Bergeaud, meilleur jeune économiste, foutaise

Antonin Bergeaud est récompensé, ce lundi 19 mai, du prix du  meilleur jeune économiste 2025. Professeur associé à HEC Paris, il est spécialiste de la croissance et de la productivité. Autant dire qu’il n’y connaît rien dans le rayon écologie. Voici un dialogue possible.

Antonin Bergeaud : La théorie économique sert à quelque chose. Dans un monde qui part dans tous les sens, il est bon d’introduire de la rationalité. Donald Trump a pris des décisions sur de simples intuitions erronées, mais il a dû reculer face à la réaction des marchés.

Biosphere : En 2025 voir que le « meilleur jeune économiste » en reste aux vulgates de l’économie orthodoxe me fait revenir à mes études de sciences éco des années 1970 où on nous interdisait de parler d’écologie. Antonin Bergeaud croit encore aux vertus du marché alors que celui-ci est myope, n’envisageant que le court terme du profit. Il ajoute plus loin un peu d’interventionnisme étatique, or celui-ci ne voit que le court terme électoral.

Antonin Bergeaud : L’idée qu’il faut maximiser le profit, que les ressources sont infinies… on n’en est plus là ! La question de la finitude des ressources est intégrée. La productivité repose d’ailleurs sur l’idée qu’on peut faire plus avec une quantité de ressources constante.

Biosphere : Je ne vois rien de novateur dans ce qu’il dit. « La question des limites est intégrée », nous dit-on, puis trois lignes plus loin « il faut une croissance de 2% », faire de l’innovation technologique etc. Toutes choses qui réclament toujours plus de ressources énergétiques et minières. Pas certain que l’on nous propose là une pensée pour période de troubles et de bifurcations. Les soi disant progrès technologiques comme les voitures électriques ne sont pas la solution au blocage énergétique. La productivité a été basée sur les ressources fossiles, or il faut en sortir.

Antonin Bergeaud : L’investissement dans les nouvelles technologies, qui auraient accru la productivité et fait de l’Union européenne une puissance capable de rivaliser avec les Etats-Unis. Ce dilemme mérite d’être explicitement posé.

Biosphere : Il est temps que les économistes mettent un pied dans le monde physique. Si l’humanité développe fortement les nouvelles technologies, il va falloir décider au dépens de qui et de quoi. Il est aujourd’hui physiquement impossible de continuer d’augmenter de manière exponentielle nos besoins énergétiques tout en se maintenant dans un monde vivable.

Antonin Bergeaud : Notre modèle social repose sur une croissance d’au moins 2 % pour financer les retraites, la Sécurité sociale, la santé, etc. Il était relativement facile de les atteindre quand on avait une démographie dynamique et des actifs de plus en plus efficaces. Cela permettait de compenser le vieillissement de la population.

Biosphere : le mythe de la croissance infinie dans un monde fini perdure même chez un jeune économiste. Ce croissancisme économique nous mène au désastre, normalement les économiste bien informés le savent depuis le rapport de 1972 sur les limites de la croissance. Et que dire du rapprochement entre les gains de productivité et le financement des retraites ? Le conflit de répartition entre la création de la valeur et sa répartition est totalement occulté. Qui ne prononce pas les mots de sobriété partagée n’est pas crédible.

Antonin Bergeaud : Aujourd’hui, l’intelligence artificielle, essentiellement américaine, va permettre de créer de nouvelles entreprises. Dans ce domaine, ce n’est pas encore trop tard pour l’Europe, mais nous ne faisons pas assez. Je pense qu’il faut s’y engager à fond.

Biosphere : La croissance, la productivité, et l’IA…. pour laquelle il faut des minerais rares et des refroidisseurs pour les data-centers. On est loin du monde d’Après la croissance. Mauvais signal. Le numérique ne fait que déshumaniser rapports humains et intelligence au sein de toute entreprise

Antonin Bergeaud : Malheureusement, les États membres de l’UE, au nom de leurs intérêts nationaux, ont mis l’accent sur la concurrence pure et pas sur une politique industrielle commune.

Biosphere : Nous sommes d’accord sur ce point, la coopération est un mécanisme bien meilleur que la concurrence dite « pure et parfaite ». Mais l’avantage de l’Union européenne est de mettre l’accent sur la coopération politique, l’union des peuples. Pour l’économique, il faudrait plutôt envisager l’autonomie territoriale tant au niveau énergétique qu’alimentaire pour affronter la crise écologique qui nous menace. Macron n’a consacré que 2,6 % de son temps de parole à l’écologie lors de son entretien le 13 mai sur TF1, Bergeaud fait pire.

19 réflexions sur “Bergeaud, meilleur jeune économiste, foutaise”

  1. Lauriane Mouysset

    De mon côté, je travaille sur l’approche bioéconomique qui relie les dynamiques écologiques aux décisions économiques non plus par des prix, mais par les processus biophysiques existant entre les humains et les non-humains. Pour les milieux agricoles par exemple, je modélise les décisions des agriculteurs en fonction du prix du foncier, des rendements ou encore des coûts des tracteurs. Mais leurs choix de planter du blé ou d’entretenir une haie modifient les ressources alimentaires disponibles pour la biodiversité. En retour, l’écosystème va fournir plus ou moins de services : s’il y a beaucoup d’oiseaux insectivores, le contrôle des ravageurs des cultures sera intense et le rendement de certaines cultures sera meilleur. Quand on monétise la nature, on lui donne une valeur parce qu’elle est utile, directement ou indirectement, au bien-être humain. Mais un singe peut avoir une valeur pour lui-même.

  2. – « Y’a pas de place pour les feignasses dans le futur » (20 mai 2025 à 03:38)

    Je sais combien notre BGA adooore les feignasses, du coup je n’ai même pas fait l’effort d’aller voir cette vidéo. De toutes façons je pense le contraire, l’avenir est aux feignasses.
    D’ailleurs je ne suis pas le seul à le penser, et même à l’espérer :
    – « Le meilleur qui puisse nous arriver, c’est que toutes ces IA passent leur temps à explorer les sites Web créés par d’autres IA. Pendant ce temps, on pourra aller pique niquer à la campagne et au soleil avec nos enfants. » (RAPPORTERRE 16 mai 2025 à 21:08 “Liberté d’expression et désinformation”)

    Oui mais pas trop d’enfants quand même ! Faudrait pas non plus faire peur à Monsieur Barthès. Au contraire il faut tout faire pour qu’il puisse imaginer ce monde où les machines feront tout, et n’importe quoi, à notre place.
    Travailler bien sûr, FAIRE la cuisine, les courses, le magasins, les soldes etc. (à suivre)

    1. Parti d’en rire

      (suite) Et même de la politique, nous pondre des beaux discours, des programmes, tout plein de plans… et puis voter bien sûr, et même signer des pétitions.
      Et puis écrire des conneries sur les blogs, pour faire rire les robots qui les lieront.
      Et pendant ce temps nous ON pourra aller pique niquer à la campagne, ce qu’il en restera, et au soleil avec nos enfants. Mieux, avec nos chiens et/ou nos chats.
      En attendant, si je pouvais choper ce robot à la con qui bloque mes commentaires… empêchant du coup Monsieur Barthès d’apprécier ma chanson… eh ben je lui ferais joyeusement la peau.
      Au robot bien sûr. Eh oh ON n’est quand même pas des sauvages !!

    2. Didier BARTHES

      Cher Michel C,
      Je suis touché de votre sollicitude : œuvrer à ce que mon imaginaire reste libre est une attention généreuse.
      Toutefois, je précise que la suite ne correspond pas à la réalité de ce même imaginaire. Merci de ne pas exprimer mes pensées à ma place, car forcément il y a un décalage et je n’attribue pas tout à fait ce rôle aux machines, ni n’aie la naïveté de croire qu’elles régleront tout.

      1. MC du Parti d’en rire

        Monsieur Barthès, j’espère qu’il n’y a pas de malentendu. Je sais ce que vous pensez des machines, de l’IA etc. et là-dessus nous sommes en phase. Si je parle là des robots, c’est d’abord pour me moquer (comme d’habitude) de tous ces technophiles, les Bergeaud, Macron, Musk et Jean Passe.
        Et ensuite pour titiller et interpeler Biosphère, pour qu’il débouche les tuyaux… à la main je suppose. Et pour qu’il foute une bonne branlée de ma part à ce robot à la con chargé de la modération. Et ce juste pour que vous puissiez écouter mon argumentation (ma chanson) jusqu’au bout.

  3. – « L’Europe doit s’engager à fond dans l’intelligence artificielle »
    Allez Manu, à fond les manettes !
    Rien que ça (titre Le MONDE) me suffit déjà à me faire une idée du bonhomme.
    Le reste ne fait que confirmer. Et c’est hélas avec ce genre de type, de relève… qu’il nous faudrait espérer. Misère misère ! En attendant… si des fois il voit ça, de là-haut ou d’ailleurs (ON ne sait jamais)… eh bien j’espère que Bernard Maris est mort de rire.

    1. Didier BARTHES

      Je crois de plus en plus que l’intelligence artificielle est une folie qui nous entraînera à la catastrophe. Pourquoi si peu de gens en sont-ils conscients ?

      1. Allez voir la video sur Yutube intitulée : « Fondateur de Doctissimo: « Y’a pas de place pour les feignasses dans le futur » »

        Laurent Alexandre est un technophile béat idolâtrant l’intelligence artificielle ! Il se réjouit qu’une machine puisse réfléchir mieux que lui ! Grace à l’intelligence artificielle il voit déjà l’ensemble de l’humanité devenir immortelle dans 20 à 30 ans. D’ailleurs il se contredit, d’un côté il affirme que tous les métiers et professions seront remplacés par l’IA, y compris tous les médecins et les cadres en entreprise, et d’un autre il dit que tout le monde va devoir bosser davantage pour rester compétitif face à l’IA en rappelant que celle ci a déjà un Quotient intellectuel qui surpasse déjà celui des plus grands génies de la terre ! Il affirme que l’IA a des émotions, de l’empathie et même de la créativité surpassant celle des humains, bref même les artistes et ingénieurs seront remplacés par l’IA.

      2. (suite)
        D’ailleurs il n’a pas su citer des métiers qui seraient encore accessibles à l’humain hormis entrepreneur pour posséder ces robots. Le truc qui cloche dans son raisonnement étant que si tous les chefs d’entreprise remplacent leur personnel par de l’IA comme il le préconise d’ailleurs, alors comment les entreprises vont écouler leurs stocks s’il n’y a plus assez d’humains pour gagner de l’argent à travers un travail ?

  4. ExtinctionRebellion

    Bergeaud prétend que les économistes ont intégré la notion de finitude des ressources… mais tout dans son discours montre le contraire. Rappelons donc ici les travaux du physicien Tom Murphy (UC San Diego) : avec 2 % de croissance par an, la consommation d’énergie double tous les 35 ans. À ce rythme, on atteint l’équivalent d’énergie que le Soleil envoie à la Terre dans 400 ans, celle du Soleil entier dans 1 300 ans, celle de toute la Voie lactée dans 2 500 ans… Qu’on le veuille ou non, on en viendra donc bien à se poser la question du « partage du gâteau » et celle, corollaire, de la limitation des besoins de chacun.

    1. Didier BARTHES

      Le heurt aux limites de la planète a déjà commencé mais dans les 30 ans qui viennent on va sentir la secousse de manière effroyable, les animaux sauvages ne la sentent plus, ils ont déjà disparu.

    2. Bergeaud, encore un discours d’économiste porté sur la croissance aveugle dans une technologie qui mettra plus de monde au chômage qu’elle ne créera d’emploi. La destruction créatrice n’est plus à l’ordre du jour. On va dans le mur des limites planétaire et ce monsieur souhaite accélérer….

  5. Adrien Bilal et Diego Känzig

    Nous avons essayé de comprendre la dissonance entre le discours des scientifiques, qui disent depuis longtemps que le changement climatique va bouleverser nos vies, et les études des économistes, qui trouvent des effets assez faibles sur l’activité. Les économistes étudient principalement la façon dont les changements de température locale affectaient l’activité économique de chaque pays, mais ils prennent très peu en compte l’effet de l’augmentation de la température mondiale. Or l’augmentation de la température océanique entraîne sécheresses, tempêtes tropicales et autres phénomènes très coûteux pour l’économie. On commence ainsi à voir apparaître des articles scientifiques sur le coût social du carbone qui utilisent des valeurs proches de celles que nous avons estimées [1 000 euros par tonne, au lieu de 100 à 150 euros par tonne utilisée précédemment]. De quoi changer l’analyse coût/bénéfice de toutes les politiques liées à la décarbonisation.

    1. Didier BARTHES

      Je suis assez prudent sur la mesure en argent de la variation des conditions climatiques. En fait, tout étant bouleversé, il est difficile de comparer. D’autre part, on fait ainsi la supposition que le climat des années 1900 – 1950 était l’optimum, ce qui est arbitraire.
      Il en est de même quand on essaye de valoriser le coût de la disparition d’une espèce, ou d’une forêt. En ces matières, l’indicateur monétaire n’est pas adapté, ils ne donne qu’une vision très très partielle des choses, comment évaluer l’harmonie de la nature et le plaisir de la contempler ?
      Un autre point m’ennuie, c’est la prééminence de la question du réchauffement climatique qui prend le pas sur celle, selon moi bien plus importante, de l’écroulement de la biodiversité, (le temps de réparation sera bien plus long et pour l’instant ce n’est pas le réchauffement qui est à la source de cet écroulement mais bien notre omniprésence).

      1. Moi non plus je n’aime pas que tout et n’importe quoi soit mesuré (chiffré) en euros ou dollars. Combien de Pognon vaut (pèse) une vie humaine, celle d’une baleine, une forêt, un arbre, le rire d’un enfant etc. ?
        Je ne crois pas que la question du réchauffement climatique prenne le pas sur l’écroulement de la biodiversité (sic). Je pense que tout le monde sait depuis longtemps que tout est lié.
        Par exemple… le réchauffement climatique est en partie responsable du déclin des insectes. De combien exactement… je n’en sais rien. C’est comme la part des séparations et des divorces dans la Bétonisation. Chacun interprètera donc les chiffres comme ça l’arrange. 😉
        Bref, savoir tout ça est une chose… vouloir (ou pouvoir) y croire en est une autre.

        1. Didier BARTHES

          Ah je ne suis pas tout à fait du même avis, quand on entend les discours sur l’écologie je trouve que le réchauffement l’emporte très largement.
          Tout est lié, certes, mais pour l’instant la cause de la disparition des animaux n’est pas le réchauffement.
          Pour les insectes c’est essentiellement l’usage des pesticides et la disparition des prairies variées et pour les grands animaux c’est notre omniprésence dans tous les endroits habitables de la Terre. Entre 1900 et 2015 le nombre de lions et de tigres a baissé de 97 %; pas un n’a été éliminé par le degré supplémentaire qu’a gagné la planète (je précise pour éviter toute critique sur ce point que je ne suis en rien climatosceptique), le réchauffement actuel est une réalité et il est bien d’origine anthropique et peut être grave s’il se poursuit mais pour l’instant ce n’est pas lui le coupable.

        2. Monsieur Barthès, le plus important c’est que nous soyons d’accord sur le fait que tout est lié. Pour le reste j’ai dit que chacun interprètera les chiffres comme ça l’arrange. Je précise pour éviter toute critique sur ce point que je ne nie pas l’écroulement de la biodiversité, dont celle des grands fauves.
          Même si je lis ici et là que la population de tigres sauvages a presque doublé depuis 2010 ! (wwf.be/fr), je sais que les lions d’Afrique pourraient disparaître avant 2050 (nationalgeographic.fr) .
          – Combien de lions reste-t-il en Afrique ? (nationalgeographic.fr)

          Et LES causes de ce désastre… nous les savons.
          Et justement, là où je ne suis pas d’accord, c’est quand vous dites que «pas un n’a été éliminé par le degré supplémentaire qu’a gagné la planète».
          – Les lions face au dérèglement climatique (instinct-animal.fr)

        3. (suite et fin) Quant à la question de savoir COMBIEN (exactement) le degré supplémentaire (+1,5 pour être plus précis) qu’a gagné la planète a éliminé de lions… de tigres, de papillons etc. etc. pour moi elle est secondaire. Pour ne pas dire ridicule.
          COMBIEN le dernier milliard de tonnes de CO2 a-t-il éliminé de lions ? Et de tigres etc. COMBIEN le dernier milliard de bipèdes qu’a gagné la planète a-t-il éliminé de lions ? COMBIEN les derniers milliards de dollars supplémentaires qu’a gagné Musk etc. etc.
          De toutes façons qui pourrait sérieusement répondre à ces questions ? ChatGpt peut-être… 🙂

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