A quoi bon d’apprendre à chercher… alors que l’on peut s’informer avec google. A quoi bon apprendre à manger avec des couverts… puisque le hamburger existe. A quoi bon apprendre à lire une carte… quand on a un GPS. Mis en place à des fins militaires à partir de 1973, le Global Positioning System qui nécessite 24 satellites est totalement opérationnel en 1995 et s’ouvre au civil en 2000. Des centaines de millions de personnes utilisent le GPS, des centaines de millions de zombies ! L’orientation par des satellites comme le calcul mental avec une calculatrice sont des sujets qui mettent en évidence la paresse intellectuelle de nos concitoyens qui s’en remettent aveuglément à leurs gadgets. Quel dommage, les voyageurs ne font qu’aller le plus vite possible d’un point A à un point B sans s’intéresser au chemin et au paysage. Pire, on ne peut qu’être inquiet de la multiplication de nos organes exosomatiques qui semblent nous rendre plus performants et qui nous rendent en fait moins intelligents.
« A Paris, sans GPS, ce n’est pas possible », pense Juliette ! Les dernières recherches sur le sens de l’orientation tendent à prouver que l’utilisation d’un GPS nuit à notre capacité à nous orienter. Une étude publiée par Nature & Communications montre ainsi que notre GPS interne se met en veille lorsqu’on suit les indications d’un smartphone. Plus nous utilisons la machine pour nous guider, moins les zones de notre cerveau responsables de l’orientation, l’hippocampe et le cortex préfrontal, sont sollicitées. L’équipe de chercheurs soulève également des conséquences à long terme. Les utilisateurs intensifs de GPS pourraient ne plus être capables de se repérer sans cet outil, faute d’avoir entraîné leur cerveau à s’orienter seul*. Jean-Marc Lamory** le constate : « Aujourd’hui, pour se situer, les gens n’ont plus besoin de comparer la carte et le terrain. Et si on ne fait plus cet aller-retour constant, ce travail intellectuel, alors on ne sait pas se repérer. On perd aussi le plaisir d’imaginer le paysage que l’on va découvrir. » Les titulaires du prix Nobel de médecine en 2014 avaient découvert un système cérébral de « GPS interne », permettant de s’orienter dans l’espace, aussi complexe que soit l’environnement. En 1971, John O’Keefe avait apporté la première pierre à la compréhension de ce mécanisme de mémoire spatiale en découvrant que des cellules nerveuses d’une zone cérébrale profonde, l’hippocampe, étaient toujours activées quand un rat se trouvait à un certain endroit d’une pièce ou d’un labyrinthe. Lorsque l’animal se trouvait en un autre lieu, d’autres cellules nerveuses étaient spécifiquement activées. O’Keefe en a déduit que ces « cellules de lieu » constituent une cartographie de l’espace dans lequel évolue l’animal. L’hippocampe pouvait désormais être considéré comme le support neuronal de la mémoire, notamment spatiale – d’autant que des lésions de cette zone cérébrale se traduisaient chez l’animal par des signes de désorientation spatiale.
La situation actuelle est grave. Le sens de l’effort personnel et de la réflexion disparaît dans notre société du « consommer plus et travailler moins ». L’incapacité de se retrouver sans GPS, l’incapacité à faire du calcul mental et d’évaluer les ordres de grandeur, l’incapacité d’utiliser ses jambes puisque la voiture est à notre porte, tout se lie pour nous rendre débiles. Les machines ont créé une génération dont le QI baisse et les forces physiques déclinent. Big data sait déjà vous alerter en temps réel sur les bonnes affaires quand vous déambulez l’esprit vide dans un des temples du consumérisme. Des centaines de millions de zombies !
* LE MONDE du 26 juillet 2017, Les jeunes savent-ils encore s’orienter sans GPS ?
** auteur de S’orienter. Des techniques traditionnelles aux nouvelles technologies (Glénat)
Bonjour Anne-Marie, je vois que vous aussi, aimez plaisanter. Pour en revenir à mon pépé, le pauvre il est mort trop tôt. Il n’a donc pas eu la chance d’écouter les chroniques de Philippe Meyer. Et alors il faisait comme les autres, il avait tendance à croire et répéter ce que les autres racontaient.
En tous cas c’est vrai , « Le progrès fait rage, et le futur ne manque pas d’avenir ! »
Ceci dit au sujet du GPS , je crois que je vais m’en acheter un. Ce matin je suis allé aux champignons, aux cèpes pour être plus précis. Et j’en ai trouvé un beau panier. Mais je ne vous dirais pas où ! Parce que du côté de chez moi on ne divulgue pas ses coins à champignons. Ben oui c’est comme ça ! Ce matin j’ai donc trouvé un super coin à cèpes. Hélas je ne suis pas certain de pouvoir le retrouver. Alors j’ai repensé au GPS.
Michel C, on employait cette expression » On n’arrête pas le progrès », en général quand on venait de détruire quelques beaux bâtiments pour construire une tour ou défigurer une région en y taillant une autoroute. P. Meyer disait aussi » Le progrès fait rage! »
Par ailleurs,vous avez compris pourquoi les femmes ne savent pas s’orienter en randonnée puisqu’elle peinent à retrouver leur boutique de fringues préférée…
(petite plaisanterie à mon tour)
Bonjour Anne-Marie Teysseire
Votre témoignage est intéressant, du moins il m’intéresse. On dit que les femmes n’auraient pas le sens de l’orientation … que celui-ci serait plutôt du domaine des hommes. Je ne sais pas si c’est vrai, d’autant plus que je connais des hommes qui n’ont pas du tout ce sens, et qui ont besoin du GPS, quitte à se laisser amener n’importe où.
Personnellement je possède ce sens de l’orientation. Dès que je perds le Nord… par exemple dans le brouillard en montagne, ou bien après avoir tourné et tourné, dans un parking souterrain, ou bien dans un labyrinthe Ikéa (c’en est réellement un, et c’est justement fait exprès !) … je ressens aussitôt un certain malaise. J’ai absolument besoin de vite me réorienter.
On dit aussi que les femmes s’orienteraient à la mémoire, et c’est comme ça qu’elles retrouveraient leur chemin. La bijouterie à gauche, la boutique de fringues au coin du carrefour à droite, etc. Bien sûr je plaisante, mais c’est ce que vous nous dites.
Aujourd’hui, un des « avantages » du GPS , c’est cette géolocalisation qui permet à tout détenteur d’un smartphone équipé de l’appli qui va bien… d’être informé en direct qu’il se trouve à 50 mètres de la boutique Machinchouet , qui justement aujourd’hui fait 50 % de solde. Je me souviens que mon pépé le disait … on n’arrête pas le Progrès !
Je témoigne en tant que victime(consentante) du GPS. Je n’ai jamais su lire une carte ou un plan, mais j’avais forcément développé des astuces. Quand j’avais fait une fois un trajet, je savais le retrouver, sans comprendre si j’allais au sud ou au nord mais en reconnaissant des repères. Un virage, un bâtiment, un panneau…(oui, je sais c’est le premier degré de l’orientation). A présent, je peux refaire 10 fois le même trajet avec la panique que mon GPS ne veuille plus m’aider. Je suis devenue aveugle.
Comme je suis souvent distrait, j’ai un petit bidule dans ma bagnole qui me signale les radars sur la route. Mais il ne fait que ça. Il ne s’agit pas d’un de ces gadgets qui vous indique la route et qui vous parle tout le temps. En tous cas c’est un GPS.
Comme Didier Barthès moi aussi j’aime les cartes routières, et surtout les cartes IGN , notamment celles au 25/1000 . J’en ai des tas, dans un piteux état. J’aime deviner les reliefs en regardant les courbes de niveau, voir et deviner le petit sentier, la barre rocheuse, la petite source… Aujourd’hui il me faut les lunettes et même la loupe, alors je les ouvre moins qu’avant. De toute manière la plupart du temps je me promène là où je n’en ai pas besoin. Mais qu’est-ce que je ferais d’un GPS ?
J’aurais des tas d’anecdotes à raconter au sujet de ce gadget. Parce qu’il faut bien le dire, dans la plupart de ses utilisations le GPS est un gadget. Ainsi cet automobiliste parisien qui se rendait dans une station de ski, et qui était planté au pied d’un col. La technologie Hight-Tech ne lui avait pas dit qu’il y avait de la neige en hiver, et donc que le col était fermé, et donc qu’ il ne fallait pas passer par là.
Absolument ! Autant le GPS est un système admirable dans sa conception et dans la technologie utilisée, autant il est une catastrophe quand il se substitue à notre intelligence.
Personnellement je préfère mille fois les cartes de papier, outre qu’elles ne tombent jamais en panne, elle me permettent de faire travailler mon sens de l’orientation, elle me laissent deviner les paysages (notamment celles de l’IGN au 25 000 qui présentent des courbes de niveaux, on peut deviner les pentes, voir où sera le soleil, anticiper la vue qui sera la nôtre, etc. )
De plus, les cartes nous disent comment sont les choses et ensuite nous pouvons choisir les itinéraires, non comme ce GPS qui nous intime de passer par où il veut. Et si on ne veut pas ? Si on préfère autre chose ? Oh je sais, la voix ne s’énerve jamais et vous propose imperturbablement sa meilleure solution même si on lui a désobéi 100 fois.
Le GPS ne nous apprend rien, il nous déleste de notre savoir et de notre intelligence, il nous déconnecte du monde réel, il travaille sur des chiffres et des vecteurs et se passe de nos images. En un mot il désenchante le monde et nous fait abdiquer devant la technique là où la carte nous enrichissait.