démographie

Nullipares, childfree, les personnes sans enfants

La décision d’avoir ou de ne pas avoir d’enfants se fait normalement à deux. Aujourd’hui, l’infécondité définitive atteint en France 21 % des hommes nés entre 1961 et 1965, et 13,5 % des femmes nées à la même époque. On estime à 3 % seulement la part due à l’infertilité médicale. Mais il est de bon ton de ne s’intéresser qu’aux femmes qui ont choisi de ne pas avoir d’enfants. En Allemagne, 25 % des femmes nées en 1968 sont sans enfants. Il y a là-bas une véritable culture des familles sans enfants. Une page entière du MONDE* consacrée aux childfree, cela se fête.

Malheureusement l’article du MONDE insiste sur la superficialité des considérations individualistes : « Je n’ai jamais eu le désir d’enfant, tout simplement. Pas besoin de chercher telle ou telle cause » ; Un enfant, c’est une « charge », un « poids », un « fil à la patte », bref, un gêneur ; « Je ne supporte pas les enfants s’ils sont un tant soit peu turbulents » ; « J’ai préféré passer mes nuits à discuter, écrire, lire ou danser, plutôt qu’à changer des couches » ;« La femme qui court toute la journée, qui travaille avec trois enfants, je ne pouvais pas vivre ça, l’idée m’était insupportable » ;« Je ne vois pas d’avantage à avoir des enfants. En revanche, une journée passée à entendre mes collègues me suffit à dresser une longue liste d’inconvénients (nuits blanches, contraintes horaires, dépenses, angoisses) ». Les considérations tournées vers le futur sont rares : « Le CDI est en voie de disparition. Plus rien n’est sûr. Je peux perdre mon emploi, mon mari peut me quitter. Si j’ai un enfant, comment savoir qu’il ne manquera de rien ? » ; « Je m’inquiète beaucoup plus pour les générations futures que ceux qui font des enfants sans réfléchir » ; « C’est l’envie d’enfants qui me paraît égoïste et irraisonnée : dans un monde pareil, sérieusement ? » 

Si nous avions à faire le choix d’une fécondité rationnelle, responsable, la base de notre raisonnement serait simple : pourquoi faire un bébé de plus dans un monde déjà surpeuplé ? Mieux vaudrait le fait d’avoir un seul enfant ou pas du tout plutôt qu’un suicide assumé dans l’intérêt de la planète… La volonté de ne pas donner naissance dans un monde menacé par l’effondrement écologique n’est pas encore un facteur déterminant, pas encore. Voici quelques références pour poursuivre votre réflexion :

Féminisme, sensibilité écologique et refus de maternité (2016)

No kid, ces femmes qui ne veulent pas avoir d’enfant (2014)

démographie responsable (2010)

oui à la nulliparité (2008)

Un livre qui fait le tour des problèmes : « Moins nombreux, plus heureux (l’urgence écologique de repenser la démographie) »

Pour rejoindre l’association « Démographie Responsable » : https://www.demographie-responsable.org/nous-rejoindre.html

* LE MONDE du 25-26 février 2018, elles ont décidé de ne pas avoir d’enfants et l’assument

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On interdit l’avortement, donc nous manquons d’eau

Excusez le raccourci, mais parce que nous refusons la maîtrise de la fécondité humaine, l’humanité a soif. Voici trois informations à recouper. Comme le Salvador, trois autres pays d’Amérique du sud interdisent toute forme d’avortement : le Honduras, le Nicaragua et la République dominicaine. En avril 1997, une réforme pénale au Salvador a interdit toute forme d’avortement, y compris en cas de viol, lorsque la vie de la mère est en danger ou quand le fœtus n’a aucune chance de survie. Teodora Vasquez avait même été condamnée en 2008 à 30 ans de prison pour une fausse couche qualifiée « d’homicide aggravé » par la justice*. Au Maroc, « il n’y a plus d’eau ni dans le ciel, ni dans le sol ». Après une décennie de surexploitation des nappes phréatiques par l’agriculture, le royaume est en situation de stress hydrique. Entre manger et boire, il faudra bientôt choisir**. Les 4,5 millions d’habitants du Cap sont menacés de se voir couper les robinets. Au Mozambique voisin, alors que les réserves sont au plus bas, un quart de l’agglomération de Maputo (4 millions d’habitants) est privée d’eau potable, car le gouvernement a décidé d’alimenter en priorité l’agriculture et la production d’électricité***. Ce sont des pays différents, des contextes socio-économiques dissemblables, mais comment ignorer que les politiques natalistes ont entraîné la surpopulation mondiale, elle-même source d’entassement dans des mégalopoles disproportionnées, avec des besoins alimentaires croissants et une pression insupportable sur les nappes phréatiques. Voici un récapitulatif issu de notre blog et centré sur ce dernier point :

Lierre Keith : Notre espèce souffre de surpopulation, et c’est le cas depuis 10 000 ans. Aujourd’hui, des milliards d’entre nous ne sont là qu’à cause des combustibles fossiles. La population mondiale est censée atteindre les 9 milliards en 2050. En parallèle, les réserves piscicoles seront épuisés, les nappes phréatiques trop profondes pour être exploitées et les dernières parcelles de couche arable seront devenues poussière. Toute discussion sur la population mondiale doit absolument prendre en compte la notion de capacité limite ou nombre d’humains qu’un environnement donné peut supporter indéfiniment.

Lester Brown : Nous coupons les arbres plus vite qu’ils ne peuvent repousser et nous surexploitons les pâturages qui, peu à peu, se transforment en déserts. Parallèlement nous épuisons les nappes phréatiques un peu partout. Une autre contrainte vient s’ajouter aux deux premières, les limites de la photosynthèse. Les productions de céréales stagnent déjà. Pour 1 degré d’augmentation de la température, nous devrions même connaître une baisse de 17 % de leur production.

Paul Ehrich : En quelque 60 millions d’années, Homo sapiens est devenu l’animal dominant de la planète, acquérant un cerveau développé et, par-dessus tout, un langage structuré. Malheureusement, au cours des siècles derniers, nous avons de plus en plus utilisé ce pouvoir pour épuiser le capital naturel de la planète, notamment ses terres agricoles profondes et riches, ses nappes phréatiques constituées durant les périodes glaciaires et sa biodiversité. Cette tendance est en grande partie due à la concomitance entre croissance démographique et augmentation de la consommation par habitant, une combinaison qui ne peut se poursuivre encore longtemps sans que risque de s’effondrer notre civilisation désormais mondiale.

Mathis Wackernagel : Mauvaise nouvelle pour la planète, ce mercredi 22 août 2012 l’humanité a déjà épuisé son crédit annuel de ressources naturelles. Nous avons déjà atteint le « Global Overshoot Day » ou « jour du dépassement ». En d’autres termes, nous vivrons à crédit jusqu’à la fin de l’année. Autrement dit, nous puisons dans le capital naturel : le réchauffement climatique s’accentue parce que le poids de l’humanité a dépassé les capacités de recyclage du CO2 par les écosystèmes, les stocks de poissons dans les mers sont en diminution, les nappes phréatiques baissent, etc. Pour M. Wackernagel, ni l’austérité ni la croissance n’éviteront la faillite du système, le défaut de régénération de la Terre sera le facteur limitant de notre économie. Car la tendance finira par se renverser, que ce soit à dessein ou par désastre.

Démographie responsable : Après les huit Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) qui ont accompagné la période de 2000 à 2015, ce sont dix-sept Objectifs de développement durable (ODD) qui devraient permettre de construire le futur des 8,5 milliards d’habitants attendus sur la planète dans quinze ans. Le commentaire de « Démographie responsable » est pertinent : « 17 objectifs et pas un seul qui ne fasse référence, ni de près ni de loin, à la démographie ? Aucune « planète durable » ne sera possible avec les 11,2 milliards d’humains attendus pour 2100, sachant qu’à 7 milliards, nous avons déjà réussi à dérégler le climat, brûlé une grande partie des ressources fossiles, provoqué la 6ème extinction des espèces, rasé une grande partie des forêts tropicales et pollué les océans et les nappes phréatiques. Une fois encore, l’ONU est à côté de la plaque… »

le cas de l’Inde : « L’électricité gratuite ou à tarif réduit dont bénéficient de nombreux agriculteurs indiens pour irriguer leurs cultures, à l’aide de pompes motorisées, accélère l’épuisement des nappes phréatiques. Au rythme actuel, la Banque mondiale prévoit que 60 % de ces nappes seront dans une situation « critique » d’ici vingt ans. Le recours à l’irrigation souterraine a aussi creusé les inégalités. Seuls les plus riches peuvent financer l’achat de pompes et le creusement de puits profonds. Les autres doivent leur acheter l’eau… »

* LE MONDE du 18-19 février 2018, Au Salvador, plus de dix ans de prison pour une fausse couche

** LE MONDE du 18-19 février 2018, Au Maroc, « il n’y a plus d’eau ni dans le ciel, ni dans le sol »

*** LE MONDE du 18-19 février 2018, Sécheresse, surexploitation : le monde a soif

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Associations antinatalistes, la force du petit nombre

Devant le tabou qui frappe la question démographique dans les médias, les milieux gouvernementaux mais aussi paradoxalement beaucoup d’écologistes, c’est le monde associatif qui a pris le flambeau de la mise en garde contre les risques liés à la surpopulation. En Europe et aux États-Unis notamment, de nombreux mouvements, selon des stratégies variées et des proximités politiques diverses, se battent pour faire reconnaître l’importance du facteur démographique et pour inciter à la réduction de la fécondité. La plupart sont motivés par des considérations écologiques.

En France l’Association Démographie Responsable, fondée fin 2008, multiplie les interventions, conférences, articles, pétitions pour alerter sur la gravité du problème et pour faire entrer cette question de plain-pied dans tous les débats ayant trait à la protection de l’environnement. Les membres de cette association sont de fervents défenseurs de l’espèce humaine ainsi que des autres espèces vivantes présentes à ses côtés, désireux de sauvegarder La Vie sur la planète et ce, dans les conditions les moins mauvaises possibles. En incitant à l’autolimitation de la natalité, l’association a pour objet d’œuvrer pour la stabilisation de la population humaine, voire sa diminution sur le long terme. Excluant tout ce qui ne respecterait pas les droits humains ou qui remettrait en cause la liberté de procréer, leur démarche passe par une bonne information de chacun(e) sur les conséquences de la pression démographique pour les générations futures, les autres espèces et l’environnement. Elle milite notamment pour que soient organisées des COP (conférences internationales) sur la démographie comme cela se fait pour le climat ou la biodiversité. Son action porte à la fois sur la démographie nationale et internationale ; un certain nombre de personnalités politiques et/ou scientifiques en sont membres d’honneur.
Au Royaume-Uni, avec plusieurs milliers d’adhérents et quelques soutiens médiatiques de poids comme le célèbre présentateur d’émissions animalières, Sir David Attenborough, l’association Population Matters fait de même. C’est de loin le premier mouvement européen. En Italie, c’est principalement l’association Rientrodolce qui porte le message. Elle est assez proche de la mouvance décroissante et milite pour un mode de vie plus doux et plus lent. Son slogan est : « Per un ritorno « dolce » a due miliardi di persone ». En Suisse, l’association Ecopop avait, en 2014, organisé une votation – perdue toutefois – pour limiter l’immigration en vue de réduire la croissance démographique du pays. Le projet prévoyait aussi de favoriser le planning familial dans les pays pauvres en demandant qu’y soit consacré 10 % de l’aide au développement. On trouve aux Pays-Bas la fondation Le club des 10 millions qui prône un retour du pays à 10 millions d’habitants (contre 17 millions aujourd’hui et 407 habitants par kilomètre carré) et en Belgique l’association One Baby qui milite également pour une certaine modération démographique. Les pays à la démographie moins vive comme l’Allemagne ou l’Espagne sont évidemment moins présents sur ces questions. Aux Etats-Unis, différentes fondations bénéficient de moyens financiers relativement importants et lient souvent leurs actions à la lutte contre la pauvreté, à la promotion de la condition féminine ou à l’écologie en général, citons notamment : Population Institute (depuis 1969), Population Action International (PAI), Population Media Center, World Population Balance, Population connection. Population Institute est également présent au Canada où son militantisme porte aussi sur la protection animale. De tels mouvements existent dans beaucoup d’autres pays, citons en Australie Sustainable Population Australia ou au Bangladesh l’association BOFOC (Bangladesh society of One Family One Child).

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La vraie tragédie, ce serait que l’humanité survive

Faudra-t-il demain exterminer totalement l’espèce humaine pour préserver la Terre ? Nous avons enquêté dans les méandres de ces « fous » de Gaïa. On distinguera trois types de groupes anti-humains. Les uns préconisent une réduction de la population. Les autres militent pour la disparition de l’espèce humaine : certains d’entre eux prônent le volontariat, d’autres la coercition. Nous avons hésité à rendre publics certains documents explosifs. N’accordions-nous pas un intérêt malsain à des théories probablement sans aucun avenir ?

L’ Eglise d’Euthanasia (The Church of Euthanasia – COE) est le groupe antihumain le plus influent. Elle a son siège social à Somerville (USA) et revendique officiellement un statut religieux. Elle est implantée depuis 1991 aux Etats-Unis, en Allemagne, en Belgique, en Angleterre, etc. Elle est dirigée par le Révérend Chrissy Korda. Son leader, activiste végane, fonde la COE après un rêve durant lequel elle aurait été visitée par un « Etre » qui l’informa que l’écosystème planétaire était détérioré et que tous nos sens nous mentaient pour nous cacher cette Vérité. Elle se réveilla avec en tête la devise « infâme » (sic) de son groupe : « Economisez la planète, détruisez-vous« . Son dogme est limité officiellement à un unique commandement : « Tu ne procréeras pas ! ». Les parents sont admis à condition qu’ils s’engagent à ne plus jamais enfanter sous peine d’ex-communication.

La COE multiplie depuis 1993 les actions. Ses activistes ont développé un réel savoir-faire en matière de provocation lors des manifestations de rue (tablette géante de RU-486, commando contre des banques de sperme, pénis gonflable fluo). Son premier service « religieux » s’est tenu, en octobre 1995, sous un portrait du « bon » docteur Kevorkian, connu aux Etats-Unis pour être le champion du suicide assisté puisqu’il fournit aux « candidats » une « machine à suicide ». La population humaine serait, selon la COE, responsable de par sa croissance d’un vrai écocide. Elle menacerait en effet d’extinction toutes les autres espèces végétales et animales. Un humanicide seul pourrait encore (nous) sauver de cet écocide programmé génétiquement : « Nous avons quelque chose à faire très rapidement et la chose la plus importante que nous pouvons faire est de réduire notre population  » (…). « C’est quelque chose que chacun de nous peut faire, elle n’exige pas de formation spéciale et c’est pourquoi chaque membre de l’église d’euthanasia prend le vœu de ne plus jamais procréer ». La COE ne propose cependant pas (contrairement à d’autres groupes) l’extinction totale de l’Humanité, sauf si les efforts entrepris pour restaurer rapidement l’équilibre devaient finalement échouer (sic). Il suffit de lire sa prose pour découvrir que derrière son soi-disant refus de la société américaine (industrielle) se cache la haine des « banquiers juifs » (sic) et de la pourriture chrétienne (resic). Elle recycle ainsi tout un bric-à-brac nauséabond fondé sur la dénonciation d’un complot judéo-égalitaire qui aurait, cette fois, pour cible, non plus les Aryens, mais la Nature. Comment réduire l’espèce humaine ?

« Si vous pensez que nous sommes trop nombreux pourquoi ne pas assumer votre propre responsabilité personnelle : pourquoi ne pas vous suicider ? » La COE estime que si l’utilisation de bombes atomiques pour réduire la population terrestre serait en soi acceptable au regard des humains, elle aurait, en revanche, l’inconvénient de rendre des vastes régions de la terre inadaptées pour n’importe quelle forme de vie animale ou végétale. La COE préconise pour l’instant d’en rester à ces méthodes volontaires mais ajoute que plus l’humanité recule le moment plus les « autres » solutions deviendront alors indispensables. La sodomie est facultative. Le suicide est encouragé. Ses dirigeants expliquent qu’ils ont choisi personnellement de se « sacrifier » en ne se suicidant pas, pour faire quelque chose de plus utile en convainquant beaucoup d’autres à le faire (sic). Ils développent une théologie du suicide aux effets dévastateurs sur des individus fragilisés…

Paul Ariès, texte de 2002

texte complet : http://www.prevensectes.com/euthanasia1.htm

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Paul Ariès et les délires terroristes des néo-malthusiens

Paul Ariès est un politologue proche du mouvement de la décroissance, mais qui s’intéresse aussi aux franges de la société, la scientologie, le satanisme et l’extrême droite, le retour de l’occultisme… Sur la question démographique, voici un résumé de son livre au titre apocalyptique*.

Interview par Paul Ariès d’un militant anti-humain : « La Terre n’est pas faite pour les hommes. Les hommes sont faits pour la Terre. Ils ont une fonction à remplir. Le problème c’est lorsqu’ils se croient les maîtres de la Terre alors qu’ils n’en sont que les esclaves, les petits insectes. Je ne sais pas d’où vient cette croyance mais elle fonde tout le système industriel. On ne le détruira pas si on ne met pas l’homme au niveau des pâquerettes. Il n’est pas plus qu’une espèce parmi des milliards d’autres espèces vivantes. Il meurt chaque jour plusieurs espèces animales ou végétales à cause de l’homme. La disparition des hommes ne serait donc pas pire que celle des autre espèces. Elle est même sans doute nécessaire. Le problème c’est que l’homme est parvenu à échapper à son destin, à se déprogrammer. Il aurait dû mourir d’une mort douce, il devra disparaître dans la violence. Cela peut être celle de la Terre lorsqu’elle se défend contre la haine des hommes. Il ne faut pas croire que les soi-disant catastrophes soient aussi naturelles que cela. La Terre fait ce qu’elle veut. Elle se débarrasse de quelques humains par un tremblement de terre ; ailleurs par un raz de marée ou une irruption volcanique. Vous pouvez sourire mais c’est comme ça. La Terre joue avec nous, un peu comme un chat avec une souris. Il ne faut pas rêver : on y passera tous ! Tu peux appeler cela comme tu veux mais l’apocalypse existe dans toutes les religions. Quand tu comprends cela, tu peux te faire sauter la cervelle, sauf si tu piges que tu appartiens à la Terre. La vie continue après la disparition des humains, mais autrement, et c’est là l’essentiel. » (page 75-76)

Le vocabulaire de Paul Ariès : « Certains se contentent de fantasmer sur le retour de Malthus, ce Diable noir du XVIIIe siècle… Le capitalisme serait-il devenu sénile pour redécouvrir avec passion les thèses maudites du Révérend Malthus ?… Nous avons enquêté dans les méandres nauséabonds de ces véritables fous de Gaïa-Notre-Mère… Ces fous dangereux, avant d’être criminels, sont les enfants d’une société qui ne connaît plus d’autre loi que celle de la consommation… Ces faussaires de la pensée n’ont de cesse de passer en contrebande une idéologie « éco-moyenâgeuse » funeste… Peut-on penser que ces fanges ne représenteraient qu’elles-mêmes ?… Ces thèses immondes ne sont pas nouvelles, mais elles rencontrent un écho plus large au sein de la communauté savante, mais aussi au sein d’une partie toujours plus grande de l’opinion publique… » (page 9 à 17)

conclusion de Paul Ariès : « Ces groupes antihumains sont dangereux car le pire reste possible. Qui pourrait en effet exclure, à terme, des dérives de nature terroriste ? Un monde inhumain peut-il féconder durablement des rêves enchanteurs ? La Bête a de beaux jours devant elle, car que lui opposons nous ? Elle pourra de nouveau faire fantasmer des individus paumés. Comment s’opposer à la fascisation des esprits ? L’humain doit reconnaître, pour cela, que tout n’est pas possible. Il n’est que temps de nous libérer de ce qui pèse, aujourd’hui, le plus lourd. Il faut donc tordre le cou aux inégalités si nous voulons casser ces mythes du surhomme et de la nature sauvage. » (page 168)

commentaires de biosphere

Difficile de faire une critique pondérée de ce livre car l’ensemble n’est qu’un tissu de contre-vérités sur les malthusiens, une accumulation de termes injurieux, une méconnaissance totale des néo-malthusiens. Exemple ; dans le chapitre « Les rentiers du Révérend Malthus », l’insulte vaut raisonnement pour Ariès : « Nous reviendrons sur les polémiques que suscitèrent les propos ignobles de Malthus… Les néo-malthusiens donnent le sentiment de n’avoir rien appris, ils ont simplement élargi leur haine des pauvres à tous les humains… Malthus ne doit pas être sous-estimé car ses formules de bateleur ont pour elles l’apparence de l’évidence alors qu’elles dissimulent les plus ignobles remèdes… La méprise de Malthus tient en fait à sa haine des pauvres… Malthus présentait une théorisation de l’abjection car il donnait pour surnuméraires ceux-là même qui produisent les richesses… L’infâme curé substitue au Dieu, garant de l’ordre éternel, le principe naturel de la population, faisant preuve d’un racisme qui justifie tous les génocides de travailleurs… (page 32 à 35) »

Le seul intérêt du livre, c’est qu’il nous informe sur les associations existantes, surtout américaines, qui vont à l’extrême de la volonté de réduire la population mondiale.

* Pour sauver la Terre : l’espèce humaine doit-elle disparaître ? (de l’humanisme à l’humanicide : les délires terroristes des néo-malthusiens) aux éditions L’Harmattan, 2017)

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Jean Dorst, un mètre carré de surface par habitant !

écrit de Jean Dorst en 1965 : Le Seigneur a dit : « croissez et multipliez… » – Oui, mais il n’a pas dit par combien ! Si on voulait caractériser le XXe siècle par un phénomène unique, ce ne serait pas par la découverte d’innombrables perfectionnements techniques, ni même par la fusion nucléaire, mais bien plus par l’explosion démographique aux conséquences incalculables. Quand on a présent à l’esprit l’accroissement démographique selon une progression géométrique, on ne peut que nourrir de sombres inquiétudes sur le destin de l’humanité. Il a fallu 600 000 ans pour que l’humanité atteigne un effectif de 3 milliards (en 1965) ; si la tendance actuelle se poursuit, il suffira de 35 ans pour que ce chiffre soit doublé (ndlr : 6,1 milliard ont été effectivement atteint en 2000). Pour le naturaliste, ce phénomène a les caractéristiques d’une véritable pullulation. Comme l’a souligné un rapport des Nations unies en 1958, si le rythme actuel d’accroissement se poursuivait pendant encore 600 ans, le nombre d’êtres humains serait tel que chacun n’aurait plus qu’un mètre carré de surface à sa disposition. Autant dire que c’est là un événement qui n’aura pas lieu. Quelque chose se passera pour arrêter cette prolifération intempestive ; souhaitons que ce ne soit pas une catastrophe à l’échelle de la planète. Peu d’entre nous ont conscience du problème de la surpopulation du fait de sa nouveauté et de tout l’obscurantisme qui en masque la gravité. D’ardents zélateurs continuent pourtant à prôner la famille nombreuse. La Suisse oublieuse de la peine qu’elle eut à nourrir ses enfants de 1940 à 1945, a explosé de joie imbécile en 1964 lorsqu’elle apprit qu’était né son cinq millionième citoyen ! Et pendant ce temps, les peuples dits sous-développés continuent de se développer à une vitesse plutôt digne de Lapins que d’êtres doués de raison.

Il faut constater que l’augmentation massive et accélérée des humains finit par rendre le problème de leur subsistance absurde ; les ressources alimentaires ne pourront jamais suivre cette progression et tôt ou tard se produira un décrochement. Nous sommes parfaitement conscients que les rendements agricoles ont été considérablement augmentés depuis les première ères de l’humanité. Le chasseur paléolithique avait besoin de 10 km² pour se nourrir ; le pasteur néolithique 10 hectares ; le paysan médiéval 2/3 d’ha de terre arable ; le cultivateur japonais peut se sustenter maintenant avec 1/16 d’hectare. Mais tout se passe comme si la quantité de nourriture et celle des multiples produits que l’homme demande à la terre essayaient de rattraper leur retard sur les effectifs de consommateurs, sans jamais y parvenir. La survie et la prospérité de l’ensemble des communautés biotiques terrestres dépendent en définitive de la mince strate qui forme la couche la plus superficielle des terres. Il existe une érosion accélérée consécutive à une mauvaise gestion du sol dont l’homme est l’unique responsable. La morphogenèse anthropique affecte gravement la fertilité par perte de substances et par transformation de la structure physique, chimique et biologique des sols. L’homme a même empiété sur des terres marginales, sans vocation agricole, et dont l’équilibre ne peut être assuré que par le maintien des biocénoses naturelles. Il y a eu déboisement, perturbations dans le régime des fleuves, destruction des habitats aquatiques, abus des insecticides, déchets de la civilisation technique à l’assaut de la planète, pollution des mers et de l’atmosphère, pollution radioactive, pillage des ressources des mers… Il faut aussi tenir compte du fait que les difficultés de répartition des denrées et les inégalités de ressources entre les différentes fractions de population ne disparaîtront pas facilement, sans doute jamais. Même si chaque homme était assuré d’une ration suffisante, il est néanmoins plus agréable de ne pas être obligé de manger debout ! Aussi est-il sage que chacune des fractions de l’humanité proportionne son expansion démographique à ses ressources propres.

L’humanité, envisagée comme une population animale, a réussi à se débarrasser de la plupart des freins à sa prolifération au risque non négligeable de multiplier les maladies héréditaires, autrefois éliminées en plus grande proportion par la sélection naturelle. On a parfois tenté de se poser la question : faut-il condamner Pasteur en raison de ses découvertes ? Certes non. Mais l’homme se doit de trouver dans les plus brefs délais, un moyen de contrôler une prolificité exagérée, véritable génocide à l’échelle de la planète. Un premier moyen de régulation est l’émigration. Or cela n’est plus guère possible à l’heure actuelle car toute la planète est strictement compartimentée et coupée de barrières. Un deuxième procédé est l’augmentation du taux de mortalité. Certaines sociétés primitives éliminent les vieillards, tandis que d’autres préconisent l’infanticide. C’est impossible à envisager dans le cas de l’humanité évoluée. Le troisième procédé consiste à une diminution du taux de natalité. Aucune religion, aucune morale et aucun préjugé ne doivent nous en empêcher. Le jour où les peuples se jetteront les uns contre les autres, poussés par des motifs en définitive écologiques, cela serait-il plus hautement moral que d’avoir maintenu les populations humaines en harmonie avec leur milieu ? Même si l’homme décide de suivre aveuglément les bergers modernes, il a le devoir de prendre une assurance et de ne pas rompre tous les liens avec le milieu dans lequel il est né. Il faut chasser de notre esprit les concepts selon lesquels la seule manière de tirer profit de la surface du globe est une transformation complète des habitats et le remplacement des espèces sauvages par quelques végétaux et animaux domestiques. La conservation de la nature sauvage doit être défendue par d’autres arguments que la raison et notre intérêt immédiat. Un homme digne de la condition humaine n’a pas à envisager uniquement le côté utilitariste des choses.

Avant que nature meure de Jean Dorst (Delachaux et Niestlé 1965)

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164 000 Français de plus pour 67,2 millions d’habitants

Catastrophe, un solde naturel (naissances – décès) « historiquement bas » en France à + 164 000 personnes, le niveau le plus faible constaté depuis l’après-guerre. L’article du MONDE pleure à chaudes larmes, « une mauvaise passe », » un dynamisme démographique en bout de course », « un tableau sombre », « une augmentation de seulement + 0,3 % pour 67,2 millions de personnes », « un indicateur de fécondité à 1,88 enfant par femme qui s’éloigne du seuil de renouvellement des générations (2,1 enfants par femme) ». C’est vraiment une catastrophe pour la journaliste Gaëlle Dupont. Ce n’est pas l’avis d’une très large majorité des commentateurs sur lemonde.fr :

Hé bé : Cela veut dire que l’on va arrêter de balancer 150 000 jeunes chaque année à Pôle emploi ? J’arrive pas à voir où est la mauvaise nouvelle.

Intriguée : Pourquoi faudrait-il se réjouir de la hausse de la population ou s’attrister de sa baisse? On vit bien dans de nombreux pays où la faible natalité est un choix (Japon, Suisse, Allemagne…). La politique familiale de la France n’est-elle pas un héritage de périodes anciennes où la pression démographique était un atout dans les rivalités européennes et fournissait la « chair à canon » ? Ne faudrait-il pas plus aider les familles pour leur 1er enfant plutôt que favoriser les familles nombreuses ?

Constant : Les articles sont écrits par des curés maintenant ? En quoi une baisse de la natalité est elle négative ?

Laure : On n’a jamais été aussi nombreux en France (pour rappel on était seulement 42 millions en 1950) et on est toujours en train de nous dire « attention nous sommes sous le renouvellement des générations ». Vous désirez quoi ?! Un triplement de la population tous les 50 ans comme au Niger suivi d’une émigration massive ?!! Le but c’est quoi ? Vivre dans des HLM entassés ou vivre convenablement avec de l’espace pour nos enfants ?!!

loulou44 : Le monde est surpeuplé, les villes sont surpeuplées, la région parisienne est sur-surpeuplées, la baisse de natalité est plutôt un bon signe.

Michèle de Dordogne : Oui, excellente nouvelle, il faut réduire la population partout si on veut que notre planète survive

jpet : Il faut s’en réjouir, à l’heure de l’écologie le vrai geste citoyen est de ne pas se reproduire.

LucM : Étonnantes toutes ces réactions en faveur de la baisse de la natalité ! Oui la démographie exerce une pression sur les ressources, mais c’est d’abord dû à notre mode de vie ! Baisser la population ne servira à rien si on consomme toujours autant !

ALAIN-MICHEL SEUX @ LucM : Mais si, ça servira puisqu’il y aura moins de monde pour prélever les ressources donc ça en laissera plus pour ceux qui restent.

Roudoudou : Excellente nouvelle, pourvu que çà dure, même si on n’en verra pas les effets tout de suite… Il est tellement évident qu’il n’est pas possible d’avoir une population humaine en constante croissance mais apparemment nos experts n’ont toujours pas compris çà….

tokolosh : Le différentiel des prix immobiliers par rapport à l’Allemagne par exemple tient largement… à notre petite passion nataliste franchouillarde, justement ! Ce n’est pas compliqué, de la simple offre et demande : plus de mômes = moins de places dispos = ce qui est rare est cher.

CYNIQUE DU BON SENS ET RAISON : 50 millions d’habitants en France, ce doit être le chiffre à atteindre pour maintenir une qualité de vie dans ce pays (conservation de l’écosystème). Un peu d’intelligence collective ne nuirait pas.

JEROME @ CBSR: j’avais calculé autour de 24 millions compte-tenu de l’empreinte écologique autour de 2,6 => 65/2,7 page 2 sur le doc: http://structures.ac-martinique.fr/eedd/EmpreinteFrance4p%5B1%5D.pdf

* LE MONDE du 17 janvier 2018, Natalité  : vers la fin de l’exception française

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Gestation Pour Autrui, un enfant à n’importe quel prix

GPA, payer une femme pour enfin avoir un enfant. Rappelons que le recours aux mères porteuses est interdit en France depuis les lois de bioéthique de 1994, mais l’association des familles homoparentales et l’association des parents gays et lesbiens s’activent dans les colonnes du MONDE* par l’intermédiaire d’une journaliste : « C’est l’histoire de Claire, une longue et douloureuse affaire d’infertilité, une première fécondation in vitro (FIV) à 32 ans, la huitième à 37 ans, décision pour une GPA aux Etats-Unis… La GPA est autorisée dans 45 des 50 états… Les bébés coûtent cher, Claire et Felipe ont explosé les tarifs… L’aventure leur a coûté 210 000 dollars, sans leurs quatre allers-retours aux Etats-Unis… Kelly, la mère porteuse de Claire et Felipe, a reçu 35 000 dollars : « nous nous sommes payé une voiture, de belles vacances à Hawaï »… On pourrait trouver une mère porteuse plus vite si on acceptait une femme sans mutuelle, donc plus précarisée… La mise en relation à but lucratif entre des parents et une mère porteuse est punie de deux ans de prison et de 30 000 euros d’amende… Les états généraux de la bioéthique, lors du premier semestre 2018, permettront d’en débattre… »

Adel sur lemonde.fr : Ce qui est choquant n’est pas la pratique mais le fait qu’il y ait des millions d’enfants orphelins sur notre planète qui attendent d’être adoptés. Le besoin absolu et à tout prix d’avoir un enfant issu de ses gamètes n’a pas de sens d’un point de vue génétique et en a de moins en moins sur le plan moral.

Pascal : Pratique abjecte de personnes se réclamant « de gauche », prêts à payer 200 000 € pour louer le corps d’une femme le temps d’une grossesse, pour assouvir leur petit besoin (pardon, « droit ») d’enfant.

Tehel : La non marchandisation du corps humain est un principe sur lequel nous ne devrions pas transiger. Pas plus pour complaire à l’égoïsme de certain.e.s. Trop de certitudes de dérives. Pour l’instant ils et elles choisissent les femmes porteuses sur catalogues, dans dix ans selon la même logique ils et elles voudront choisir les caractéristiques de l’enfant. Stop.

Pascal : Et donnons rapidement le droit de vendre ses organes aux personnes qui le souhaitent. Après tout, il y a un marché, il y a des pauvres qui ont besoin d’argent, et des riches qui peuvent payer.

RBV : Derrière cette question se pose celle plus vaste du droit à l’enfant. Sur une planète où la croissance démographique nous met tous en danger, est il acceptable d’avoir recours à la PMA, GPA. J’entends pourtant la souffrance de ceux qui ne peuvent avoir d’enfant mais il faut être pragmatique.

Maillard Bernard : De deux choses l’une : soit la société place la satisfaction du désir individuel en premier et chacun se sert en fonction de ses ressources et du rapport de forces établi, en refusant toute considération spécifique sur la nature humaine. Soit la société privilégie le service de l’autre en préservant une spécificité à la nature humaine. La marchandisation des corps humains et l’esclavage sont alors durablement bannis. C’est un choix de société. Je choisis clairement le second .

Juliette : La gestation pour autrui (GPA) est un business sans vergogne, et « Le Monde » ne se prive pas d’en faire la publicité en donnant toutes les coordonnées, notamment aux États-Unis, et même les tarifs comparés. Une banalisation inacceptable, une justification inepte, et finalement une apologie. Pour finir par laisser à penser que le seul tort de la GPA est d’être trop chère ! La rédaction de cet article du « Monde » est absolument infecte. Une vraie honte pour ce journal ! Pour ne pas dire dégueulasse.

* M le magazine du Monde, 30 décembre 2017 | La gestation pour autrui côté business

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Inès, acharnement médical, acharnement des parents

Une médecine qui est devenue apte à prolonger quasi indéfiniment des vies qui n’en sont plus n’est pas une bonne médecine. C’est pourquoi il semble normal qu’une équipe médicale puisse décider d’arrêter les soins d’un enfant contre l’avis de ses parents. Le Conseil d’État a été saisi en décembre 2017 du cas d’une adolescente de 14 ans, Inès, en coma végétatif à la suite d’un arrêt cardiaque en juin dernier. Selon la procédure collégiale prévue par la loi Claeys-Leonetti de 2016 sur la fin de vie, la décision d’arrêt des soins prise le 21 juillet a été notifiée aux parents. La mère d’Inès n’a pas voulu voir l’évidence : « Je trouve qu’elle est consciente par moments. » L’expertise médicale, confiée à trois professeurs conclut pourtant au caractère « déraisonnable » du maintien de l’assistance respiratoire et de la sonde gastrique alors que le « pronostic neurologique est catastrophique et qu’Inès est dans un état végétatif persistant. (…) Le caractère irréversible des lésions neurologiques est certain ». Sur la base de ces avis médicaux unanimes selon lesquels les traitements sont « inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le maintien artificiel de la vie », les juges de Nancy ont rejeté le recours des parents. La mère veut avoir le dernier mot : « Notre fille nous appartient, pas aux médecins ».* Passage donc par le Conseil d’État. L’avocat des parents a invoqué la convention d’Oviedo sur la dignité de l’être humain en médecine, selon laquelle l’avis des parents d’un mineur prime sur celui des médecins. Pour l’avocat de l’hôpital, cette convention a un statut réglementaire, donc inférieur à la loi de 2016.

Le Conseil d’État a validé, le 5 janvier, la possibilité que les médecins puissent procéder à l’arrêt des soins. Selon les termes de la loi et son interprétation par le Conseil constitutionnel, « il appartient au médecin en charge d’un patient, lorsque ce patient est hors d’état d’exprimer sa volonté, de prendre la décision d’arrêter ou de ne pas mettre en œuvre, au titre du refus de l’obstination déraisonnable, les traitements qui apparaissent inutiles, disproportionnés ou sans autre effet que le seul maintien artificiel de la vie. »** Les parents ne sont pas propriétaires d’un enfant, ils ne peuvent que lui vouloir le meilleur dans l’existence. D’ailleurs leur demander leur avis sur la fin de vie est normalement une charge trop lourde, parfois insupportable. Une décision relevant du milieu médical leur enlève un poids moral et affectif, la décision finale est prise par d’autres, ils devraient reconnaître le bien fondé de cette approche. Si pour des raison personnelles ou religieuses, ils s’obstinent, en dernier recours la loi française ne leur donne pas raison. Une bonne loi est là pour trancher entre des avis contradictoires après mûre réflexion collective.

Si des individus veulent s’affranchir de la loi collective, qu’ils prennent leur responsabilité et qu’ils gardent le comateux chez eux. Le cas d’Ariel Sharon est significatif. Il végétait depuis une attaque cérébrale le 4 janvier 2006. Il coûtait cher, 296 000 euros par an. Contre l’avis médical, les enfants refusaient le débranchement. Sharon a été maintenu en vie par les médecins jusqu’à ce que l’hôpital demande à la famille de payer les soins… il a fini par être débranché le 11 janvier 2014. Huit années d’acharnement inutile d’un point de vue socio-économique. A l’heure où l’espèce humaine dépasse les 7 milliards de représentants sur une planète qu’elle a dévastée, l’arrêt des machines qui maintiennent artificiellement en vie des personnes aux frais des contribuables ne serait-elle pas d’un bon rapport qualité/prix ? D’un point de vue écologiste, il faut savoir reconnaître la mort qui vient car elle est par nature notre lot commun. Prolonger une vie qui n’en est plus une est indigne, cela paraît incompatible avec notre faculté de penser et juger la réalité des faits. Il paraît donc plus sain de tout faire pour empêcher la perte de biodiversité et l’extinction des espèces plutôt que de vouloir préserver la vie des humains qui ne servent plus à rien.

* LE MONDE du 30 décembre 2017, Fin de vie : le Conseil d’Etat doit statuer sur le cas d’une adolescente dans un « état végétatif persistant »

** LE MONDE du 6 janvier 2018, Fin de vie : le Conseil d’Etat valide l’arrêt des soins d’une adolescente dans le coma, contre l’avis des parents

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Nous sommes 7,5 milliards au 1er janvier 2018

Le 1er janvier 2018, l’humanité a franchi le seuil des 7,5 milliards de représentants. La croissance reste stable avec un rythme annuel de + 1,2 %, soit un doublement en moins de 60 ans. La planète gagne environ 89 millions d’habitants par an, plus qu’une France entière de plus habitant la surface de la planète. Cela correspond à 244 000 personnes de plus par jour, soit 170 personnes par minute. Nous serons environ 9,8 milliards en 2050 et 11,2 milliards en 2100 selon les projections moyennes.

En ce qui concerne la France, l’estimation de l’INSEE pour le 1er janvier 2017 était de 64 860 000 habitants sur le seul territoire métropolitain. Un taux d’accroissement d’environ + 0,5 %  a permis à notre pays de dépasser au 1er janvier 2018 les 65 millions en métropole.

Le 13 novembre dernier, plus de 15 000 scientifiques du monde entier proposaient un ensemble de 13 mesures parmi lesquelles deux faisaient directement référence à la démographie. 

– Réduire le taux de fécondité en faisant en sorte qu’hommes et femmes aient accès à l’éducation et à des services de planning familial, particulièrement dans les régions où ces services manquent encore.

Déterminer à long terme une taille de population humaine soutenable et scientifiquement défendable tout en s’assurant le soutien des pays et des responsables mondiaux pour atteindre cet objectif vital.

(lire l’article complet sur le blog « économie durable »)

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Malthus et l’injonction divine de « peupler la terre »

La plupart des attaques contre mon essai sont moins des réfutations que des déclamations ou des injures qui ne méritent aucune réponse. Je suis donc appelé à relever des objections qui ont été faites en simple conversation. Je saisis cette occasion de corriger les erreurs qui ont été commises sur la nature de mes opinions, et j’invite ceux qui n’ont pas le temps de lire en entier cet ouvrage, à jeter du moins les yeux sur le court résumé que je vais en donner, s’ils ont à cœur de me juger d’après mes propres sentiments et non d’après ceux qu’on me prête. C’est méconnaître mes principes que de m’envisager comme un ennemi de la population, les ennemis que je combats sont le vice et la misère.

La première grande objection est que mes principes contredisent le commandement du Créateur, ordre de croître, de multiplier et de peupler la terre. Je suis pleinement persuadé que c’est le devoir de l’homme d’obéir à son Créateur, mais ce commandement est subordonné aux lois de la nature dont il est l’auteur. Si, par une opération miraculeuse, l’homme pouvait vivre sans nourriture, nul doute que la terre ne fût très rapidement peuplée. Mais comme nous n’avons aucune raison de compter sur un tel miracle, nous devons, en qualité de  créatures raisonnables, examiner quelles sont les lois que notre Créateur a établies relativement à la multiplication de l’espèce. Si nous prétendons obéir au Créateur en augmentant la population sans aucun moyen de la nourrir, nous agissons comme un cultivateur qui répandrait son grain dans les haies et dans tous les lieux où il sait qu’il ne peut pas croître. Il n’y a aucun chiffre absolu : garnir une ferme de bestiaux, c’est agir selon la grandeur de la ferme et selon la richesse du sol qui comportent chacune un certain nombre de bêtes. Le fermier doit désirer que ce nombre absolu croisse. C’est vers ce but qu’il doit diriger tous ses efforts. Mais c’est une entreprise vaine de prétendre augmenter le nombre de leurs bestiaux, avant d’avoir mis les terres en état de les nourrir. Je crois que l’intention du Créateur est que la terre se peuple ; mais qu’il veut qu’elle se peuple d’une race saine, vertueuse et heureuse ; non d’une race souffrante, vicieuse et misérable.

Sur le haut prix qu’on doit mettre à une grande et forte population, je ne diffère en rien des plus chauds partisans de cette doctrine. Je suis prêt à reconnaître avec tous les anciens écrivains que la puissance d’un État ne doit pas se mesurer par l’étendue d’un territoire, mais par l’étendue de la population. La France recrute ses armées avec plus de facilité que ne peut le faire l’Angleterre. Il faut convenir que la pauvreté et le manque d’emploi sont des aides puissants pour un sergent recruteur. Ce ne serait pas néanmoins un projet bien humain que celui de maintenir le peuple anglais dans le besoin, afin de pouvoir l’enrôler à plus bas prix.

Malthus en 1803, Essai sur le principe de population (Flammarion 1992, tome 2, page 341 à 347)

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Malthus, enseigner la contrainte démographique à l’école

Il convient d’insister particulièrement sur cette vérité, que ce n’est point pour l’homme un devoir de travailler à la propagation de l’espèce, mais bien de contribuer de tout son pouvoir à propager le bonheur et la vertu. Si l’on veut obtenir des classes inférieures le degré de prudence nécessaire pour contenir les mariages dans de justes bornes, il faut faire naître parmi elles les lumières et la prévoyance. Le meilleur moyen de parvenir à ce but serait d’établir un système d’éducation paroissiale semblable à celui qui a été proposé par Adam Smith. Outre les sujets ordinaires d’instruction, je voudrais qu’on exposât fréquemment, dans ces écoles, l’état des classes inférieures relativement au principe de population, et l’influence qu’elles ont à cet égard sur leur propre bonheur. On aurait soin de faire remarquer que le mariage est un état désirable, mais que pour y parvenir c’est une condition indispensablement requise d’être en état de pourvoir à l’entretien d’une famille. Si dans la suite on pouvait joindre dans ces écoles quelques-uns des principes les plus simples de l’économie politique, il en résulterait pour la société un avantage infini. Adam Smith propose d’enseigner les parties élémentaires de la géométrie de la mécanique. Je ne puis m’empêcher de croire que l’on pourrait également mettre à la portée du peuple les principes communs sur lesquels se règlent les prix d’achat et de vente. Ce sujet intéresse immédiatement la classe du peuple et ne pourrait manquer d’exciter son attention.

On a répandu en Angleterre des sommes immenses en assistance, et il y a lieu de croire qu’elles n’ont servi qu’à aggraver les maux de ceux qui les ont reçues. On a trop peu fait au contraire pour l’éducation du peuple ; on a négligé de l’instruire de quelques vérités politiques qui touchent de près à son bonheur, qui sont peut-être le seul moyen par lequel il pourrait améliorer son état. Il est peu honorable pour l’Angleterre que l’éducation des classes inférieures du peuple ne se fasse que par quelques écoles du dimanche, entretenues par des souscriptions particulières, et qui même n’ont été fondées que fort récemment.

Je pense entièrement comme Adam Smith ; je crois qu’un peuple instruit et bien élevé serait beaucoup moins susceptible qu’un autre d’être séduit par des écrits incendiaires, et saurait mieux discerner et apprécier à leur valeur les vaines déclamations de quelques démagogues qu’anime l’ambition et l’intérêt. Les écoles serviraient à instruire le peuple de sa vraie situation ; qu’une révolution, si elle avait lieu, ne ferait point changer en leur faveur le rapport de l’offre de travail à la demande, ou celui de la quantité de nourriture au nombre des consommateurs. Ce serait le vrai moyen de relever la partie inférieure du peuple, de la faire sortir de son état d’abaissement, de la rapprocher de la classe moyenne. Le bienfait d’une bonne éducation est du nombre de ceux dont tous peuvent jouir. Et comme il dépend du gouvernement de le mettre à la portée de tous, il est sans contredit de son devoir de le faire.

Malthus en 1803, Comment il faudrait s’y prendre pour corriger les opinions erronées sur la population

in Essai sur le principe de population (Flammarion 1992, tome 2, page 267 à 273)

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Malthus contre les lois sur les pauvres

Les lois sur les pauvres tendent manifestement à accroître la population, sans rien ajouter aux moyens de subsistance. Ainsi les lois y créent les pauvres qu’elles assistent. Secondement, la quantité d’aliments qui se consomme dans les maisons de travail (Work-houses) diminue d’autant les portions qui sans cela seraient réparties à des membres de la société plus laborieux et plus dignes de récompense. C’est une dure maxime, mais il faut que l’assistance ne soit point exempt de honte. C’est un aiguillon au travail, indispensable pour le bien général de la société. Heureusement, il y a encore chez les paysans quelque répugnance à recourir à l’assistance. C’est un sentiment que les lois sur les pauvres tendent à effacer.

Les lois sur les pauvres, telles qu’elles existent en Angleterre, ont contribué à appauvrir la classe du peuple qui ne vit que de son travail. Il est bien probable d’ailleurs qu’elles ont contribué à faire perdre aux pauvres les vertus de l’ordre et de la frugalité, qui se font remarquer d’une manière si honorable dans la classe de ceux qui font quelque petit commerce ou qui dirigent de petites fermes. Les lois sur les pauvres ont été incontestablement établies dans des vues pleines de bienveillance. Mais il est évident qu’elles n’ont point atteint leur but. Pour mettre le pauvre à portée de cette assistance, il a fallu assujettir toute la classe du peuple à un système de règlement vraiment tyrannique. La persécution que les paroisses font éprouver à ceux qu’elles craignent de voir tomber à leur charge, surtout lorsqu’elles se dirigent contre les femmes prêtes à accoucher, sont odieuses et révoltantes. Je suis persuadé que si ces lois n’avaient jamais existé en Angleterre, la somme totale du bonheur eût été plus grande chez le peuple qu’elle ne l’est à présent. Le vice radical de tous les systèmes de cette nature est d’empirer le sort de ceux qui ne sont pas assistés. Le fameux statut de la 43e année d’Élisabeth, qu’on a souvent cité avec admiration, est ainsi conçu : « Les inspecteurs des pauvres, de concert avec les juges de paix, lèveront une taxe sur les habitants de leur paroisse suffisante pour se procurer le lin, le chanvre, la laine, le fil, le fer et les autres articles de manufacture, nécessaires pour donner aux pauvres de l’ouvrage. » Il ne serait pas plus déraisonnable d’ordonner qu’il vienne deux épis de blé partout où jusqu’ici la terre n’en a produit qu’un. On n’insiste point sur la nécessité des efforts constants et bien dirigés pour le bon emploi des capitaux agricoles et commerciaux ; mais on paraît s’attendre à voir ces fonds s’accroître immédiatement à la suite d’un édit du gouvernement abandonné pour exécution à l’ignorance de quelques officiers de paroisse. Rien de plus difficile, rien de moins soumis à la volonté des gouvernements, que l’art de diriger le travail et l’industrie, de manière à obtenir la plus grande quantité de subsistance que la terre puisse produire. Où est l’homme d’État qui osât proposer de prohiber toute nourriture animale, de supprimer l’usage des chevaux, de contraindre le peuple entier à vivre de pommes de terre ? En supposant la possibilité d’une semblable révolution, serait-il convenable de l’opérer ? Surtout si l’on vient à réfléchir que, malgré tous ces règlements forcés, en peu d’années on serait en proie aux besoins auxquels on aurait voulu se soustraire, et avec beaucoup moins de ressources pour y subvenir. Les tentatives qu’on a faites pour employer les pauvres dans de grands établissements de manufactures ont presque toujours échoué. Si quelques paroisses ont pu, par une meilleure administration, persévérer dans ce système, l’effet qui en a résulté a été infailliblement de jeter dans l’inaction plusieurs ouvriers, qui travaillaient dans le même genre sans être à la charge de personne. Soit que les balais sortent de la fabrique des enfants ou de celle de quelques ouvriers indépendants, dit le chevalier Eden, il en s’en vendra jamais plus que le public n’en demande. Pour toutes ces raisons, le règlement de la 43e année d’Élisabeth, envisagé comme une loi permanente, est d’une exécution physiquement impossible. Dire qu’il faudrait fournir de l’ouvrage à tous ceux qui ne demandent qu’à travailler, c’est vraiment dire que les fonds destinés au travail sont infinis ; qu’ils ne sont soumis à aucune variation ; que sans égard aux ressources du pays rapidement ou lentement rétrogrades, le pouvoir de donner de bons salaires à la classe ouvrière doit toujours rester exactement le même. Cette assertion contredit les principes les plus évidents de l’offre et de la demande, et renferme implicitement cette proportion absurde, qu’un territoire limité peut nourrir une population illimitée. Il est inexcusable de promettre sciemment ce qu’il n’est pas possible d’exécuter.

On m’a accusé de proposer une loi pour défendre aux pauvres de se marier. Cela n’est pas vrai. J’ai dit distinctement que si un individu voulait se marier sans avoir une espérance légitime d’être en état d’entretenir sa famille, il devait avoir la plus pleine liberté de le faire ; et toutes les fois que des propositions prohibitives m’ont été suggérées, je les ai toutes fermement réprouvées. Je suis de l’opinion que toute loi positive pour limiter l’âge du mariage serait injuste et immorale. Ce que je propose, c’est l’abolition graduelle des lois sur les pauvres, assez graduelle pour n’affecter aucun individu qui soit actuellement vivant, ou qui doivent naître dans les deux années prochaines. La raison pour laquelle j’ai hasardé une proposition de cette espèce est la ferme conviction où je suis que ces lois ont décidément fait baisser les salaires des classes ouvrières et ont rendu généralement leur condition plus mauvaise qu’elle n’aurait été, si ces lois n’avaient jamais existé.

Malthus en 1803, Essai sur le principe de population (Flammarion 1992, tome 2 p.66 à 86)

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Malthus, obstacle démographique privatif et destructif

Les obstacles à la population qui maintiennent le nombre des individus au niveau de leurs moyens de subsistance, peuvent être rangés sous deux chefs. Les uns agissent en prévenant l’accroissement de la population, et les autres en la détruisant. La somme des premiers compose ce qu’on peut appeler l’obstacle privatif ; celle des seconds, l’obstacle destructif. L’obstacle privatif, en tant qu’il est volontaire, est propre à l’espèce humaine et résulte d’une faculté qui le distingue des animaux ; à savoir, de la capacité de prévoir et d’apprécier des conséquences éloignées. L’homme, en regardant autour de lui, ne peut manquer d’être frappé du spectacle que lui offrent souvent les familles nombreuses ; il éprouve une juste crainte de ne pouvoir faire subsister les enfants qu’il aura à faire naître.

Dans un pays où la population ne peut pas croître indéfiniment, l’obstacle privatif et l’obstacle destructif doivent être en raison inverse l’un de l’autre : c’est-à-dire que dans les pays malsains, l’obstacle privatif aura peu d’influence. Dans ceux au contraire qui jouissent d’une grande salubrité, et où l’obstacle privatif agit avec force, l’obstacle destructif agira faiblement et la mortalité sera très petite. Mais il y a très peu de pays où l’on n’observe pas un constant effort de la population pour croître au-delà des moyens de subsistance. Cet effort tend constamment à plonger dans la détresse les classes inférieures de la société, et s’oppose à toute espèce d’amélioration dans leur état. Supposons un pays où les moyens de subsistance soient suffisant à sa population. L’effort constant qui tend à accroître celle-ci ne manque pas d’accroître le nombre des hommes plus vite que ne peuvent croître les subsistances. Aussitôt le pauvre vivra plus difficilement. Le nombre des ouvriers étant accru dans une proportion plus forte que la quantité d’ouvrage à faire, le prix du travail ne peut manquer de tomber ; et le prix des subsistances haussant en même temps, il arrivera nécessairement que, pour vivre comme il vivait auparavant, l’ouvrier sera contraint de travailler davantage. Pendant cette période de détresse, la population s’arrête et devient stationnaire. En même temps le bas prix du travail encourage les cultivateurs à employer sur la terre une quantité de travail plus grande qu’auparavant ; les agriculteurs défrichent les terres incultes, et s’emploient à fumer et améliorer avec plus de soin celles qui sont en culture ; jusqu’à ce qu’enfin les moyens de subsistance arrivent au point où ils étaient à l’époque qui nous a servi de point de départ. Les mêmes marches rétrogrades et progressives ne manqueront pas de se répéter. Une des principales raisons pour lesquelles on n’a pas beaucoup remarqué ces oscillations, c’est que les historiens ne s’occupent guère que des classes les plus élevées de la société. Nous n’avons pas beaucoup d’ouvrages où la manière de vivre des classes inférieures soient peint avec fidélité. Or, c’est chez ces classes-là que se font sentir les fluctuations dont j’ai parlé.

Les obstacles destructifs qui s’opposent à la population sont d’une nature très variée. Ils renferment toutes les causes qui tendent de quelque manière à abréger la durée naturelle de la vie humaine par le vice ou par le malheur. Ainsi on peut ranger sous ce chef toutes les occupations malsaines, les travaux rudes ou excessifs et qui exposent à l’inclémence des saisons, l’extrême pauvreté, la mauvaise nourriture des enfants, l’insalubrité des grandes villes, toutes les espèces de maladies et d’épidémies, la guerre, la peste, la famine. Pour les obstacles privatifs, l’abstinence du mariage, jointe à la chasteté, est ce que j’appelle contrainte morale.

Malthus, Essai sur le principe de population (Flammarion 1992, tome 1, page 75 à 84)

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Malthus explique le rapport population / nourriture

La nature a répandu d’une main libérale les germes de vie dans les deux règnes, mais elle a été économe de place et d’aliments. Sans cette réserve, en quelques milliers d’années, des millions de monde auraient été fécondées par la Terre seule ; mais une impérieuse nécessité réprime cette population luxuriante ; et l’homme est soumis à sa loi, comme tous les êtres vivants. Pour les plantes et les animaux, le défaut de place et de nourriture détruit ce qui naît au-delà des limites assignées à chaque espèce.

Les effets de cet obstacle sont, pour l’homme, bien plus compliqués. Il se sent arrêté par la voix de la raison, qui lui inspire la crainte d’avoir des enfants aux besoins desquels il ne pourra point pourvoir. Si au contraire l’instinct l’emporte, la population croît plus que les moyens de subsistance. Nous pouvons tenir pour certain que, lorsque la population n’est arrêtée par aucun obstacle, elle va doubler tous les vingt-cinq ans, et croît de période en période selon une progression géométrique. Il est moins aisé de déterminer la mesure de l’accroissement des productions de la terre. Mais du moins nous sommes sûrs que cette mesure est tout à fait différente de celle qui est applicable à l’accroissement de la population. Un nombre de mille millions d’hommes doit doubler en vingt ans par le seul principe de population, tout comme un nombre de mille hommes. Mais on n’obtiendra pas avec la même facilité la nourriture nécessaire pour alimenter l’accroissement du plus grand nombre. L’homme est assujetti à une place limitée. Lorsqu’un arpent a été ajouté à un autre arpent, jusqu’à ce qu’enfin toute la terre fertile soit occupée, l’accroissement de nourriture dépend de l’amélioration des terres déjà mises en valeur. Cette amélioration, par la nature de toute espèce de sol, ne peut faire des progrès toujours croissants ; mais ceux qu’elle fera seront de moins en moins considérables tandis que la population, partout où elle trouve de quoi subsister, ne connaît point de limites, et que ces accroissements deviennent une cause active d’accroissements nouveaux. Nous sommes donc en état de prononcer, en partant de l’état actuel de la terre habitée, que les moyens de subsistance, dans les circonstances les plus favorables à l’industrie, ne peuvent jamais augmenter plus rapidement que selon une progression arithmétique.

La conséquence inévitable de ces deux lois d’accroissement, comparées, est assez frappante. Substituons à la Grande Bretagne la surface entière de la Terre ; et d’abord on remarquera qu’il ne sera plus possible, pour éviter la famine, d’avoir recours à l’émigration. Portons à mille millions d’homme le nombre des habitants actuels de la Terre : la race humaine croîtrait selon les nombres, 1, 2, 4, 8, 16, 32, 64, 128, 256 ; tandis que les subsistances croîtraient comme ceux-ci : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9. Au bout de deux siècles, la population serait aux moyens de subsistance comme 256 est à 9 ; au bout de trois siècles, comme 4 096 et à 13, et après deux mille ans, la différence serait immense et comme incalculable. Le principe de population, de période en période, l’emporte tellement sur le principe productif des subsistances que, pour que la population existante trouve des aliments qui lui soient proportionnés, il faut qu’à chaque instant une loi supérieure fasse obstacle à ses progrès.

Malthus, Essai sur le principe de population (Flammarion 1992, tome 1, page 67 à 74)

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Le tabou de la contraception en France et en Afrique

« Elle veut tuer nos enfants et anéantir la population africaine ! Elle est de mèche avec les Occidentaux ! » Imperméable aux critiques, La Sénégalo-Mauritanienne Fatimata Sy poursuit son objectif : donner aux femmes le droit de choisir « combien d’enfants elles souhaitent avoir et quand ». Elle dirige depuis 2012 le Partenariat de Ouagadougou, un programme de planification familiale lancé en 2011 dans neuf pays d’Afrique francophone pour permettre aux femmes d’accéder aux méthodes modernes de contraception.* « Les maris ont-ils songé que, désormais, c’est la femme qui détiendra le pouvoir absolu d’avoir ou de ne pas avoir d’enfants en absorbant la pilule, même à leur insu ? Les hommes perdront alors la fière conscience de leur virilité féconde et les femmes ne seront plus qu’un objet de volupté stérile. » Ainsi s’exprimait en 1967 le député Jean Coumaros lors de la discussion de la loi Neuwirth autorisant la pilule contraceptive en France**. Les mentalités françaises et africaines peuvent se ressembler étrangement à quelques années près ; féminité et maternité sont trop souvent liées.

Ce n’est pas un hasard si Fatimata Sy milite pour le planning familial. « Chaque Africain connaît au moins une femme dans son entourage qui est morte en couches à cause des grossesses rapprochées. Moi, c’étaient ma tante et ma cousine. »* En 1967 en France, l’avortement clandestin était pratiqué par 300 000 femmes chaque année au prix de quelques morts non désirées. Mais Fatimata Sy ne parle pas d’IVG, seulement de contraception. Le sujet de l’avortement est encore trop brûlant en Afrique. Et l’Interruption Volontaire de Grossesse n’est autorisé légalement en France que depuis 1975. La maîtrise de la fécondité reste encore un gros tabou dans la plupart des pays et des mentalités. La décision prise par Donald Trump de couper le financement du planning familial fait trembler les malthusiens… et le reste d’un monde surpeuplé ! Et si on est partisan de la biodiversité, il en va aussi de la survie de la faune sauvage.

Le rejet de la maîtrise de la fécondité n’est en effet plus de mise quand il s’agit d’abattre un dixième de la population lupine en France. A titre de dérogation au statut de protection de l’espèce, le plafond de loups pouvant être « détruits » a été fixé à 40 pour la période juillet 2017-juin 2018. Il n’y avait pourtant en mai dernier que 360 spécimens en France et une population viable de loups devrait atteindre 500***. Notons que l’espèce humaine a naturellement le même statut dans la chaîne alimentaire que le loup. Ce sont des prédateurs qui dépendent du nombre d’herbivores à leur disposition. Pour un partage équitable des troupeaux de moutons, ces deux populations devraient donc être en nombre équivalent, ce qui est très loin d’être le cas. Ce ne sont pas les éleveurs qui devraient se plaindre de la concurrence des loups, ce sont les loups qui devraient se plaindre du nombre de Français…

* LE MONDE du 21 décembre 2017, Le combat de « Mama Partenariat » pour le planning familial en Afrique

** LE MONDE du 20 décembre 2017, En 1967, la crainte d’une « flambée d’érotisme »

*** LE MONDE du 20 décembre 2017, Plan loup, un exercice d’équilibriste

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La politique de Macron face aux migrants, dur dur

Lundi 18 décembre aura lieu la Journée internationale des migrants. Faut-il « remettre au cœur des choix du gouvernement le respect des droits des migrants et des réfugiés, quel que soit leur statut » comme l´exige des associations ? L´editorial du Monde* est cinglant envers Macron : « Sur le terrain, c’est une politique migratoire très dure qui est en application… Chaque soir, de nouvelles familles se retrouvent enfermées dans des centres de rétention administrative… Quand la brutalité semble l’emporter sur l’humanité, c’est aussi l’honneur de la France qui est en jeu… » Voici quelques commentaires sur lemonde.fr :

Nardo : Je suis en total désaccord avec cet édito. l’immigration dans de telle proportions doit être maîtrisée et contrôlée. Proposer l’ouverture des frontières sans conditions est totalement irresponsable et suscitera le rejet de la majorité des français de tous bords.
CHRISTIAN SCHOLTES : Merci pour cet édito. Macron trahit une partie de ses électeurs qui ont cru en son humanisme. Le masque est tombé.
GEOFFREY BASSET @ C.Scholtes : Comme l’auteure (Maryline Baumard une immigrationniste notoire) de cet édito, vous confondez humanisme et ouverture des frontières à tous les migrants d’une part, et migrants et réfugiés d’autre part ! Macron respecte sa parole en accueillant les réfugiés et en expulsant les migrants économiques qui ne sont pas éligibles au droit d’asile ! On accueille les réfugiés dans le respect des accords de Dublin et les autres sont refoulés !
JosieLaRelou : Si l’humanisme consiste à laisser venir des gens chez nous qui croient y trouver le bonheur alors qu’ils vont en fait dormir sous des ponts ou entassés dans des taudis, en attendant un asile que beaucoup n’obtiendront pas car ils n’en respectent pas les critères, alors c’est un humanisme dont les conséquences sont dramatiques…
bravo Macron! : Depuis qu’ils sont au pouvoir, Macron et ses amis ont pu évaluer l’ampleur du problème, d’autant plus que le processus s’accélère. Déjà, il y a 2 ou 3 ans, la cour des comptes avait signalé le coût important de l’aide aux migrants. Heureusement, en incitant les jeunes africains à rester chez eux et développer leur pays, Macron a une vision plus large que les bonnes âmes qui veulent surtout se donner un image de « chic type », sans voir plus loin.
citoyen : Les bons sentiments dans un éditorial ne coutent rien. Environ 1 milliard d’humains souhaiteraient vivre en Europe ou aux USA et avoir le même niveau de vie. On peut le comprendre mais faut-il faire des ponts aériens pour réaliser ce rêve ? Notre civilisation y survivrait-elle ?. La seule option est hélas celle de Macron: limiter les réfugiés économiques en aidant les pays d’origine sur le plan du développement; contrôler la natalité et se débarrasser de la corruption de leurs dirigeants.
GERONIMO : Merci Macron d’avoir répondu à l’attente de 75% de ses électeurs qui croient en son sens des réalités et qui laisse ainsi à certains la posture, si facile, d’un ‘humanisme pas cher payé et qui ne leur coûte, à eux, finalement pas grand chose.
JOHN DOE : « L’honneur de la France », c’est de donner un toit et une activité aux Français.
Français nanti : Comme dit notre concierge (pas français lui non-plus tandis que moi, c’est depuis Vercongétirix au moins… ): « Les migrants, c’est comme les pigeons: plus on leur donne, plus y viennent. Si j’empêche la Mémée du 5° de jeter des graines, elle m’engueule ; si je balaye pas les crottes, les autres m’engueulent ; si y a des rats qui viennent, c’est la mairie qui m’engueule ; alors, je fais quoi? ». Vous pouvez répondre en portugais, le concierge s’empressera de me traduire (bientôt les étrennes…).
le sondeur toujours plus pâle : Relever la xénophobie de certains lecteurs n’est pas diffamatoire, c’est juste un constat.
* LE MONDE du 17 decembre 2017, Accueil des migrants : l’honneur de la France est en jeu

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Dix milliards de terriens, ce n’est vraiment pas humain

Gilles Boeuf sait qu’on comptait environ 5 millions d’individus sur Terre il y a 12 000 ans. Si on calcule à l’époque la somme de ces humains et de leurs animaux domestiques, cela représente à peu près 0,1 % de l’ensemble de la biomasse que constituent les 5000 espèces de mammifères. Aujourd’hui, c’est 90 % ! Hervé Le Bras  sait qu’aujourd’hui la moitié de la production actuelle de céréales est destinée à des animaux domestiques. Ils savent, selon leurs propres discours* , que la population mondiale atteindra les 10 milliards en 2050, que le changement climatique nous touchera de plein fouet, que les océans s’acidifient, que les pollutions dégradent les écosystèmes, que sans zone humide ni forêt tropicale on court à la catastrophe, que du Sénégal jusqu’au Niger la question de l’alimentation et de l’emploi va se poser très fortement, que les guerres compliquent encore les choses. Mais selon eux le malthusianisme ne s’impose pas, le taux de croissance de la population mondiale diminue et la question démographique sert à déculpabiliser les pays riches de leur pollution. Les internautes réagissent sur lemonde.fr :

ALAIN LE COMTE : On croît rêver (cauchemarder), 10 000 000 000 d’habitants bientôt, ce n’est pas trop ???!!!

Démographie Responsable : Entretien fort étonnant où les deux intervenants listent toute une série de problèmes actuels et de risques futurs liés à la démographie galopante… mais où au final ils tirent comme conclusion qu’il n’y a pas trop à s’inquiéter. Quant à cette pseudo évidence, répétée en boucle, d’une meilleure distribution des richesses, si c’est une excellente chose sur le plan moral, ça ne résoudra en rien la crise écologique bien au contraire, puisque cela fera grimper en flèche la consommation.

Desideriusminimus : Étonnant qu’en dépit de tout bon sens, on persiste à refuser de reconnaître la formule désormais à la mode « en même temps » : urgence d’un changement de mode de vie ET (en même temps) régulation démographique. Le déni fait de la résistance.

Nawak : La pollution des pays du nord est problématique, et doit se régler, mais dire que la démographie sert d’excuse au nord pour culpabiliser le Sud est une ineptie! Le Sud fait tant d’enfants qu’ils sont incapables d’éduquer, de nourrir et d’employer qu’ils les envoient au Nord…. Les enfants à naître au Sud vont vouloir consommer et polluer comme au Nord. La solution doit venir de – de pollution au nord et – d’enfants au sud.

CYNIQUE DU BON SENS ET RAISON : Malthus va émerger dans la première partie de ce XXIe siècle comme le visionnaire de notre pauvre humanité terrestre : notre hubris ayant tout accéléré, en quelques décennies, la planète a été ravagée de manière irréversible. Les sots (notre Jupiter en tête) ambitionnent toujours plus de croissance quantitative dans tous les domaines : ce sont les externalités négatives qui croissent exponentiellement… la chute sera tragique !

Malthus : Pourquoi exclure sans discussion que l’État puisse légitimement réguler la natalité ? La Chine l’a fait, d’autres approches seraient possibles. Discutons en, plutôt que de rejeter ces solutions à priori. Serait-ce un tabou religieux ?

le sceptique : Tabou religieux pour certains, mais pour d’autres dont je suis, il y a simplement la question des droits de l’homme, ce point de détail de notre modernité. Que l’on en arrive à citer en exemple l’intrusion dans la vie privée par des régimes totalitaires indique combien les questions écologiques embrument certains esprits. Après, les Etats ont d’autres outils que le contrôle de la chambre à coucher des citoyens : éduquer, diffuser la contraception, supprimer les allocations familiales.

CYNIQUE DU BON SENS ET RAISON : Les droits de l’homme ? L’égoïsme est-il un « droit de l’homme » ?

Richard Revest : Malthus! Les anciens l’avaient oublié. Les jeunes ne le connaissent pas. Mais les archivistes du petit monde ont ressorti sa fiche. Malthus le maudit, celui qui avait dit qu’il n’y en aurait pas pour tout le monde. Celui qui avait vu la réalité.

TIKATSOU : Toujours le même discours d’Hervé Le Bras, Tout va très bien Mme la marquise ! L’Afrique subsaharienne, 1 milliard aujourd’hui, 2 en 2050, 4 en 2100 ! Allez convaincre ces gens qu’il faudra adopter un avenir frugal et non le mode de vie occidental dont ils rêvent ! Remettre en cause ce mode de vie occidental ? Messieurs d’en haut, des beaux quartiers parisiens, commencez, donnez l’exemple au peuple ! Abandonnez voyages en avion, restaurants et hôtels de luxe, résidences secondaires en Corse etc.

cedric : C’est une blague cet article. La population et les animaux domestiques représentent maintenant 90% de la biomasse et ce n’est pas un problème pour ces deux messieurs ?! Bien sûr qu’il faut réduire notre natalité ! Moins on sera nombreux moins on polluera – moins notre empreinte sur la planète sera forte. Il vaut mieux vivre bien avec 4 milliards d’habitants que manger du riz et des insectes sans pouvoir acheter un steak en étant une dizaine de milliards d’habitants !!

Pourquoi de si piètres intellectuels en France : La question mérite d’être posé. Un militantisme confondant ? Une spécialisation outrancière ? On pourrait parler d’ignorance faute de mise en perspective, des réponses rigides ouvrant sur le néant et rien sur les autres spécialités (économie, anthropologie, agronomie et j’en passe et des meilleures). Ah peut-être aussi la médiatisation et le mandarinat qui ôtent toute retenue critique.

* LE MONDE idées du 8 décembre 2017, 10 milliards d’humains, et alors ?

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Décroissance, ne pas nier la différence des sexes

Lu, dans le mensuel la Décroissance*, ces trois points de vue sur la sexualité. En résumé :

Nathalie Heinich : La différence n’est pas la discrimination. Vouloir traiter toute différence entre les sexes est l’équivalent de ne pas vouloir faire de différence entre des pommes de terre et des carottes au motif que reconnaître ces différences aboutirait à faire une hiérarchie entre elles. Cela fait partie d’une certaine dérive du féminisme. Dans cette volonté de vouloir modifier les réalités biologiques, par exemple les conditions physiologiques de la procréation, se niche une forme de volonté de toute-puissance. Les enfants-rois devenus des adultes réclament la même toute-puissance au niveau de la procréation que celle qu’ils ont pu obtenir dans leur enfance au niveau de la satisfaction de leurs plaisirs immédiats. Le problème est que l’État tend à leur donner satisfaction, et notamment de toute-puissance d’un parent unique sur un enfant potentiel. Si vous faites un enfant à deux, votre puissance sur l’enfant est nécessairement limitée par l’autre parent. Le fait que notre monde biologique, imaginaire et symbolique repose sur une catégorisation en deux sexes est constitutif de notre rapport au monde, et c’est aussi la garantie d’une certaine limitation du fantasme de toute-puissance. C’est pourquoi la différence des sexes est, à mes yeux, une valeur qu’il faut défendre, en tout cas en matière de filiation.

Jean-Pierre Winter : Ce qui est irréductible, c’est que l’homme c’est génétiquement XY, la femme XX, et que ça a des conséquences, c’est-à-dire qu’il y a un réel qu’on ne peut pas nier. Dans la différence des sexes est la loi réelle, c’est-à-dire biologique, mais aussi fantasmée. Le mouvement constant à nier les sexes aboutit aujourd’hui à ceci : tout se passe comme si l’inconscient passait dans la loi, comme si le fantasme faisait la loi. Nous sommes tous pris dans les fantasmes des personnes qui nous ont élevés, mais est-ce que le fantasme de l’autre doit s’instaurer comme loi au détriment de la réalité à la fois symbolique et biologique ?

Tülay Umay : Un sexe peut-il exister sans l’autre ? Les différentes réformes installant « le mariage pour tous », la légalisation de la PMA (procréation médicalement assistée) et, dans d’autres pays, celle de la GPA (gestation pour autrui), répondent par l’affirmative. Pour ces différentes législations, le Réel de la différence des sexes est dénié. La volonté individuelle suffit pour assurer la reproduction. Le désir laisse la place à une pure volonté qui se passe du corps. La procréation est séparée de la relation sexuelle. La femme, ainsi « libérée », s’aliène dans la machine médicale qui lui garantit son « autonomie », c’est-à-dire la négation de l’autre sexe. La place du désir, du manque de l’autre, est renversée par la volonté de jouissance. La conséquence en est l’impossibilité de construire un « nous ».

* La Décroissance n° 145, décembre 2017 – janvier 2018

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Malthus, un membre de l’Académie pontificale pour la vie

Le pape François a transformé la mission de l’Académie pontificale « pour la vie »*, mais s’arrête en chemin. Traditionnellement chargée d’étudier les répercussions des progrès des techniques médicales et des nouvelles législations « concernant la promotion et la défense de la vie », cet organisme n’aura plus comme principale fonction de donner des leçons de morale reproductive. Pour le pape François, « La vie » ne se résume pas à « quelques sujets liés au début de la vie ». Les questions de la peine de mort, des migrations, des ventes d’armes vont trouver leur place au programme de cette Académie pour la vie. Il faudra s’interroger sérieusement sur ce que veut dire “pro-life” !

Mais il faudra toujours partager les « fondamentaux » de la conception de la vie faite par le catholicisme. Cela ferme la porte à toute orientation malthusienne (basée sur le choix volontaire pour réduire sa propre fécondité), et encore plus néo-malthusienne (autorisation collective de la contraception et de l’avortement). Le pape François, dans son encyclique Laudato’ Si de 2015, reste profondément nataliste : « Il faut reconnaître que la croissance démographique est pleinement compatible avec un développement intégral et solidaire. Accuser l’augmentation de la population et non le consumérisme extrême et sélectif de certains est une façon de ne pas affronter les problèmes…  » Lors de son retour des Philippines le 19 janvier 2015, le pape François dénonçait le « néo-malthusianisme en cours », redisait son opposition au contrôle « artificiel » des naissances et maintenait son opposition au préservatif et à l’avortement…

Voyons comment le clergyman Malthus (1766-1834) aurait interrogé « les Écritures » s’il devenait membre de cette Académie « pour la vie » : « La première grande objection est que mes principes (maîtriser la fécondité humaine) contredisent le commandement du Créateur, ordre de croître, de multiplier et de peupler la terre. Je suis pleinement persuadé que c’est le devoir de l’homme d’obéir à son Créateur, mais ce commandement est subordonné aux lois de la nature dont il est l’auteur. Si, par une opération miraculeuse, l’homme pouvait vivre sans nourriture, nul doute que la terre ne fût très rapidement peuplée. Mais comme nous n’avons aucune raison de compter sur un tel miracle, nous devons, en qualité de  créatures raisonnables, examiner quelles sont les lois que notre Créateur a établies relativement à la multiplication de l’espèce. Si nous prétendons obéir au Créateur en augmentant la population sans aucun moyen de la nourrir, nous agissons comme un cultivateur qui répandrait son grain dans les haies et dans tous les lieux où il sait qu’il ne peut pas croître. Il n’y a aucun chiffre absolu : garnir une ferme de bestiaux, c’est agir selon la grandeur de la ferme et selon la richesse du sol qui comportent chacune un certain nombre de bêtes. Le fermier doit désirer que ce nombre absolu croisse. C’est vers ce but qu’il doit diriger tous ses efforts. Mais c’est une entreprise vaine de prétendre augmenter le nombre de leurs bestiaux, avant d’avoir mis les terres en état de les nourrir. Je crois que l’intention du Créateur est que la terre se peuple ; mais qu’il veut qu’elle se peuple d’une race saine, vertueuse et heureuse ; non d’une race souffrante, vicieuse et misérable. » Le pape François serait horrifié par ce discours du pasteur Malthus.

* LE MONDE du 2 décembre 2017, Le Vatican élargit le sens de la vie

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