Bientôt l’effondrement auquel personne ne veut croire

La population mondiale était évaluée en 1947 à 2 325 000 000 d’habitants. La population mondiale est de 7 120 500 000 personnes en ce mois d’avril 2013. Multipliée par trois au cours d’une courte vie humaine, si ce n’est par quatre pour un centenaire ! Certains croient que cette évolution n’a rien de dramatique. Nous pensons au contraire que l’effondrement de notre civilisation globale ne peut plus être évité. Aujourd’hui la société technologique est  menacée  par un ensemble de problèmes environnementaux qu’accroissent l’expansion démographique. La liste est longue : érosion rapide de la biodiversité ; exploitation irraisonnée des océans ; destruction accélérée des insectes pollinisateurs ; épuisement des sols et des eaux souterraines ; réchauffement climatique ; acidification des océans ; etc.

Le biologiste Paul Ehrlich a toujours eu comme idée que la démographie était au centre de tout, que nous sommes trop sur la planète et qu’il fallait trouver des moyens pour être moins nombreux. James Brown, professeur à l’université du Nouveau-Mexique : « On commence à prendre conscience qu’une croissance exponentielle ne pourrait pas continuer indéfiniment sur une Terre finie… La bombe P et les limites de la croissance deviennent probablement une réalité en ce moment même. » Le biologiste Gilles Boeuf, président du Muséum national d’histoire naturelle : « Ce que souligne Paul Ehrlich, c’est que, même si, dans la situation actuelle, on calcule que la Terre pourrait nourrir neuf milliards d’humains, nous ne sommes absolument pas sûrs que cela soit encore possible dans quelques décennies… Simplement parce que le système de production va commencer à subir les effets des perturbations que nous avons introduites dans le système, à commencer par le changement climatique. » (Éléments d’information de ce paragraphe tirés principalement du MONDE Culture & Idées du 9 février 2013, Notre civilisation pourrait-elle s’effondrer ? Personne ne veut y croire – article de Stéphane Foucart)

La revue Nature a par exemple publié, au printemps 2012, deux vastes synthèses de la littérature scientifique, menées collectivement par une quarantaine de spécialistes du fonctionnement des écosystèmes. Leurs conclusions sont glaçantes : non seulement l’ensemble de la biosphère terrestre connaîtra une « bascule abrupte et irréversible » dans les prochaines décennies, du fait des transformations apportées par l’homme à l’environnement, mais les services rendus aux économies par ce dernier vont perdre en efficacité du fait de l’érosion de la biodiversité. Mais le gouffre est énorme entre les centaines d’études alarmantes et l’inertie des réactions. La communauté scientifique a toujours peur d’être accusés de catastrophisme ou d’opinions militantes ou exagérées. Les médias évitent les sujets trop anxiogènes. La situation telle que la perçoivent les spécialistes des écosystèmes est ignorée par le plus grand nombre.

Au terme de leur longue tribune dans Proceedings of the Royal Society B, Paul et Anne Ehrlich affirment : « L’effondrement de la civilisation globale peut être évité car la société moderne a montré de la capacité à traiter les menaces de long terme, si elles sont évidentes et continuellement portées à notre attention… Mais nous estimons que la probabilité d’éviter l’effondrement n’est que d’environ 10 % ».

6 réflexions sur “Bientôt l’effondrement auquel personne ne veut croire”

  1. Nos réactions sont forcément liées à un vécu, et quand il s’agit de l’humain, raisonner sur les moyennes me semble une aberration. Dans chaque scénario, il faut regarder ce que pourraient signifier les extrêmes. Quand on parle de densité urbaine par exemple, les joies de la vie de quartier dans certains faubourgs de Paris ne peuvent pas compenser la désolation des grands ensembles.
    Je me suis intéressé à la tuberculose à un an; plus tard, à un mètre près, j’accompagnais dans un grand voyage aller le voisin du 10e, qui par curiosité scientifique sans doute a voulu défier les lois de la gravitation (ce qui me permet de confirmer, elle est bien universelle); et mes nuits ont parfois été incommodées par les appels au secours des enfants du 1er dont le père, citoyen, écoulait la production viticole française; etc.
    Tant que la quantité primera sur la qualité, tout ceci fera partie des scènes de la vie courante; et il est préférable de ne pas penser au tableau de la vie pour une gamine de Karachi. Mais il faut penser à elle quand on se lance dans un discours métaphysique sur le devenir de l’humanité. Les choux et les roses sont sensibles au mildiou.

  2. Oui, le Terre peut nourrir tout le monde.
    Dans « les monades urbaines » de Robert Silverberg, elle nourrit même 70 milliards d’habitants, il suffit juste d’accepter la société qui va avec.
    Si on met des camisoles aux enfants, une cour de récréation de 10 mètres carrés leur suffira largement, pourquoi en demander plus?

  3. J’ai toujours quelques interrogations sur la pertinence des théories selon lesquelles nous sommes trop nombreux sur la planète: en effet, nous sommes trop nombreux si on veut vivre selon le standard de vie occidental, avec tout le gaspillage de nourriture et la dépendance aigue au pétrole.
    Pour rappel, nous produisons largement plus de nourriture que nécessaire (l’OMS considère que 2200 kcal/jour/hab sont suffisantes pour les adultes), simplement nous en gaspillons 30 a 50%… En réduisant ce gaspillage, on a de quoi nourrir les 9 milliards d’humains prévus pour 2050 (max. prévu).
    Mieux : en rationalisant notre alimentation (viande 3 ou 4x/semaine par exemple), on diminue la part de la production végétale dédiée à l’alimentation des animaux d’élevages intensifs (aujourd’hui : 40% selon la FAO). On libère des terres pour l’alimentation humaine, et on peut se payer le luxe d’une agriculture moins intensive, meilleure à terme pour la planète et moins énergivore (produits phytosanitaires, plus d’aberrations énergétiques comme les animaux européens nourris au soja brésilien…)
    Les voies pour diminuer la consommation d’énergie de chacun, on les connaît… « y’a plus qu’à » accepter une société qui ne se base plus sur la croissance.

    Bref, pour résumer, il y a une jolie petite phrase du Mahatma Gandhi : « La Terre est suffisante pour nourrir tout le monde, mais elle ne suffira jamais à combler l’avidité de quelques-uns ». Nous faisons partie de ces quelques-uns.

  4. Quelques unes des ‘predictions’ d’Ehrlich (traduit par moi-meme de: « Cracked Crystal Ball: Environmental Catastrophe Edition », par Ronald Bailey) qui montrent bien qu’Ehrlich ne se trompe jamais, qu’il faut absolument prendre a la lettre tout ce qu’il ecrit, y compris quantitativement, et que ceux qui en doutent doivent etre foudroyes sur place par la Nature en colere (ou, le cas echeant, par ses mandataires universellement reconnus que sont les deep ecologistes, cela va de soi). Je me rejouis, remarquez, qu’un membre de l’Academie des Sciences US trouve grace a vos yeux. Pour une analyse plus poussee du cote auto-messianique d’Ehrlich, lisez  » The Skeptical Environmentalist » de Lomborg.
    Lors du premier « Earth Day » en 1970, Ehrlich predit que « dans 10 ans la plupart de la vie animale marine aura disparue. De large regions cotieres devront etre evacuees a cause de la puanteur degagee par les poissons morts. »
    Lors d’un conference en 1971, Ehrlich predit que: « Aux alentours de l’an 2000, le Royaume Uni ne sera qu’un petit group d’iles appauvries, habitees par environ 80 millions d’affames. Si j’etais parieur, je parierais meme que l’Angleterre n’existera plus en l’an 2000″
    Brillant, Dr. Ehrlich !!

  5. quelques posts de ce blog sur Paul Ehrlich
    août 2009, pour une sexualité éclairée
    Quand Paul Ehrlich parle d’éducation sexuelle, il ne pense pas à des cours d’hygiène ou bien des histoires du genre « fleurs et papillons ». Il s’agit de présenter la fonction reproductrice comme une composante parmi d’autres de l’activité sexuelle, qui demande à être maîtrisée selon les besoins de l’individu et de la société…
    La suite : http://biosphere.blog.lemonde.fr/2009/11/09/sexualite-eclairee/
    août 2012, évolution démographique et environnement
    Quarante ans après la publication de son livre The population Bomb, le scientifique Paul Ehrlich persiste et signe : la surpopulation – associée aujourd’hui à la surconsommation – est au centre de la crise environnementale. Et il insiste : ce ne sont pas les solutions technologiques qui changeront quoi que ce soit…
    La suite : http://biosphere.blog.lemonde.fr/2012/08/18/lanimal-dominant-evolution-demographique-et-environnement/
    octobre 2012 Commoner/Ehrlich, le débat démographique
    Le débat entre Commoner et Ehrlich a rapidement dépassé le désaccord scientifique pour fonder deux stratégies radicalement différentes. Commoner s’appuie sur une philosophie non déterministe de la technologie qui admet la possibilité d’une transformation technique radicale. Le mouvement écologiste fondamentaliste préconise le contrôle de la croissance globale…
    La suite : http://biosphere.blog.lemonde.fr/2012/10/19/debat-commonerehrlich-le-debat-demographique/

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