors d’un colloque pourtant organisé par la branche écolo de son propre Parti !

Martine Aubry a bien lâché sa bombinette après Fukushima, « Je crois qu’il faut sortir du nucléaire »**. Mais dans sa motion au Congrès de Reims (novembre 2008), Martine écrivait le contraire : « S’agissant du nucléaire, le fonctionnement et le renouvellement de la filière, dans notre pays, doivent se faire. » Martine est à l’image de son parti, adepte d’une critique molle du capitalisme négligeant l’incompatibilité entre les forces de l’argent et celles de la nature. Dans l’affrontement capital/travail, le PS a oublié l’environnement et une donnée désormais vitale : les ressources de la planète ne sont ni infinies ni éternelles. Menacé par l’activité humaine, l’état de la biosphère chamboule les axiomes. Mais le PS n’en a cure, il se tourne encore et toujours vers son passé.

* LeMonde du 3 mars 2011, Le livre-programme du PS.

** LeMonde du 29 mars 2011, Sur le dossier nucléaire, Martine Aubry est prise entre deux feux

 

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marcher, c’est penser et vivre

Marcher, c’est penser à nouveau et revivre. Quelques aphorismes* :

– Dans les Cévennes Stevenson rencontre des bergers, des paysans, des colporteurs, des vagabonds. Le paysan marche avec des sabots qui alourdissent ses pas, il chemine près de l’animal bâté, accompagne son troupeau, va chercher l’eau avec un broc. Les routes sont emplies de saisonniers, de rempailleurs, de rétameurs, d’acheteurs de peaux de lapins, de ramoneurs, de chiffonniers allant à pied de hameaux en villages. Mais voyager à pied est devenu improbable dans les années 1950-1960, quand les voitures ou la mobylette se banalisent. Les itinérants circulent désormais en voiture.

– Anachronique dans le monde contemporain privilégiant la vitesse, l’utilité, le rendement, l’efficacité, la marche est un acte de résistance célébrant la lenteur, la disponibilité, la conversation, le silence, la curiosité, l’amitié, l’inutile, autant de valeurs résolument opposées aux sensibilités néolibérales qui conditionnent désormais nos vies.

– Si on redécouvre aujourd’hui les bienfaits de la marche, c’est que l’on commence à ressentir que la vitesse, l’immédiateté, la réactivité peuvent devenir des aliénations. On finit, dans nos vies ultramodernes, par n’être plus présent à rien, par n’avoir plus qu’un écran comme interlocuteur. Nous sommes des connectés permanents. Ce qui fait l’actualité critique de la marche, c’est qu’elle nous fait ressentir la déconnexion comme une délivrance.

– De manière plus générale, un espace que vous appréhendez par la marche, vous ne le dominez pas simplement par le regard en sortant de la voiture car vous l’avez inscrit progressivement dans votre corps.

– Le rapport du corps à l’espace est aussi très impressionnant : par exemple la beauté des paysages est plus intense quand on a fait des heures de marche pour franchir un col. C’est comme si le fait d’avoir fait preuve de persévérance et de courage physique pour parvenir à tel ou tel panorama était récompensé.

– Il y a, dans la contemplation des paysages par le marcheur, une dimension de gratitude.

– L’espace naturel des penseurs et des intellectuels reste majoritairement la bibliothèque ou la salle de conférences. Mais si vous prenez les penseurs comme Rousseau, Nietzsche ou Thoreau, ils insistent pour dire ce que leur oeuvre doit à cet exercice régulier, solitaire. C’est en marchant qu’ils ont composé leur oeuvre, reçu et combiné leurs pensées, ouvert de nouvelles perspectives.

* LeMonde du 25 juin 2011, Marcher, c’est penser loin des sentiers battus (dossier de deux pages)

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le sentiment de nature chez Giscard d’Estaing

« On ne peut pas uniquement proposer aux Français une réconciliation avec les milieux naturels, avec l’environnement. Cette aspiration ne peut constituer à elle seule, pour une nation, une idéologie complète. Mais venons-en à la chasse. Il s’agit du rapport ancestral de l’homme avec la nature qui fait partie de notre vie rurale. Priver le monde rural de cet exercice, c’est rompre un lien naturel. L’activité des chasseurs – quels qu’ils soient – s’inscrit dans le cadre de la protection de la nature menée par le gouvernement. Tout doit être mis en œuvre pour que les chasseurs deviennent les défenseurs de la nature.

Nos grandes agglomérations ont trop souvent entraîné une séparation brutale avec la nature. En réaction, se développe une sensibilité nouvelle pour la vie animale. Une société qui tolérerait la disparition de la faune sauvage détruirait les équilibres naturels fondamentaux pour la vie

La nouvelle croissance entraînera des progrès par :

–          L’intégration de la nature dans notre vie quotidienne par la  création de nouveaux espaces verts. Les décrets d’application de la loi de protection de la nature, récemment publiés permettent de créer des réserves naturelles. La France continuera à permettre une plus grande préservation des espaces naturels.

–          Le développement de relations entre les hommes plus chaleureuses par un rythme de vie plus naturel… La France a choisi de tenir son rang d’abord en donnant à son économie des bases saines, je dirai plus naturelles.

Nous acceptons la dégradation de notre environnement parce que nous ne la mesurons pas en termes de valeur. L’objet de la comptabilité patrimoniale que je préconise est d’indiquer, dans la fabrication de chaque produit, ce qu’il coûte réellement et globalement à la collectivité. On doit par conséquent prendre en compte non seulement le coût financier direct, mais aussi la consommation d’espace, d’énergie, de matières premières ainsi que la pollution de milieux naturels. L’entretien du cadre de vie, la restauration des milieux naturels, tout cela peut être chiffré. Dans cette affaire – qui n’a fait jusqu’ici l’objet d’aucune étude cohérente dans aucun pays du monde – la France pourrait donner l’exemple. »

Giscard d’Estaing, Président de la République (propos recueillis par Marc Ambroise-Rendu dans Le Monde du 1er février 1978)

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en 2012, écologisme contre extrême droite

Il existe seulement deux offres politiques sérieuses pour les présidentielles 2012, celle de l’extrême droite et celle de l’écologie. Daniel Cohn-Bendit pense encore qu’une candidature écolo au premier tour des présidentielles 2012 est inefficace ou superflue. C’est faire peu de cas d’une histoire de l’écologie politique qui présente  sans interruption au moins un candidat aux présidentielles depuis 1974. C’est oublier que l’écologie  progresse régulièrement dans le choix des électeurs : en 2002, Noël Mamère a dépassé la barre  symbolique des 5 % et même les 7 % si on y ajoutait les voix de Corinne Lepage. Notons aussi que l’alliance des écologistes et de la société civile pour les européennes de 2009 a permis de faire quasiment jeu égal avec le Parti socialiste. L’écologie n’est plus une candidature de témoignage, elle devient une nouvelle offre politique. Mais il existe aussi un autre positionnement depuis 1974, celui de l’extrême droite. Face à la crise globale de notre système thermo-industriel, le Front National propose le repli sur nos frontières et désigne des boucs émissaires, l’immigration principalement. Il est en effet plus facile dans l’adversité de montrer du doigt un coupable présumé. Face à cette tactique souvent utilisée dans la pratique électorale, l’écologie politique présente nombre d’analyses et de pratiques possibles, c’est-à-dire des réponses complexes pour une crise multiple. Or une idée juste mais complexe passe beaucoup plus difficilement dans les urnes qu’une réponse fausse mais simple. C’est d’abord pour cela que le Front national est arrivé au deuxième tour des présidentielles en 2002.

La France connaît d’ailleurs, dans la perspective des présidentielles 2012, un alignement de la droite sarkozienne sur les thèses de l’extrême droite. Avec Claude Guéant, Brice Hortefeux ou Marine Le Pen, il existe une homogénéité voulue dans la recherche de boucs émissaires. Avec l’écologie « qui commence à bien faire », l’abandon de la taxe carbone et les rêves envolés du Grenelle de l’environnement, nous voyons que la droite n’est pas capable de traiter l’urgence écologique. De son côté le Parti socialiste continue à sous-traiter la question environnementale ; lors du dernier congrès à Reims en 2008, le PS a complètement ignoré la possibilité de devenir un parti résolument écologique comme le proposait la motion B de son pôle écologique. Face à un socialisme engoncé dans une social-démocratie obsolète et bien proche des fondamentaux de droite, seule une candidature écologiste porte une autre voix, celle de la réconciliation entre les activités humaines et les possibilités de notre planète.

Il y a urgence. Depuis le rapport du club de Rome en 1972 sur les limites de la croissance en passant par les analyses du GIEC, l’écologie scientifique nous a permis de mesurer les dégâts du progrès. Or l’UMP et le PS restent deux idéologies jumelles, associées à la révolution industrielle et vouées à la croissance économique, valorisant le facteur capital et/ou le facteur travail, oubliant complètement le facteur terre. Ces pratiques du « toujours plus » nous ont entraînés dans des impasses tant financières qu’environnementales. C’est l’écologie politique qui montre la nécessité d’une troisième voie, au-delà de la droite et de la gauche, rassemblant tous les citoyens conscients des limites de notre planète. S’il n’y avait pas de traduction politique de l’urgence écologique, ce serait démobilisateur et démoralisant. Face aux crises systémiques, Europe Ecologie-Les Verts propose un changement en profondeur de notre système économique et social qui passe par une rupture dans nos modes de production et de consommation.

Depuis la formation en Nouvelle Zélande du premier parti écologiste, le « Values Party » en 1972 et la candidature de René Dumont pour les présidentielles françaises de 1974, l’écologie politique va bientôt avoir quarante ans. L’âge de la maturité ? Pas encore. Ses porte-parole peinent à s’imposer dans un milieu de libertaires qui peuvent commettre des errements du genre « pacte anti-Hulot ». Mais c’est un projet d’avenir qui valorise le respect de la diversité biologique et culturelle ; l’inverse des choix de la droite. C’est un projet qui prône la décentralisation de l’économie et du pouvoir ; l’inverse des choix de la droite. Mais ce sont surtout les craquements de la planète qui valident la candidature d’un ou une écologiste aux présidentielles 2012.

(chronique déjà parue à notre initiative sur lemonde.fr)

 

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faire confiance à son corps

« Si on les utilise à tort, ils deviendront moins forts. » De quoi s’agit-il ? Le slogan de la campagne 2002 avait été plus explicite : « Les antibiotiques, c’est pas automatique ». Mais en 2011, le rapport de l’Afssaps* montre que la consommation d’antibiotiques repart à la hausse depuis 2005 en France. Pas moins de 175 millions de boîtes ont été vendues en 2009. Or, plus on utilise les antibiotiques, plus les bactéries s’y habituent et moins les antibiotiques sont efficaces. Selon l’OMS, nous allons vers une ère post-antibiotique dans laquelle de nombreuses infections courantes ne pourront plus être soignées et recommenceront à tuer.

Si beaucoup de médecins croient que le patient attend des médicaments, c’est parce qu’ils ont été formés au curatif au détriment du préventif, parce qu’ils ont été formatés par l’industrie pharmaceutique à prescrire le remède miracle. Une enquête de l’UFC-Que Choisir en janvier indiquait qu’un faux patient se plaignant d’un mal de gorge fictif s’était vu prescrire des antibiotiques par un médecin sur deux.  Si beaucoup de patients se précipitent à la pharmacie, c’est qu’ils sont victimes de ce contexte. Achetons moins de médicaments !

Selon Serge Mongeau**, « L’approche biomécanique de la médecine officielle fractionne l’être humain, le psychisme et le corps, puis chaque fonction du corps, chaque organe et même chaque cellule. Comme toute maladie ne résulterait alors que d’un trouble biomécanique, il n’y aurait aucune raison que nous ne parvenions pas à réparer le trouble. Si le médicament ne fait pas effet, c’est qu’on n’a pas encore su trouver la bonne substance ! Les soins aux malades devraient au contraire être essentiellement destinés à renforcer les mécanismes internes d’auto-réparation. Il serait nécessaire d’apprendre :

– à faire confiance à la capacité prodigieuse d’auto-réparation de son organisme ;

– à savoir comment mobiliser ses forces pour hâter sa guérison (par l’alimentation, le repos, des contacts humains chaleureux, etc.) ;

– quand on décide de consulter un professionnel, il faudrait pouvoir le considérer comme un instrument possible qu’on n’emploiera pas forcément. »

* LeMonde du 24 juin 2011, Les antibiotiques sont encore trop systématiquement prescrits.

** La simplicité volontaire, plus que jamais (1998)

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pourquoi et comment sortir du nucléaire

Pas plus tard que hier soir, nous avons écouté l’argument principal du député Yves Cochet sur le nucléaire : « Nous ne pouvons pas faire confiance à l’espèce humaine… La révolution industrielle s’est terminée par les boucheries des deux guerres mondiales, imaginez si les belligérants avaient déjà eu à l’époque l’arme atomique ! La nature humaine pousse à l’autodestruction. Imaginez une crise grave, qui va pouvoir gérer la maintenance complexe des centrales nucléaires ? Lors des inondations à la Nouvelle Orléans, 1/3 des  services de secours aux personnes ont fait défection, c’était chacun pour soi ! L’humanité est trop violente, trop lâche, trop irrationnelle pour être à la hauteur du nucléaire, qu’il soit civil ou militaire. Nous sommes dépassés par la mégamachine, cette monstrueuse bête technique qui semble fonctionner de façon autonome, sans la volonté humaine. Et la fusion est la grande énergie de l’avenir, et qui le restera toujours. »

Pourtant Yves Cochet reste  confiant. Plus on mettra en lumière les vices du nucléaire, plus on le fera disparaître, comme Dracula. De plus la sortie du nucléaire est possible avec la sobriété énergétique, l’efficacité énergétique, la montée en puissance des énergies renouvelables. Réduire de 50 % comme c’est possible nos 450 térawatts/heure d’électricité nucléaire permet d’ici 25 ans de trouver en substitut des 225 térawatts/heure qui restent à fournir des sources d’énergie fiable et durable. Il faut absolument ne plus acheter de congelés Picard, et abandonner son congélateur…

Yves nous conseille de consulter le site Global Chance, à l’initiative des scénarios Négawatts de sortie du nucléaire. Leur dernière mise en ligne hier, par Bernard Laponche : « Sortie du nucléaire : je suis sûr que les Allemands y arriveront ».

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