Autoroute A69, le chantier est arrêté, enfin !

Le tribunal administratif de Toulouse a annulé, le 27 février, l’arrêté préfectoral autorisant le chantier de l’autoroute A69, entre Toulouse et Castres : « L’A69 et l’élargissement de l’A680 n’ayant que des bénéfices de portée limitée, il n’y a pas de nécessité impérieuse à les réaliser, et les arguments présentés en faveur de ces projets ne justifient pas qu’il soit dérogé à l’objectif de conservation des habitats naturels, de la faune et de la flore sauvages. » L’ouvrage devait entrer en service à la fin de l’année.

Le concessionnaire désigné de l’A69, Atosca, a pris « acte de l’impossibilité de poursuivre les travaux et de l’intention de l’Etat d’engager toutes les voies de recours permettant la reprise du projet dans les meilleurs délais possibles et dans le respect de la réglementation ». ’Etat va faire appel, a annoncé le ministère des transports car cette route a été « déclarée d’utilité publique en 2018 et bénéficie d’un large soutien local de la part des élus, des habitants et des acteurs économiques ».

Le point de vue des écologistes contre les travaux inutiles et imposés

Les États présentent un caractère double assez particulier, ils sont à la fois des formes institutionnalisées de pillage et des projets utopiques. Le dossier de l’A69 est celui qui illustre le mieux cette troublante dualité – entre l’Etat stratège soucieux du long terme et l’Etat pillard qui permet le saccage de l’avenir et des biens communs au bénéfice de quelques-uns. L’A69 est ce vieux projet d’autoroute entre Castres et Toulouse dont le tracé jouxte celui de la route nationale 126  : de vingt à trente minutes gagnées pour relier les deux villes, et une vingtaine d’euros pour l’aller-retour. Inutile et imposé.

Notre plus ancien article sur les autoroutes

14.08.2005 Des routes, des routes, trop de routes

En vertu de la loi de décentralisation d’août 2004, l’Etat français veut transférer 18 000 kilomètres de routes nationales (pour 10 000 kilomètres d’autoroutes) aux Conseils généraux. Ce n’est qu’un tout petit aspect d’une voirie qui compte 1,5 millions de kilomètres dont les départementales occupent 365 000 kilomètres, les communales 550 000 km et les chemins ruraux environ 600 000 km. Les problèmes de financements deviennent lancinants et le désengagement de l’Etat est à juste titre mal perçu par les collectivités locales. A cela s’ajoute les inquiétudes avec la privatisation prévue de certaines autoroutes. Mais personne ne s’interroge sur le bien-fondé d’un tel réseau dédiés aux déplacements individualisés.

L’importance démesurée de ce réseau de voirie entraîne pourtant la dégradation importante des écosystèmes par l’artificialisation des territoires et leur fragmentation. Pour la Biosphère, jamais une société humaine respectueuse de l’environnement n’aurait du dépasser le niveau des chemins vicinaux qui ne font qu’entretenir les rapports de voisinage.

A69. Manifestation interdite, donc violente ? (juin 2024)

extraits : A partir du 7 juin 2024, les mouvements mobilisés contre le projet d’autoroute avaient prévu trois jours de réunions et d’actions sur le tracé de l’A69. Le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a demandé au préfet du Tarn d’interdire « cette nouvelle manifestation qui s’annonce extrêmement violente » où pourraient se rendre « 5 000 personnes dont 600 black blocs ». Le groupe des écologistes à l’Assemblée nationale a, pour sa part, évoqué le film Minority Report (2002) en décrivant un gouvernement prêt à « nous plonger en plein film d’anticipation où la violence s’invente avant même son existence éventuelle »….

A69, État pillard et non État stratège ! (avril 2024)

extraits : En dépit des avis négatifs des instances d’expertise et des fortes oppositions locales, la volonté de l’État et des collectivités de construire cette autoroute censée désenclaver Castres semble inébranlable. A quel moment l’État pillard prend-il le pas sur l’État stratège ? Notons que le pillage n’existe que par le soutien des électeurs au pouvoir en place. Toute tentative d’avancée militante se heurte à des personnes qui vivent dans un monde où l’urgence écologique n’existe pas….

autoroute A69, inutile et imposée (octobre 2023)

extraits : L’enterrement de Notre-Dame-des-Landes ne faisait que préparer l‘épanouissement de la contestation de tous les GTII, Grands travaux inutiles et imposés. Partout sur le territoire, une cinquantaine de projets d’aménagement suscitent de vives oppositions locales, souvent depuis plusieurs années : déchets nucléaires à Bure, lignes à très haute tension….

8 réflexions sur “Autoroute A69, le chantier est arrêté, enfin !”

  1. Les élus n’ont rien compris au monde de demain. Quatre parlementaires du Tarn veulent déposer une proposition de loi dite de « validation » de l’autorisation environnemental. Ce texte a pour objectif d’autoriser la construction, malgré la décision du tribunal administratif. L’Etat a déjà demandé un sursis à exécution pour que les travaux puissent reprendre et a annoncé qu’il ferait appel de la décision du tribunal administratif. Patrick Mignola, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement : « On considère que cette autoroute est d’intérêt général, c’est pour ça que l’Etat avait autorisé les travaux ». Exactement ce qu’avait contesté le tribunal administratif de Toulouse qui, le 27 février, avait jugé illégale l’autorisation environnementale car le projet ne réunissait pas tous les critères, notamment celui d’une « raison impérative d’intérêt public majeur ». (à suivre)

    1. (suite et fin ) L’initiative des parlementaires et du gouvernement irrite aussi de nombreux juristes qui s’alarment que l’Etat de droit soit piétiné et d’un manque de respect de la séparation des pouvoirs. Si cette démarche aboutit, cela veut dire que l’État aurait à l’avenir le droit d’annuler ou de valider des autorisations environnementales. Dans ce cas-là, il n’y a plus de recours possible, ce serait une négation du pouvoir judiciaire. Que ce soit sur le terrain politique avec la proposition de loi ou sur le terrain juridique avec l’appel devant le tribunal administratif, le dossier de l’A69 est loin d’être achevé.

  2. Plus con que moi tu meurs !

    Encore un juge rouge , ne vous inquiétez pas , ce jugement sera annulé par la cour d’appel et la grande lessive des partisans de ces basses considérations écologiques se poursuivra.

  3. – Autoroute A69 : recours, arrêt du chantier… Que va-t-il se passer après l’annulation du projet ? (publicsenat.fr 27/02/2025)

    En attendant, rappelons vite fait qui était POUR et qui était CONTRE. L’occasion de voir qui sont ceux qui se préoccupent réellement de la biodiversité, du tissus rural etc. bref d’écologie… et bien sûr les autres, ceux qui ont d’autres priorités :
    – Guerre des arbres – L’A69, l’affaire personnelle de Macron (lelieudocumentaire.fr 2023)
    – Autoroute A69 : la Fédération du Tarn du PS réaffirme son soutien au projet (letarnlibre.com 10/11/2023)
    – Projet d’autoroute A69: le PS face à ses contradictions (lefigaro.fr 20 octobre 2023)
    – Les communistes s’opposent au projet d’autoroute A69 entre Toulouse et Castres (mediapart.fr 21 avril 2023)
    – A69 mise à l’arrêt : «victoire» pour les écolos et les insoumis, claque pour les élus locaux et le gouvernement (liberation.fr 27 février 2025)
    (à suivre)

    1. (suite) Bonne nouvelle donc pour (tous) les Écologistes, bien sûr. Pour les Insoumis aussi, et même pour les Communistes. Côté socialistes… faudrait faire un sondage. 🙂
      En attendant, les résultats du sondage, mauvaise nouvelle pour les autres.
      Et même grosse claque pour les mauvais perdants.
      – « Philippe Folliot, sénateur centriste du Tarn, se dit « choqué » et « ulcéré » par la décision du tribunal administratif de Toulouse. Quant à Jean Terlier, le député EPR du Tarn, il dénonce une « irresponsabilité des magistrats ». Pour sa part, l’État va faire appel de cette suspension du chantier. » (Suspension du chantier de l’A69 : les partisans du projet dénoncent une décision « incompréhensible » – francetvinfo.fr 27/02/2025)

      Pauvres choux, choqués, ulcérés… pauvres (ir)responsable qui ne comprennent pas.
      C’est triste quand même, non ?

      1. Parti d’en rire

        Et celui-là, qui en plus de la grosse claque mériterait une bonne grosse baffe. Pédagogique bien sûr, la bonne grosse baffe.
        – « … une aberration, qui illustre une fois encore la domination idéologique d’une minorité militante, qui au nom d’une écologie punitive, refuse tout progrès et cherche en permanence à paralyser l’aménagement de nos territoires d’Occitanie. Face à cette décision scandaleuse […] je tiens à saluer la volonté de l’État de faire appel […] L’intérêt général doit toujours primer sur les basses considérations idéologiques d’une poignée d’activistes souvent violents ! [et blablabla] »
        (Tribune de Julien LEONARDELLI, Député au Parlement européen – rassemblementnational.fr)

        Notons que, comme par hasard, tous ces pleurnichards ne pourront pas être qualifiés de gauchistes. Quoique… depuis que certains osent dire que MLP en est une il faut s’attendre à tout. Et à n’importe quoi bien sûr.

  4. Notre Affaire à Tous

    Nous saluons cette décision du TA de Toulouse qui a su juger en toute indépendance malgré les pressions exercées par les pouvoirs publics et économiques, et par une certaine presse locale. Elle renvoie les porteurs du projet à la réalité du Droit. Elle dénonce l’irresponsabilité de l’État et du concessionnaire pour avoir engagé les travaux sans attendre. Ce passage en force, dopé au déni institutionnel, vient d’être stoppé net.
    Nous appelons le gouvernement à faire preuve de responsabilité et à ne pas faire appel. Nous demandons la mise en place immédiate d’une instance de dialogue afin d’identifier les besoins réels de mobilité, de modèle agricole, social et économique souhaité par les habitants et permettant de construire un projet de territoire global respectant l’intérêt général et en phase avec les enjeux d’aujourd’hui.

  5. Trente et un ans après l’approbation de l’A69 par le gouvernement, sept ans après la publication du décret de déclaration d’utilité publique et deux ans après le début du chantier, les travaux, déjà bien commencés, sont arrêtés. Dans le détail de son jugement, le tribunal administratif estime que l’autorisation environnementale, forgée grâce à des « dérogations à l’interdiction de porter atteinte aux espèces protégées et à leurs habitats », n’est pas légale car le projet ne réunit pas tous les critères, notamment celui d’une « raison impérative d’intérêt public majeur ».
    C’est une première pour une infrastructure aussi importante, qui avait franchi plusieurs étapes et dont le chantier était avancé, mais le jugement est extrêmement détaillé et remet le droit de l’environnement au cœur de la décision juridique.

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