démographie

Et si Malthus finissait par avoir raison ?

Thèse :

1) Un écologiste se doit de traiter l’enjeu démographique. Avant même d’être le choix d’un couple, le nombre d’enfant a des conséquences collectives si importantes qu’il faut en délibérer démocratiquement.

2) La façon de consommer des populations a certes des répercussions néfastes sur l’environnement, mais le nombre d’hommes et de femmes présents sur la planète fait problème. La question démographique est aussi importante que le mode de vie des Américains qui, s’il était généralisé, nécessiterait plusieurs planètes. Par exemple le Bangladesh, hormis les très petits pays tels que Singapour, est le pays le plus densément peuplé au monde. Il n’y avait que 42 millions d’habitants en 1951, il y en a plus de 150 millions aujourd’hui : la situation est ingérable.

3) Le rythme auquel s’est accru la population mondiale au cours des cinquante dernières années est préoccupant. Le nombre d’êtres humains a plus que doublé en quarante ans, la baisse de la mortalité infantile ayant été associée à des taux de natalité encore élevés : il n’y a pas transition démographique pour de nombreux pays. Le nombre des femmes en âge d’avoir des enfants demeure supérieur à ce qu’il était pour la génération précédente. D’où un nombre absolu de naissances qui demeure très élevé.

Antithèse : Avec le texte ci-dessus, nous nous opposons point par point au chapitre « Démographie » du petit livre « L’économie verte en trente questions »* :

1) Les écologistes n’assument pas toujours de traiter de l’enjeu démographique. Pour des raisons de respect des libertés individuelles : la décision d’avoir ou non des enfants est d’abord une affaire personnelle, même si les décisions prises par les femmes et les hommes à ce sujet ont des conséquences collectives.

2) Mais une autre raison peut conduire à considérer la question démographique comme secondaire. Ce  ne serait pas tant le nombre d’hommes et de femmes présents sur la planète qui ferait problème, mais la façon dont consomment les plus riches d’entre eux. Ainsi, si un pays peut être considéré comme surpeuplé aujourd’hui, ce n’est pas le Bangladesh, mais les Etats-Unis d’Amérique, au vu du mode de vie des habitants de ces deux pays

3) Pour autant, le fait que la croissance de la population mondiale ralentisse est tout de même une excellente nouvelle, au vu de la pression sur les ressources qu’imposera dans tous les cas la satisfaction des neuf milliards d’habitants que la Terre comptera en 2050.

Synthèse : Ce hors-série d’Alternatives économiques se termine par des considérations avec lesquelles nous ne pouvons qu’être d’accord : « Le mouvement de baisse de la fécondité sera d’autant plus rapide qu’on parviendra à élever les niveaux de vie, à étendre les systèmes de protection sociale – et notamment l’éducation des filles – et à mettre à déposition de tous les moyens contraceptifs permettant d’éviter les grossesses non désirées. »

Le problème, c’est que les négociations internationales ont toujours échoué à traiter de front la question démographique, croyant que le « développement » suffirait à faire baisser la fécondité. La vulgate anti-malthusienne aura fait beaucoup de mal, contribuant à l’explosion démographique actuelle : 1 milliard d’habitants s’ajoute en moyenne tous les douze ans depuis quarante ans sur une planète dont les ressources se raréfient. Comme le dit ce hors-série, « Crise écologique, crise économique, crise sociale, il faut changer de cap ». Le malthusianisme, c’est-à-dire une politique volontariste de maîtrise de la fécondité, est une nécessité. Vous pouvez adhérer à l’association « Démographie responsable »

* Hors-série poche n° 61 (Alternatives économiques, mars 2013)

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L’échec de la politique démographique indienne

Qu’est-ce qui se cache derrière le titre du MONDE « l’Inde est en passe de gagner la bataille démographique » ? Ce n’est pas parce que la population de l’Inde va dépasser celle de la Chine d’ici à 2030 que l’Inde s’ouvre des perspectives d’avenir !

D’abord l’article de Julien Bouissou fait preuve d’un anti-malthusianisme non fondé : « Contrairement aux prévisions malthusiennes pessimistes, l’augmentation de la population indienne ne débouchera pas nécessairement sur des famines ou sur un désastre économique et social. » Admirons l’astuce, « pas nécessairement ». S’il y a des millions de morts de faim, l’article aura quand même raison ! Donnons à l’auteur de cette figure de style quelques raisons de devenir malthusien. Le quintuplement de la population indienne entre 1901 et 2010, passant de 240 millions à 1,2 milliard d’habitants, a inévitablement créé des conditions nouvelles en termes d’environnement et de développement. Si la révolution verte a permis d’accroître fortement la production agricole, les coûts écologiques et économiques des pratiques mises en place ne peuvent être ignorés : biodiversité mise à mal, usage intensif d’engrais et pollution, recours aux pesticides, développement de l’irrigation et assèchement des rivières, mécanisation qui encourage l’endettement, vulnérabilité financière des paysans. L’Inde est confrontée à une dégradation des terres à grande échelle liée autant à l’intensification des cultures qu’à la fragilité naturelle des sols. La très forte progression de la densité de la population en Inde (77 habitants au kilomètre carré en 1901, 382 aujourd’hui) explique aussi les difficultés alimentaires. L’article de Bouissou reconnaît d’ailleurs que « un enfant sur deux souffre de malnutrition ».

L’article s’appuie ensuite sur le « dividende démographique », lié au rapport favorable actifs/personnes à charge dans une population jeune. Encore faut-il que les actifs ne se retrouvent pas chômeurs. C’est ce que l’article reconnaît, « des millions d’emplois devront être créés pour absorber le surplus de main d’œuvre ». Comment ? Développer l’industrie ? Investir dans les infrastructures ?? Le mahatma Gandhi préférait à juste raison l’artisanat dans un pays qui a déjà trop de bras et la relocalisation des activités contre la mondialisation des échanges.

Pour le reste, Julien Bouissou énonce toutes les batailles démographiques que l’Inde est en train de perdre : difficultés en matière de santé publique, absentéisme scolaire, déséquilibre à la naissance entre filles et garçons. Un titre racoleur fait donc un mauvais titre quand le contenu de l’article dit l’inverse. L’Inde ferait mieux de suivre l’exemple chinois d’un enfant par famille… et LE MONDE devrait progresser en matière d’analyse démographique.

* LE MONDE du 2 avril 2013, l’Inde est en passe de gagner la bataille démographique  (Julien Bouissou)

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la politique démographique chinoise ne doit pas changer

En Une du MONDE, d’après le titre racoleur, il semblerait que « la Chine veut revenir sur la politique de l’enfant unique ». Mais ce n’est pas parce que la Commission de la planification familiale va fusionner avec le ministère de la santé que le gouvernement chinois va changer de politique démographique.

Quels sont alors les arguments de fond du journaliste Brice Pedroletti* ? Il paraît que les « démographes chinois » (sans plus de précisions) réclament un assouplissement de la planification familiale au motif que « le taux de fertilité est passé bien en dessous du seuil de renouvellement de la population ». Comme si la population chinoise, de 1,253 milliard en 2012, était un idéal à conserver. Rappelons qu’une population doit toujours être mis en rapport avec la capacité de charge d’un pays, c’est-à-dire les possibilités pour les écosystèmes de pourvoir à l’entretien durable des habitants. Or, si on prend les autres titres sur lemonde.fr ce jour, on s’aperçoit que la Chine est déjà gravement polluée par sa production d’engrais ou que la pollution des rivières chinoises est un fléau. De plus le problème démographique chinois n’est pas seulement le nombre de personnes. L’article de Pedroletti rappelle que la priorité des dirigeants chinois est d’élever le produit intérieur brut (PIB) par habitant. Or la Chine est confrontée à un véritable dilemme. Si la population chinoise augmente moins vite en raison de la politique de l’enfant unique, mais que chaque Chinois change de mode de vie pour se  caler sur celui d’un Européen moyen, il est à prévoir que la pression environnementale ne diminuera pas !

Brice Pedroletti ne témoigne donc d’aucune profondeur dans son raisonnement. Pire, il commet dans un second article** le défaut journalistique courant de chercher le scandale. Le titre parle de lui-même : « Stérilisations forcées, séquestrations et tortures ». Il paraît qu’en Chine sévit une « armée d’avorteurs en marge de la légalité ». Mais quand on lit l’article, il n’est plus question de ce qu’annonçait le titre. Le contenu ne repose que sur des cas particuliers : principalement celui de Gao Liguo qui a voulu cacher aux autorités la grossesse de sa femme et Yang Zhizhu qui a été suspendu de son poste d’enseignant après la naissance de sa seconde fille. C’est vraiment insuffisant pour étayer cette conclusion de l’article : « une politique de planification familiale honnie par la population. »

Nous attendons mieux d’un journaliste écrivant dans un quotidien qui était dit jusqu’à maintenant « de référence ».

* LE MONDE du 2 avril 2013, La chine revient sur le dogme de l’enfant unique (Brice Pedroletti)

** LE MONDE du 2 avril 2013, Stérilisation forcées, séquestrations et tortures (Brice Pedroletti)

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une politique familiale sans allocations familiales ?

Le socialiste Didier Migaud suggère d’intégrer les allocations familiales dans le calcul de l’impôt sur le revenu. Thibault Gajdos répond* : « Au lieu de débattre des objectifs de la politique familiale, on ratiocine sur ses modalités… Cette « politique familiale » tant vantée, dont le quotient familial est l’inébranlable totem et les allocations familiales l’indépassable tabou, est clairement et fortement nataliste… Mais une natalité forte est-elle souhaitable ? Historiquement, une population nombreuse était un facteur puissant de domination. Ces temps sont évidemment révolus… Un second argument est souvent invoqué : une forte natalité serait un facteur de croissance économique. Le problème est qu’aucune théorie ni aucune donnée ne permettent de défendre ce point de vue. Bien au contraire… Ce n’est pas tant le nombre de bras qui importe que la qualité des cerveaux. Or, plus le taux de natalité est élevé, plus l’investissement dans l’éducation par enfant, et donc la croissance, sont faibles… Une autre politique familiale est possible. Celle qui vise, non pas à poursuivre des objectifs natalistes, mais à améliorer le bien-être et l’éducation des enfants en donnant la priorité aux plus pauvres. »

Si les propos de Thibault Gajdos sont clairement croissanciste (« Une telle politique favorise la croissance »), ils n’en restent pas moins carrément malthusiens. Ils rejoignent ainsi les préoccupations du MEI (Mouvement des écologistes indépendants) qui vient de se prononcer pour une réorientation des allocations familiales. Voici en résumé leurs positions : « La poursuite d’une politique volontariste en faveur de la natalité peut être mise en cause du triple point de vue écologique, moral et économique. Écologique d’abord, car la planète ne supporte plus nos effectifs… Problème moral ensuite, les allocations familiales sont d’abord des prélèvements qui touchent ceux qui, par leur relative retenue démographique se comportent de la façon la plus responsable et la plus écologique… Économique enfin, car quelle est la logique de ce soutien inconditionnel à la natalité ? On nous dit souvent qu’il faut préserver l’avenir. C’est une triste plaisanterie… Peut-on sérieusement compter sur une société qui, pour notamment financer les retraites, exigerait que chaque génération soit plus nombreuse que la précédente ? … On ne financera pas les retraites avec les chômeurs… »

Le MEI propose une allocation de 100 euros dès le premier enfant (au lieu de 0 actuellement) et de garder le même montant quel que soit le nombre d’enfants. Nous pensons de notre côté que l’Etat n’a pas à intervenir financièrement dans le  choix du nombre d’enfants par les familles : il ne donne rien. Par contre la formation des enfants (et des parents) doit porter aussi sur la capacité de charge de la planète : à chacun d’en tirer les conséquences et d’assumer ses propres choix.

* LE MONDE économie du 12 mars 2013, Et si l’on repensait vraiment la politique familiale ?

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Un technologue face à la procréation médicale assistée

Sur ce blog, nous nous interrogeons aux événements en tant qu’ils relèvent de la nature et de l’écologie. Or toutes nos activités humaines utilisent une quantité plus ou moins grande de ressources terrestres. Par exemple le sommeil et la méditation sont les activités les plus sobres qu’on puisse pratiquer, et donc les plus écologiques. On peut alors classer les techniques selon leur intensité croissante en ressources mesurées en termes d’énergie. C’est une première méthode. Rester au plus simple dans notre demande d’énergie exosomatique, c’est alléger notre trace sur la planète. Médicaliser la procréation nécessite des spécialistes alors que la fonction de reproduction n’a pas normalement besoin de porteur de chandelles.

Deuxième méthode d’appréciation d’une technique, la validité sociale de la division sociale du travail qui rend les choses plus complexes et exige donc toujours plus de prélèvements sur la nature. Il faut savoir choisir. C’est la question « faut-il utiliser des ressources naturelles ici plutôt que là », sachant que dans un système clos comme le nôtre, ce qui est utilisé pour une application technique ne peut plus l’être pour agir ailleurs. La PMA est une technique sophistiquée, connaissant beaucoup d’échecs et possible financièrement seulement dans un pays riche (ou pour les riches des pays pauvres). Il faut lire René Frydman (le « père » d’Amandine, premier bébé-éprouvette français en 1982) qui demandait encore récemment dans une tribune du MONDE toujours plus d’argent pour la PMA. (11.01.2013, Un plan pour la procréation médicalement assistée). La société de croissance nous a trop habitués à dépendre de techno-organisations complexes et à y voir les conditions du progrès alors qu’il faudrait économiser les ressources. De quel type de médecine avons-nous réellement besoin ? C’est une question fondamentale qu’on doit socialement se poser.

On peut aborder aussi une troisième dimension, l’équilibre nécessaire entre une population et son écosystème. Médicaliser la procréation, c’est vouloir pallier à une insuffisance naturelle, la stérilité. Or la démesure de notre empreinte écologique humaine, qui dépasse déjà la capacité de charge de la biosphère, devrait nous inciter à accepter une stérilité, qu’elle soit masculine ou féminine, naturelle ou forcée (couple homosexuel). C’est en ce sens que la  PMA devrait être rejetée dans les pays riches. Pas pour des raisons morales ou religieuses, mais parce que la planète est déjà surpeuplée. Les personnes en capacité de procréer ont mille raisons de ne pas faire d’enfants. Il ne faut donc pas considérer socialement le fait de ne pas avoir d’enfant comme une damnation, mais comme une juste limitation par la nature de notre pouvoir de désirer. Nos citoyens devraient se rendre compte que faire des enfants à n’importe quel prix dans un monde surpeuplé n’est pas un signe de liberté, mais une soumission à la vision traditionnelle qui fait de l’enfant à naître un épanouissement de soi. Pour Simone de Beauvoir, la femme n’est pas vouée à la fécondation et certaines féministes aujourd’hui choisissent la nulliparité même quand elles sont fécondes. Avoir un enfant même si on ne peut pas est-il vraiment un droit quand toute naissance supplémentaire aujourd’hui, particulièrement dans un pays riche, consume la planète en surconsommant ? Nous devrions au contraire assumer politiquement un choix raisonné en limitant le nombre des naissances. Ne pas avoir d’enfant n’est pas plus douloureux et insupportable que ne pas être un séducteur ou un savant, ou un artiste de génie.

Enfin la PMA interfère avec la sélection naturelle. Pour un couple hétérosexuel, la PMA peut avoir des conséquences négatives sur les descendants, par exemple en termes de cancer : on a forcé la nature, notre génétique n’est plus adaptée. Quand il s’agit d’une relation homosexuelle, la PMA pour lesbiennes est un moyen de nier les lois de l’évolution en refusant l’altérité des sexes et donc les mécanismes de l’évolution. Le sexe n’est autre que la production par un organisme de nouvelles versions de lui-même dans lesquelles les gènes disponibles sont redistribués. En permettant au matériau génétique de se recombiner librement, le sexe offre à la sélection naturelle beaucoup plus de variantes que si les organismes continuaient à se reproduire sans lui (les bactéries). S’il faut se mettre à deux pour faire un troisième, c’est justement pour que ce dernier ne soit identique à aucun des premiers. Ce sont les variantes génétiques de la reproduction sexuée qui ont permis la formidable diversité des espèces animales et végétales qui nous entourent aujourd’hui. Alors, pourquoi refuser dans la formation d’un couple la différence sexuée ? Est-ce un problème d’identification à son propre sexe pendant la socialisation primaire ? Est-ce un ostracisme envers le deuxième sexe ? La société peut-elle traiter à égalité des situations inégales et des cas particuliers ?

En définitive, vouloir contourner la sélection naturelle qui a donné la fécondité aux uns et la stérilité à d’autres relève d’une volonté de toute puissance de l’homme, l’hubris, liberté de faire tout et n’importe quoi au nom du « désir individuel » pour le plus grand profit du système capitaliste libéral et de ses spécialistes. En toutes choses, il faut savoir raison garder, c’est-à-dire respecter les limites de la planète. Que les citoyens pratiquent une société moins complexe, plus conviviale parce que plus simple, plus centrée sur nos propres capacités physiques, limitant notre trace sur la planète… à notre avis nous nous en porterons tous mieux.

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Pierre Rabhi, un anti-malthusien en parole et en acte

Pierre Rabhi est une personnalité admirable. Auteurs de nombreux livres, praticien de l’agroécologie, candidaté aux présidentielles de 2002, sa parole est sage et ses actions écologiquement valables… sauf en matière démographique. Il écrit : « Les arguments démographiques que les repus exhibent sans cesse pour justifier l’inanition des pauvres, sont fallacieux et ne résistent pas à un examen attentif. Accuser le million de ventres vides d’être responsables du fléau dont ils sont victimes relèvent du cynisme que la raison et le cœur ne peuvent que récuser. Pour contribuer à réduire ou à supprimer ce terrible fléau, l’agroécologie est souveraine. »*

Nous reconnaissons là le bréviaire des anti-malthusiens : les riches n’ont rien à reprocher à la fécondité des pauvres, notre humanisme à nous est le plus grand, les performances agricoles sont LA solution à la famine.  Sauf que sur la planète, il n’y a pas un million, mais un milliard de ventres vides, sauf que les enfants des riches sont aussi trop nombreux, sauf que l’agriculture industrielle n’arrive pas à nourrir le monde et que l’agroécologie ne ferait pas mieux. Pierre pense qu’en améliorant la fertilité (des sols), « j’augmente la capacité de la terre à nourrir un nombre croissant de personnes sur une surface donnée** ». Sans s’en rendre compte, Pierre définit ainsi la course sans fin qu’il y a entre amélioration des méthodes agricoles et explosion démographique. Il ne se pose pas la question d’une capacité de charge limite de la biosphère à supporter les humains. Il ne semble pas connaître la loi des rendements décroissants en agriculture, loi absolue quelle que soit la méthode d’exploitation des sols utilisée. Il dit : « La démographie n’est qu’un prétexte, pas une cause. Ce ne sont pas les nombreux affamés qui épuisent les ressources.*** » Cette phrase ne serait juste que s’il ajoutait « seulement ». En effet, ce sont à la fois les riches et les pauvres qui épuisent les ressources. Et l’état de pénurie absolue fait en sorte que les pauvres en arrivent même à manger les semences qui devraient servir pour l’année suivante et à détériorer durablement leur écosystème proche. Pierre pense encore que l’émigration est une solution : « Les êtres humains se sont spontanément réunis en clans et en tribus, mais au-delà d’un certain nombre, lorsqu’ils n’étaient plus à même de se nourrir sur un territoire, ils essaimaient pour survivre*** . » Il devrait se rendre compte que sur une planète close et saturée d’hommes, la fin des migrations est proche. D’ailleurs il reconnaît que les humains sont heureux jusqu’à une certaine densité ; quand elle devient excessive, ils sombrent dans l’anonymat des cités…, « La ville est incompatible avec la nature de l’humain.*** » Or l’urbanisation résulte pour une grande partie de la paupérisation des paysans qui n’arrivent plus à vivre de leurs terres, même si elles sont cultivées en agroécologie.

Pierre Rabhi avec sa femme Michèle a fait cinq enfants. Si tous les couples faisaient comme eux, cela correspondrait à une multiplication par deux de la population mondiale tous les 40 ans environ. Nous sommes 7 milliards, en 2100 nous serions plus de 28 milliards. Pierre devrait étudier les évolutions exponentielles et leur course folle. Pierre devrait étudier Malthus, la progression arithmétique de la production alimentaire et la progression géométrique de la population humaine.

* Kaizen, hors série n° 1, janvier 2013 : « Il était une fois, Pierre Rabhi » p.121

** Kaizen p.33

*** Kaizen p.12

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le mariage légal entre femmes, ce n’est pas nouveau

Dans certaines ethnies africaines, il existait un mariage légal entre femmes. C’est le cas des Nuer soudanais chez lesquels la fille stérile est considérée comme un homme de son lignage d’origine. C’est pourquoi elle perçoit une part des dots et, avec ce capital, elle peut à son tour acquitter le prix de la fiancée pour une jeune fille qu’elle épouse légalement. Elle lui choisit, pour engendrer des enfants, un homme pauvre qui gardera le statut de serviteur. Les enfants tiendront pour « père » la femme stérile. Cette histoire, rapportée par Françoise Héritier, montre que le statut de femme stérile engendre socialement des arrangements pour procurer quand même un enfant et remédier ainsi à un « défaut » de la nature. Il s’agit donc d’une société nataliste pour laquelle l’absence d’enfant est une tare. Les Nuers en arrivent même à procurer un enfant à un mort sans descendance.

Ces méthodes paraissent écologiquement valables, elles n’ont pas de coût en énergie extra-corporelle. C’est bien mieux que la procréation médicale assistée (PMA) et infiniment mieux que l’ectogénèse avec utérus artificiel : toute technicisation utilise des ressources en spécialistes et en ressources. Mais l’écologie est un vaste ensemble qui amène à d’autres considérations. Toute naissance supplémentaire aujourd’hui, particulièrement dans un pays riche qui consume la planète en surconsommant (ah, le poids écologique des couches des bébés !) devrait correspondre à un choix raisonné, limitant le nombre de naissance. La stérilité est donc une bonne chose, les personnes en capacité de procréer ont d’ailleurs mille raisons de ne pas faire d’enfants. La démesure de notre empreinte écologique humaine, qui dépasse déjà la capacité de charge de la biosphère, nous incite à accepter une stérilité, qu’elle soit masculine ou féminine, naturelle ou forcée (couple homosexuel). C’est en ce sens que la  PMA ou la GPA (gestation pour autrui) devraient être rejeté dans les pays riches. Pas pour des raisons morales, mais parce que la planète est déjà surpeuplée. Il ne faut pas considérer socialement le fait de ne pas avoir d’enfant comme une damnation, mais comme une juste limitation par la nature de notre pouvoir de désirer.

Nos citoyens devraient se rendre compte que faire des enfants à n’importe quel prix dans un monde surpeuplé n’est pas un signe de liberté, mais une soumission à la tradition qui fait de l’enfant à naître un épanouissement de soi. D’autre part vouloir contourner la sélection naturelle qui a donné la fécondité aux uns et la stérilité aux autres relève d’une volonté de toute puissance de l’homme, l’hubris, liberté de faire tout et n’importe quoi pour le plus grand profit du système capitaliste libéral et de ses spécialistes. Soulignons enfin que la rigueur morale ne peut reposer sur le fait que d’autres pays (ou d’autres personnes) ont mis en place des systèmes qui mettent à mal la filiation.

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pour une politique de l’enfant unique en France

Cocorico : la France est vice-championne d’Europe de fécondité (Le Monde.fr, 15.01.2013). Bientôt 100 millions d’habitants comme le voulaient à une époque ces principes qui nous gouvernent ? Non car avec 2,01 enfants par femme, nous sommes un peu au dessous de ce qu’il est nécessaire pour assurer durablement le renouvellement des générations (2,1). Car « un pic de mortalité a freiné la démographie française en 2012 (LE MONDE du 16 janvier 2013) : canicule, vague de froid exceptionnelle, épidémie de grippe hiver particulièrement rigoureux, gastro-entérite, surmortalité… le réchauffement climatique et les errements du thermomètre ont encore frappé.

Il n’empêche, la journaliste Gaëlle Dupont nous rassure : La France arrive seconde parmi les pays de l’Union, derrière l’Irlande (2,05 enfants par femme). La population française a augmenté de 0,47 % en 2012 et on arrive presque à 66 millions de personnes. Rapprochons ces chiffres de la montée structurelle du chômage, de la disparition inéluctables des ressources fossiles, du fait que le niveau de vie français nécessiterait plusieurs planètes pour être généralisé. Alors l’indicateur de fécondité espagnol, tombé à 1,3 enfant par femme, nous semble un modèle à suivre. Bientôt le modèle chinois d’un enfant par couple serait même l’objectif  à atteindre en France… si les médias ne glorifiaient pas la forte fécondité… si nos gouvernants n’assuraient plus de primes aux famille nombreuses… si nous étions enfin raisonnable…

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l’enfant unique, une chance pour l’homme et la planète

La politique de l’enfant unique a rendu les Chinois « pessimistes et moins compétitifs ». Un tel titre du MONDE* fait frémir, tant de contre-sens en une seule phrase ! L’étude citée, faite par des chercheurs « spécialisés dans l’économie du développement » ne montre que ce qu’elle veut montrer. Car ce n’est vraiment pas une tare, à part pour les allergiques à toute réflexion, d’être moins compétitif dans un système où les nations s’entre-tuent sur les marchés du libre-échange… et d’être pessimiste face à une économie chinoise croissanciste, prédatrice, polluante et pour tout dire, désespérante. Cette étude s’appuie sur les délires de Gary Becker pour qui tous les problèmes sont résolus en terme de marché. Ces « chercheurs » sont en fait spécialisés dans le libéralisme économique : goût du risque, statut d’auto-entrepreneur, métiers de la finance. Cette étude considère que si on tourne le dos aux fondamentaux du libéralisme économique, c’est à cause de la politique de l’enfant unique. On ne voit pas trop le lien !

Encore un fois il s’agit au fond d’attaquer le « strict contrôle » des naissances chinoises au travers d’une « étude » biaisée. On conteste aussi, argument médiocre, le déséquilibre homme/femme à la naissance (avortement sélectif, préférence envers les mâles). Mais cette psychologie peut être changée dans un pays où Mao avait loué la femme, la moitié du ciel. Il est encore plus douteux de développer tout un paragraphe sur le cas particulier d’une mère forcée à avorter, faits-divers qui remonte à juin 2012 et déjà utilisé par LE MONDE en novembre dernier. La politique d’un pays de 1 340 000 000 habitants ne peut résulter d’un simple faits-divers et des réactions sur Internet. Combien de femmes dans le monde meurent en couches à la suite de grossesses multiples ? Qui réagit à cela sur Internet ?

Le correspondant du MONDE à Shanghaï, Harold Thibault, n’a vraiment rien à dire. Il aurait mieux fait de développer sur cette idée : 400 millions de naissances évitées dans un pays, c’est autant de pression en moins sur les écosystèmes…

* LE MONDE du 13-14 janvier 2013, La politique de l’enfant unique a rendu les Chinois pessimistes moins compétitifs et moins consciencieux

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Ce que « malthusien » veut dire, essai de définition

Le terme « malthusien » est un mot du dictionnaire français voulant dire simplement « favorable à la limitation des naissances ». Dans le petit Larousse 2000, le terme est étendu à ceux qui sont contre l’expansion économique. Un objecteur de croissance voulant une maîtrise de la fécondité est donc malthusien par définition. Ce rappel lexical est d’autant plus nécessaire que le terme malthusien est ignoré de la population : notre société se garde bien d’apprendre aux gens ce qui peut les rendre responsables. Approfondissons l’analyse.

Le terme « malthusien » découle de l’essai sur le principe de population écrit à la fin du XVIIIe siècle par le britannique Malthus, un économiste et pasteur anglican. Il a été critiqué par les socialistes autant pour ses positions démographiques que pour sa conception opposée au maintien de « lois sur les pauvres ». Aujourd’hui encore une partie de l’intelligentsia fait mine de croire qu’il s’agit d’être « anti-pauvres » alors que Malthus voulait au contraire défendre la cause des pauvres. Mais il croit en une approche qu’on pourrait appeler libérale, reposant sur la responsabilité individuelle : « Le peuple doit s’envisager comme étant lui-même la cause principale de ses souffrances… Si nous négligeons de donner attention à nos premiers intérêts, c’est le comble de la folie et de la déraison d’attendre que le gouvernement en prendra soin… En Angleterre, les lois sur les pauvres ont été incontestablement établies dans des vues pleines de bienveillance. Mais il est évident qu’elles n’ont point atteint leur but… Les lois sur les pauvres tendent manifestement à accroître la population sans rien ajouter aux moyens de subsistance… Ainsi les lois y créent les pauvres qu’elles assistent… Ce que je propose, c’est l’abolition graduelle des lois sur les pauvres, assez graduelle pour n’affecter aucun individu qui soit actuellement vivant, ou qui doivent naître dans les deux années prochaines… La plupart des attaques contre mon essai sont moins des réfutations que des déclamations ou des injures qui ne méritent aucune réponse. Je suis donc appelé à relever des objections qui ont été faites en simple conversation… Une objection est tirée de ce que je nie que les pauvres aient droit d’être entretenus par le public. Ceux qui font cette objection sont tenus de prouver que le rapport de la population et des subsistances est faux… Tous mes raisonnements et tous les faits que j’ai recueillis prouvent que, pour améliorer le sort des pauvres, il faut que le nombre proportionnel des naissances diminue… Le droit d’être nourri ne peut appartenir à tous. Ceux qui soutiennent que ce droit existe, et qui cependant vont en voiture, vivent dans l’abondance, nourrissent même des chevaux sur un sol qui pourrait nourrir des hommes, me semblent mal d’accord avec leurs propres principes… En aucun cas, nous ne devons perdre l’occasion de faire du bien… Tout lecteur équitable doit reconnaître que l’objet pratique que l’auteur a eu en vue par-dessus tout est d’améliorer le sort et d’augmenter le bonheur des classes inférieures de la société. » Autant de phrases de Malthus qui méritent d’être étudiées sans qu’on fasse du mot malthusien un épouvantail.

D’autre part le terme « néo-malthusien » est faussement employé par les tenants du système croissanciste comme voulant dire « opposé à l’expansion économique », donc au progrès ! Ainsi néo-malthusien est considéré comme une critique en soi, sans tenir compte du fait qu’historiquement les « néo-malthusiens » représentent bien autre chose. Le néo-malthusianisme est développé à la fin du XIXe siècle par une partie de la mouvance anarchiste qui se réfère aux lois de Malthus, mais aussi au refus de fournir à la bourgeoisie chair à canon, chair à plaisir et chair à produire. Certains, comme Paul Robin (1837-1912), ont œuvré pour propager les méthodes de contraception  et le féminisme. Celui-ci est considéré comme le père du planning familial et du MLF (mouvement de libération des femmes).

Les termes « malthusien » et « néo-malthusien » nous paraissent, dans leur sens originel, dignes d’estime.

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l’avenir de nos aînés, habiter chez leurs enfants !

La Chine a adopté fin décembre 2012, une législation protégeant les droits des personnes âgées qui exige notamment que les membres de la famille fassent de « fréquentes visites » à leurs aînés. De plus la loi prévoit des obligations de soutien financier et de logement*. Rappelons que la loi française fait aussi obligation aux enfants de subvenir aux besoins de leurs parents. Le cas échéant, c’est prélevé sur vos revenus ! Que ce soit en Chine ou en France, à cause d’une population vieillissante et/ou d’un déficit de la sécurité sociale, il nous semble de toute façon normal que les enfants s’occupent de leurs parents : c’est la marque d’une solidarité familiale qui s’applique d’un bout à l’autre de la chaîne des âges. Mais l’assistance par l’Etat des gens du berceau à la tombe nous a fait oublier ces fondements d’une civilisation, la solidarité des cellules de base. Même si le sens de la solidarité est très variable d’une famille à l’autre, nous allons être obligés de s’occuper de nos anciens. Pourquoi ? Ecoutons Jean-Marc Jancovici :

« Etudiants, enseignants, employés de la Sécu, retraités sont tous des enfants de l’énergie abondante à prix décroissant : rien de tout cela ou presque n’existe dans les pays où l’énergie reste un luxe… La croissance de la quantité d’énergie consommée par personne, qui permet en termes purement physiques d’augmenter la productivité des gens qui travaillent, a pour conséquence d’assurer la nourriture, le logement, l’habillement, les loisirs, etc. des gens qui ne travaillent pas, dont les retraités et les étudiants. Retraites et études longues sont donc « assises » sur des consommations d’énergie importantes, et c’est bien ainsi que se lit la géographie actuellement : il n’y a beaucoup de retraités et d’étudiants que dans les pays qui consomment beaucoup d’énergie… Bien gérer la sortie de scène du « Père fossile » ne va pas être une mince affaire… En effet, la contrainte sur l’approvisionnement énergétique futur, qui va venir contrarier la productivité physique de manière forte, aura pour conséquence que le niveau relatif des retraites baissera, et que l’on va probablement pour partie revenir à un système de gestion des personnes âgées économe en énergie, c’est-à-dire… les garder chez leurs enfants. La question n’est pas de savoir si cette organisation est désirable ou non. Les bons sentiments sans kilowattheures risquent d’être difficiles à mettre en œuvre ! »**

L’individualisme des sociétés occidentales, qui s’est transformé en égoïsmes même par rapport à ses propres parents, était favorisé (si ce n’est causé) par l’abondance de l’énergie fossile. Cette période d’insouciance funeste touche à sa fin. Tant mieux !

* Le Monde.fr avec AFP | 29.12.2012, La Chine contraint les familles à prendre soin de leurs seniors

** Changer le monde, tout un programme de Jean-Marc Jancovici (Calmann-lévy, 2011)

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La fin des migrations, en Europe et ailleurs

Pour ceux qui ne savent pas ce que « immigration massive » veut dire, nous conseillons de lire l’article d’Elise Vincent, Catastrophe migratoire à Mayotte (LE MONDE du 27 décembre 2012). En résumé :

–          Pour rejoindre l’île, des dizaines de Comoriens risquent leur vie tous les jours

–          Interrogations sur le sens de leur travail de la gendarmerie, premiers acteurs de la lutte contre l’immigration irrégulière.

–          Coût de l’inlassable surveillance. Leurs bateaux utilisent plus de 100 litres d’essence par heure.

–          40 % des 212 000 habitants de Mayotte sont désormais d’origine comorienne. (+ 25 % depuis 2007)

–          Système de santé proche de l’effondrement.

–          L’éducation nationale ne suit plus : 25 % à 40 % des élèves sont issus de familles sans papiers.

–          Quasi-totalité des jeunes arrivant en métropole en échec scolaire ou professionnel.

–          Désarroi des associatifs et fonctionnaires qui tentent de maintenir à flot le territoire.

–          Multiplication des baraques en tôles qui mitent les collines en terre rouge de l’île.

–          Prostitution sauvage, sous la coupe des propriétaires et des voisins.

–          Expulsions « abattage »  : environ 20 000 par an, soit autant que toutes celles de métropole.

Que fait donc Dominique Baudis, défenseur des droits ? Après un grand flou dans ses déclarations (« il faudrait »*), il conclut ainsi : « Je veux essayer de nouer un dialogue avec la Commission des droits de l’homme des Comores (le pays d’immigration vers Mayotte), crée il y a un an. J’espère, même dans un cadre non gouvernemental, convaincre les autorités comoriennes de l’intérêt de ne pas laisser leurs citoyens mettre leur vie en danger ainsi que celle de leurs enfants en prenant la mer dans des embarcations de fortunes. » En clair, comme il ne s’agit certainement pas de fournir aux migrants des bateaux français sécurisés, Dominique Baudis indique qu’il vaut mieux que les Comores gardent leurs ressortissants chez eux : halte à l’immigration sauvage !

Cette étude de cas montre que les frontières aujourd’hui se ferment inexorablement aux migrants, que ce soit a Mayotte, aux frontières européenne, entre le Mexique et les Etats-Unis, pour tous les territoires du monde. Devant les difficultés, il y a un repli sur son propre territoire, et les grandes envolées sur les « droits de l’homme » et la libre circulation des hommes disparaissent comme par enchantement… Peut-il y avoir un autre peuplement en phase avec son écosystème qu’au prix d’une « (re)localisation » des humains ?

* LE MONDE du 28 décembre 2012, On a créé un département, il faut assumer

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Vœux qui se réalisent en 2013 : soyons bêtes et heureux

Nous ne pouvons que relayer les vœux d’un de nos correspondants :

Soyons contents, de 2000 à 2010
l’Espagne est passée de  40  à 46 millions d’habitants,
la France de 59 à 64 millions,
l’ Italie de 57 à 60 millions,
l’ explosion démographique continue…
Soyons contents,
tout ira bien de pire en pire  pour la  croissance de l’argent !
Soyons contents, contents,
la croissance de  nos destructions  protège bien nos emplois et  la croissance économique !
Soyons contents, contents, contents,
nous n’y pouvons rien,  si nos médias nous mentent, c’est la faute des autres,
nous n’avons pas le choix, pas le choix, pas le choix !
Soyons contents, contents, contents, contents,
puisque  nos médias sont soumis aux financiers, puisqu’ils nous  désinforment,  désorientent,  désensibilisent,
puisqu’ils affirment  que toute  satisfaction durable de  nos besoins ferait disparaître nos activités,  marchés, emplois et argent !
Restons en 2013 dans les illusions du pouvoir médiatique… Soyons heureux !

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Dénatalité en Corée du Sud, un Bien et non un Mal

LE MONDE sous-titre « Les Coréens sont confrontés aux maux des pays avancés : injustices, précarité, dénatalité » *. La dénatalité serait-elle donc un mal ? Que dit en vérité l’article de Philippe Pons :

« Des ombres se profilent derrière l’optimisme officiel… L’expansion coréenne est aussi impressionnante que déséquilibrée… Taux de faillites élevé des PME…  La grogne des petits entrepreneurs se conjugue à des inégalités en hausse et à une précarité croissante… Près d’un quart des jeunes diplômés peinent à trouver un emploi et le travail temporaire est le lot de 40 % des salariés… L’expansion a fait voler en éclats les solidarités traditionnelles sans mettre en place de filet social : quatre Coréens sur dix âgés de plus de 65 ans n’ont pas de retraite… La corruption endémique des milieux politiques, liée à l’affairisme ambiant et à une compétition exacerbée, dès l’école primaire, dans une société qui ne ménage guère de seconde chance pour ceux qui ont échoué une fois, contribue à démoraliser grand nombre de Coréens… La cohésion sociale, qui fut une force dans le redressement du pays, s’est effritée… La Corée du Sud a le taux de suicide le plus élevé des pays de l’OCDE… Surendettement des ménages emportés par un consumérisme effréné ou saignés par les frais exorbitants d’inscription scolaire de leurs enfants… Selon l’OCDE la Corée du Sud arrive à l’avant-dernière position en termes de satisfaction des conditions de vie… »

Dans un tel contexte négatif, il nous semble que la dénatalité est une réponse normale de la population, et non un mal en soi. L’anti-malthusianisme primaire rode dans la tête de ceux qui font l’accroche d’un article.

* LE MONDE du 16-17 décembre 2011, Corée du Sud, à la recherche d’un nouveau modèle

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Pour ou contre une Chine de 3 milliards d’habitants ?

« Entrée en vigueur en 1979, la politique de l’enfant unique visait à limiter le nombre de naissances… La Chine… 1,34 milliard d’habitants… envisage d’assouplir sa politique de l’enfant unique… Des chercheurs mettent en garde contre les futurs problèmes économiques et sociaux auxquels la Chine risque de se trouver confrontée en raison du vieillissement de sa population… Cette nouvelle politique pourrait entrer en vigueur dans des régions « productives économiquement ».» L’information du MONDE se résume à cela*.

Résoudre les problèmes du vieillissement de la population par plus de natalité, donc par plus de vieux et de retraités demain, ne résout fondamentalement rien du tout. Cet article ne définit même pas de quels problèmes il s’agit. A notre connaissance La Chine n’a pas généralisé le système de retraite par répartition, le rapport actif/retraité n’a donc aucune importance. Et les régions « économiquement productives » le seront-elles pour les générations futures ?

Halte au racisme anti-vieux, les personnes âgées peuvent apporter beaucoup à leur famille.

L’article se poursuit de façon superficielle : « Le débat sur la politique de l’enfant unique a été relancé en juin dernier lorsqu’une femme enceinte de sept mois et déjà mère d’un enfant a été contrainte par les autorités d’avorter, suscitant une vague d’indignation sur Internet. » La politique d’un pays de 1 340 000 000 habitants ne peut résulter d’un simple faits-divers et des réactions sur Internet. Combien de femmes meurent en couches à la suite de grossesses multiples ? Qui réagit à cela sur Internet ?

Halte à l’anti-malthusianisme primaire… qu’on retrouve même sur LE MONDE !

* Le Monde.fr avec Reuters | La Chine pourrait revoir sa politique de l’enfant unique

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UNFPA, rapport 2012 sur l’état de la population mondiale

Enfin un organisme international  qui s’attaque à la question démographique. Le rapport de l’UNFPA* a pour sous-titre : « Oui au choix, non au hasard : planification familiale, droits de la personne et développement. » Extraits :

« La capacité de décider du nombre de ses enfants et de l’espacement de leurs naissances est tenue pour acquise par un grand nombre de gens du monde développé et de membres des élites des pays en développement. Néanmoins, pour la majorité de la population des pays en développement, et notamment des pays les plus pauvres, les capacités et les moyens de déterminer la taille de sa famille sont rares ou insuffisants. […] De nos jours, la planification familiale est reconnue quasi universellement comme un droit intrinsèque confirmé et conforté par de nombreux autres droits de la personne. Il n’est donc pas justifiable qu’en tant que droit, seuls y aient accès les membres des classes aisées ou privilégiées. […] L’État de la population mondiale 2012, s’appuyant sur les recherches les plus récentes, lance un appel aux pays en développement et développés, aux organisations internationales et aux entités de la société civile, auxquels il demande :
– D’accroître radicalement leur appui financier et leur engagement politique […]
– De promouvoir la planification familiale en tant que droit […]
– D’intégrer la planification familiale volontaire […]
– D’éliminer les obstacles économiques, sociaux, logistiques et financiers […]
– De mettre les programmes de planification familiale à la disposition de toute la gamme des usagères et usagers […]
– D’inclure la contraception d’urgence […]
– D’associer les hommes et les garçons à la planification familiale, à leur propre profit et pour appuyer la réalisation du droit des femmes et des adolescentes d’utiliser la contraception. »

Source : http://www.ceped.org/?UNFPA-le-rapport-2012-sur-l-etat**

* UNFPA : Fonds des Nations unies pour la population

** Ceped : Centre population & développement

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ECOPOP, limiter l’immigration pour protéger la nature ?

Avec une densité moyenne de 193 habitants par kilomètre carré de la surface productive, la Suisse est un pays très densément peuplé. Le groupe d’écologistes Ecopop a déposé vendredi 2 novembre devant les autorités une initiative en vue d’une « votation » pour limiter l’immigration*. Le but : protéger la nature et limiter le besoin de constructions nouvelles. Le texte « Halte à la surpopulation » propose donc de « limiter l’immigration nette en Suisse », à un taux de 0,2 % par an. La Confédération helvétique comptait fin août quelque 1,8 million d’étrangers, pour 8 millions d’habitants au total dans le pays, soit 3 % de plus qu’en août 2011.

Les arguments sont scientifiques, ils reposent sur la formule mathématique, I = PAT, qui semble irréfutable :  l’Impact de l’espèce humaine est déterminée, à Technique donnée, par sa Population et par ses Affluences (Activités, niveau de vie). Pour réduire les impacts I, il est donc nécessaire d’agir sur l’efficacité technique T, l’Affluence (réduire le nombre d’unités de production ou de consommation par personne) et la population P (réduire le taux de natalité). Sauf à trouver immédiatement des solutions techniques extraordinaires, la décroissance matérielle devrait, sur un territoire dont on a dépassé la capacité de charge, s’accompagner d’une politique démographique qui agit tant sur la fécondité que sur les flux migratoires.

L’immigré est aussi un émigré. Au niveau d´un pays, l´émigration peut constituer pour l´individu un espoir de survie, remédier temporairement au problème du chômage et permettre au politique d´amoindrir l´effet « cocotte minute » qui peut se produire lorsque le mécontentement citoyen atteint son paroxysme. Alors l´émigration constitue une tactique pour exporter le mécontentement vers l´extérieur tout en attendant les retombées financières des migrants. Mais la démographie du pays peut continuer à galoper, les problèmes ne sont pas résolus. Libéraliser l´immigration (l’émigration) n´est pas une stratégie durable… baisser la fécondité oui.

* Monde.fr avec AFP et Reuters | 02.11.2012, Suisse : des écolos veulent freiner l’immigration pour protéger la nature

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Homosexualité sans limites = dérive libérale extrêmiste

La technique se veut toute puissante, franchissant la barrière des espèces et la différence sexuée. Les homosexuels en profitent. Ils réclament non seulement le mariage, mais le droit à avoir un enfant, la procréation médicalement assistée et pourquoi pas demain l’utilisation des souches IPS grâce auxquelles ils pourront produire à la fois des ovules et des spermatozoïdes ; la seule limite des IPS, pour l’instant, étant que l’enfant d’un couple de lesbiennes ne pourrait être qu’une fille.  Les couples d’hommes pourront en outre bénéficier de l’utérus artificiel, simple amélioration de la couveuse pour prématurés*. Le passage du défendu au toléré, puis au légalisé, suit le rythme des innovations techniques et l’emporte sur l’éthique.

Un philosophe et théologien catholique, Xavier Lacroix, s’insurge contre cette politique du « sans limites » : « Les partisans de l’homoparentalité disent que la différence sexuelle n’a pas d’importance, ils occultent l’union entre un homme et une femme en vue de la procréation. C’est grave, car cela revient à dire que tout vient de la volonté et de la culture… Or on est homme ou femme, on peut engendrer ou pas. Il y a des limites… L’opposition de l’Eglise au mariage entre personnes du même sexe est donc une résistance à la volonté de toute puissance…. La future loi dirait que l’enfant à deux pères ou deux mères, elle affirmerait une fiction… Le slogan du « mariage pour tous » supposerait que le mariage est un bien de consommation auquel tout le monde devrait avoir accès. Or structurellement les couples homos ne peuvent pas procréer… Je vois effectivement dans la création du mariage pour tous l’amorce d’une dérégulation et d’un déni des limites… Ce n’est pas être homophobe que de dire que dans les relations homosexuelles, il y a une limitation spécifique. »*

Sur ce blog, nous n’avons aucune référence religieuse, notre seule raison d’écrire découle d’un constat : la biosphère a des limites et l’espèce humaine croit pourtant être en mesure de les transcender. La volonté des gays et lesbiennes d’avoir un enfant n’est qu’un symptôme de cette dérive de la pensée qui découle à la fois du libéralisme moral (tout découle de la volonté humaine) et de la technique extrême (tout est possible). Le problème, c’est qu’en franchissant les limites, il n’y a plus aucun équilibre durable possible, que ce soit au niveau des relations sociales (sexualité, mariage, etc.) ou des relations avec le milieu qui nous fait vivre (les écosystèmes).

* LE MONDE science&techno du 27 octobre 2012, Biologie et homoparentalité

* LE MONDE du 27 octobre 2012, Les homosexuels veulent entrer dans la norme en la subvertissant

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Pour une population à moins de 9 milliards en 2050 !

Robert Engelman est le président du Worldwatch Institute. Cela n’en donne que plus de poids à sa pensée : « Une population future moins nombreuse signifie que les générations futures exerceront une moindre pression sur le climat, l’environnement et les ressources naturelles. Les sociétés peuvent agir  pour faire en sorte que le pic démographique mondial se situe à un niveau inférieur aux 9 milliards d’habitants attendus, même s’il est rare que les décideurs et les médias abordent cette éventualité. Il s’agit pourtant d’un scénario de bien-être mondial sans inconvénient majeur. » Voici les 9 stratégies qu’il préconise :

1. Garantir l’accès de tous à une large gamme d’options contraceptives pour les deux sexes

On estime que 40 % de toutes les naissances sont non désirées. Si toutes les  femmes pouvaient décider du moment de leur grossesse, le taux de fécondité à l’échelle du globe passerait sous l’indice de renouvellement des générations. Alors que le monde dépense quelque 42 milliards de dollars par an en nourriture pour animaux domestiques, il suffirait de 24,6 milliards pour financer les services de planning familial.

2. Garantir l’éducation pour tous avec une attention particulière pour les filles

Les femmes n’ayant pas été scolarisées ont en moyenne 4,5 enfants, 3 après quelques années à l’école primaire, 1,9 avec une ou deux années de cycle secondaire. L’éducation permet aux filles d’explorer d’autres aspects de la vie que celui de la maternité.

3. Eradiquer le sexisme dans tous les aspects de l’existence

Les femmes qui sont en mesure de gérer leurs biens, de divorcer et de participer à la vie sociale à égalité avec les hommes sont davantage susceptibles de retarder leur maternité. Cette égalité est d’autant plus nécessaire que les hommes, dans la plupart des pays, tendent à souhaiter plus d’enfants que leur partenaire.

4. Proposer à tous les étudiants une éducation sexuelle

L’ignorance des jeunes est un obstacle à la prévention des grossesses. Ils ne savent pas comment fonctionne leur corps, comment refuser la relation sexuelle non souhaitée, comment éviter la grossesse.

5. Mettre un terme à toutes les politiques qui récompensent financièrement les parents en fonction du nombre d’enfants

Des politiques subventionnent la fécondité de « sur-remplacement » (des taux au-delà de deux enfants par femme), contribuant à engendrer des populations plus nombreuses qu’elles ne le seraient autrement. Les gouvernements peuvent maintenir les avantages financiers sans les lier au nombre d’enfants, en les associant à la parentalité elle-même.

6. Enseigner les relations entre population et environnement

Peu de systèmes scolaires dans le monde comportent un enseignement qui explique aux jeunes les interactions entre la taille de la population, l’environnement naturel et le développement humain. Une formation sur l’influence du nombre d’hommes pourrait constituer une bonne incitation à une transformation culturelle hâtant la fin de la croissance démographique.

7. Chiffrer les impacts sur l’environnement

Une taxe carbone permettrait aux parents de mesurer l’impact de chaque être humain, chaque naissance donc, sur l’environnement. Une tarification environnementale pousse à réduire les taux de fécondité puisque les couples comprennent que le coût d’un enfant supplémentaire s’avère important.

8. S’adapter au vieillissement de la population plutôt que de le retarder

Les impacts du vieillissement sont moins importants et durables que ceux de la poursuite de la croissance démographique. Car autrement ce sont les décideurs de demain qui se verraient contraints de prendre en charge le vieillissement différé à un moment où la densité de population et les problèmes qui lui sont associés rendront encore moins attrayante et réalisable une incitation à la poursuite de la croissance démographique.

9. Convaincre les dirigeants à mettre un terme à la croissance démographique

La population est devenue un sujet tabou en politique, dans les affaires internationales, et même dans les médias et l’opinion publique. Or un ensemble de politiques visant à améliorer la vie des femmes, des hommes et des enfants aurait pour retombée le ralentissement démographique.

Plus les gouvernements retardent les politiques préconisées, plus le monde devra gérer des populations plus denses et des augmentations du taux de mortalité.

Source : Vers une prospérité durable, RIO + 20, sous le titre original de Moring Toward Sustainable Prosperity, la dernière édition du Worldwatch Institute (éditions de la Martinière, 2012)

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Démographie et environnement, le débat (24 oct. 2012)

Conférence-débat organisée par l’association Démographie responsable. Après un PowerPoint présenté par Hugues Stoeckel, auteur de La faim du monde, Michel Sourrouille a énoncé les termes du débat.

INTRODUCTION

Un sondage préalable auprès de l’assistance montre que personne ne voudrait d’une population de plus de 9 milliards d’habitants après 2050. A peine 10 % souhaiterait une stabilisation à ce chiffre, les autres désirant une baisse de la population mondiale. L’état d’esprit malthusien, en faveur d’une limitation des naissances, est donc un état d’esprit fréquent que ne reflète pas le comportement nataliste des politiques et des intellectuels. Alors qu’au cours des années 1970 la surpopulation mondiale était un thème qui se retrouvait dans des livres comme la Bombe P de Paul Ehrlich, avec la problématique Malthus/ Marx dans les cours de Sciences économiques et sociales et lors des conférences mondiales sur la population (1974 au Caire, 1984 à Mexico), le « politiquement correct » est sorti vainqueur de la conférence du Caire en 1994 sur la population. Le résultat principal a été l’exclusion systématique de toute considération numérique dans les discours autorisés. L’attention à la  taille de la population était devenue à tort associée à une approche coercitive, souvenir des politiques de stérilisations forcées en Inde et de la politique de l’enfant unique en Chine.

Démographie et environnement ? Il y a ceux qui gardent une option anthropocentrée : l’environnement est ce qui est tout autour de l’homme, la nature est donc au service de l’homme, peu importe l’évolution de sa population. Significatif était ce sous-titre du MONDE (14-15 octobre 2012) : « Face à l’explosion démographique, seule une réorientation de l’agriculture permettra de lutter contre la faim. » Soyons plus productif et la faim disparaîtra ! Mais il y a aussi ceux qui préfèrent parler de nature ou de biosphère plutôt que d’environnement : l’homme n’est pas au centre, il dépend des écosystèmes. On peut parler à cet égard d’écocentrisme. La fécondité humaine redevient alors une variable sur laquelle il faut agir. Car en fait la question de fond est bien celle-là : l’espèce humaine est-elle compatible avec le milieu naturel ? D’où les deux parties de l’exposé de Michel Sourrouille.

1/2) OUI, l’espèce humaine peut se multiplier

Notons d’abord que le terme « démographie » empêche toute vision idéologique. Il s’agit d’une simple description de la population, les statistiques sont reines : taux de fécondité, taux d’accroissement, niveau de population dans chaque pays, dans chaque secteur d’activité, etc. Le jugement de valeur est exclu. Depuis cinquante ans la population mondiale augmente  en moyenne d’un milliard tous les douze ans : rien à craindre pour les démographes, c’est une évolution normale, attendons la transition démographique (passage à la baisse conjointe de la natalité et de la mortalité grâce au développement économique).

On considère que la notion d’optimum démographique est inopérante. Personne ne peut définir le niveau de population qui serait le meilleur en soi. Pour un débat, on peut avoir un certain nombre de personnes assises dans une salle, un plus grand nombre en les laissant debout, un nombre plus grand encore en diffusant sur écran la séance. Culturellement, l’être humain est malléable, il peut aussi bien s’épanouir dans les grands espaces naturels que s’entasser dans des tours à plusieurs étage et des villes tentaculaires. Techniquement il croit qu’il peut pourvoir à tout problème. Actuellement Barry Commoner a gagné contre  Paul Ehrlich. Il s’appuie sur la possibilité d’une transformation technique radicale « pour satisfaire aux exigences indéniables de l’écosystème ». Les techniques agricoles ont en effet dopé la production alimentaire depuis plus d’un siècle.

Puisque tout est possible, l’intelligentsia est devenue anti-malthusienne. Les religions du « croissez et multipliez votre nombre pour dominer la planète » luttent contre l’avortement et même le préservatif. La droite, conservatrice en matière de mœurs, a combattu ardemment Simone Veil en 1974 lors du débat sur l’interruption volontaire de grossesse. Comme cette droite est aussi nationaliste, productiviste et expansionniste, fi de la maîtrise de la fécondité ! La gauche, dans le droit fil du marxisme pour lequel il faut changer les structures productives sans se soucier du nombre d’hommes, tient le même langage que la droite en soutenant les incitations publiques à la procréation. Paradoxalement le mensuel La décroissance garde une optique anti-malthusienne : « Il y a trop de voitures, le nombre d’hommes ne compte pas. » Ils rejoignent le courant humaniste qui sacralise la personne humaine et le libre choix des gens en matière de procréation.

Tout cela est une alliance au sens propre « contre nature », de ceux qui gardent une optique anthropocentrique en ignorant les contraintes naturelles.

2/2) NON, l’espèce humaine a dépassé la capacité durable de la Terre

Contrairement aux approches subjectives de la culture humaine, une démographie responsable se penche sur les réalités objectives. Les lois de la nature conditionnent les activités humaines, que ce soit le circuit économique ou le cycle reproductif. L’économie devrait être encastrée dans le social, lui-même conscient de la détermination ultime que constitue l’écologie : l’homme n’est qu’un animal au milieu des autres animaux.

Tout n’est pas possible, il y a une population limite ou capacité de charge ainsi définie par l’ONU : «  nombre d’hommes qui peuvent être entretenus sans réduire irréversiblement la capacité à les entretenir dans le futur. » Sans rentrer dans les détails, il suffit de rappeler que l’empreinte écologique de l’homme dépasse de 30 % les capacités de régénération de la planète, ce qui veut dire que nous détruisons une partie du capital naturel au détriment des générations futures. Cette année, le jour du dépassement a eu lieu le 22 août.

Robert Malthus a été le premier, à la fin du XVIIIe siècle, à porter un regard d’écologiste sur la condition humaine. Il a mis en relation l’évolution de la population et des ressources alimentaires pour en tirer une loi : alors que la population augmente très vite (de façon exponentielle dite géométrique), la production agricole, à cause des rendements décroissants, n’augmente que de façon linéaire, arithmétique. Si la révolution de Liebig a permis artificiellement une hausse des rendements agricoles au XXe siècle, cette parenthèse enchantée se termine pour en revenir à des rendements en souffrance sur des terres épuisées.

C’est l’énergie fossile qui a permis les engrais, l’irrigation et la mécanisation : nous mangeons du pétrole, même si c’est indirectement. Or le passage actuel du pic pétrolier nous annonce une descente énergétique inéluctable. Il nous faudra un jour revenir à une population compatible avec l’agriculture biologique d’avant la « révolution » agricole, soit un milliard de personnes… comme en 1804. Comme l’homme a entre-temps fortement dégradé les terres arables de multiples façons, on ne peut même pas dire que le milliard pourra être nourri convenablement.

Enfin nous avons oublié que nous sommes au bout de la chaîne trophique, ce qui permet notre survie par l’alimentation.. Beaucoup de végétaux font vivre moins d’herbivores qui nourrissent beaucoup moins de carnivores. L’espèce humaine devrait donc être peu nombreuse, sauf que pour son avantage est bientôt son malheur, elle est omnivore. Il y a des végétaliens, des végétariens et une fraction croissante de la population qui mange de plus en plus de viande. Selon le régime alimentaire, on peut nourrir plus ou moins de personnes.

Notre analyse devrait aller encore plus en profondeur. Contrairement à ce que pensent beaucoup de personnes, l’homme est un animal parmi d’autres, ce qui veut dire que la Terre héberge à la fois les humains et les non-humains. L’expansion humaine empiète sur l’habitat et la nourriture des autres espèces, ce qui entraîne une perte de biodiversité rapide et généralisée : on peut parler d’une 6ème extinction des espèces. La conférence de Nagoya sur la biodiversité en 2010 comme celle qui vient de se terminer en Inde ne peuvent résoudre le problème tant que la croissance démographique de l’espèce humaine n’est pas maîtrisée. Arne Naess nous invite à adopter la position philosophique de l’écologie profonde : « L’épanouissement de la vie non-humaine requiert une diminution de la population humaine. »

CONCLUSION

Il ne faut pas avoir peur de le dire, l’homme est le cancer de la terre. Cette expression est utilisée aussi bien par Cioran, par Yves Paccalet ou par Paul Ehrlich. Notre expansion démographique est semblable à une cellule du corps (terrestre) qui se développe anarchiquement  au détriment de la santé de l’ensemble. En conséquence, quoi qu’en pensent certains, la décroissance est forcément malthusienne : on a à la fois trop de voitures et trop d’êtres humains. Nous devons agir à la fois sur la quantité de biens et sur la quantité de personnes.

Si nous avions à exprimer un idéal de population, ce serait 6 à 8 millions de terriens, un chiffre qui nous ramène aux débuts du néolithique, où il fallait vivre de chasse et de cueillette sans empiéter sur son écosystème… condition qui n’a d’ailleurs pas toujours été respectée, même à l’époque ! A titre de comparaison, les grands carnivores comme les lions et les tigres, ne sont plus au total que 20 000 à 40 000 seulement sur la planète. Contre plus de 7 milliards pour la seule espèce humaine, le super-prédateur.

Il faut retrouver le sens des limites alors que notre système croissanciste a complètement occulté cette réalité, la finitude de la biosphère : le temps du monde fini commence, l’enjeu du XXIe siècle sera l’écologie (la science de l’environnement) aux prises avec plusieurs milliards d’habitants. Comme l’écrivait Yves Cochet dans sa préface au livre de Stoeckel, « l’ère industrielle va se contracter et disparaître bientôt… Faute de pouvoir éviter cela, nous avons désormais la responsabilité politique de minimiser le nombre de morts ». Une des actions possibles est d’adhérer à Démographie responsable

(texte communiqué par Michel Sourrouille)

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