écologie appliquée

Greenpeace, une multinationale comme les autres

Le bureau français de l’ONG internationale Greenpeace compte 150 personnes en CDI. Karine Michils, membre démissionnaire de l’assemblée statutaire qui représente les adhérents, a envoyé une lettre à l’ensemble des adhérents pour dénoncer un « déni de démocratie ». Elle déplore notamment l’opacité de la direction à chaque question posée en assemblée : « On me rétorquait que j’étais agressive et pas bienveillante. J’ai rejoint Greenpeace pour combattre des multinationales, mais j’ai pour l’instant combattu une multinationale, c’est Greenpeace. »

Jules Thomas : Depuis vingt ans, les effectifs de Greenpeace France n’ont cessé de croître, et sa structure de se rapprocher d’une entreprise classique : naissance d’un service RH, création de postes de management intermédiaire et délimitation stricte des périmètres de chacun en 2015… Ce qui a généré des conflits fréquents entre pôles ou salariés, parfois arbitrés de manière autoritaire par la direction, Petit à petit, une contestation grandit en interne. Le 25 septembre dans une ambiance tendue, le directeur général de Greenpeace France, Jean-François Julliard, regrette l’attitude des salariés qui ont parlé au Monde, arguant qu’un article à charge contre la structure nuira à la collecte de dons.

La direction de l’association, jugée tantôt absente, tantôt brutale, n’apprécie pas vraiment les critiques. Clément Sénéchal, chargé de campagne climat (l’équivalent d’un porte-parole thématique), a été licencié en novembre 2022 pour « usage excessif de sa liberté d’expression » à la suite d’une dispute sur Twitter avec François Gemenne qui avait condamné le jet de soupe par des militants écologistes sur des tableaux. Une liste, composée pour bonne partie de manageurs, s’est montée aux couleurs du syndicat révolutionnaire CNT pour « rendre le pouvoir aux salariés », face à ASSO-Solidaires, jugé trop « politique ».

NB : ASSO est un syndicat français membre de l’Union syndicale Solidaires regroupant les salariés du secteur associatif. La Confédération nationale du travail (CNT) est une confédération syndicale française de type anarcho-syndicaliste. La raison d’être de ces deux syndicats au sein de Greenpeace ne peut qu’interroger sur les appartenances et les objectifs des uns et des autres.

Le point de vue des écologistes circonspects

Greenpeace traverse une crise de croissance. Gérer 150 personnes en CDI sans vendre ni biens ni services et en faisant la manche, ce n’est pas rien. C’est devenu une entreprise comme les autres, avec surcharge de travail et climat social difficile. Aussi nous voulons en rester sur ce blog biosphere au récapitulatif de nos articles antérieurs sur Greenpeace.

Devenir activiste avec Greenpeace

extraits : Greenpeace reste profondément discrète sur son fonctionnement. Les  » activistes  » font parler d’eux mais ne parlent jamais d’eux. Pourtant six d’entre eux ont accepté de raconter* leur engagement, à visage découvert. Ils se félicitent d’avoir démontré la vulnérabilité de la centrale de Nogent-sur-Seine. Ils racontent : « Quand on t’appelle pour te demander si tu peux te libérer quatre ou cinq jours, tu ne sais pas où se passera l’action et même quelle en sera la durée exacte ». A l’origine de l’engagement, il y a un sens très développé de la désobéissance civile et beaucoup de courage. Les activistes sont formés pour participer à des opérations de confrontation non violente. La priorité pour Greenpeace est de pouvoir poser une image sur ce qu’elle veut dénoncer.

Greenpeace attaque des centrales nucléaires

extraits : Greenpeace par intrusion dans deux centrales nucléaires apporte la preuve de leur vulnérabilité. Ce sont des « stress tests » gratuits pour le gouvernement ! Pourtant des commentateurs du monde.fr se déchaînent. Par exemple Pierre-Marie Muraz : « Il serait temps que les ayatollahs de Green Peace soient sanctionnés… » Nous répondons.

Greenpeace, que je t’aime… que je t’aime…

extraits : L’ONG Greenpeace a fêté son 50e anniversaire le 15 septembre 2021. A l’origine mobilisée contre des essais nucléaires américains en 1971, cette institution entièrement autonome financièrement a mené des actions médiatiques dans de multiples domaines liés à la protection de la planète. Sans compter l’important travail d’enquête, d’investigation pour cibler au mieux leurs campagnes. Le premier salarié de Greenpeace France était chargé de la production photo, Pierre Gleizes ; ce qui éclaire bien le choix de communiquer avec des images percutantes. Greenpeace a toujours revendiqué de marcher sur deux jambes. L’activisme, avec cette forte capacité d’actions non violentes, et le lobbying qui l’amène à discuter avec les gouvernements et à s’asseoir aux tables des grandes conférences.

Greenpeace, association anti-malthusienne

extraits : On entend parfois dire que la surpopulation est l’une des principales causes de la crise climatique et qu’il serait nécessaire de contrôler la croissance démographique. Cette idée est fausse et dangereuse, car elle rejette la faute de problèmes sociétaux sur le dos notamment de populations qui n’en sont aucunement à l’origine…

Greenpeace, une association malthusienne

extraits : Rex Weyler, co-fondateur de Greenpeace international en 1979 : « The challenge we face, as environmentalists, or as concerned citizens, is that “scale” is almost a taboo subject in public discourse. Since population and overconsumption remain two of the primary drivers of ecological destruction, perhaps we should take on the challenge of stabilising our population, along with managing over-consumption. We cannot presume to engineer our way out of these ecological realities without attention to scale. We must embrace the nagging question of human scale, and recognise the need to slow down and control human enterprise. »

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Hubert Reeves est mort, écoutons son message

Dans la nébuleuse pestilentielle que nous traversons, cet homme qui avait les yeux vers le ciel, les pieds sur terre et la parole simple a traversé la vie en répandant l’extase la plus naturelle qui soit : contempler l’univers. Il nous avait expliqué que nous étions tous faits de poussières d’étoiles, car l’essentiel des éléments qui nous constituent, comme le carbone, l’oxygène et l’azote, proviennent directement des forges stellaires. L’astrophysicien Hubert Reeves est retourné à cette poussière cosmique le 13 octobre 2023. Il avait 91 ans.

nécrologie : Son amour de la nature, hérité de ses parents, ne l’a jamais quitté. Après avoir écumé le ciel, il s’est passionné pour la Terre. Comme si ses deux vies – chercheur et vulgarisateur en astrophysique – ne suffisaient pas, Hubert Reeves en a investi une troisième : défenseur de l’environnement. En 2001, il succède à Théodore Monod à la tête de la Ligue ROC pour la préservation de la faune sauvage. Quelques années plus tard, l’association prend le nom d’Humanité et biodiversité et il en devient le président d’honneur. Affligé par le réchauffement climatique, les pollutions et la perte de biodiversité qu’il constate lui-même dans le jardin de sa maison de campagne, il met sa notoriété au service du combat écologique. Il rédige des tribunes, interpelle les maires, les parlementaires et les candidats à l’élection présidentielle de 2012.

Dans « Je n’aurai pas le temps », Hubert Reeves assurait qu’on pouvait voir l’astronomie et l’écologie « comme deux volets du même thème : notre existence. L’astronomie, en nous racontant l’histoire de l’Univers, nous dit d’où nous venons, comment nous en sommes venus à être ici aujourd’hui. L’écologie, en nous faisant prendre conscience des menaces qui pèsent sur notre avenir, a pour but de nous dire comment y rester. »

Quelques commentaires inspirés

Chama : J’ai un souvenir merveilleux avec ce grand Monsieur. J’avais emmené mon fils de 7 ans écouter une conférence de lui, dans un observatoire. Le lendemain matin, il expliquait à ses grands parents qu’ils étaient de la poussière d’étoiles.

Hellboy : Si l’on pouvait plus valoriser ce type de personnes que des mecs qui tapent dans un ballon la société s’en porterait mieux…

jairaison : Il faut lire « Patience dans l’azur » un chef d’œuvre de vulgarisation. J’aime beaucoup certaines de ses phrase du genre :  » pour que l’Univers existe, il faut un observateur » une évidence pas toujours évidente si on y réfléchit bien.

BA-ba : Les étoiles, en fusionnant trois atomes d’hélium, donnent naissance à un atome de carbone. Par contre lithium, béryllium et bore sont créés lorsque des rayons cosmiques de haute énergie brisent des noyaux de carbone, d’oxygène ou d’azote présents dans l’espace. Les forges stellaires ! Nous sommes au sens propres des poussières d’étoiles…

Paganfab : D’un côté un assassin radicalisé, de l’autre Hubert Reeves. L’hétérogénéité de la race humaine est sidérante, désespérante…

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L’écologiste Hubert Reeves nous dit des choses sensées

Hubert Reeves : « La difficulté, dans le fond, c’est de savoir ­gérer cette intelligence fabuleuse qui, aujourd’hui, nous pose tous les problèmes ­environnementaux que nous connaissons. Nous sommes capables de réchauffer la planète, d’acidifier les océans, nous avons une puissance fantastique mais cette puissance pourrait nous éliminer comme elle a failli nous éliminer pendant la guerre froide… C’est comme si la nature nous disait : « Je vous ai fait un beau cadeau qui vous a permis de survivre aux premiers temps de l’humanité et maintenant débrouillez-vous avec ». » (extraits)

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Manifeste pour une santé commune

Recension du livre « Manifeste pour une santé commune »

aux éditions Utopia, 2023.

auteurs : Ioan Negrutiu, avec François Collart Dutilleul, Olivier Hamant et Fabrice Riem de l’Institut Michel Serres et le Centre Lascaux sur les Transitions.

Il s’agit de recevoir les ressources de la nature de manière à satisfaire les besoins humains avec raison et prudence, et à utiliser les ressources de la raison humaine pour garantir les besoins de la nature et permettre sa pérennité.

Ceci est l’antidote à notre penchant (un rien) pathologique pour la démesure. Autrement dit, on peut tout faire, à condition de

– respecter les droits humains pour en faire le socle des responsabilités et devoirs qui en découlent ;

– faire que les activités humaines soient mesurées et amorties en coûts réels sociaux et écologiques, donc pas de dette et de décroissance socioécologique.

Le Manifeste en 6 points :

1. Une clarification des idées socioécologiques. Les récits des dernières décennies sont des narratives socio-écologiques. La démarche ressources-santé commune est une synthèse conceptuelle assortie d’une méthodologie. Cette méthodologie intègre d’une manière systémique les limites sociales et planétaires.

2. Une alliance concrête entre Sciences de la Nature, numérique et droit. Cette science permet actuellement d’observer et assister en direct à ses prédictions. Mais on persiste à rien faire ou si peu pour changer de trajectoire. D’où l’intérêt de l’alliance : qui mesure bien ce qui compte, juge avec justesse. Mesurons l’essentiel socioécologique en termes de santé.

3. Une démarche policlinique. La santé commune est systémique et preventive, elle est la conjonction de trois santés indivisibles et interdépendantes.

La santé des milieux naturels sur le temps long (pas de jour de depassement avant Noël).

La santé sociale par la garantie d’un accès équitable aux ressources, socle des droits fondamentaux.

La santé humaine comme état de complet bien-être physique, mental et social.

La santé commune est une purge. Elle permet de renverser la logique actuelle des systèmes économiques, institutionnels, commerciaux.

Encastrer l’économie dans le social et l’écologie consiste à penser simultanément ressources ET santé. Et de passer de la performance et la compétition aux interactions et à la robustesse. Or, l’économie est une formidable machine pour transformer les ressources, mais qui ne veut pas croire ou accepter que le monde physique est fini.

4. Passer du préventif au curratif veut dire mettre le marché à sa place, au bénéfice de l’adéquation ressources accessibles et besoins vitaux pour tous. Cet ajustement est une lois de la vie. Celui de l’offre et de la demande est un arrangement de domination.

Cela pose la question de la valeur des vies, humains et non-humains, donc de la dignité devant le devenir indigne du monde. La santé commune fait des relations reciproques et indissociables le cheminement vers le vivable, l’habitable ; autrement dit la primauté des communs, des politiques publiques dignes de ce nom, au service « systémique » de l’inérêt général.

Avec des exemples concrets, comme la restauration collective et le foncier, et l’analyse des contextes en Nouvelle Zélande, Chine, Finlande.

5. Nous proposons la boîte à outils Ressources – Santé Commune, et un contrat de santé commune.

Il est question de droits humains et de justice, de besoins vitaux dans l’accès aux ressources, à l’alimentation, à un environnement sain. Cela va au-delà de l’égalité, qui en tant que telle ne dit rien des conditions de vie. Ainsi :

Si, conformément au contrat social, la conception des rapports sociaux ambitionne avant tout de pacifier les relations des êtres humains entre eux en excluant la violence et la loi du plus fort, elle n’a pas pour autant privilégié les modalités d’une mise en commun des ressources. Or, c’est précisément le premier objectif d’un contrat : mettre en commun des ressources pour satisfaire collectivement les besoins de chacun en excluant la violence et la force comme moyen d’un tel ajustement. Il s’agit donc de recevoir les ressources de la nature de manière à satisfaire les besoins humains avec raison et prudence, et à utiliser les ressources de la raison humaine pour garantir les besoins de la nature et permettre sa pérennité.

La boîte à outils est modulable à volonté et son but premier et de permettre l’élaboration des contrats de santé commune en territoire par des acteurs réunis.

6. Ressources – Santé Commune c’est le court et le long terme à la fois. C’est un retour au collectif, dans des territoires économes en ressources et riches en travail. Avec priorité donnée aux ressources primaires, Sol, Eau, Biomasse. Ces ressources sont régénérables mais épuisables, non-délocalisables  et non-substituables.

Cela implique de mettre les questions de pauvreté, climatiques et de biodivetrsité dans une perspective nouvelle, dans une architecture des priorités articulée différement.

Elizabeth Mrema au PNUE le dit : « You can do everything under the sun as far as climate actions and solutions are concerned, but if nature is not part of the equation, global warming will continue to increase to unimaginable levels. »

En somme,

C’est par la radicalité douce d’un récit et outil que la santé commune et les ressources sont mises aux fondements de toute politique, en tant que méthode à la fois universalisable et adaptée à chaque territoire.

La question est : quoi d’autre pour transformer en profondeur et en douceur nos territoires, institutions, et nos modes de vie avec des outils et des savoirs raisonnés ?

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CLIMAT : des négationnistes criminels

Bonjour l’armée du doute. Les négationnistes du climat se font encore entendre ! Les spécialistes du climat sont attaqués sur les réseaux sociaux par des comptes anonymes qui remettent en cause la réalité du réchauffement ou sa gravité. Un discours qui diffuse autant parmi les élites politiques et économiques que parmi le peuple.

Un membre du GIEC : « Parfois je rêve que la bêtise soit un facteur aggravant du risque de décès prématuré lié au réchauffement… » (texte d’un dessin)

Matthieu Goar : Ils agissent comme une armée souterraine sur X-twitter en réponse aux messages pédagogiques de scientifiques. Ils remettent en cause la réalité du réchauffement climatique ou la responsabilité des activités humaines. Ils dénigrent les spécialistes du climat dans un mélange d’invectives et de pseudo-expertises alimentées par des sites se disant « climato-réalistes ». Le climatologue Christophe Cassou : « Tous mes posts étaient assaillis, pollués, manipulés, avec un détournement de ma parole… Le rôle d’un scientifique est d’informer, pas de lutter contre la désinformation. » Fatigué, il a arrêté son activité en ligne à l’été 2023. Guillaume Séchet, météorologiste : « Au début, je prenais le temps de répondre. C’était peine perdue, ils ont un comportement paranoïaque car ils voient de la manipulation partout. Les gens qui ont des doutes posent des questions et sont courtois. Chez eux, il n’y a que de la méchanceté. »

Après avoir longtemps reculé, le climatoscepticisme regagne du terrain dans plusieurs études récentes. Selon l’enquête « Obs’COP » réalisée par l’institut Ipsos et publiée en juin, 37 % des sondés apparaissent climatosceptiques : 8 % nient la réalité du réchauffement, 29 % considèrent qu’il n’est pas d’origine humaine. Globalement le négationnisme climatique permet à un climato-rassurisme de se développer. Le changement climatique est anxiogène et ce discours fait espérer aux gens qu’on aura le temps, que des technologies futures nous sortiront du pétrin et qu’il suffit d’attendre. Ce discours se diffuse dans toutes les strates de la société. Il fonctionne sur une croyance dans le techno-solutionnisme, dans le génie humain, c’est un pari fou. Edouard Philippe, ancien premier ministre, s’est opposé à l’interdiction de louer les logements les plus énergivores en s’inquiétant de la situation des « plus modestes ». Le même jour, Laurent Wauquiez (Les Républicains), président de la région Auvergne-Rhône-Alpes, a déclaré qu’il n’appliquerait pas le dispositif « zéro artificialisation nette » pas des solutions concrètes, par exemple des changements de mode de vie. Le plus grave est que le négationnisme se déplace dans les élites, qui sont pourtant responsables des choix de société.

Le point de vue de ce blog biosphere

Interdisons de parole les négationnistes du climat (2019)

extraits : Un média français, Cnews le 6 mai 2019, l’animateur Pascal Praud le texte : « Est-ce que vous diriez qu’il y a depuis trente ans dans le monde un dérèglement climatique ? Oui ou non ? » L’invitée principale, Claire Nouvian, militante écologiste, s’étrangle : « Attendez, mais vous en êtes encore là ? Ce n’est pas une émission de climatosceptiques quand même ? » Rejoint par Elisabeth Lévy, la directrice de la rédaction du magazine conservateur Causeur, Pascal Praud défend le droit des climatosceptiques à s’exprimer. La liberté d’expression n’est jamais absolue, surtout quand il s’agit à la fois de nier les avancées scientifiques et de ne pas agir contre la détérioration de la Biosphère. Interdisons de parole les négationnistes du climat…

ajout 2023 : La liberté d’expression est légalement limitée quand elle se révèle être de la publicité mensongère, de la tentative d’escroquerie, de l’abus de faiblesse, de la mise en danger de la vie d’autrui, etc… Préciser ces concepts dans le cas du climatonégationnisme serait utile.

Sylvestre Huet face aux négationnistes du climat (2016)

extraits : Doit-on se contenter du terme « climato-sceptiques » pour qualifier ces affabulateurs ou leur infliger un « négationnistes » ? Climato-sceptique est un terme inventé par les « négateurs » de différents résultats des sciences du climat. Ce terme auto-proclamé visait à induire une présentation positive, puisque le doute, le scepticisme peut être vu comme la marque d’un esprit libre, indépendant, capable de bousculer préjugés et idées reçues. Négationniste est un terme qui s’est petit à petit imposé afin de souligner que, justement, ces soi-disants « sceptiques » ne doutent de rien. En réalité, ils mentent sur des faits…

Ban Ki-moon contre les négationnistes du climat (2015)

extraits : Ban Ki-moon : « Le débat scientifique sur la réalité du changement climatique est clos… Le changement climatique se produit à cause des activités humaines. Les engagements des pays à réduire les émissions de gaz à effet de serre sont inférieurs à ce qui est attendu pour maintenir l’augmentation des températures mondiales au-dessous des 2°C. »Ban Ki-Moon oublie de dire que les individus, tous ceux qui vivent à l’occidentale, devront réduire drastiquemet leur consommation d’énergie (la diviser par 3 ou 4 en moyenne), ce qui implique de réduire leur niveau de consommation dans une très forte proportion.

réchauffistes contre négationnistes (2010)

extraits : On s’aperçoit finalement que les négationnistes « farfouillent dans les articles des dissidents et dans la presse étrangère » (dixit Mon810) pour essayer de marquer leur présence sur Internet ; leur argumentation reste limitée scientifiquement ou non démontrée, mais ils sont virulents. Les réchauffistes peuvent s’appuyer sur des rapports scientifiques validés, mais leur présence sur le net des bloggeurs est marginale. Le problème, c’est que cette disproportion dans le débat instille le doute et l’abstention dans la réflexion des citoyens ; la délibération démocratique est faussée quand on ne sait plus qui croire. C’est un des éléments d’explication de l’échec de Copenhague. C’est pourquoi nous allons à la catastrophe, mais nous ne voulons pas le croire…

les négationnistes du climat (2009)

extraits : D’un côté un conglomérat de « scientifiques », mais aussi de politiciens et d’économistes, dénonçaient du 8 au 10 mars 2009 le protocole de Kyoto à New York. En ouvrant le débat, le président tchèque Vaclav Klaus se contente d’un procès d’intention : «  Le véritable projet de l’alarmisme environnementaliste est de ramener l’humanité des siècles en arrière ». De l’autre côté 2000 scientifiques, parmi lesquels les plus éminents climatologues mondiaux, préparaient du 10 au 12 mars la prochaine conférence de Copenhague où les gouvernements devront décider en toute connaissance de cause. Le comité scientifique de la conférence affirme : « Les dernières observations confirment que le pire des scénarios du GIEC est en train de se réaliser. Le système climatique évolue d’ores et déjà en dehors des variations naturelles à l’intérieur desquelles nos économies se sont construites »…

Nos écrits il y a dix ans sur les négationnistes du climat (2005)

extraits : Le problème de l’écologie, c’est la tendance humaine à se valoriser en prenant le contre-pieds de la réalité, surtout si on y trouve un avantage financier. Ainsi le botaniste D.B. (pas besoin de lui faire de la publicité) ne cachait pas son scepticisme sur l’origine humaine du réchauffement climatique, soutenant dans l’hebdomadaire New Scientist : « Les kyotoistes mentionnent rarement que 555 des 625 glaciers observés par le service mondial d’observation des glaciers ont grossi depuis les années 1980. »

Le point de vue des écologistes en 2023 sur l’article de Matthieu Goar

Ophrys : C’est quand même fascinant d’entendre dire que les scientifiques du GIEC exagèrent alors que la trajectoire actuelle dépasse les pires scénarios des projections faites ces derniers décennies.

Patrick : Les travaux du GIES, comme ceux du COR, sous-estiment la réalité. A chaque catastrophe naturelle, pour chaque victime, il faudra stigmatiser les climatosceptiques car ils sont responsables du retard dans la mise en œuvre des mesures nécessaires. Et j’espère qu’un jour, proche, les 4×4 se feront caillasser par les jeunes générations.

Ophrys : Sinon les scientifiques peuvent simplement continuer à crier dans le désert et se contenter d’un « on vous l’avait bien dit » quand la catastrophe arrivera.

Philémon Frog : Il semble qu’il y ait beaucoup de gens animés par des frustrations, la misanthropie, la simple volonté de semer la confusion, le chaos… Internet a révélé ces profils qui étaient occultés auparavant. Ils sont un vecteur pour se libérer virtuellement tout en restant terrés.

GeorgesL : Les sociologues du climat devraient prendre en compte le fait qu’en 2023, organiser une procession pour faire tomber la pluie est toujours possible. Il reste en effet beaucoup de gens — une majorité je le crains — pour qui la démarche scientifique n’a rien de plus convaincant que n’importe quelle autre opinion à condition qu’elle soit largement répandue.

Jacques Py : La question qui, à mon sens, est déterminante: allons-nous à échéance rapprochée vers une crise existentielle pour les humains ? Que signifie « existentiel »? Des conditions de vie devenues insupportables à une grande majorité des humains, et pour beaucoup, la mort, catastrophes, famines, maladies liées, etc. Il nous faut exprimer clairement que cette crise climatique est existentielle… Les climatorelativistes, et autre climatorassuristes n’ont que leur opinion devenue aujourd’hui criminelle.

Vipierre : En réalité il n’y a que des climatosceptiques. D‘abord les authentiques (35%) et puis tous les autres qui admettent la responsabilité des humains mais se sentent peu ou pas concernés et préfèrent se retourner vers les pouvoirs publics à condition bien sûr que les mesures prises ne les impactent pas. Les citoyens vraiment concernés et actifs sont une infime minorité.

Jacr : Alea jact  est. L’humanité finira comme un grand drogué, mort par overdose… avec la complicité des dealers, Total, BP, Exxon Mobil, etc ….

 

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L’indispensable VADE-MECUM de l’écologiste

L’interdépendance est une des caractéristiques de l’écologie. En matière humaine, il y a interrelation de fait entre notre comportement individuel, l’engagement dans des collectifs intermédiaires et l’état de la planète. Les recommandations suivantes s’adressent à tout citoyen qui cherche à construire une société plus égalitaire et conviviale en harmonie avec les possibilités matérielles de la biosphère.

Aujourd’hui se constitue progressivement un peuple écolo dont les idées vont structurer la pensée et l’action tout au cours du XXIe siècle. Nous sommes tous potentiellement partie prenante de ce changement. Ci-dessous une ébauche de vade-mecum (va-avec-moi) de l’écologiste, à garder toujours en tête. Mais à chacun de trouver sa propre voie.

Présentation synthétique du

Vade-mecum de l’écologiste

1) Les écologues indiquent que tous les indicateurs sont au rouge

2) Tous les citoyens sont écologistes par définition

3) Un écologiste montre l’exemple par son comportement

4) Notre action obéit au principe de la non-violence

5) Notre pensée intériorise les intérêts des acteurs absents

6) Un lieu à privilégier, la communauté de résilience

7) Un écologiste s’inscrit dans des réseaux

8) Une conception écologique du social et de l’économique

9) Un engagement qui ne peut être que politique

DÉVELOPPEMENT

1) Les écologues indiquent que tous les indicateurs ont au rouge

Le mot écologie a été inventé en 1866 pour désigner une science naissante qui étudie le biotope (territoire offrant des possibilités de vie durable pour une espèce) et la biocénose (ensembles des êtres vivants dans un même milieu). Etude longtemps limitée à des milieux naturels spécifiques, l’écologie est devenue une approche globale des problèmes. Les écologues, porteurs de l’écologie scientifique, démontrent que tous les indicateurs de la planète sont dégradés (stress hydrique, épuisement des ressources fossiles, des réserves halieutiques, des sols…, réchauffement climatique, etc.).

Les crises écologiques, à commencer par la descente énergétique qui va impacter tout notre tissu productif, s’ajoutent à la contrainte financière qui a déjà fait ses effets. Nous nous dirigeons avec une forte probabilité vers l’effondrement de la société thermo-industrielle. Loin du catastrophisme, nous devons faire preuve de réalisme et réagir par rapport à toutes ces menaces.

2) Tout les citoyens sont écologistes par définition

Par définition, tous les citoyens sans exception sont concernés par l’écologie, c’est-à-dire la meilleure manière de parler (logos) de notre maison la Terre (éco, oïkos). Nous sommes tous plus ou moins victimes et responsables du niveau insupportable d’exploitation de la planète qui ne peut que renforcer l’exploitation inadmissible de l’homme par l’homme. Nous sommes donc tous amenés à avoir un comportement écologique.

L’écologie déborde largement la division droite/gauche. Travailleurs ou capitalistes, riches ou pauvres, nous sommes sur la même planète, limitée dans ses possibilités. Nous devons apprendre à partager l’espace et les ressources, non seulement avec les autres humains, mais aussi avec toutes les autres espèces (la biodiversité). L’écologisme marque l’abandon de l’anthropocentrisme et les avancées de l’humilité.

3) Un écologiste montre l’exemple par son comportement

L’écologie montre que le tout et ses parties sont indissociables. C’est la somme des comportements individuels qui fait évoluer la société, c’est la société ainsi créée qui formate les individus. Nous fonctionnons en effet socialement par interaction spéculaire : « Tu fais, parce que je fais, parce que nous faisons tous ainsi. » Le changement social résulte donc de notre exemplarité dans notre comportement écologique. Soyons le changement que nous voulons voir pour ce monde.

Le mode de vie à l’occidentale est bien au-dessus des possibilités de la planète (cf. l’empreinte écologique), ce qui nécessite une cure d’austérité.  Cela présuppose aussi la lutte contre les inégalités. Individuellement nous devrions adopter le principe suivant : Faire preuve le plus possible dans ma vie de sobriété énergétique et d’autolimitationpour construire avec autrui une société plus conviviale et plus égalitaire. Comme à l’impossible nul n’est tenu, à chacun de faire son possible pour (re)trouver le sens des limites et la simplicité volontaire.  L’écologiste doit s’interroger sur la véritable signification de sa prétendue liberté, y compris en matière de procréation ; place à une démographie responsable.

4) Notre action obéit au principe de la non-violence

C’est l’obéissance servile aux mécanismes actuels de détérioration de la biosphère et des rapports humains qui nous prépare l’arrivée d’un autoritarisme. Nous savons que nous sommes tous profondément déterminés par les conditions sociales qui nous sont faites, le parcours de nos parents, notre statut professionnel, etc. Mais nous pouvons penser autrement et pratiquer la désobéissance civile. Nous pourrions tous être des objecteurs de conscience, des technocritiques, des objecteurs de croissance, des lanceurs d’alerte Il faut savoir résister de façon appropriée à la société industrielle de consommation et du spectacle. Non-violence ne veut pas dire passivité.

                La force de la vérité pèse dans nos raisonnement, mais cette vérité n’est pas préétablie. Les limites (à ne pas dépasser) de la pression humaine sur la planète restent souvent indéterminées. L’autoformation permanente de l’écologiste est alors nécessaire ; il faut bien connaître pour mieux agir. Le réseau de documentation des écologistes n’est qu’un moyen parmi d’autres. Mais si nous ne pouvons convaincre par la parole, inutile de vouloir vaincre par la violence. La recherche de l’efficacité immédiate nuit à la pérennité des solutions.

5) Notre pensée intériorise les intérêts des acteurs absents

Il y a les invisibles de la représentation, les acteurs absents. Bien sûr les habitants du tiers-monde, les pauvres, les chômeurs, les exclus… Mais pour une considération écologiste, il s’agit aussi des acteurs absents, qui ne peuvent prendre la parole lors d’une négociation, ou qui ne sont pas invités à la table des négociations : par exemple les générations futures et les non-humains.

Ce n’est pas une procédure démocratique que de décider sans les acteurs absents de ce qui les intéresse au premier chef. Une telle délibération ne peut qu’entraîner de mauvaises décisions dans l’espace et/ou le temps. L’écologiste, élu ou non, doit savoir s’exprimer au nom des acteurs absents, élargir sa pensée dans l’espace et dans le temps.

6) Un lieu à privilégier, la communauté de résilience

Ce paradigme ou modèle de référence porte des noms différents : Communautés intentionnelles ou Ecovillages ou Agenda 21 local ou Towns transition ou Plan climat ou Cités jardins ou communautés de résilience Il ne s’agit pas d’une nouvelle théorisation, mais d’une pratique applicable au Nord comme au Sud, par les gens de droite comme par les gens de gauche, par les urbains et les paysans, par les chefs d’entreprise ou par les travailleurs. Tout le monde est concerné puisqu’il s’agit de rendre notre avenir durable.

Le souci principal d’un écologiste devrait être de chercher la relocalisation des activités et la décentralisation du pouvoir (principe de subsidiarité). Concrètement un écologiste soutient ou met en œuvre une communauté de résilience, espace territorial qui cherche localement l’autonomie alimentaire et énergétique pour assurer la transition de la civilisation thermo-industrielle vers des sociétés qui fonctionneront sans énergies fossiles. Un système démocratique durable est d’autant mieux préservé si l’Etat central programme la mise en place d’une autonomie territoriale. Il n’y a de véritable démocratie que locale. L’écologiste cherche la subtile synthèse entre une pensée ancrée dans l’espace mondial et dans le long terme d’une part, et d’autre part une pratique qui s’exerce de préférence dans son milieu d’appartenance. Le terme qui résume le mieux cette disposition d’esprit est glocal, fusion des deux mots « global » et « local » : agir localement tout en pensant globalement.

7) Un écologiste s’inscrit dans des réseaux

Coopérative ou mouvement, réseaux ou association, l’important est moins dans l’appellation que dans la capacité à créer une forme d’appartenance commune à ce qu’on pourrait appeler un « peuple écolo ». Il nous faut repenser notre façon de vivre et d’être ensemble pour préparer le futur. D’où la nécessité de se retrouver en groupe pour chercher la meilleure voie possible. Avec l’aide de l’écologie scientifique, nous devons débattre collectivement de nos besoins et de nos techniques, de notre manière de manger comme de nos moyens de déplacement.

                Un écologiste s’investit normalement dans une association à but environnemental. Savoir à quelle association adhérer relève d’une analyse personnelle des statuts de cette association. Par exemple Attac a « pour objet… de mener des actions de tous ordres en vue de la reconquête, par les citoyens, du pouvoir que la sphère financière exerce sur tous les aspects de la vie politique, économique, sociale et culturelle dans l’ensemble du monde. » Il n’y a nulle trace dans ces objectifs de préoccupation explicite à propos des rapports entre l’homme et la nature. Adhérer à Attac ne suffit pas pour un écologiste, sauf à œuvrer pour transformer les objectifs de l’association dans un but écologique.

8) Une conception écologique du social et de l’économique

La droite libérale donne priorité à l’économique, la gauche au social. Le concept de développement durable ne hiérarchise pas entre économique, social et environnemental. Or l’écologiste constate qu’aucune activité socioéconomique n’est possible si on n’accorde pas une attention première aux ressources naturelles (l’eau, l’énergie, etc.) qui permettent son existence (durable). Le facteur « terre » est devenu plus important que le travail et le capital car sans ressources naturelles, ni travail, ni capital ! D’où l’idée que sans considérations écologiques, on ne peut avoir des avancées sociales réelles, et sans société conviviale, il ne peut y avoir d’économie saine.

La disparition inéluctable de la plupart de nos esclaves énergétiques (les machines) indiquent que le temps de travail va augmenter, la division sociale du travail se simplifier et le détour de production se raccourcir. Il faudra d’abord compter sur sa force physique, les agriculteurs et les artisans redeviendront l’essentiel de l’emploi. Les techniques douces, à forte intensité d’énergie renouvelables, seront privilégiée. Le respect des cycles naturels formera un impératif.

9) Un engagement qui ne peut être que politique

Au sens noble du mot « politique », il s’agit de participer à l’organisation de la cité. Au sens large, tous nos gestes sont politiques car ils entraînent des répercussions sur le fonctionnement de la société humaine insérée dans la biosphère. Nous ne pouvons échapper au politique. L’écologie politique porte en soi l’urgence écologique, mais elle ne s’incarne pas forcément dans un parti particulier puisque l’écologie a pour vocation de rassembler l’ensemble de l’humanité autour d’un avenir durable.

A chacun de s’investir dans un parti ou mouvement de son choix en sachant que l’essentiel est notre propre comportement. Un projet politique doit remonter d’en bas, de notre engagement personnel, et non l’inverse, descendant des institutions. Et notre critère d’engagement, c’est d’abord la préoccupation écologique. L’écologie, c’est-à-dire la gestion du long terme et le sens des limites, doit l’emporter sur le souci de la victoire électorale. L’essentiel est de porter en toutes circonstances par la pensée et par ses actes les principes généraux de ce vade-mecum.

Pour de plus amples développements,

Utopie 2050

L’indispensable VADE-MECUM de l’écologiste Lire la suite »

Un composteur pour tous et toutes

A compter du 31 décembre 2023, toutes les villes européennes devront proposer une solution de tri des biodéchets à leurs habitants, dans le cadre de l’application du « Paquet économie circulaire » adopté en 2018 par le Parlement européen et les Etats membres. La France a retranscrit cet objectif dans la loi antigaspillage pour une économie circulaire, votée début 2020.

Au 1er janvier 2024, toutes les communes devront proposer à leurs habitantes et habitants une solution pour trier leurs biodéchets. Aujourd’hui, chaque Français produit en moyenne 254 kg d’ordures ménagères par an, dont 83 kg sont des déchets organiques. Au total, 5,5 millions de tonnes de matière organique finissent soit incinérés, soit enfouis en décharge alors qu’ils pourraient être valorisés et retourner à la terre.

Reporterre : Le compost devient obligatoire… mais personne n’est prêt. Différentes options s’offrent aux collectivités : la collecte séparée en porte-à-porte, l’apport volontaire à des points de compost, le compostage domestique individuel ou encore le compostage partagé, par exemple, dans un jardin de quartier.

Pour l’heure, seule une centaine de communautés de communes ou d’agglomérations proposent une vraie collecte séparée des biodéchets. Zero Waste France soulève les limites de la loi actuelle qui ne précise ni comment ce tri doit être assuré, ni comment vérifier qu’il est bien mis en œuvre. « Certaines collectivités commencent déjà à dire : “On a mis en place une expérimentation, on respecte la loi” », constate l’ONG. Comment leur opposer que deux ou trois points de compost dispersés sur une agglomération de 30 000 habitants ne sont pas une solution suffisante de tri ? (extraits)

Le compostage consiste en une dégradation biologique de la matière organique en une substance fertile brunâtre appelée compost. On produit ainsi un amendement de très bonne qualité pour le sol et on diminue la quantité d’ordures ménagères : les déchets organiques composent en effet 30 % du volume des poubelles de la classe globale et environ 50 % de son poids. On peut utiliser en ville un composteur en bois, mais il est préférable d’entreposer directement pelures et restes végétaux dans un endroit bien ensoleillé et bien drainé, facile d’accès : au bout de six mois, le compost a l’aspect d’un terreau meuble, presque noir, qui peut s’utiliser tel quel. Au bout de trois mois, on obtient déjà un jeune compost qui peut s’épandre en couches et recourir les endroits dénudés où il finira sa décomposition durant l’hiver. Le compostage est l’un des éléments fondateurs des cycles de la vie.

Le point de vue du MONDE, autant dire rien

Fil Good  (2023)

extraits : Tri des biodéchets , l’enjeu est de taille : quelque 20 millions de tonnes de biodéchets sont produites en France chaque année par les ménages et les professionnels (restaurants, magasins, producteurs et transformateurs de denrées alimentaires). Et vous, savez-vous composter ? …

Arnaud Leparmentier (2023)

extraits : Les Américains cuisent de trop grosses portions, mangent trop, jettent trop, laissent périmer leurs aliments. Au total, selon l’association ReFed, qui vise à réduire le gaspillage alimentaire, un quart des 230 millions de tonnes de nourriture produite aux Etats-Unis est perdu, et ces déchets seraient responsables de 4 % des émissions de gaz à effet de serre du pays.La ville de Columbus , capitale de l’Ohio, veut arriver à diviser par deux, d’ici à la fin de la décennie, les 170 000 tonnes de nourriture déversées chaque année à la décharge. ce qui pouvait être recyclé. Epluchures de pommes de terre, écailles de crevettes, os : les quantités sont très vite astronomiques…

Émilie Echaroux  (2020)

extraits : Aujourd’hui, les déchets alimentaires (épluchures, aliments non consommés, etc.) représentent 30 % de la poubelle des ménages. Le 1er juillet 2020, quatre places de stationnement ont été transformées en bornes d’apport volontaires de biodéchets (déchets alimentaires) dans le 14e arrondissement de Paris. A l’image de Paris, les projets d’installation de bacs à compost partagés se multiplient dans les communes françaises. Mais le manque d’information et de communication sur la thématique du compostage empêche une vraie appropriation de cette méthode par les ménages. La valorisation des déchets alimentaires par le compostage permet de faire retourner au sol ces matières organiques, les transformant en un produit semblable au terreau permettant de nourrir les sols…

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La tentation écofasciste selon Pierre Madelin

La tentation écofasciste. Écologie et extrême-droite (Écosociété, 2023).

résumé de ce livre de Pierre Madelin : Le lien entre l’extrême droite et la défense de l’environnement n’a rien d’évident. Pourtant, il existe bel et bien une pensée écofasciste au sein de la grande famille des idéologies nationalistes et identitaires. Démographie, tensions entre localisme et universalisme, immigration… Les théories écofascistes sèment un certain trouble dans l’écologie politique. «Il me semble raisonnable de penser que plus la crise écologique s’aggravera, plus les options démocratiques et émancipatrices dont nous disposons pour y faire face s’amenuiseront, et plus au contraire des solutions extrêmes, aujourd’hui encore impensables, risqueront de s’imposer», écrit Pierre Madelin dans ce livre  Une lecture indispensable pour mieux combattre cette alliance entre le «brun» et le «vert». Son livre différencie aussi explicitement le mouvement écofasciste et le néomalthusianisme.

Résumé de l’introduction du livre de Pierre Madelin

Le 15 mars 2019, à Christchurch, en Nouvelle-Zélande, Brenton Tarrant tuait dans plusieurs mosquées 51 personnes et en blessait 49 autres. Dans son manifeste, il écrivait  : « Je me considère comme un écofasciste. (…) L’immigration et le réchauffement climatique sont deux faces du même problème. L’environnement est détruit par la surpopulation, et nous, les Européens, sommes les seuls qui ne contribuent pas à la surpopulation. Il faut tuer les envahisseurs, tuer la surpopulation, et ainsi sauver l’environnement. »

Jusqu’alors, c’est peu dire que l’extrême-droite avait principalement brillé par son mépris pour les enjeux écologiques. Mais comme il existe de fortes chances que l’articulation entre thématiques écologistes et thématiques identitaires, encore embryonnaire aujourd’hui, s’intensifie au cours des années à venir à mesure que les crises écologiques et migratoires vont s’exacerber, j’espère que ce livre constituera une ressource utile pour toutes les personnes désireuses de mieux comprendre les enjeux.

Tout en admettant que la crise du capitalisme, qui dure depuis les années 1970, est propice aux évolutions autoritaires du système et à l’avènement d’« états d’exception », d’autres intellectuels estiment en outre que les conditions ayant présidé à l’avènement de régimes fascistes au siècle dernier ne sont plus réunies aujourd’hui. Indéniablement, il y a du vrai dans cette critique, d’autant plus entendable que certains milieux d’extrême-gauche semblent trouver un malin plaisir à voir du fascisme partout et à taxer de fascistes quiconque ne partage pas leurs positions, contribuant ainsi à discréditer un terme dont l’usage hyper-extensif et souvent paresseux semble dispenser de toute analyse politique sérieuse. C’est faire fi de l’avertissement lancé par Robert Paxton dès 2004 : « Le fascisme du futur – réaction en catastrophe à quelque crise non encore imaginée – n’a nul besoin de ressembler trait pour trait, par ses signes extérieurs et ses symboles, au fascisme classique. Un mouvement qui, dans une société en proie à des troubles, voudrait ‘se débarrasser des institutions libres’ afin d’assurer les mêmes fonctions de mobilisation des masses pour sa réunification, sa purification et sa régénération, prendrait sans aucun doute un autre nom, et adopterait de nouveaux symboles. Il n’en serait pas moins dangereux pour autant. »

Mais quid de la Nouvelle Droite, qui a été à l’avant-garde de « la contre-révolution écologique des droites dures » et qui n’a cessé de vilipender le nationalisme étroit de la formation frontiste. Le conservatisme ? Si l’on entend ce terme au sens moral et qu’on l’associe à une législation punitive en matières de mœurs – par exemple concernant l’avortement – il va sans dire que ce critère n’est pas plus pertinent. La Nouvelle Droite française s’est toujours moquée du puritanisme, notamment dans le domaine de la sexualité, et les néo-malthusiens américains hostiles à l’immigration sont pour la plupart d’ardents promoteurs du contrôle des naissances et de l’accès à la contraception. L’attachement à la nature ? Il révèle lui aussi son lot de divisions, et il existe au sein des écologies d’extrême-droite comme dans les autres familles de l’écologie politique une tension évidente entre une nostalgie agrarienne pour des paysages façonnés par des communautés paysannes, et une nostalgie primitiviste pour des paysages sauvages e menacés par la croissance démographique.

En Finlande, le naturaliste Pentti Linkola, mort en 2020, est sans doute l’un des seuls auteurs à s’être explicitement revendiqué de l’éco-fascisme. Opposé au progrès technologique, à la croissance économique, Linkola en appelait à la formation d’une élite écologique et d’un gouvernement centralisé capable de contrôler et de réguler le règne destructeur de l’égoïsme et des désirs individuels qu’il associait à la démocratie. Favorable au contrôle de la population (« l’excès de vie est la plus grande menace qui pèse sur la vie », à l’arrêt du commerce international et de l’immigration, il était également un décroissant convaincu, notamment au niveau des moyens de transport. Partisan d’une nationalisation et d’une réduction drastique de la production industrielle, il souhaitait que les voitures personnelles soient confisquées et abandonnées au profit des vélos, des bateaux à rame et des carrioles à cheval, et que les rares voyages de longue distance subsistants soient effectués au moyen de transports collectifs réduits au minimum.

S’il est probable que les récentes évolutions localistes et écologistes du FN/RN en France répondent pour l’instant avant tout à une visée stratégique et électoraliste, il me semble en revanche évident qu’un intellectuel comme Alain de Benoist est un écologiste sincère et convaincu. Et s’il est vrai que dans l’hexagone, ce sont la plupart du temps des théoriciens d’extrême-droite qui ont été à l’initiative de ce que l’on pourrait appeler une écologisation du fascisme, il n’en va pas de même aux États-Unis, où c’est plutôt à un processus de fascisation de l’écologie auquel on a assisté. Edward Abbey, Dave Foreman, Holmes Rolston III, Philip Cafaro : autant d’auteurs qui étaient engagés de longue date dans la défense de la nature sauvage et de positions philosophiques écocentrées lorsqu’ils ont commencé à rattacher celles-ci à des thématiques anti-immigrationnistes.

Mais l’objectif de ce livre, c’est de se demander si l’éco-fascisme, par-delà les théories qui le nourrissent et les individus ou les groupes encore marginaux qui s’en revendiquent pour mener des actions violentes, est susceptible d’inspirer, dans un futur plus ou moins lointain, des gouvernements ou des régimes politiques. Il me semble raisonnable de penser que plus la crise s’aggravera, plus les options démocratiques et émancipatrices dont nous disposons pour y faire face s’amenuiseront, et plus au contraire des solutions extrêmes, aujourd’hui encore impensables, risqueront de s’imposer.

Pierre Madelin sur ce blog biosphere

Néo-malthusianisme contre écofascisme

Pierre Madelin : « Garett Hardin[1] affirme que l’humanité habitant désormais un monde clos, aux ressources matérielles et alimentaires limitées, les problèmes posés par la surpopulation ne pourront pas être durablement réglés par la recherche agronomique, l’exploitation des océans ou le développement technologique. Cette inversion radicale du rapport à la technologie et au futur s’est accompagnée d’un revirement total sur la question de la contraception. Alors que Malthus s’y opposait, celle-ci devient un élément phare des politiques publiques défendues par les néo-malthusiens. William Vogt soutenait ainsi qu’il fallait conditionner l’aide internationale au contrôle des naissances et rétribuer les stérilisations volontaires. Puis ce fut au tour d’Ehrlich de se prononcer en faveur de l’émancipation des femmes et du contrôle des naissances, avant que Garett Hardin ne multiplie les interventions en faveur de l’avortement.  

Dès les années 1950, les néo-malthusiens ont donc joué un rôle important dans la défense des droits reproductifs – par exemple le droit à l’avortement – et dans la promotion des techniques contraceptives comme la pilule ou le DIU. Ainsi Margaret Sanger, Katherine McCormick, Gregory Pincus et John Rock, quatre personnes ayant joué un rôle central dans le développement des premières pilules, étaient également profondément préoccupées par la croissance démographique. Aussi n’est-il pas surprenant qu’il ait existé dans les années 1960 une alliance significative et largement oubliée aujourd’hui entre féministes et néo-malthusiens. Ces derniers furent nombreux à en appeler à une refondation des rôles sociaux dévolus aux femmes, afin que celles-ci ne soient plus cantonnées à leur « vocation »  maternelle.

Mais dans les années 1970, les relations entre féministes et néo-malthusiens se distendent quelque peu. Plus que le simple accès à la contraception, les féministes revendiquent désormais l’autonomie reproductive et réalisent que celle-ci pourrait être menacée par des politiques de contrôle des naissances, dont la vocation ne serait certes plus d’assigner les femmes à leur « fonction » reproductrice, mais d’entraver celle-ci au nom de la protection de l’environnement, qui deviendrait alors un nouvel argument pour nier leur liberté. « Lorsque l’on se demande comment réduire la population à un milliard », peut-on lire dans un texte de l’organisation Women Against Genocide, « ce ne sont pas les riches et les puissants qui s’en iront, mais les pauvres, les noirs et les personnes de couleur, sans parler des femmes qui seront manipulées, stérilisées, empoisonnées chimiquement et assassinées »[2].

Cette critique est-elle justifiée ? Oui et non. Car lorsque elles évoquent les mesures à prendre pour mettre en place des politiques de contrôle des naissances et de décroissance démographique, les grandes figures du néo-malthusianisme diffèrent. Et chez un même auteur, des positions contradictoires et des évolutions notables peuvent apparaître au fil du temps, notamment sur les questions relatives aux classes sociales, au genre et à la « race ». Ainsi Ehrlich, fondateur dès 1968 de l’association Zero Population Growth (ZPG), dont l’objectif est de stabiliser la population américaine, est-il ambigu en ce qui concerne les options coercitives. S’il y est opposé aux États-Unis[3], où il « promeut des méthodes de restriction volontaire de la fertilité (contraception, stérilisation choisie), via la sensibilisation de public et le lobbying politique »[4], il y est en revanche plutôt favorable au niveau international, préconisant même dans certains textes des stérilisations forcées et une aide alimentaire proportionnée aux efforts des pays destinataires en matière de contrôle des naissances.

Quid du racisme, dont le néo-malthusianisme a si souvent été accusé, à tel point que les deux termes se recoupent dans l’esprit de nombreuses personnes ? Dans ce qui reste sans doute à ce jour le meilleur ouvrage consacré à l’histoire de la pensée néomalthusienne aux États-Unis, The Malthusian Moment, auquel ce chapitre doit d’ailleurs beaucoup, l’historien Thomas Robertson a bien montré à quel point il serait simpliste et injuste de réduire Ehrlich à un idéologue raciste. C’est bien Paul Ehrlich, qui défendit lui aussi la nécessité de mettre en place des politiques de redistribution entre le nord et le sud[7], qui alla le plus loin dans ce domaine, s’engageant précocement en faveur du mouvement des droits civiques aux États-Unis, et s’opposant vigoureusement au racisme persistant dans les sciences naturelles et notamment en biologie. Preuve de la longévité de cet engagement, il s’attaqua en 1977 aux positions du prix Nobel William Shockley lorsque celui-ci suggéra que les différences raciales pouvaient être un facteur explicatif de l’intelligence des individus.

Et lorsque ses appels au contrôle des naissances furent critiqués par des groupes afro-américains, qui jugeaient insuffisant son anti-racisme universaliste et estimaient que dans une société profondément raciste[8], toute politique démographique comporterait nécessairement des biais racistes, Ehrlich fit preuve d’une remarquable réactivité :

« Le contrôle de la population peut être perçu comme un complot ourdi par des blancs riches pour supprimer les personnes ‘racisées’ du monde. Et malheureusement, dans l’esprit de certains membres de notre société blanche et raciste, c’est effectivement ainsi qu’elle est envisagée »[9]. A l’encontre de positions qu’il avait pu tenir quelques années plus tôt, il ajouta que la plus grande menace pesant sur la survie humaine n’était pas la croissance démographique des populations du tiers-monde mais celle des américains eux-mêmes, « consommateurs et pollueurs par excellence » . Ehrlich ajoute : « Le bébé américain moyen, écrit Ehrlich, a davantage d’impact sur les systèmes vivants de notre planète que de douzaines d’enfants indiens et latino-américains »[10]. Anticipant la critique du racisme environnemental, il remarqua également que « les groupes minoritaires – les noirs, les chicanos – ne sont pas, en général, à l’origine de la pollution, et qu’ils sont au contraire les premiers à souffrir de celle qui est produite par les blancs »[11].

S’il m’a semblé important de revenir ici sur la complexité des positions néomalthusiennes sur la question raciale, c’est pour souligner que le néo-malthusianisme ne se confond pas nécessairement avec des écologies politiques identitaires, nationalistes ou anti-immigrationnistes. Trop souvent aujourd’hui, les recherches ou les articles consacrés à l’éco-fascisme ont tendance à assimiler deux sensibilités qui se sont souvent rencontrées mais qui demeurent pourtant irréductibles l’une à l’autre. Pour le dire simplement, si les éco-fascismes attirent presque toujours l’attention sur la surpopulation, les néo-malthusiens ou les écologistes sensibles à la question démographique ne sont en revanche pas tous, loin s’en faut, disposés à adopter une conception racialisée des populations considérées comme « surnuméraires », ni à prôner des mesures autoritaires pour réduire la population mondiale. Il ne faut pas perdre de vue que le constat inquiet d’un monde plein et même trop-plein a été largement partagé dans l’écologie politique des années 1970, y compris au sein de ses courants les plus anti-autoritaires et les moins enclins au racisme et au rejet de l’immigration.

Ainsi, en Norvège, le fondateur et principal théoricien de l’écologie profonde – et ancien résistant au nazisme, sans doute est-il opportun de le rappeler ici -, Arne Naess, a placé la décroissance démographique au cœur de la plateforme de son mouvement : «L’épanouissement de la vie et des cultures humaines, écrit-il, est compatible avec une diminution substantielle de la population humaine. L’épanouissement de la vie non-humaine requiert une telle diminution »[12]. En France, dans les années 1970 (très exactement le 2 septembre 1974), André Gorz, un auteur que l’on a pas vraiment coutume d’associer à des positions nationalistes ou racistes, écrit dans le Nouvel Observateur un article au titre inquiet, « Douze milliard d’hommes ? » et prône une relance des campagnes antinatalistes dans les pays du Sud. Peu après, Françoise d’Eaubonne, pionnière de l’éco-féminisme, dénonce vigoureusement le « lapinisme phallocratique » et ses effets dévastateurs sur la planète.  

Notes

[1] Garett Hardin, La tragédie des communs. Paris, PUF, 2018.

[2] Cité par Thomas Robertson, The Malthusian Moment, opus cité, p. 193.

[3] Il envisagea néanmoins d’y placer des contraceptifs chimiques dans le réseau d’eau potable avant d’admettre que ce n’était pas envisageable !

[4] F. Locher, « Les pâturages de la guerre froide », opus cité, p. 27.  

[5]Fairfield Osborn, La planète au pillage. Arles, Actes Sud, 2008.

[6]Cité par T. Robertson, The Malthusian Moment, opus cité, p. 55.

[7] Paul R. Ehrlich, Loy Bilderback, Anne H. Ehrlich, Golden door : international migration, Mexico and the United States. New York, Wideview Books, 1981.

[8] Des groupes afro-américains craignent même que ce contrôle ne soit exercé pour entraver la croissance démographique de leurs communautés et pour neutraliser ainsi la menace politique qu’elles représentent dans un contexte où les émeutes sont nombreuses. Certains vont même jusqu’à évoquer un « génocide des noirs ».

[9]Cité par T. Robertson, The Malthusian Moment, opus cité, p. 173.

[10]Ibid., p. 173.

[11]Ibid., p. 174.

[12] https://biosphere.ouvaton.org/reperes/592-ecologie-profond

Rassemblement national, écologisme superficiel

Pierre Madelin : « Jean-Marie Le Pen était généralement hostile à la protection de l’environnement, avec des accents parfois climatosceptiques. En 2017, il a par exemple déclaré que « sans le réchauffement climatique on mourrait de froid ». Il avait comparé, en 1989, le parti écologiste à une pastèque, expliquant que ses adhérents étaient verts à l’extérieur, rouge à l’intérieur. Mais face aux évolutions de la société, le RN se saisit depuis quelques années de différents enjeux qu’il négligeait auparavant. C’est le cas des droits des femmes, de la cause LGBT et, désormais, de l’écologie. Le parti met en avant le localisme. Le localisme sert de passerelle vers les thèmes identitaires et nationalistes. Marine Le Pen déclarait, en 2019, qu’il fallait protéger « les écosystèmes, à commencer par les écosystèmes humains que sont les nations ». A la même époque, Jordan Bardella, qui n’était pas encore le président du Rassemblement national, affirmait, pour sa part, que « le meilleur allié de l’écologie, c’est la frontière ». Si l’on peut relocaliser les activités économiques, il faudra aussi relocaliser les êtres humains, ceux que l’extrême droite estime ne pas être de véritables Français. La critique des énergies renouvelables est un autre élément important de ce nouveau discours. Les éoliennes sont particulièrement visées. Elles contreviendraient au localisme, car elles seraient imposées sans concertation dans les territoires. A l’inverse, le nucléaire est défendu, il représente aux yeux du RN un socle sur lequel asseoir la souveraineté énergétique de la France et permet de décarboner l’économie. Ces propos relèvent d’un « greenwashing » nationaliste. On voit que le RN reste fortement imprégné par son fond libéral, productiviste et technosolutionniste.

A travers le monde, les principales forces politiques d’extrême droite rejettent généralement l’écologie. L’ancien président brésilien Jair Bolsonaro, Donald Trump aux Etats-Unis, Vladimir Poutine en Russie, ou encore le premier ministre indien, Narendra Modi, sont des défenseurs des énergies fossiles, des acteurs de la déforestation, et s’opposent aux accords internationaux en faveur du climat. »

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Sociologie des jeunes militants écolos

Ecolo dès le plus jeune âge

Linda, même pas 9 ans, a trouvé des slogans pour en parler en classe :

– Soyons raisonnable, utilisons les énergies renouvelables

– Je protège ma planète, je prends ma bicyclette

– J’agis pour la Terre, je respecte les écogestes

– Je protège ma planète, je finis mon assiette

Maelys, juste 12 ans, pour sa candidature de déléguée de classe en 5ème :

Aujourd’hui nous aimerions nous présenter à l’élection des délégués car nous voulons voir cette classe au plus haut. Et pour cela nous avons quelques idées. Organiser des goûters zéro déchet est une idée fantastique pour promouvoir la durabilité et réduire notre impact sur l’environnement. En optant pour des aliments frais et non emballés, préparés à la maison, nous pouvons éviter les déchets plastiques inutiles. Utiliser des boîtes et des contenants réutilisables pour transporter les collations permet également de limiter les déchets. C’est une initiative amusante et éducative qui nous permet de prendre soin de notre planète tout en profitant de délicieuses collations. Ensemble, nous pouvons faire une différence pour un avenir plus vert !

Installer une plante dans la classe ! Les plantes apportent une touche de nature et de fraîcheur à l’environnement, ce qui peut rendre la classe plus accueillante et agréable. En plus d’être esthétiquement plaisantes, les plantes peuvent également améliorer la qualité de l’air en absorbant le dioxyde de carbone et en libérant de l’oxygène. Elles peuvent également aider à réduire le stress et favoriser la concentration des élèves. Alors, pourquoi ne pas ajouter une plante dans la classe pour créer une atmosphère plus verte et apaisante ? Mettez la main à la plante 😉 !

Ecolos un peu plus âgés

Aujourd’hui, de plus en plus de jeunes entrent dans le mouvement directement par la porte de la contestation dure. Cet engagement est coûteux en matière de santé mentale, avec des formes de burn-out militants qui peuvent arriver très vite. Il y a aussi l’enjeu de l’écoanxiété, cette question de la crainte du futur, qui n’est désormais plus, pour eux, lointain. Cette réalité est niée. Une tribune de Laurent Lardeux, pourtant anodine, entraîne des réactions disproportionnées chez des commentateurs sur lemonde.fr

Laurent Lardeux : « La notion de radicalité renvoie au fait de se placer en rupture par rapport au pouvoir politique institutionnel. Or, chez la plupart de ces jeunes, il n’y a pas d’envie de scission, mais au contraire la volonté de s’adresser directement aux pouvoirs publics et aux institutions,dans l’espoir d’infléchir les organisations. Les actions restent, dans une très large majorité des cas, non violentes. Elles occasionnent en fait très peu de dégâts : c’est de l’ordre de jets de soupe sur des vitres de protection, de manifestations lors d’événements sportifs, d’occupations de places ou de sites industriels. Par rapport aux associations plus anciennes, qui sont sur un fonctionnement plus hiérarchisé et où il faut un consensus sur l’orientation unique qui guidera le mouvement, la génération climat agit dans de nombreuses sous sections locales qui peuvent avoir leur propre direction. »

Les réactions d’internautes anti-écolos

Taraxacum : De faux rebelles testostéronés qui entraînent l’idéal naturel de la jeunesse vers l’habituelle impasse des mouvements inexpérimentés

un Transnaute : Faut bien s’amuser un peu et se rebeller contre les parents.

Atchoum la houle : Ces jeunes veulent imposer par la force un demain qui soit la copie d’hier, pousse à son paroxysme le « c’était mieux avant ». Ce sont surtout des idéalistes incapables de devenir adulte pour vivre dans leur époque.

Pm22 : On commence comme cela et on termine bon bourgeois de gauche, député, ministre, Rédacteur en chef… ou on pantoufle dans une ONG avec bon salaire.

Antonio : De jeunes oisifs repus et choyés par l’ancien monde qui veulent donner la leçon à ceux qui voudraient aussi leur part et leur imposer le puritanisme étroit de leur projet de nouveau monde.

Vexinfrancais : On aimerait que ces activistes publient leur bilan carbone détaillé,…habitudes vestimentaires, voyages en avion, usage du numérique….. Asperger un tableau et pire bloquer une autoroute, c’est pour la planète ou c’est pour faire parler de soi ?

Jean Kaweskars : Une petite amende de 3000€ / personne à chaque sit-in non déclaré, blocage de route ou jet de liquide sur une œuvre d’art d’un musée leur redonnera très rapidement le goût de la démocratie et du respect des lois.

Totoro : A lire la majorité des réactions on peut être sûr d’une chose : ce ne sont pas les lecteurs du Monde qui feront avancer la cause écologique…

Pour en savoir plus, écolosceptiques, organisation du déni (écrit en 2015)

Sociologie des jeunes militants écolos Lire la suite »

L’heure est à la déconsommation

Hausse des prix des carburants, de la taxe foncière, du tarif réglementé de l’électricité (15 % en février, puis 10 % en août)… trop, c’est trop, dans les rayons des supermarchés l’heure est à la déconsommation pour les Français.

Cécile Prudhomme : Les Français n’ont pas cinquante solutions. Ils limitent leurs achats. Ils privilégient la nourriture au détriment du reste. Ils sortent moins, dépensent moins dans les loisirs et rognent sur leur épargne afin de payer leurs factures d’énergie. Ils achètent de moins en moins de produits à réchauffer, comme les plats cuisinés surgelés. En fait, tout ce qui nécessite d’allumer le four, et donc d’utiliser de l’énergie. Le choc est bien plus fort sur les produits qu’ils ne mettent pas dans leur assiette. Toutes les catégories de la maison, dont le petit électroménager, souffrent. Le non-alimentaire est considéré comme non indispensable. Il y a une déconsommation importante des achats plaisir, même le rayon jouets est touché. Quant aux traditionnelles ventes de la rentrée des classes, elles ont été catastrophiques. On a bien vendu les cahiers, mais les gens ont taillé leurs crayons plutôt que d’en acheter d’autres. Et quant aux cartables…

Le point de vue des écologistes économes

Lapin67 : Excellente nouvelle pour l’environnement ! Il faudra s’habituer, la sobriété c’est aussi de devoir tailler ses crayons plutôt que les remplacer.

Mathilde54 : Quant à la folie de changer de cartable tous les ans, pas de commentaire… Il est temps d’apprendre à protéger notre planète en recyclant et en utilisant les affaires plus longtemps.

Lecteur Masqué : Vu ce que les gens achetaient comme malbouffe ce n’est pas plus mal qu’ils lèvent le pied. Quand à l’excuse « pas le temps pour cuisiner » à d’autres : il y a toujours du temps pour regarder des inepties sur son écran !

le cinquième Beatles : Quand je vois le contenu de certains caddies, et le gabarit des personnes qui les ont remplis, je me dis qu’à quelque chose malheur pourrait être bon…

Lili35 : Je crois que l’on est à un tournant. Réapprendre à aller au marché, cuisiner et manger des légumes de saison. Refaire ses confitures et son pain, des gâteaux. Acheter au fur et à mesure et ne plus manger des plats industriels. La différence elle est là ! La grande surface n’est pas l’amie du client.

Alternactif : Ce qui va se passer, c’est qu’on va tous cultiver notre potager et élever des poules.

Arnaud Lestremau : Et pourtant, la gauche anticapitaliste appelle à la manifestation pour le pouvoir d’achat. Entre la démagogie permettant de gratter quelques voix et la cohérence des idées pour la sauvegarde de la planète, le choix a été fait très rapidement.

Le point de vue de ce blog biosphere

Nous sommes sur ce blog adeptes des Dé, Démondialisation, Démilitarisation, Dépollution, Dépopulation, Désurbanisation, Dévoiturage, Décroissance, Débond. Il n’était que temps d’adopter aussi l’expression « Déconsommation » puisque LE MONDE nous avait pris de vitesse dans son numéro du 17-18 septembre 2017, « Déconsommation, j’écris ton nom » 

L’ère est à la société de déconsommation (2017)

extraits : Aujourd’hui, sur les réseaux sociaux, ce n’est pas en remplissant mais en vidant ses placards que l’on fait sensation… Ces Français qui empruntent la voie de la déconsommation, on les trouve essentiellement dans les grands centres urbains où, équipés de leurs sacs en papier kraft, ils vont avec parcimonie se réapprovisionner en baies de goji et en lentilles corail… S’il y a autant de facteurs explicatifs que de déconsommateurs, les crises sanitaires à répétition semblent avoir lourdement pesé sur les comportements… Chez de nombreux déconsommateurs s’impose l’idée qu’il faut réévaluer le coût réel de nos achats, en y intégrant aussi bien les maladies de civilisation et les dégâts environnementaux que la souffrance causée à autrui, fût-il en train de coudre un smiley sur un tee-shirt à l’autre bout du monde.

Les temps changent. Après la crise des subprimes de 2007-2008, on n’avait pas assisté à un phénomène massif de « déconsommation ». Bien que cette récession soit l’une des plus graves depuis la guerre, bien que le chômage frise les 10 % de la population active, le tourisme en Corse avait explosé l’été… parce que le tourisme à l’étranger avait reculé. Aujourd’hui en 2023 on parle de déconsommation à cause de la baisse de pouvoir d’achat provoqué par l’inflation. Demain tous et toutes nous parleront « sobriété partagée » car la pénurie de ressources naturelles fera sentir ses effets. La décroissance est inéluctable, elle sera maîtrisée ou bien on se foutra sur la gueule !

En savoir plus, Le dossier des « Dé… » en résumé

L’heure est à la déconsommation Lire la suite »

Macron, « l’écologie à la française » !!!!

Pour atteindre en 2030 une réduction de 55 % de nos GES par rapport à 1990, la France doit faire davantage en sept ans que ce qui a été réalisé en trente-trois. La marche est très haute. Qu’il s’agisse de la façon de se déplacer, de se loger, de produire, de consommer, sans parler de la nécessité de protéger et de restaurer les écosystèmes naturels, les efforts s’annoncent inédits. Au moment même où l’Allemagne, le Royaume-Uni ou la Suède sont obligés d’assouplir leur agenda climatique en revenant sur des mesures mal acceptées par la population, Emmanuel Macron croit pouvoir avancer sans heurter les Gilets jaunes. Les ajustements annoncés ne débouchent donc pas sur le nécessaire changement d’organisation économique. Mais à ne pas vouloir angoisser les Français aujourd’hui, le danger est de les exposer demain à un réveil d’autant plus difficile.

Matthieu Goar : « Le 25 septembre, Emmanuel Macron a présenté sa vision d’une « écologie à la française » censée répondre à un triple défi, « celui du dérèglement climatique et de ses conséquences, celui d’un effondrement de notre biodiversité et celui de la rareté de nos ressources » Mais toute idée de contraintes ou de changements sociétaux est repoussée. « Nous avons décidé d’encourager nos compatriotes à changer plus vite, sans interdiction, en les incitant », a-t-il ainsi assumé au sujet des chaudières à gaz. Des sujets comme la limitation de la vitesse à 110 km/h sur l’autoroute – proposée par la convention citoyenne pour le climat en 2019 –, la consommation de viande ou l’usage de l’avion n’ont même pas été abordés.

Le chef de l’Etat s’est contenté de parler de façon très vague d’« une politique de transformation de tous les comportements », mais il a aussi annoncé que le leasing permettant l’accès à une voiture électrique pour 100 euros par mois vingt-quatre heures après avoir annoncé une nouvelle aide au carburant de 100 euros pour les gros rouleurs les plus modestes. Il s’est engagé à reprendre dès octobre le « contrôle du prix de notre électricité » pour qu’elle soit « soutenable à la fois pour nos entreprises et pour nos ménages ». Sans entrer dans le débat immense sur les restructurations, M. Macron a aligné les objectifs : 1 million de véhicules électriques et 1 million de pompes à chaleur devront être produits en France d’ici à 2027… »

Le point de vue des écologistes de rupture

Avec ce mélange macronien d’un refus des interdictions et d’une ambition assumée pour une « croissance verte », teintée d’un techno-solutionnisme sur l’hydrogène ou le captage du carbone, Emmanuel Macron dessine sa propre vision d’une écologie « positive ». Une façon de se tenir en équilibre instable entre « l’écologie du déni » de l’extrême droite et « l’écologie de la cure » incarnée par une infime partie des écologistes institutionnels. « Notre écologie est aussi une stratégie de préservation de notre richesse de biodiversité et au fond, de nos paysages qui constituent l’identité profonde de la France », avait conclu le président de la république, comme si la transition n’était qu’une douce évolution pour mieux protéger les modes de vie !

Voici de notre côté les modalités d’une rupture avec la société croissanciste

1 Analyse simplificatrice de la réalité

# Approche systémique des interdépendances avec la biosphère

2 Crise conjoncturelle, politique de court terme

# effondrement de la civilisation thermo-industrielle

3 Priorité à la croissance et risque de récession/dépression

# Maîtrise de la décroissance

4 Acceptation des inégalités de revenus

# Revenu maximum autorisé

5 Appropriation privée privilégiée

# Gestion collective des biens communs

6 Ecologie non punitive, soutien des intérêts à court terme

# Ecologie de l’état d’urgence, garante du long terme

7 Dualisme homme / nature

# Biocentrisme et écocentrisme

8 Ecologie superficielle, réparatrice

# Ecologie profonde, éliminant les causes des dysfonctionnements

9 Priorité à l’économie, censé résoudre tous les maux

# ressources naturelles, base de l’économie et des avancées sociales

10 Mythification du PIB, option quantitative

# Priorité au qualitatif, IBED (indicateur de bien-être véritable).

11 Ignorance des limites biophysiques

# Sens des limites matérielles et éthiques

12 Civilisation minière, extractiviste

# Utilisation uniquement de ressources renouvelables

13 Alignement à gauche ou à droite

# Ecologie au delà des divisions politiques traditionnelles

14 Loi du marché et individualisme

# Lois de la nature et apprentissage du collectif

15 Règne de la concurrence et de la compétition

# Apprentissage de la coopération et du partage

16 Marchandisation des rapports sociaux, culte de l’avoir

# Valorisation des relations, des liens, de l’être

17 Mondialisation des échanges et libre-échange

# Démondialisation, relocalisation, monnaies locales

18 Politique macroéconomique de relance

# Politique de sobriété énergétique et de partage

19 Politique de l’emploi global

# Politique de l’emploi utile

20 Salarisation et emplois publics

# Augmentation de la part des profession indépendantes

21 Soutien aux grandes entreprises

# Valorisation des artisans, paysans et PME

22 Soutien à l’agro-industrie, la monoculture

# Agriculture biologique, polyculture/élevage

23 Priorité à la technoscience

# Mise en œuvres de techniques douces, appropriées

24 Politique d’infrastructures, de grands projets

# Rapprochement des lieux de vie, de travail et de loisirs

25 Option tout voiture

# Dévoiturage

26 Politique d’allongement des études

# Apprentissage court du savoir être et du savoir faire

27 Priorité à la spécialisation dans une société complexe

# Formation à la polyvalence dans un système productif simplifié

28 Accentuation de la division du travail

# Raccourcissement du détour de production

29 Allongement des circuits de distribution

# Priorité aux circuits courts, alimentaires, biens et services

30 Prime à l’intérêt national dans négociations internationales

# Vers l’union des peuples, nous n’avons qu’une planète

31 Politique militariste

# Apprentissage de l’action non violente

32 Maintien de la force de frappe

# Désarmement nucléaire unilatéral

33 Politique militaire interventionniste sur les théâtres extérieurs

# Neutralité militaire de la France vis-à-vis de l’étranger

34 Journée d’appel et de défense

# Initiation à l’objection de conscience

35 Assistance du berceau à la tombe

# Recherche des solidarités de proximité

36 Politique familiale nataliste (allocations familiales, quotient…)

# Neutralité de l’Etat, éducation à la capacité de charge

37 Etatisation, centralisation

# Soutien à la formation de communautés de résilience

38 Politique de l’offre d’énergie (nucléaire et renouvelable)

# Incitation à la réduction des besoins en énergie exosomatiques

39 Marché carbone

# Taxe carbone avec prévision carte carbone (rationnement)

40 Soutien de la consommation par la publicité

# Suppression de la publicité, indicateurs qualité/prix

41 Effet de mode, obsolescence programmée

# Produits de base, réparables, recyclables…

42 Politique du spectacle (foot, société de l’écran…)

# Loisirs de proximité avec contact physique direct avec autrui

En savoir plus avec notre blog biosphere

post-covid, pour une écologie de rupture (avril 2020)

extraits : On ne peut que constater : les militants de la décroissance l’ont rêvé, le coronavirus l’a fait. L’activité productive est à l’arrêt, le krach boursier est arrivé, les perspectives de croissance sont en berne, les déplacements sont réduits au strict minimum, les voyages par avion sont supprimés, les enfants restent en famille chez eux, le foot-spectacle se joue à huis clos et la plupart des gouvernances sont remises en question. Les politiques commencent alors à réfléchir aux fondamentaux…

pour une écologie de rupture avec le système (2016)

extraits : Depuis le rapport Meadows en 1972, nous savons qu’une croissance infinie dans un monde fini est impossible. Il n’y aura pas d’énergie de substitution aux énergies fossiles. Il faut donc penser l’avenir en termes de sobriété et de résilience. Face à l’ampleur de la transformation nécessaire, l’imaginaire écolo ne peut pas se résumer à « l’immédiateté » imposée par le système productiviste. L’écologie est aussi un art de vivre, une philosophie de la sobriété. Nous devons être porteurs et acteurs de ce message…

Une écologie de rupture contre la société croissanciste (2015)

extraits : L’idée-clé de l’écologie politique, c’est la conscience aiguë que nous avons déjà dépassé les limites de la biosphère. Il faudra donc faire des efforts dans tous les domaines. Il ne s’agit pas d’écologie punitive, mais de soutenir une écologie de rupture. A ceux qui lui demandaient comment sortir de la crise, l’écologiste Teddy Goldsmith répondait en souriant : « Faire l’exact contraire de ce que nous faisons aujourd’hui, et ce en tous les domaines. »

Macron, « l’écologie à la française » !!!! Lire la suite »

Macron aime la bagnole, pas l’écologie !

Dimanche 24 septembre 2023, décidé moins de vingt-quatre heures plus tôt, le chef de l’Etat s’est exprimé sur les grands sujets – immigration, écologie, inflation, géopolitique –. Face aux prix de l’essence qui s’envolent, Emmanuel Macron ose : « On aime la bagnole. Et moi, je l’adore ». Ouah ! On en change rien, victoire, tu régneras, oh joie tu nous sauveras, roulez petits bolides !

Emmanuel Macron : « Il y a un chemin d’écologie à la française qui est une écologie de progrès, qui n’est ni le déni ni la purge… Par rapport au débat sur le pouvoir d’achat, l’écologie est la réponse, notamment grâce aux véhicules électriques. Parce qu’en France on aime la bagnole. Et moi, je l’adore… On n’interdira pas les chaudières au gaz… A ceux qui réclament une grande mesure, je promets de sortir du charbon d’ici à 2027… Je prolonge l’aide ciblée de l’État, jusqu’à 100 euros par an, pour les ménages les plus modestes. La transition écologique n’est pas l’annonce d’une tragédie, mais peut apporter au pays des emplois et de la prospérité, et donc lutter contre l’inflation. »

Le point de vue des écologistes pas dupes

baobab dégingandé : Donc il va faire ce qu’il avait déjà dit qu’il allait faire, mais sans obliger personne, et en même temps il sera toujours possible de faire l’inverse. Il avait déjà promis la sortie du charbon… pour 2022 !

PIER A. : « En France, on aime la bagnole ». Le populisme ça peut aussi être libéral catho de centre droit.

Benoittttt : Il a même ajouté, « on aime la bagnole. Et moi, je l’adore » ?? Il y a 50 ans sous Pompidou, je comprendrais, mais en 2023, au vu de la place de ce moyen de transport dans les émissions de GES c’est désolant. Un vrai gamin attardé !

Raphaurel : Le plus grand défi du siècle est la lutte contre le réchauffement climatique. Nous ne pouvons pas accepter que la réponse à ce défi soit de passer au tout électrique ! Je ne peux pas croire que Macron pense ce qu’il dit. Il est jeune, il ne pourra pas être réélu, il DOIT prendre des décisions difficiles. C est notre surconsommation de tout qui doit changer et non remplacer une voiture polluante contre une autre voiture certes non émettrices de CO2 mais tout aussi polluante pour sa fabrication et la production d’énergie.

Autre Citoyen : Plutôt que d’être fan de la bagnole, il ferait bien d’être fan des transports en commun… Quant à la vente à perte des carburants, mais quel amateur !

Jacques Py : Parler de sortir du charbon quand nous n’avons presque plus de centrales à charbon, comment nommer cela ? Prendre les Français pour des jambons !

Liberté Egalite Fraternite et Republique : Un Président pris en étau entre l’idéologie politique néolibérale transnationale qu’il porte, exigeant de la croissance pour augmenter les bénéfices non redistribués par le pillage des ressources limitées naturelles intergénérationnelles de la planète ET la protection des humains de travailleurs, consommateurs nécessaires à l’augmentation du PIB.

Savonarole : Un président d’immense stature dont on se souviendra longtemps ! Au moins 5 min.

Notre adoration pour Macron est sans limites, lire nos écrits antérieurs

E. Macron invente la « sobriété raisonnable » !!

extraits : Emmanuel Macron, ce vieux jeune qui vit encore aux temps de l’abondance à crédit, ânonne l’idée de sobriété sans vouloir nous avertir que le futur proche ne sera pas une allée bordée de roses, mais de larmes….En visite au Salon du Bourget, lundi 19 juin 2023, le chef de l’État affirme qu’il faut distinguer une sobriété « bien organisée, non punitive », d’une sobriété « punitive » : « La première serait comprise par tous et raisonnable, tout le monde fait des efforts qui permettent de faire des économies d’énergies. L’autre en viendrait à dire « il faut tout arrêter, et il faut renoncer à la croissance. Je ne la crois pas raisonnable…

Macron, un technolâtre de l’aviation

extraits : Le président de la République a annoncé une salve d’investissements pour créer une filière française de biocarburants baptisée « BioTJet ». Macron enfile les oxymores comme des perles : «  avion ultrasobre, appareil zéro émission, des carburants aériens durables, moteur à biocarburant, kérosène durable… » La voiture propre et la croissance verte passent dans la stratosphère, le greenwashing fait toujours ses ravages…

Macron subventionne les émissions de GES

extraits : La première ministre, Elisabeth Borne vient d’annoncer (décembre 2022) le versement en 2023 d’une « indemnité carburant » de 100 euros. Ce gouvernement soi-disant libéral (en faveur de la loi du marché) s’ingénie à masquer l’indicateur prix, la seule boussole pour nos comportements marchands dans nos sociétés trop complexes. Dans un contexte de réchauffement climatique, l’État doit non seulement laisser les automobiliste gérer par eux-mêmes leur budget « effet de serre », mais il aurait du, dès le premier rapport du GIEC sur le climat, augmenter chaque année la taxation du pétrole pour inciter la population à se passer de véhicule individuel pour privilégier par ses choix de vie les modes de déplacement doux pour la planète…

Emmanuel Macron cause, la planète trinque

extraits : La lutte contre le réchauffement climatique, l’épuisement des ressources et la crise de la biodiversité suppose de revoir en un temps record tout notre modèle de développement, le président de la République ne le sait pas encore. Il  aura fallu attendre quelque quarante-cinq minutes pour que la journaliste de France 2, Caroline Roux, aborde en octobre 2022 la question de l’urgence climatique, interrogeant Emmanuel Macron sur les véhicules électriques…

L’effondrement en marche avec Macron

extraits : L’exhortation à la sobriété énergétique lancée par Emmanuel Macron le 14 juillet 2022 est certes salutaire, mais il est regrettable qu’elle soit plus le produit des tensions sur les approvisionnements en énergies fossiles de la France du fait de l’invasion russe de l’Ukraine que celui d’un volontarisme climatique assumé. La réponse du gouvernement français reste « insuffisante » pour « garantir un avenir vivable », avait averti en juin le Haut Conseil pour le climat (HCC), dans son quatrième rapport annuel. Les propositions de la convention citoyenne pour le climat qui allaient dans le sens de la sobriété n’ont pas été retenues par Macron…

Les écolos, choyés par Emmanuel Macron ?

extraits : « La politique que je mènerai dans les cinq ans à venir sera écologique ou ne sera pas », a lancé le président sortant lors de son meeting à Marseille en avril 2022. Emmanuel Macron s’engage à nommer un premier ministre « directement chargé de la planification écologique ». Il propose aussi d’organiser « une fête de la nature » chaque année, à l’image de la Fête de la musique…

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Église verte et écopsychologie

Notre blog biosphere reçoit un grand nombre d’informations dont deux récentes abordent d’une certaine façon la définition du Soi et les pratiques du travail qui relie. Sociétés premières et religions du livre commencent à se rejoindre dans une vision non anthropocentrée de notre planète.

    • Église verte est née dans le sillage de la mobilisation chrétienne pour la COP21 en 2015 à Paris et des retombées de l’encyclique du pape François “Laudato Si’“, sur le soin de la maison commune, sortie en 2015 également. Le label Église verte fête le 16 septembre ses 6 ans. Il est porté par le Conseil d’Églises Chrétiennes en France, la Conférence des Évêques de France, la Fédération Protestante de France et l’Assemblée des Évêques Orthodoxes de France. Cet outil pratique est conçu pour aider les communautés chrétiennes à progresser sur le chemin de la conversion écologique.
    • Les éditions wildproject nous offrent un extrait du livre : l’article de la thérapeute Jeannette Armstrong “Les gardien·nes de la Terre” (PDF)fondateur de l’écopsychologie. Selon la conviction d’Armstrong, notre responsabilité la plus essentielle est d’apprendre à relier l’intégralité de notre moi individuel et de notre moi communautaire à la terre : « Nous les Okanagan (Amérindiens), considérons que la personne dans son entièreté possède quatre principales facultés qui fonctionnent ensemble : le moi physique, le moi émotionnel, le moi pensant, intellectuel et le moi spirituel. Ces facultés peuvent être librement décrites comme ce qui nous relie au reste de la création de manière saine… »

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Pour reverdir l’être, le SOI ouvert au monde

Toile de la vie et Travail qui relie

Pour comprendre l’écopsychologie en quelques mots

L’écopsychologie qui soigne l’esprit et sauve la Terre

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Les penseurs de l’écologie en quelques mots

Jean-Jacques Rousseau : il n’y a pas un être dans l’univers qu’on ne puisse, à quelque égard, regarder comme le centre commun de tous les autres, autour duquel ils sont tous ordonnées, en sorte qu’ils sont tous réciproquement fin et moyens relativement aux autres… Le premier qui, ayant enclos un terrain, s’avisa de dire « Ceci est à moi » est à l’origine de bien des crimes, des guerres, des misères et des horreurs.

John Muir : Il utilisa sa notoriété d’écrivain dans on combat préservationniste, il milita pour la crétion du Yosemite Park, fonda le Sierra Club et partit en 1903 camper trois nuits avec le président Theodore Roosevelt… qui signa ensuite le décret élargissant à son périmètre actuel le Yosemite Park.

Rachel Carson : son livre, Printemps silencieux (1962) est à l’origine d’une campagne pour l’interdiction du DDT qui aboutit aux États-Unis en 1970. Une autre conséquence fut la création, la même année, de l’Agence de protection de l’environnement, à qui la régulation des pesticides fut confiée alors qu’elle relevait jusque-là du département de l’agriculture des États-Unis.

Ruth Harrison : son livre, Animal Machines (1964) est à la cause animale ce que Printemps silencieux est à la cause environnementale. Il relate le remplacement des fermes traditionnelles dans les années 1950 par les fermes-usines, avec leur obsession de grande taille et du rendement, de confinement hors sol des animaux. Il a suscité le comité Brambell sur le bien-être des animaux d’élevage.

Arne Naess : L’écologie superficielle pense les problèmes en termes de responsabilité interhumaine, le courant de l’écologie profonde les formule en termes de respect des entités du monde naturel dont on reconnaît la valeur intrinsèque. La valeur des formes de vie non humaines est indépendante de l’utilité qu’elles peuvent avoir pour des fins humaines limitées.

Jacques Ellul : l’homme des temps modernes croit se servir de la technique alors que le plus souvent, c’est lui qui la sert. Combinée avec des États omnipotents, la technique moderne devient vite « totalitaire ».

Ivan Illich : Les institutions modernes, dotées de moyens techniques et bureaucratiques considérables, ne peuvent s’empêcher de croître au point que, franchissant un certain seuil, elles finissent par produire le contraire de l’effet recherché. Ce qu’il baptise du nom de « contre-productivité ». Une société conviviale est une société où l’outil est au service de la personne intégrée à la collectivité, et non au service d’un corps de spécialistes. L’éducation à la survie dans ce monde artificiel commence avec les premiers manuels scolaires et finit par le mourant qui s’agrippe aux résultats de ses examens médicaux. Est-e cela vivre, dis-moi ?

René Dumont, candidat écolo à la présidentielle de 1974 : « Nous allons bientôt manquer d’eau et c’est pourquoi je bois devant vous un verre d’eau précieuse puisque, avant la fin du siècle, si nous continuons un tel débordement, elle manquera… » Il écrivait déjà en 1973, « Un âne marche mieux qu’un tracteur sans essence » et « le chien américain dépense plus que l’Indien ». L’étude de la production alimentaire à l’échelle de la planète comparée à l’évolution démographique a forgé chez lui des vues malthusiennes.

Peter Singer : inscrit la libération animale dans un sillage historique, celui de l’émancipation des Noirs et des femmes. Il s’agit d’élargir le cercle de la considération morale, comme on l’a élargi auparavant par-delà les races et le sexe. Il popularise le mot antispécisme, c’est à-dire le combat contre le spécisme (néologisme forgé en 1970 par Richard Ryder), une hiérarchisation arbitraire établie entre les espèces.

Françoise d’Eaubonne : parlez-lui d’écoterrorisme, elle répondra « contre-violence ». Rien de plus qu’un retournement de l’arme de l’ennemi contre liu-même. Le 2 mai 1975, elle pose avec d’autres deux bombes artisanales qui explosent dans la centrale nucléaire en construction de Fessenheim. Le circuit hydraulique est endommagé et le chantier retardé de quelques mois. Elle dénonce aussi le lapinisme phallocratique qui conduit à la surpopulation.

Jean-Marc Jancovici : Nous sommes tous devenus des « Iron Man ». Grâce à la puissance des énergies fossiles, un Français moyen a à sa disposition l’équivalent de 427 esclaves énergétiques. Or nous vivons sous une double contrainte : nous arrivons au bout des énergies fossiles et nous sommes meurtris par le réchauffement climatique. En clair nous allons avoir de plus en plus de problèmes et de moins en moins de moyens pour les résoudre. L’idée d’une croissance vert est absurde, et plutôt que de subir la décroissance mieux vaut l’organiser.

Greta Thunberg : A l’heure du souper, l’alarme incendie retentit. Vous constatez que le toit de votre maison est la proie des flammes, mais comme si de rien n’était, vous entrez terminer votre dîner. Après tout, vous aviez prévu de regarder un film avant d’aller vous coucher. « Je suis désolée, mais cela n’a aucun sens », dit Greta en mars 2020 aux eurodéputés à qui elle vient de décrire cette scène.

(extraits du livre « Les penseurs de l’écologie » (Les Liens qui Libèrent, 2023))

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La bibliothèque idéale de l’écologie

les penseurs traités par ce post : Françoise d’Eaubonne, Élisée Reclus, James Lovelock, André Gorz, David Abram, Aldo Leopold, Hans Jonas, Günther Anders, Jürgen Habermas, Ulrich Beck.

L’histoire de la pensée écologique en quelques citations

les penseurs traités par ce post : Georges Canguilhem en 1973, Arne Naess en 1976, Daniel Cohn-Bendit en 1997, Pascal Durand en 2012, José Bové en 2013, Benoît Lechat en 2014, Michael Jacobs en 2015, Nicolas Hulot en 2016.

Les penseurs de l’écologie en quelques mots Lire la suite »

Fragments de vie, fragment de Terre (suite)

Cette autobiographie de Michel SOURROUILLE, « Fragments de vie, fragment de Terre (Mémoires d’un écolo) », est éditée chaque jour par épisode sur ce blog biosphere tout au cours des mois de juillet et août.

Utopie, ce qui n’est pas encore réalisé !

Face à la la crise démographique

Dès la fin du XXe siècle, la capacité de charge de la planète est déjà dépassée, il y a surpopulation manifeste. En effet un niveau donné de population est indissociable de l’état des ressources alimentaires et de l’échelle des besoins. L’empreinte écologique des pays riches est telle qu’elle n’est pas généralisable et des émeutes de la faim se sont multipliées durant la première moitié du XXIe siècle. Le diagnostic de Robert Malthus a refait surface, une population ne peut s’accroître plus vite que ce que le milieu naturel peut lui offrir durablement. Les problèmes de fécondité de la terre issus de la surexploitation des sols sont devenus apparents, ce qui accroît d’ailleurs le sentiment général de surpopulation. La destruction de l’humus, la déforestation, la stérilisation des terres, la désertification, l’épuisement des ressources halieutiques ont continué leurs ravages pendant tout le début du XXIe siècle.

En 2050, la planète compte près de 10 milliards d’habitants d’humains. Nous sommes confrontés à deux problèmes interdépendants, le niveau de la population et l’état des ressources. La maîtrise de la fécondité est devenue incontournable, tous les moyens sont utilisés : liberté de contraception et d’avortement, suppression des allocations familiales car l’Etat se veut neutre financièrement par rapport aux naissances voulues par les couples. L’approche fiscale de la fécondité est remplacée par la formation des jeunes et des adultes en matière de poids démographique et de responsabilité dans l’éducation des enfants. A cette approche malthusienne se superpose l’apport d’Arne Naess : « si l’épanouissement de la vie et des cultures humaines est compatible avec une diminution substantielle de la population humaine, l’épanouissement de la vie non-humaine requiert une telle diminution. » Le maintien de la biodiversité est facilitée par la maîtrise de la fécondité humaine.

En 2050, la relocalisation de la production agricole et la généralisation de l’agriculture biologique ne peut suppléer complètement à l’apport interrompu du pétrole (engrais, énergie, pesticides, etc.) propre à une agriculture productiviste. Il faut donc changer de régime alimentaire. De gré ou de force, nous sommes tous devenus quasi-végétariens, le complexe agroalimentaire a fait faillite. La sécurité alimentaire exigée par les pays du Nord a été remplacée par l’idée de souveraineté alimentaire de chaque territoire. Les jardins collectifs ont été fortement encouragés par mise à disposition gratuite de terrains aménagés avec une double vocation alimentaire et de création de lien social.

Technologique, limitation de l’innovation

Les sociétés « d’avant le développement » obéissaient principalement à des logiques de « reproduction » et non de « production ». Elles visaient avant tout à reproduire du lien social, ce qui supposait de garder le sens des limites (Frédéric Durand). Leur but premier était de permettre la reproduction d’une communauté, à la fois démographiquement et culturellement. On n’adoptait une innovation que si elle ne mettait pas en péril l’équilibre général. Cette conception montre la voie de l’après-développement (François Partant). Pendant la révolution industrielle, les avancées de la science sont spectaculaires, mais nécessitent plus que jamais à l’échelle de la planète un encadrement éthique. L’innovation se recentre sur les besoins fondamentaux de l’humanité (alimentation, santé, lien social).

En 2050, la notion de progrès technique ainsi que l’emprise de la technique sur la société est remis en question. Il est dorénavant admis par tous que les techniques thermo-industrielles sont conditionnées par les mécanismes de l’entropie. Nicholas Georgescu-Roegen, qui avait proposé dès 1979 un programme bioéconomique, est devenu un auteur de référence. La qualité d’une civilisation ne se juge plus par son degré de technologie et d’accumulation matérielle. Les enseignements de Jacques Ellul, Ivan Illich et quelques autres formatent la pensée de chacun. La division du travail, complément obligé de la complexification technologique, est simplifiée. Le détour de production n’est plus allongé comme précédemment, mais au contraire raccourci. Le transhumanisme n’est plus défini comme une symbiose entre l’homme et la machine, mais comme l’ouverture de l’humanisme aux générations futures et aux non-humains.

En 2050, il s’agit dorénavant de limiter la dégradation des écosystèmes en abandonnant nos moyens techniques disproportionnés (pesticides, OGM , nanotechnologies, géo-ingénierie…) et d’échapper à l’idéologie de la technoscience. Le progrès culturel est prépondérant et conditionne l’acceptation sociale des innovations technologique. La compréhension des mécanismes de la biosphère et la compassion envers autrui forment le socle des techniques éducatives. Dès le plus jeune âge, on a appris les méfaits de la mégamachine et les avantages des techniques douces. Le système techno-médical ne recherche plus à repousser la mort à n’importe quel prix (euthanasie accepté).

La nature des communications : valorisation des rapports de proximité

Au début du XXIe siècle, nous avons pris progressivement conscience de l’enfermement planétaire (André Lebeau). De plus le choc pétrolier de 2027 a fait ressentir à tous la fin de l’énergie fossile à bas prix : le coût des déplacements explose. Il y a eu une limitation générale, volontaire ou forcé, des déplacements physiques. Les villes compactes se sont multipliées, accompagnant le processus de désurbanisation. La voiture individuelle est en voie de disparition, comme le transport par avion et les trains à grande vitesse. Ce qui domine, c’est le concept d’écomobilité, qui a rejeté de fausses solutions techniques comme la voiture électrique. Le slogan du XXe siècle, « plus vite, plus loin, plus souvent et moins cher » est devenu « moins vite, moins loin, moins souvent et beaucoup plus cher ».

En 2050, la mobilité géographique comme la mobilité professionnelle est réduite, le travail s’enracine de plus en plus sur un territoire déterminé. Le tourisme international a presque complètement disparu et il est mal accepté par les autochtones. Même s’il y a encore quelques voyageurs, les migrations de masse apparaissent dorénavant comme des impossibilités majeures. Notons que plus on attendra pour lutter contre le réchauffement climatique en réduisant drastiquement la combustion de ressources fossiles, plus il y aura de réfugiés climatiques et plus les replis identitaires seront importants (cf. Harald Welzer, Les guerres du climat). 

En 2050, la révolution numérique commence à apparaître comme une impasse. La génération de l’écran aura disparu faute d’écrans individuels à cause des grandes pannes récurrentes d’approvisionnement électrique. Les moyens de communication au loin (téléphone, télévision), facilités par l’usage de l’électronique, sont utilisés de façon collective et parcimonieuse. Ils permettent de conserver un lien avec la communauté mondiale, la planète est aussi notre village. Les activités de loisirs se recentrent sur la communauté proche. La société du spectacle est progressivement remplacée par des activités ludiques de proximité (sport, musique, etc.) dont les personnes sont elles-mêmes les acteurs.

Les acteurs du changement : de la toute puissance étatique à l’autonomie individuelle

Alors que le système socialisant privilégiait pendant les Trente Glorieuses l’intervention de l’Etat (pratique keynésienne, Etat-Providence), au cours des années 1980 le tournant libéral privilégie les entreprises et la responsabilité individuelle. Mais au-delà de cette dichotomie apparente, chaque nation était en fait représentée par un Etat de type « national-socialiste », c’est-à-dire un système qui considère les intérêts de ses ressortissants et non l’intérêt général. Au moment des premiers choc écologiques de la première moitié du XXIe siècle, la tendance mondiale a été au renforcement du pouvoir d’Etat dans chaque nation pour faire face à la crise ultime. En effet il a fallu prendre des décisions autoritaires et provoquer une mobilisation sans précédent des citoyens : à crise systémique, réponse systémique. Le sentiment d’urgence était généralisé, les directives acceptées ; la crise économique était telle que le consensus allait de soi (écocitoyenneté). Mais les pays renforçaient aussi leurs liens réciproques. Le RES (Rapport Europe Soutenable) appliqué dans l’Union européenne a été un facteur prépondérant de l’évolution mondiale.

Pourtant un système démocratique durable est d’autant mieux préservé quand l’Etat central a programmé la mise en place d’une autonomie territoriale. Dès le début du 21e siècle, des communautés de résilience se préparaient au pic pétrolier, au changement climatique et à la crise économique afin de mieux y résister (ne pas confondre avec les survivalistes). Ce processus rend obsolète en 2050 l’existence d’un Etat central fort. La pratique de l’Etat « national-socialiste » est abandonnée. Les relations de production et de consommation se recentrent sur le territoire (relocalisation, désurbanisation, ruralisation). L’agriculture et l’artisanat ont retrouvé une place stratégique. Les études sont courtes, centrées sur l’apprentissage des techniques douces et l’expérience de la convivialité. Les individus savent maintenant que leur responsabilité personnelle passe par la prise en compte de leur responsabilité collective, ils raisonnent glocal, à la fois global et local.

En 2050, nous passons de la toute puissance étatique à l’autonomie individuelle. La philosophie des Lumières se concrétise par la maîtrise individuelle de ses gestes quotidiens. Les militants des syndicats et des partis politiques savent dorénavant qu’on doit personnellement vivre en harmonie avec les principes démocratiques ET écologiques. Ainsi le pôle écologique du parti socialiste français avait adopté en 2010 le principe suivant : « Le Pôle écologique du PS invite ses membres et l’ensemble des citoyens à faire preuve le plus possible dans leur vie de sobriété énergétique et d’autolimitation pour construire ensemble une société plus conviviale et plus égalitaire. » La recherche des limites est un passage obligé pour permettre un équilibre durable entre les possibilités de la planète et l’harmonie sociale, mais la simplicité volontaire ne se décrète pas.

La question ontologique : les valeurs comme processus de hiérarchisation des choix

Au début du XXIe siècle, les hommes n’ont pas su réagir à l’urgence environnementale. Comme Hans Jonas l’avait pressenti, il était naïf d’espérer pouvoir résoudre le problème simplement au moyen de techniques « vertes ». C’était aussi un leurre d’espérer résoudre la crise écologique au travers de simples mesures économico-politiques. A cause de cet échec, la thèse selon laquelle le XXIe siècle sera le siècle de l’écologie peut être accréditée. C’est en effet d’une modification de notre rapport à la nature, mais aussi d’une révision de nos valeurs dont nous avons besoin. Le vœu majeur de notre temps me semble adéquatement formulé dans l’aspiration à une philosophie de la nature qui cherche à concilier l’autonomie de la raison avec une valorisation intrinsèque de la nature (Vittorio Hösle).

En 2050, une nouvelle ontologie commence à remplacer tant les croyances religieuses que la croyance en la croissance capitaliste. Nous sommes en passe d’acquérir un nouvel horizon éthique, du type écologie profonde (Arne Naess), basé sur le plus grand respect des humains (généralisation de la non-violence) comme des non-humains. Pour arriver à cet état d’esprit, il a fallu l’échec de l’écologie superficielle ou réparatrice ; la crise écologique a en effet permis de mettre en question l’analyse des spécialistes pour adopter une approche systémique.

En 2050, nous avons compris que l’humanité sans la nature ne serait plus humaine. Opposer l’amour des hommes et l’amour de la nature serait une erreur, l’espèce humaine n’étant qu’un élément de la nature. Il y a un approfondissement de l’humanisme qui abandonne alors les illusions de l’anthropocentrisme.

Le processus de décision : vers une démocratie élargie

Autrefois le système démocratique était ethnocentré, délibère un groupe particulier à un moment donné. La nation était, au moins depuis le XIXe siècle, le nouveau paradigme. Il est cependant clair que la nation est une catégorie nécessairement anti-universaliste. Ce système, véritable exercice d’un rapport de force entre intérêts divergents, avait fait la preuve de son inefficacité, par exemple dans la lutte contre le réchauffement climatique. Mais l’urgence écologique est reconnue au début du XXIe siècle comme fondamentale pour l’ensemble de l’humanité, on ne peut mener qu’une lutte supranationale au-delà des nations. Le choc des crises écologiques remet même en question le paradigme de la démocratie représentative habituelle.

En 2050, nous avons ressenti le besoin d’un équivalent dans le droit public de la figure du tuteur présente dans le droit civil. Les parlementaires ne défendent pas, dans un Etat de droit moderne, les intérêts de leurs électeurs ; ils défendent l’ensemble du peuple. Les décideurs ont dorénavant pris conscience que « l’ensemble du peuple » ne se réduit pas aux générations actuelles. Chaque membre d’une instance délibérative sait se situer à la fois dans le long terme et dans l’espace élargi. Chacun se fait l’avocat des acteurs-absents (ou tiers-absents), à savoir les habitants des autres territoires, les générations futures, mais aussi les non-humains (la biodiversité).

En 2050, l’éclatement du pouvoir politique entre différentes communautés en charge de son propre écosystème permet de renforcer la démocratie directe. On applique le principe de subsidiarité dans un monde complexe où se côtoie encore des pays isolés, des nations autonomes, des conglomérats d’états (L’Union européenne ?) et des instances qu’on n’ose plus qualifier de transnationales. Mais qu’on ne s’y trompe pas, ce n’est ni l’action individuelle ou l’action collective, ni les institutions ou les Etats, ni la politique ou la morale qui fabriquent notre avenir, c’est l’interaction spéculaire : « Tu fais, parce que je fais, parce que nous ferons tous de même ».

Je ne sais pas si cette utopie 2050 aura un grand avenir. Elle est sur mon blog depuis 2009, aucun syndicat ou parti politique ne m’a encore contacté pour la faire sienne ! Mais je ne désespère pas… car mes perpspectives 2050, si tout se passe au mieux, devraient s’étaler sur au moins un siècle, donc bien au-delà de mon existence personnelle puisque je suis né en 1947.

Je pense en particulier que nous sommes en passe d’acquérir une nouvelle ontologie, un nouvel horizon éthique, du type écologie profonde, basé sur le plus grand respect des humains (généralisation de la non-violence) comme des non-humains. L’écologie profonde est une philosophie, une recherche de la sagesse. C’est pour moi les fondements d’une pensée qui est seule à même de nous donner des repères stables dans le monde conflictuel qui s’annonce. (la suite, demain)

Une vision d’ensemble de cette autobiographie :

Mémoires d’un écolo, Michel SOURROUILLE

00. Fragments préalables

01. Un préalable à l’action, se libérer de la religion

02. Une pensée en formation, avec des hauts et des bas

03. En faculté de sciences économiques et sociales, bof !

04. Premiers contacts avec l’écologie

05. Je deviens objecteur de conscience

06. Educateur, un rite de passage obligé

07. Insoumis… puis militaire !

08. Je deviens professeur de sciences économiques et sociales

09. Du féminisme à l’antispécisme

10. Avoir ou ne pas avoir des enfants

11. Le trou ludique dans mon emploi du temps, les échecs

12. Ma tentative d’écologiser la politique

13. L’écologie passe aussi par l’électronique

14. Mon engagement associatif au service de la nature

15. Mon engagement au service d’une communauté de résilience

16. Ma pratique de la simplicité volontaire

17. Objecteur de croissance, le militantisme des temps modernes

18. Techniques douces contre techniques dures

19. Je deviens journaliste pour la nature et l’écologie

20. Une UTOPIE pour 2050

21. Ma philosophie : l’écologie profonde

22. Fragments de mort, fragment de vie

23. Sous le signe de mon père

Fragments de vie, fragment de Terre (suite) Lire la suite »

Fragments de vie, fragment de Terre (suite)

Cette autobiographie de Michel SOURROUILLE, « Fragments de vie, fragment de Terre (Mémoires d’un écolo) », est éditée chaque jour par épisode sur ce blog biosphere tout au cours des mois de juillet et août.

Une UTOPIE pour 2050

Quelques idées générales : Nous avons besoin d’une utopie mobilisatrice pour répondre à la question qui se posera bientôt dans notre futur proche : comment vivre mieux avec moins ? J’ai rassemblé tout ce qui me motive dans la synthèse suivante et j’ai considéré comme hypothèse probable que les années 2030 seront marquées par la réalité physique d’un krach écologique multiple, et donc par une prise de conscience généralisée. Les années suivantes, l’humanité sera donc obligée de changer fondamentalement de paradigme, d’imaginaire collectif. Ce que nous prévoyons déjà pour 2050 est largement avéré au niveau des statistiques ; les objectifs face à une crise systémique causée par le système capitaliste et les moyens de réagir ont fait l’objet de propositions de nombreux analystes. Il n’est pas besoin de beaucoup imaginer, encore moins d’auditionner toujours plus spécialistes : il suffit de lire les écrits déjà parus.

D’ici à 2050, la synergie des crises alimentaires, énergétiques, climatiques et démographiques va entraîner une dégradation rapide et brutale du niveau de vie à l’occidentale. Face à la catastrophe annoncée, les humains vont réagir à leur manière, selon deux modalités contradictoires. Pour une part, les violences seront exacerbées, qu’elles s’exercent entre les humains ou pour piller les dernières ressources accessibles. Nous ferons aussi appel à la raison, à la coopération, au sentiment d’interdépendance. Nous ne pouvons pas déterminer à l’avance ce qui l’emportera entre la face sombre de l’individu ou l’intelligence des situations. Des analyses comme le rapport secret du Pentagone (octobre 2003) sur le changement climatique envisagent le pire, c’est-à-dire la priorité à la raison d’État et la survie des sociétés les plus combatives. Il y a aussi les pessimistes qui pensent que plus rien n’est possible, donc pourquoi agir. D’autres analystes misent sur la pédagogie de la catastrophe. En effet, le temps que nous avons pour une rupture écologique est très court, mais le sentiment de la catastrophe en marche pourrait servir de pédagogie.

Un Mouvement social-écologiste, qui voudrait préparer un avenir durable, se doit d’envisager des scénarios pour accélérer l’évolution vers des comportements écologiquement vertueux. Nous sommes obligés de nous confronter aux limites de notre planète, notre volonté doit aller en ce sens : la volonté politique liée à la nécessité écologique. C’est l’objectif de l’écologie politique, c’était par exemple la vocation des Verts en 1984 ou la création mort-née du pôle écologique du Parti socialiste. Un parti ne peut pas faire l’impasse sur l’avenir de tous les êtres vivants, sauf à admettre qu’il ne s’occupe que du bien-être actuel de la société française. Un parti digne de ce nom doit se montrer capable d’un véritable projet alternatif pour un avenir durable. Il s’agit de concilier le volontarisme politique et le sens de l’utopie dans un contexte actuel qui nous fait déjà penser que 2050 sera profondément différent de ce qu’a construit la société thermo-industrielle en deux siècles.

Un scénario écolo futuriste, même s’il paraît utopique, n’est en rien de la science fiction. En 1974, Joël de Rosnay présentait un programme de « voyage en écosocialisme ». La déclaration du Congrès de l’Arche préfigurait une démarche écologique dès 1991. Aujourd’hui il est devenu encore plus évident que la limitation des ressources tirées de notre planète va bouleverser en profondeur notre économie et nos sociétés : l’écologie devient une variable dominante, ce qui est concrétisé dans la Déclaration de principes du parti socialiste en 2008. Voici un résumé de mon utopie, l’intégralité est lisible sur mon site biosphere de documentation des écologistes :

https://biosphere.ouvaton.org/utopie

1) les facteurs de changement : du facteur travail et capital au facteur nature

Le marxisme n’est plus adapté, lui qui posait que l’économique formait l’infrastructure sur lequel pouvait se bâtir des superstructures idéologiques et politiques. En fait la véritable infrastructure matérielle est constituée par la nature et ses potentialités à nourrir ses hôtes ; l’état des ressources naturelles et la capacité des écosystèmes à recycler nos déchets forment le socle incontournable sur lequel repose nos activités socio-économiques. La considération de l’économie biophysique (Yves Cochet) devient essentielle. Le tsunami financier de 2008-2009 n’était qu’un épiphénomène, les crises écologiques sont déjà à l’œuvre. L’idée de développement durable n’opérait guère de saut conceptuel car il assimilait croissance et développement. Vu l’interdépendance entre l’économique, le social et l’écologique, on considère dorénavant que l’économique est inclus dans le social, lui-même sous-partie des possibilités de la biosphère. Nous abandonnons progressivement l’indicateur PIB (produit intérieur brut), spécialisé dans l’accumulation économique, pour confectionner de nouveaux indicateurs de richesse. L’IDH (indicateur de développement humain) deviendra un simple élément des indicateurs de bien-être (ISH, IBED…). Les IDE (indicateurs d’écologie appliquée) seront multiples et reposeront non seulement sur la solidarité (entre les peuples et les individus) mais aussi sur le respect de tous les équilibres des écosystèmes.

En 2050, le facteur nature est devenu la catégorie essentielle de la pensée sociale ; ce sont les possibilités de la planète qui conditionnent l’activité humaine. A chaque époque son facteur déterminant. Ce sont les entrepreneurs et l’accumulation du capital qui avaient marqué les premiers temps de la révolution industrielle au XIX siècle, époque analysée par Karl Polanyi (désencastrement de l’économie) et Joseph Schumpeter (grappes d’innovation). Au moment des Trente Glorieuses, l’augmentation du pouvoir d’achat et la sécurité sociale vont valoriser le facteur travail. Mais la croissance économique a entraîné un épuisement des ressources naturelles, principalement énergétique et fossile (Richard Heinberg), et une pollution généralisée (de l’air, de la terre et de l’eau). Le développement durable s’est révélée comme un oxymore au moment du pic pétrolier, atteint dans les années 2010. Le pic énergétique est franchi dans les années 2020. Il y a des guerres. En 2030, il est devenu vraiment perceptible que le réchauffement climatique déstabilise vraiment la plupart des écosystèmes. Dans les années 2040 la société thermo-industrielle connaît le début du processus d’effondrement des civilisations complexes analysé par Joseph Tainter. On a pris conscience de la validité de la durabilité forte, les critères du libéralisme (durabilité faible) ont atterri dans les oubliettes de l’histoire. Les objecteurs de croissance ont vu se confirmer leur pronostic : une croissance sans limites dans un monde fini est impossible.

En 2050, la contre-productivité de la croissance passée a rendu nécessaire une décroissance matérielle et énergétique. On applique le scénario négawatts. Il n’existe presque plus de ressources non renouvelables, il y a recyclage et utilisation mesurée des ressources renouvelables. La sortie du nucléaire est programmée, les dernières centrales en activité ferment les unes après les autres. Au lieu de raisonner en terme de productivité du capital ou du travail, il est devenu essentiel pour les entreprises de s’exprimer en termes d’ACV (analyse du cycle de vie d’un produit). Le contact de l’activité humaine et du milieu naturel est devenu une préoccupation constante, la perte de biodiversité est enrayée. Une nouvelle spiritualité, basée sur l’interdépendance entre tous les êtres vivants, commence à être intégrée dans les morales religieuses ou laïques : la Terre-mère.

2) le concept d’égalité : abolition de la richesse économique

Alors qu’au début du XIXe siècle, le niveau de développement était relativement identique partout sur la planète, la révolution industrielle va entraîner la séparation des niveaux de vie du Nord et du Sud, ainsi que des inégalités croissantes à l’intérieur du Nord comme du Sud. La mondialisation qui s’accélère au cours du XXe siècle favorise l’apparition d’une classe globale sur toute la planète, tous les ménages qui peuvent s’offrir le luxe d’une voiture personnelle. Les riches qui détruisent la planète (Hervé Kempf), c’est la population qui pouvait vivre selon les standards de la classe moyenne occidentale. D’autre part les classes sociales avaient fait place à la fin du XXe siècle à une lutte pour le classement, stricte application du libéralisme économique. La question sociale ne peut être résolue par une lutte contre « la pauvreté », la simplicité volontaire est en effet un modèle à suivre. Par contre la misère et les inégalités sont inacceptables dans un société conviviale.

En 2050, de gré ou de force, nous avons échappé à la pression du confort. Désormais une société sans classes se bâtit progressivement. Le cycle infernal imitation/ostentation (Thorstein Veblen) qui entraînait la surconsommation est brisé, la publicité est supprimée, la marchandisation de l’existence oubliée. La réduction des inégalités est devenue une obligation matérielle en plus d’être une obligation morale ! Nous rentrerons dans une société du partage à la place de la société de l’avantage. Nous sortons du capitalisme et de la fabrique des inégalités.

En 2050, tous les revenus sont encadrés par des normes minimales et maximales, par exemple le RMA ou revenu maximal admissible. Les hiérarchies sociales disparaissent avec l’égalisation des revenus et l’égale considération de tous les statuts socioprofessionnels, intellectuels ou manuels. S’occuper de sa famille et de son entourage est devenu aussi important que son insertion professionnelle. Au niveau de la consommation, nous ne pouvons plus acheter que des produits génériques. L’esprit de compétition disparaît tant dans les relations interindividuelles que dans les relations interentreprises. On sait dorénavant que l’appropriation privée n’est pas un bon système pour gérer de façon raisonnable les rapports entre les humains et la nature, on raisonne de plus en plus en terme de « res communis », biens communs.

3) la diversité culturelle : l’idée de tolérance, moins floue que le concept de liberté

A partir des années 1980, la généralisation de la mondialisation libérale avait détruit les cultures traditionnelles, que ce soit au niveau des langues ou des traditions. Mais l’homogénéisation culturelle s’est accompagnée d’une montée des intégrismes et le fast food s’est accompagné d’une épidémie d’obésité. Dans les années 2020, les blocages croissants dans l’approvisionnement en énergie ont entraîné un recentrage sur le territoire local, une ruralisation. Après avoir acheté ses fruits et légumes de proximité (locavore), on a ressenti l’appel d’une résurgence de la culture locale. En 2050, le respect des diversités culturelles est devenue une valeur centrale.

Dans le futur, à l’opposé de la croyance en une mégapolisation du monde, littéralement hors-sol, on a réhabilité la notion du territoire comme unité vivante de la nature et de la culture. Il s’agit d’une inversion du processus accéléré de développement planétaire. Le concept d’autosoutenabilité d’unités territoriales autonomes (bio-régions) et néanmoins responsables du devenir de la planète Terre (Alberto Magnaghi) est mis en application.

En 2050, l’idée de démondialisation remplace la globalisation, le protectionnisme généralisé a succédé au libre-échange des biens et des marchandises imposé par des organisme transnationaux au service du profit à court terme. Mais la restriction dans la circulation des biens et services va de pair avec de fortes restrictions dans la circulation des personnes ; les migrations sont presque complètement arrêtées. A une époque les migrations étaient choisies par le pays d’accueil, dorénavant chacun vit sur son territoire d’origine et amené en conséquence à construire un sentiment d’appartenance durable à son écosystème particulier. Mais cette nécessité de vivre et d’agir au niveau local n’empêche pas de se ressentir comme membre de la planète toute entière (glocal), ce qui évite les replis communautaires et la stigmatisation de l’altérité.

4) la solidarité : moins de biens, plus de liens

Conformément aux prévisions du club de Rome en 1972, le libéralisme économique a fini par s’écraser contre les limites de la planète. Il avait entraîné une accumulation du capital et des marchandises (l’abondance à crédit), mais aussi une compétition brutale et stressante. En 2050, le système de concurrence est devenu l’exception, la coopération la règle. Le marché et sa loi de l’offre et de la demande a dorénavant un rôle marginal. Par exemple au niveau de l’énergie, après avoir testé le marché (le marché carbone), la taxation (contribution climat-énergie universelle), nous avons été obligés de faire appel à un rationnement (carte carbone). Il y a une planification écologique, impérative sur des problèmes essentiels comme la fourniture d’énergie et l’alimentation de base. Pour le reste, la solidarité économique reste un enjeu propre à chaque territoire, des systèmes de partage équitable ont été mis en place. Tout est interprété en termes de R (réduire, recycler, etc.) et de Dé (décroissance soutenable, désurbanisation, démondialisation, dévoiturage, effet débond…).

En 2050, la crise économique structurelle a entraîné un blocage de l’Etat Providence : endettement trop grand, difficulté de refinancement des emprunts, difficulté d’imposer davantage les contribuables d’une économie en crise. L’Etat central a abandonné la plupart de ses prérogatives au profit des entités territoriales. Il y a autonomie conviviale. Mais l’essentiel de la solidarité se passe dans des relations de proximité, par exemple à l’intérieur de chaque famille. L’assistance au niveau local, que ce soit pour s’occuper des jeunes ou des personnes âgées (à la retraite), a remplacé les systèmes d’assurance qui ont fait faillite d’autant plus que le vieillissement de la population a pesé sur les comptes sociaux dans beaucoup de pays. L’acharnement thérapeutique a disparu pour faire place à une maîtrise volontaire de la mort (DMD ou droit de mourir dans la dignité).

En 2050, la solidarité internationale ne repose plus sur l’aide alimentaire ou financière : l’autonomie des territoires est devenue la règle. Dans les pays pauvres, la lutte contre la misère absolue a remplacé l’inatteignable objectif de lutte contre la pauvreté relative. Dans les pays riches, la critique du luxe et du profit est devenue consubstantielle à l’approche écologiste. Politiser la question du luxe était d’ailleurs la seule voie pour élargir l’audience de l’écologie vers les classes populaires. La sobriété heureuse, préfigurée par les mouvements de simplicité volontaire, devient le mode de vie habituel. Par exemple les besoins de chauffage ont été limités au maximum, les logements sont compacts et les maisons passives (isolation, température réduite). La possession de résidence secondaire est considéré comme une atteinte aux équilibres écologiques. Certaines actions politiques (gratuité des transports en commun/encouragement des actions collectives d’intérêt général…) ont fait évoluer le plaisir de l’avoir et de la possession vers le plaisir du partage et du sens de la vie. (la suite, demain)

Une vision d’ensemble de cette autobiographie :

Mémoires d’un écolo, Michel SOURROUILLE

00. Fragments préalables

01. Un préalable à l’action, se libérer de la religion

02. Une pensée en formation, avec des hauts et des bas

03. En faculté de sciences économiques et sociales, bof !

04. Premiers contacts avec l’écologie

05. Je deviens objecteur de conscience

06. Educateur, un rite de passage obligé

07. Insoumis… puis militaire !

08. Je deviens professeur de sciences économiques et sociales

09. Du féminisme à l’antispécisme

10. Avoir ou ne pas avoir des enfants

11. Le trou ludique dans mon emploi du temps, les échecs

12. Ma tentative d’écologiser la politique

13. L’écologie passe aussi par l’électronique

14. Mon engagement associatif au service de la nature

15. Mon engagement au service d’une communauté de résilience

16. Ma pratique de la simplicité volontaire

17. Objecteur de croissance, le militantisme des temps modernes

18. Techniques douces contre techniques dures

19. Je deviens journaliste pour la nature et l’écologie

20. Une UTOPIE pour 2050

21. Ma philosophie : l’écologie profonde

22. Fragments de mort, fragment de vie

23. Sous le signe de mon père

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Fragments de vie, fragment de Terre (suite)

Cette autobiographie de Michel SOURROUILLE, « Fragments de vie, fragment de Terre (Mémoires d’un écolo) », est éditée chaque jour par épisode sur ce blog biosphere tout au cours des mois de juillet et août.

l’ignorance de la question écologique par LE MONDE (1945-2023)

Les journalistes Marc Ambroise-Rendu, Roger Cans et Hervé Kempf ont été successivement en charge de la rubrique environnement au MONDE. Ils saluent tous l’amélioration de plus en plus visible de leur employeur en matière de traitement de l’enjeu écologique. Il est vrai qu’en la matière, les débuts du quotidien ont été désastreux. Dans son numéro 199 du 8 août 1945, le quotidien annonçait le largage de la première bombe atomique en manchette sur trois colonnes avec, en surtitre, cette formule ingénue et terrible : « Une révolution scientifique ». Il est vrai aussi que l’ensemble de la presse fut unanime pour oublier les êtres humains carbonisés ou irradiés. Pourtant Albert Camus pouvait écrire à la même date dans l’éditorial de Combat : « Des journaux américains, anglais et français se répandent en dissertations élégantes sur l’avenir, le passé, les inventeurs, le coût, la vocation pacifique et les effets guerriers, les conséquences politiques et même le caractère indépendant de la bombe atomique. Nous nous résumerons en une phrase : la civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. »

Il était donc possible à l’époque de porter sur ce terrible événement un regard sans concession, Albert Camus l’a fait, seul contre tous. L’enjeu pour un journal comme LE MONDE qui se positionne comme « de référence », c’était pourtant d’aller au-delà des apparences dictées par les puissants, de ne pas choisir une impossible neutralité, de savoir se positionner comme un véritable journaliste d’investigation, d’éclairer le lecteur. LE MONDE avait encore beaucoup de chemin à parcourir pour bien mesurer l’importance croissante de la détérioration de notre environnement.

En 1952, on inaugure le barrage de Donzères-Mondragon ; l’envoyé spécial du MONDE ne dira rien concernant l’impact environnemental de ce « colossal ouvrage ». En 1953 pour le barrage de Tignes, le reporter du MONDE s’émerveille devant l’ouvrage d’art qui « offre une ligne extrêmement harmonieuse ». Pas un mot sur le village englouti par le barrage, mais une constatation confondante de naïveté et de cynisme : « Le site n’en souffre pas ». En 1957, la critique du projet de tracé de l’autoroute du sud à travers la forêt de Fontainebleau fait simplement l’objet d’une libre opinion qui constate : « Il est triste de penser que l’autorité des naturalistes, des artistes et des sociétés savantes est impuissante contre le vandalisme ». Plus de vingt ans après Hiroshima, LE MONDE n’a pas beaucoup progressé dans son analyse. Le naufrage du Torrey Canyon le 18 mars 1967 échappe complètement à l’attention du quotidien pendant plusieurs semaines, ce n’est que la première marée noire sur nos côtes ! Il faut attendre le 21 avril pour que soit publié en Une un bulletin intitulé « les dangers du progrès ». La conversion écologique de ce quotidien « de référence » va être lente, aussi lente que la prise de conscience générale dans une société où priment l’économique et le socio-politique sur la sauvegarde de la planète.

C’est seulement à partir de 1969 que LE MONDE ouvre un dossier « Environnement » au service de documentation. Mais il n’y a toujours pas de journaliste spécialisé. Quotidien institutionnel dont la rédaction était constituée de spécialistes restant dans leur domaine (politique principalement) pendant des années, LE MONDE n’a commencé à traiter spécifiquement d’environnement qu’en 1971, lorsque le ministère de la protection de la nature et de l’environnement a été crée. Dès ce moment un rédacteur, qui venait du service Economie et couvrait jusque-là la vie des entreprises, a suivi l’action de Robert Poujade. Versé au service « Equipements et régions » (on ne savait trop où caser l’environnement), il a immédiatement reçu de ses anciens interlocuteurs les jérémiades classiques selon lesquelles, si on obligeait les entreprises à quoi que ce soit, ils allaient licencier leur personnel. En 1972, c’est la première conférence des Nations unies « pour l’homme et son environnement » qui contraint LE MONDE à créer une rubrique sous ce nom. Mais les rédactions se méfiaient encore de ce type d’information et l’écologie est restée un gros mot encore longtemps pour bien des personnes.

NB : en plus de l’interview des journalistes du MONDE que j’ai directement mené, j’ai été aidé pour ce qui suit par les archives de l’association JNE (Journalistes pour l’environnement et l’écologie).

avec Marc Ambroise-Rendu, l’environnement devient une rubrique au MONDE (1974-1981)

Nous avons interrogé le journaliste Marc Ambroise-Rendu, le premier en charge d’une rubrique environnement au MONDE depuis mars 1974. Son directeur, Jacques Fauvet, n’avait aucune idée de la manière dont il fallait traiter la nouvelle rubrique environnement, mais comme il y avait un ministère du même nom depuis le 7 janvier 1971, un ministre (Robert Poujade), des officines diverses, des salons de l’environnement et des réactions patronales, il fallait « couvrir ». Ambroise-Rendu a proposé de nourrir la rubrique avec 50 % de nouvelles institutionnelles et 50 % d’infos provenant de la vague associative en train de monter. Fauvet a dit OK.

Les reportages d’Ambroise-Rendu sur les protestations et propositions associatives de terrain convenaient bien au service « Equipement et régions » dont il dépendait et l’audience était là. Mais ses collègues des autres services étaient étonnés, et même, pour certains, scandalisés qu’on donne dans leur journal « si sérieux » autant de place à l’environnement – sujet marginal et jugé parfois réactionnaire. Un rédacteur en chef s’est même exclamé: « L’écologie, c’est Pétain »… Il s’en est excusé plus tard. Quand René Dumont a fait acte de candidature aux présidentielles de 1974, le service politique n’a même pas envoyé un stagiaire pour voir à quoi ressemblait ce « zozo ». C’est Ambroise-Rendu qui a couvert les premiers balbutiements de sa campagne qui a démarré par une conférence de presse dans une salle de cours poussiéreuse de l’ Agro. Voyant qu’un « étranger » mettait les pieds dans son espace réservé, le service politique a fini par reprendre la main.

Le seul président de la République qui a osé s’exprimer longuement sur la politique écologique est Valéry Giscard d’Estaing… fin 1977 ! L’interview, avec le labrador roupillant sur le tapis, a été longuette et « molle ». Il a fallu attendre deux mois pour que cet entretien avec Marc Ambroise-Rendu, après ré-écriture, paraisse dans LE MONDE du 26 janvier 1978. La première question était déjà incisive : « La France peut-elle continuer à donner l’exemple d’une croissance accélérée, alors que celle-ci est fondée sur la sur-exploitation du monde, le gaspillage et les risques technologiques ? » Il est significatif que la réponse de VGE pourrait aussi bien être faite par le président actuel : « Je préconise une nouvelle croissance qui économise l’énergie et qui réponde à des aspirations plus qualitatives. Mon objectif est que nous retrouvions un taux de croissance supérieur à celui de ces quatre dernières années, ne serait-ce que pour résoudre le problème de l’emploi. Cette nouvelle croissance n’est ni une croissance sauvage ni une croissance zéro. » La troisième question montrait que le journaliste savait poser les bonnes questions  : « L’opinion paraît de moins en moins favorable à un développement ambitieux du programme électronucléaire. Comment réintroduire la démocratie dans le choix nucléaire ? » La réponse de Giscard est un véritable déni de la réalité : « Le gouvernement respecte la démocratie dans le domaine nucléaire, comme dans les autres. Il a la responsabilité devant le pays de prendre les décisions qui engagent la politique de la France. Il le fait sous le contrôle du Parlement (…) La vraie question n’est pas oui ou non au nucléaire. La question c’est : oui, mais comment ? » 

Au cours des 3000 jours pendant lesquels Marc Ambroise-Rendu a tenu sa rubrique « Environnement », il a aligné plus de 1200 papiers dans tous les registres. Il n’a jamais été rappelé à l’ordre pour « engagement excessif » ou « commentaires orientés ». Il avait l’impression de parler allègrement – et utilement – de sujets sérieux et cela avec une totale liberté (dans les limites d’un quotidien national). Sous des dehors austères et même sévères, Fauvet était, au fond, un vrai libéral. Les pressions venaient d’ailleurs. Ambroise-Rendu avait participé avec ses collègues des sciences et de l’économie à une série sur le parti pris nucléaire de la France. En trois livraisons les journalistes avaient essayé de discerner où menait l’aventure nucléaire décidée par de Gaulle-Pompidou-Messmer et les technocrates  du CEA et d’EDF. Les articles ont fait grand bruit. Ambroise-Rendu a été appelé par le patron d’EDF qui lui a demandé « Mais M. Rendu qu’est-ce qu’on vous à fait ? » Il était vraiment stupéfait qu’on puisse envisager de réexaminer le choix du nucléaire. Les seuls qui n’ont pas participé à cette série, ce sont les gens du service politique qui se sont bien gardés de titrer la réalité : « Le nucléaire enjambe la démocratie ».

Marc Ambroise-Rendu a vécu au MONDE les meilleures années de sa carrière journalistique mais son successeur Roger Cans, nommé en 1982, a été moins chanceux.

l’environnementaliste Roger Cans, bien isolé au MONDE (1981-1998 )

Le journaliste Roger Cans succède à Marc Ambroise-Rendu sur la rubrique environnement au journal LE MONDE en 1982. Mais l’élection de Mitterrand en 1981 avait été un coup d’arrêt à la politique environnementale et surtout à la mobilisation associative qui était traitée précédemment par Marc Ambroise-Rendu. Toute la France avait cru que le socialisme au pouvoir résoudrait toutes les difficultés. Or, sous la direction de Jacques Fauvet, ancien chef du service politique, l’environnement ne prenait vraiment sens que si un mouvement politique l’assumait ; c’est pourquoi, quand Roger Cans reprend la rubrique environnement au MONDE, il se retrouve seul et isolé. Son chef de service lui dit carrément que l’important était la décentralisation et la régionalisation, qui devraient occuper 80 % de son temps. Mais très vite, Cans a pu de son propre chef consacrer 90 % de son temps à la rubrique environnement. Avec quelques revers.

En 1984, Cans avait pris l’initiative d’un reportage sur l’agriculture biologique. Durant une semaine, il avait visité une ferme de Beauce en cours de conversion, une autre de la communauté Lanza del Vasto, un petit élevage de Mayenne et un jeune couple d’éleveurs de l’Orne. Il a eu l’impudence (l’imprudence) d’en faire une série de trois papiers, afin d’en montrer l’intérêt et la diversité. Le directeur de la rédaction d’alors, Daniel Vernet, le croise dans le couloir et lui demande « l’agriculture bio, combien de divisions ? » (par analogie avec la blague de Staline sur le Pape…). Le journaliste répond un peu trop vite « moins de 1 % », ce qui était vrai… et les articles passent à la trappe. Toujours en 1984, Cans avait proposé de couvrir une AG des Verts dans un gymnase de Dijon. Le service politique lui avait dit alors qu’il « avait du temps à perdre ».

En 1985, l’affaire Greenpeace passionne LE MONDE parce que c’est une affaire politiquement sérieuse (la bombe atomique, la Polynésie, Charles Hernu, les plongeurs d’Aspretto, le coulage du Rainbow Warrior en Nouvelle Zélande, Mitterrand, etc.). La totale. Le quotidien mobilise Cans pour passer six semaines à bord du Greenpeace (embarquement à Curaçao, débarquement à Papeete) afin de couvrir la campagne des « écolo-pacifistes » contre les essais nucléaires français. Un arrangement a été conclu avec Gamma TV pour associer nos forces durant cette campagne. LE MONDE mobilise aussi son rédacteur défense, Jacques Isnard, qui embarque dans le navire de la Marine française. Ainsi, la couverture est totale sur l’océan, avec la vision binoculaire écolos/Marine française. Pendant ce temps, à Paris, deux fins limiers du service Justice (Bertrand Le Gendre) et Police (Edwy Plenel), se mobilisent pour corser l’affaire, découvrir une 3e équipe et pousser Hernu à la démission. L’aspect environnemental de la bombe atomique n’intéressait pas LE MONDE. C’est seulement quand la politique s’en empare que la rédaction suit.

Même avec des catastrophes écologiques, la rubrique environnement a du mal à s’imposer. L’affaire de Bhopal, cette fuite de gaz mortel qui tue ou blesse des milliers d’habitants d’une grande ville indienne en décembre 1984 ne donne lieu qu’à une brève le premier jour. Et le correspondant à New-Delhi n’ira à Bhopal que plusieurs mois après la catastrophe, lorsque l’affaire deviendra politique. Idem pour Tchernobyl, en avril 1986 : le correspondant à Moscou n’ira jamais enquêter sur place, la couverture de l’événement est donc minimale. Il faut attendre octobre 1986 pour que le journal propose à Cans un reportage du moment qu’il ne coûte rien : accompagner Pierre Mauroy, ancien Premier ministre et président des cités unies, qui va présider un congrès à Kiev et qui invite quelques journalistes politiques. LE MONDE publiera le reportage mais aussi un petit papier politique sur le PS vu par Pierre Mauroy, c’est cela qui enchantera André Fontaine, alors rédacteur en chef. On n’ira passer à Tchernobyl que par inadvertance : ce sont des congressistes italiens du PCI, parmi lesquels des médecins, qui ont demandé à enquêter sur Tchernobyl en marge du congrès.

Il a fallu la percée électorale de l’écologie politique lors des élections municipales de 1988 et des européennes de 1989 pour que le quotidien commence à s’y intéresser un peu. Un nouvel élan est même donné avec la préparation du sommet de Rio en 1992. Une petite chronique, « l’avenir de la planète », n’a eu qu’un temps. Mais l’écologie n’est toujours pas un service ni un département rédactionnel, l’environnement reste un problème technique. Et l’écologie politique reste considérée comme une nuisance puisqu’elle affaiblit la gauche dans les élections (comme aux USA Ralph Nader qui fait élire Bush au lieu de John Kerry). Colombani considérait même Antoine Waechter comme « à droite de la droite ».

Hervé Kempf accompagne l’écologisation du MONDE (1998-2011)

Hervé Kempf succède à Marc Ambroise-Rendu et Roger Cans sur la rubrique environnement au journal LE MONDE. Mais il n’est plus isolé, l’écologie prend de l’importance dans ce quotidien « de référence ». Edwy Plenel, influencé sans doute par le directeur adjoint de la rédaction, Jean-Paul Besset, a voulu doubler la couverture de l’environnement. Hervé Kempf été embauché en septembre 1998 pour renforcer à l’international Sylvia Zappi, en poste depuis le départ de Cans en 2005. Zappi est partie vers le service politique (pour couvrir notamment l’écologie politique) mais a tout de suite été remplacée par Benoit Hopquin, puis par Gaëlle Dupont. Grâce à cette multiplication des journalistes, LE MONDE a joué un rôle important notamment dans :

– le suivi des négociations climatiques. A côté du binôme Kempf-Zappi puis Kempf-Hopquin, puis Kempf-Dupont, le service Sciences a suivi de plus en plus l’environnement, notamment en ce qui concerne la climatologie. Avec Stéphane Foucart, LE MONDE possède une des meilleures expertises de vulgarisation scientifique sur la question. Les journalistes ont par exemple durement bataillé contre Allègre et les climato-sceptiques début 2010.

– la bataille des OGM (LE MONDE a été bien utile pour faire connaître José Bové ou Arnaud Apoteker) ;

– le nucléaire (même si la ligne générale du journal est pro-nucléaire, beaucoup de papiers « critiques » ont pu passer) ;

– la décroissance qui a trouvé ses premiers relais grand-public dans LE MONDE (cf. L’HYPOTHÈSE DE LA DÉCROISSANCE VAUT PEUT-ÊTRE QU’ON Y RÉFLÉCHISSE (Pierre Pascallon, LE MONDE du 14 mai 1974)) ;

et des dizaines d’autres sujets que les journalistes ont été les premiers ou parmi les premiers à révéler en France, comme l’Arctique ouvert par le réchauffement (27 octobre 2004), les sables bitumineux (26 septembre 2007), la déforestation à cause de l’huile de palme (9 janvier 2008), les gaz de schiste (22 mars 2010)…

L’« environnement » est donc de mieux en mieux traité, l’évolution s’étant amplifiée avec l’arrivée à la direction d’Eric Fottorino en juin 2007. Fottorino a mobilisé davantage de rédacteurs à la chose environnementale (Laurence Caramel, Laetitia Clavreul, Stéphane Foucard) en plus des rédacteurs patentés (Hervé Kempf à l’international, Gaëlle Dupont au national et Sylvia Zappi à l’écologie politique). Six ou sept rédacteurs au lieu d’un seul, situation qui a duré presque 25 années (1974-1998), cela fait une sacrée différence. Fottorino a même ouvert clairement les colonnes du quotidien à l’écologie à partir du numéro du 23 septembre 2008 ; la page 4 consacrée à la Planète, au même titre que les pages International ou France, est un bel effort pour faire prendre conscience aux lecteurs que, si rien n’est perdu encore (mais c’est tout juste), rien n’est encore gagné. « Planète » est un véritable service comptant plus de dix journalistes, un cas unique en France. Hervé Kempf assure dorénavant une chronique hebdomadaire sur l’écologie souvent percutante et assure le pivot de l’information sur l’environnement. Depuis 1998, il a écrit plus de 1250 articles. LE MONDE est donc devenu assez écolo, son engagement en matière d’information environnementale tranche d’ailleurs avec le reste de la presse.

Mais sous la rubrique Planète, nous retrouvons l’ancienne page Environnement & Sciences et le même type d’articles… en moins optimiste : c’est sous le mode de la contemplation et de la désolation que sont traités les faits écologiques. Depuis 2008, la tonalité des pages Planète reste similaire. Les titres du 31 octobre 2008 étaient caractéristiques du fatalisme dominant : « A la frontière jordanienne, l’exploitation effrénée d’une mine d’or bleu » ; « L’amiante devrait échapper à l’inscription sur une liste internationale de produits dangereux ». Planète du 3 septembre 2011 confirme notre diagnostic : « Les océans sont plus bruyants qu’il n’y paraît, et le sont toujours plus » ; « La Chine accueille les procédés les plus polluants de l’industrie chimique mondiale ». La planète tourne à l’envers, on ne sait plus par quel bout s’attaquer à cette farce tragique… alors, on constate qu’on ne peut rien changer ! Un quotidien, même d’envergure (inter)nationale, ne fait que refléter l’état présent de la société. Il ne s’engage pas, il laisse la société telle qu’elle est. Un autre « MONDE » est nécessaire, il est possible, encore faut-il éradiquer les blocages que nous analyserons dans l’article suivant…

L’écologie au MONDE, les blocages journalistiques subsistent

Nous avons reflété dans nos articles précédents le point de vue des journalistes Marc Ambroise-Rendu, Roger Cans et Hervé Kempf, successivement en charge de la rubrique environnement au journal LE MONDE à partir de 1974. Ils en ont témoigné, l’écologie a pris de l’importance dans ce quotidien de référence. Mais comme il faut préserver les convenances et les recettes publicitaires, LE MONDE cultive encore la croissance, le tout automobile et les néfastes futilités. J’avais écrit en 2007 au chroniqueur Eric Le Boucher : « Vous restez un fervent adepte de la croissance économique… » J’ai reçu cette réponse : « La croissance est la seule façon de résoudre le problème social et elle peut être propre. » J’ai obtenu un jour cette réponse de Nadine Avelange, à l’époque responsable du Courrier des lecteurs : « Cher lecteur, notre situation financière ne nous autorise pas à refuser des publicités pour des voitures. Bien cordialement ». Un blog classé comme « invité du MONDE », qui nous avertissait du pic pétrolier, fait pourtant de la publicité pour les voyages en avion ! La crise écologique qui nous menace ne sera bien traitée médiatiquement que dans la mesure où les contraintes réelles ou imaginaires de l’économie ne pèseront plus sur le contenu des articles des journalistes.

La déformation de l’information tient aussi à la présentation systématique des différents points de vue, ce qui entraîne l’incapacité du lecteur à juger du fond. Par exemple, l’autorisation de mise sur le marché de l’insecticide Cruiser OSR avait été accordée le 3 juin 2011 par le ministre de l’agriculture. L’Union nationale de l’apiculture française (UNAF) a alors adressé aux ministres concernés un courrier soulignant que « cet insecticide systémique (le Cruiser), utilisé en enrobage de semences de colza et véhiculé par la sève jusque dans les fleurs, est composé de trois substances actives d’une extrême toxicité pour les abeilles » (LE MONDE du 30 juillet 2011). Mais dans le même numéro, le danger est récusé par Syngenta, qui affirme qu’il n’existe « pas de risques pour les populations d’abeilles ». Déjà, dans l’édition du MONDE du 24 juillet, sous le titre « Le fabricant de l’insecticide Cruiser contre-attaque », il n’y avait qu’un simple entrefilet qui ne prouvait rien : « Syngenta a affirmé qu’il allait « combattre toute allégation » contre l’insecticide Cruiser OSR, car il « ne comporte pas de risques pour les populations d’abeilles ». Le Conseil d’Etat, statuant en référé le vendredi 29 juillet, s’appuie sur un point de droit purement formel sans trancher sur le fond pour rejeter la requête de l’UNAF. A suivre ces infos du MONDE, le lecteur ne peut qu’en conclure que l’enjeu écologique est bien trop compliqué pour être pris en considération, et concompréhensible. Syngenta va pouvoir continuer à commercialiser son insecticide.

Il existe enfin une contradiction flagrante entre journalistes qui peuvent se contredire dans un même numéro. Dans LE MONDE du 29 juillet 2011, Stéphane Foucart s’intéresse à l’état de la planète : « Tandis que les uns fondent leur optimisme sur les acquis du demi-siècle écoulé, les autres craignent, avec raison, celui qui vient. Les effets négatifs du système technique commencent à en concurrencer les effets bénéfiques car ses dimensions sont désormais telles qu’elles se heurtent aux limites physiques de la terre. Arrivé au sommet des courbes, on peut voir le déclin se profiler. De manière croissante, les services rendus au système technique par la biosphère s’érodent sous l’effet du même système technique. » Mais Jean-Philippe Rémy appelle de ses vœux une voiture made in Africa : « Vite, il faut rouler africain ». Il s’attache ainsi à une conception dépassée de l’économie qui repose sur la production manufacturière et les « retombées bénéfiques de l’exploitation des ressources naturelles ». Jean-Philippe Rémy contemple l’évolution passée des courbes, Stéphane Foucart la tendance prévisible.

Sortons du MONDE papier. Si on consulte les blogs des journalistes du MONDE début septembre 2011, deux seulement sont intitulés « Planète » pour 44 au total, et trois sont consacrés au sport ! Pour les blogs « invités par la rédaction », 7 sur 34 sont consacrés au sport, 2 à la gastronomie et un seul à notre Planète. Sur les 35 blogs des abonnés « sélectionnés », 5 Planète dont 3 qui ne traitent pas directement d’écologie (humanitaire, lutte contre le SIDA, droits de l’homme). Le thème des rapports entre l’homme et son environnement naturel représente à peine 4 % des blogs du MONDE et sans doute beaucoup moins globalement sur lemonde.fr. Dans LE MONDE et ailleurs, l’urgence écologique ne relève pas encore d’une conception globale et systémique. Pas encore… Car la dimension et l’ampleur des problèmes environnementaux devraient bientôt transformer les journalistes ordinaires en militants des vérités qui nous sont dissimulées. L’analyse journalistique deviendra alors un commentaire (im)pertinent, la société se transformera.

Pour cette nécessaire rupture écologique, la société aurait besoin d’un mythe mobilisateur comme le manifeste du parti communiste de Karl Marx l’a été au XIXe siècle. Mais le mouvement écolo est encore balbutiant et il n’y a pas de classes sociales qui se sentent porteur d’un projet global. J’ai été obligé de me fabriquer moi-même mon propre projet de société que voici… (la suite, demain)

Une vision d’ensemble de cette autobiographie :

Mémoires d’un écolo, Michel SOURROUILLE

00. Fragments préalables

01. Un préalable à l’action, se libérer de la religion

02. Une pensée en formation, avec des hauts et des bas

03. En faculté de sciences économiques et sociales, bof !

04. Premiers contacts avec l’écologie

05. Je deviens objecteur de conscience

06. Educateur, un rite de passage obligé

07. Insoumis… puis militaire !

08. Je deviens professeur de sciences économiques et sociales

09. Du féminisme à l’antispécisme

10. Avoir ou ne pas avoir des enfants

11. Le trou ludique dans mon emploi du temps, les échecs

12. Ma tentative d’écologiser la politique

13. L’écologie passe aussi par l’électronique

14. Mon engagement associatif au service de la nature

15. Mon engagement au service d’une communauté de résilience

16. Ma pratique de la simplicité volontaire

17. Objecteur de croissance, le militantisme des temps modernes

18. Techniques douces contre techniques dures

19. Je deviens journaliste pour la nature et l’écologie

20. Une UTOPIE pour 2050

21. Ma philosophie : l’écologie profonde

22. Fragments de mort, fragment de vie

23. Sous le signe de mon père

Fragments de vie, fragment de Terre (suite) Lire la suite »

L’écologie à la mode du Rassemblement national

Interrogée par terraeco en mars 2012, Marine Le Pen exprimait le fond de sa pensée.

Selon vous, les changements climatiques n’existent pas ? « Je ne suis pas sûre que l’activité humaine soit l’origine principale de ce phénomène. »

Vous remettez en cause les conclusions du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat ? « Ce ne sont pas les travaux du GIEC qui peuvent établir avec certitude que l’homme est la cause du changement climatique. Mon père m’expliquait quand j’étais petite que le Sahara gagnait déjà un kilomètre par an ».

Parlons agriculture ? « Le bio est une dictature, avec des histoires de gros sous enrobées dans des bons sentiments. »

En 2023, Marine Le Pen identifie maintenant l’environnement comme un axe de progression pour le RN. L’idée sous-jacente est d’opposer « le bon sens de la terre, du paysan », contre l’idéologie urbaine bobo et les “technos hors sol”.

Cela parle sans doute aux artisans, aux agriculteurs, aux petits chefs d’entreprise qui subissent des normes administratives complexes. Mais cela ne résoudrait en rien les problèmes systémiques auxquels nous sommes confrontés.

Clément Guillou : L’extrême droite voit dans l’écologie et les inévitables mesures d’adaptation au réchauffement climatique un clivage majeur des années à venir et un sujet de fracture nationale à exploiter ; le monde rural et périurbain constitue le gros de son électorat. Jusqu’à présent, le « localisme » faisait figure d’élément de langage quasi unique pour le RN. Le terme devrait à présent passer au second plan derrière une « écologie du bon sens », que le parti oppose à la présumée écologie punitive. « L’idéologie [des écologistes], c’est la lutte contre l’humain », avançait Marine Le Pen le 1er mai 2023. La traduction concrète de cette formule est la suivante : le RN entend s’opposer à tout ce qui menace de perturber les modes de vie et de consommation des Français au nom de l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre. D’autre part, on revendique une posture technosolutionniste face au réchauffement climatique, en expliquant que la recherche résoudra le problème. Le RN vise à porter l’effort de recherche privée et publique à 5 % du produit intérieur brut (il est aujourd’hui de 2,2 %) et compte aussi sur des avancées considérables dans la recherche nucléaire.

A l’Assemblée nationale, la lutte contre l’écologie punitive passe par le combat contre les zones à faibles émissions, décidées au nom de la santé publique, contre la refonte des diagnostics de performance énergétique, ou contre le zéro artificialisation nette (ZAN). Ce qui est attaqué par le ZAN, c’est le modèle de la France pavillonnaire qui veut être tranquille, la France de la voiture individuelle. Andréa Kotarac* prend la relève du député européen Hervé Juvin, ancien « Monsieur Environnement » du RN.

Le point de vue des écologistes véritables

C’est tout simple  » il faut arrêter d’emm… les gens » ! C’est un argument politique qui marche à tous les coups ! Or les contraintes liées au rétablissement des équilibres naturels sont incontournables. Alors même que les questions écologiques sont complexes et écosystémiques, l’extrême droite martèle une pensée binaire. Ils savent où aller chercher la colère et la frustration. C’est facile d’opposer écologie de bon sens et écologie punitive, ce serait impossible à mettre en pratique si on était en responsabilité de gérer l’urgence écologique… sauf à se complaire dans le dogmatisme et préférer la fin du mois à la fin du monde.

Il semble que les problèmes auxquels l’espèce humaine est globalement confrontée dépassent les capacités d’intelligence des décideurs et des électeurs. Un peu partout dans le monde, le populisme au pouvoir fait prendre un retard colossal aux sociétés qui tombent sous sa coupe. Or tout retard accélère l’ampleur de la catastrophe environnementale en cours. Les efforts à faire sont désagréables aux yeux du citoyen moyen, et jugées inutiles au vu de ce que ne font pas « les autres ».

Bref, nous nous dirigeons donc à la fois impuissants et très tranquillement, en même temps vers plus 3 ou plus 4 degrés d’ici la fin du siècle et vers la fin des énergies fossiles qui étaient la base de notre confort actuel. Nos générations futures marcheront au pas pour se lancer dans des conflits interrégionaux sans fin, la guerre est la seule issue envisagée par une dictature…

En savoir plus grâce à notre blog biosphere

Projet de l’écologiste Marine Le Pen

extraits : sur son site en 2023, le projet du RN (l’environnement pour une écologie française) : Nous pratiquerons, dans tous les domaines, une écologie positive, notre projet tourne la page de l’écologie punitive… L’urgence est de rompre avec une écologie dévoyée par un terrorisme climatique… Nous sortirons du « Green deal » et de l’enfer administratif qu’il impose aux petites entreprises sous le nom de « taxonomie » au profit d’un plan d’autonomie stratégique fondé sur le développement durable… La France n’a pas à sacrifier le bien-être de sa population pour corriger les erreurs ou les abus des autres pays !… … Les Français pourront continuer à sortir leur famille en voiture, à prendre des bains chauds, à apprécier le feu de bois dans la cheminée et à fêter Noël ! »

L’écologie, impensé du Rassemblement National

extraits : Ce parti d’extrême droite fait bloc avec la FNSEA et oppose la ruralité aux « talibans de la verdure », comme Marine Le Pen appelait les écologistes durant sa campagne présidentielle de 2022. Christophe Barthès, député Rassemblement national (RN) de l’Aude : « Il faudrait être idiot pour voir qu’il n’y a pas de changement climatique. Mais est-ce l’effet de l’homme ? Peut-être que oui, peut-être que non…

* Andréa Kotarac, né en 1989, commence en politique en s’engageant contre l’extrême droite. En 2016, il participe même à une manifestation appelant la région à accueillir des migrants. D’abord membre du Parti de gauche et de La France insoumise, il devient en 2019, assistant parlementaire du député européen Hervé Juvin (RN). Au début de l’année 2021, il lance le parti Les Localistes, avec Hervé Juvin. Le RN l’investit ensuite comme tête de liste aux élections régionales de 2021. Il prend la direction de la revue IDées, censée servir de réflexion aux parlementaires européens RN. Présenté comme le « nouveau visage de l’écologie version RN », il est chargé de préparer la plate-forme écologique du parti pour la présidentielle de 2027.

L’écologie à la mode du Rassemblement national Lire la suite »

Fragments de vie, fragment de Terre (suite)

Cette autobiographie de Michel SOURROUILLE, « Fragments de vie, fragment de Terre (Mémoires d’un écolo) », est éditée chaque jour par épisode sur ce blog biosphere tout au cours des mois de juillet et août.

Je deviens journaliste pour la nature et l’écologie

Quelques idées générales : Normalement unis par l’écologie, nous devrions avoir un discours plus cohérent. Normalement ! Mais il a autant de perceptions de notre rapport à la nature qu’il y a d’environnementalistes. A plus forte raison quand on est journaliste. J’ai terminé ainsi sur mon blog biosphere une étude sur le traitement de la question environnementale par le quotidien LE MONDE  : « La crise écologique qui nous menace ne sera bien traitée médiatiquement que dans la mesure où les contraintes réelles ou imaginaires de l’économie ne pèseront plus sur le contenu des articles des journalistes. Mais comme il faut préserver les convenances et les recettes publicitaires, les articles du MONDE cultive encore la croissance, le tout automobile et les néfastes futilités. La déformation de l’information tient aussi à la présentation systématique des différents points de vue, ce qui entraîne l’incapacité du lecteur à juger du fond quand il n’a pas de lunettes théoriques préalables. Il existe enfin une contradiction flagrante entre certains journalistes, majoritaires, qui fondent leur optimisme sur les acquis du demi-siècle écoulé, et une infime minorité qui craint, avec raison, celui qui vient. »

Difficile d’être journaliste engagé dans la presse ordinaire. Aussi je ne suis devenu qu’à l’âge de la retraite journaliste-écrivain pour la nature et l’écologie, membre de l’association JNE…

Septembre 2008. Maintenant à la retraite, j’ai le temps de m’occuper d’écologie sept jours sur sept, mon blog, mon site, mes activités politiques. Dans le cadre de la commission environnement du parti socialiste, j’ai organisé dans les locaux de l’assemblée nationale un colloque sur le pic pétrolier le 25 janvier 2011. Quelques jours auparavant, Alain Hervé que je ne connaissais pas me téléphone pour me rencontrer à cette occasion… nous nous retrouvons dans un petit bistrot près de Notre Dame le lendemain du colloque. Extraordinaire, nous sommes toujours sur la même longueur d’onde. Alain Hervé, né en 1932, est un historique de l’écologie. Il fonde les Amis de la Terre en 1970, dirige le hors-série du Nouvel Observateur en 1972 : « La dernière chance de la Terre » que j’avais lu à l’époque. À partir de 1973, il fonde le mensuel écologique Le Sauvage. Lors de la candidature de René Dumont à la Présidence de la République en 1974, il est responsable du bureau de presse.

Il avait souffert de l’environnement urbain, j’avais vécu jusqu’à ma vie active dans une chambre de centre-ville, les fenêtres des voisins à cinq mètres des miennes. Il ne croit pas du tout au progrès technique qui a entraîné cet âge industriel qui sévit sur notre planète et la ravage. Je ne peux qu’être d’accord. Il estime que nous sommes tous écologistes, car nous n’avons pas le choix, nous devons tous respirer, déféquer. C’est une évidence. C’est beaucoup plus qu’une approche de droite ou de gauche que nos partageons, il s’agit d’une vision globale de l’univers auquel nous sommes confrontés. Nous sommes tous les deux conscients des limites de la planète. Il nous faut donc observer, comprendre et se conformer aux lois de la nature. C’est l’accord parfait entre nous !

Au cours de notre conversation, Alain Hervé me propose de devenir membre des JNE, association des journalistes-écrivains pour la nature et l’écologie. Il me parraine, il me trouvera un autre parrain en la personne de Laurent Samuel. Mes écrits de référence, c’est le contenu de mon blog à l’époque hébergé par le serveur du monde.fr. JNE est en train de s’ouvrir aux blogueurs. Je suis donc accepté. Mon rêve de jeunesse, devenir journaliste, devient réalité, je suis officiellement passeur de connaissances ! Je produis mon premier article de journaliste JNE après l’AG de Cassis en juin 2011 :

« Tout juste admis au sein de JNE, je fais le long voyage qui me mène d’Angoulême à la méditerranée. Je suis arrivé à Cassis le vendredi à six heures du matin, dans une gare excentrée qui montrait déjà l’isolement du bourg. En arrivant à pied dans la baie, pratiquement une seule route pour accéder à la ville, une seule pour en repartir : la voiture ne peut pas imposer sa loi dans un lieu si étroit. Je fus réconforté par l’étroitesse ancestrale des ruelles qui se protègent des voitures. Mais autour du port, centre névralgique de Cassis, je fus abasourdi par la succession interrompue des restaurants qui encerclaient la mer. Le touriste arrive partout en masse dès qu’il y a quelque chose à voir des restes de la nature. Les innombrables bateaux de plaisance rendaient invisibles les rares bateaux de pêche. Mais laissons cela pour l’instant, j’ai passé un WE splendide avec mes nouveaux camarades de la JNE.

La thématique était prenante, comment protéger les Calanques, comment sauver les baleines, comment se sentir uni avec la nature… L’organisation était parfaite : conférence-débat sur le projet de parc national, exposé sur les ferries vers la Corse qui font des victimes parmi les cétacés, PowerPoint sur la récupération des déchets… Bien entendu tous les repas étaient bios et végétariens, nous avons mangé collectif et pensé écologique. Nous nous sommes naturellement déchaussés à l’entrée de la salle de réunion, nous avons écouté dans le recueillement un son et lumière sur les mammifères de la mer en péril, nous avons religieusement respecté une minute de silence pour les dauphins. Dans les conversations privées, les divergences pouvaient s’exprimer en toute confiance, échec ou succès du Grenelle de l’environnement, pro ou anti-Hulot, ramasser les déchets ou faire du commerce avec, observer les éléphants en Afrique ou lutter contre le tourisme dans les calanques. Mais en filigrane de ce WE de loisirs et de réflexion, une opposition entre nous qui devrait se durcir dans les décennies à venir. D’un côté l’écologie superficielle, réparatrice, naturaliste et pleine de compromis. De l’autre une écologie plus profonde, axées sur la rupture des comportements, un ressourcement spirituel, le combat pour la Terre-mère genre Earth First!.

Appliquons ma grille de lecture, fondamentaliste, à la protection de la nature à Cassis. Le parc naturel des Calanques voudrait s’étendre de la banlieue de Marseille à la Ciotat en passant par ici. Remarquons l’impuissance des procédures démocratiques à arriver à un consensus acceptable : plusieurs années de discussion pour préparer son extension officielle, et rien ne vient. On en arrive à espérer la toute puissance de la décision étatique. Il y a la méfiance de la bourgeoisie locale qui décrète que l’UICN voudrait imposer ses diktats à Cassis. Il y a les pêcheurs qui veulent pécher en tout temps et en tous lieux. Il y a les cabanons au bord de l’eau qui se transmettent de père en fils et qu’on ne voudrait pas voir disparaître. Il y a les viticulteurs qui ne savent toujours pas à quelle sauce bureaucratique ils vont être mangés. Il y a les prérogatives empilées, croisées et emmêlées des communes, du conseil général et du conservatoire du littoral. Il y a les amateurs de varappe qui veulent continuer à grimper en dehors de la foule. Il y a France Nature Environnement qui se débat au milieu de tout ça. Alors, un parc naturel, avec ou contre les hommes ?

Prenons une première expérience, éprouvante pour moi, le promène-couillons. Il s’agissait d’entrer dans un bateau de promenade pour faire le tour des Calanques à défaut de voir des dauphins vu le vent soudain. Mais la découverte de la nature accompagnée par le bruit incessant d’un moteur ne pouvait rien me dire de la nature. Je pouvais regarder les falaises de calcaire et les embruns sur notre proue, je ne sentais ni le rocher, ni la mer, je me contentais de compatir envers ceux qui ont eu le mal de mer. Retour au port où les humains regardent des humains, nous sur le pont et les badauds au bar. Ce n’est pas ainsi que je vois un parc national. La nature se mérite.

Non au tourisme de masse qui s’accapare le port, ses falaises et ses habitants. Non à un parc naturel qui ressemblerait au zoo, qui empêcherait de vouloir la nature au plus près de son domicile. La nature et les hommes ne sont pas contradictoires, mais nous faisons comme si… il devait en être toujours ainsi : nature-spectacle, nature-payante, nature cadenassée, nature en définitive étrangère à notre être profond. Oui au parc naturel, mais pour ses autochtones, les pêcheurs professionnels, les vignerons à label bio, les artisans et les petits commerçants. Oui au parc naturel pour les voyageurs à pied ou en vélo, qui prennent le temps d’arriver sur les calanques, qui mangent avec l’habitant, qui savourent lentement le lieu et instaurent durablement des liens. C’est ainsi que je vois la nature et les hommes. »

A Cassis, j’ai partagé ma chambrée avec Roger Cans. Grâce à nos longues discussions, j’ai pu mettre sur pied mon premier article d’envergure. Roger m’a donné l’adresse Internet de Marc Ambroise-Rendu, je connaissais déjà Hervé Kempf, j’avais donc le point de vue des trois journalistes que se sont succédés sous la rubrique environnement du quotidien LE MONDE. Je pouvais brosser un historique de la sensibilité écologique de ce média. Avant 1971-1972, c’est le mépris et la désinvolture. Dans les années 1970, une bonne mobilisation des associations environnementalistes mobilise la presse et incite à la création de périodiques comme la Gueule Ouverte ou Le Sauvage ; l’écologie politique devient aussi une réalité. Mais les années 1980 sont un éteignoir sous l’effet conjugué de la victoire en France du socialisme productiviste (Mitterrand, 1981) et du triomphe de la mondialisation libérale avec Reagan et Thatcher. Ce n’est que très récemment que l’écologie refait surface grâce à la popularisation du réchauffement climatique et les succès électoraux des écologistes. Mon article est passé en cinq épisodes dans les chroniques d’abonnés du monde.fr, nous n’avions pas droit à plus de 5000 caractères par article ! (la suite, demain)

Une vision d’ensemble de cette autobiographie :

Mémoires d’un écolo, Michel SOURROUILLE

00. Fragments préalables

01. Un préalable à l’action, se libérer de la religion

02. Une pensée en formation, avec des hauts et des bas

03. En faculté de sciences économiques et sociales, bof !

04. Premiers contacts avec l’écologie

05. Je deviens objecteur de conscience

06. Educateur, un rite de passage obligé

07. Insoumis… puis militaire !

08. Je deviens professeur de sciences économiques et sociales

09. Du féminisme à l’antispécisme

10. Avoir ou ne pas avoir des enfants

11. Le trou ludique dans mon emploi du temps, les échecs

12. Ma tentative d’écologiser la politique

13. L’écologie passe aussi par l’électronique

14. Mon engagement associatif au service de la nature

15. Mon engagement au service d’une communauté de résilience

16. Ma pratique de la simplicité volontaire

17. Objecteur de croissance, le militantisme des temps modernes

18. Techniques douces contre techniques dures

19. Je deviens journaliste pour la nature et l’écologie

20. Une UTOPIE pour 2050

21. Ma philosophie : l’écologie profonde

22. Fragments de mort, fragment de vie

23. Sous le signe de mon père

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Soulèvements de la Terre / Darmanin… 1 / 0

Les juges des référés de la haute instance administrative ont suspendu, vendredi 11 août, la dissolution des Soulèvements de la Terre, prononcée le 21 juin en conseil des ministres. Le gouvernement qualifiait dans son décret SLT de « groupement de fait », et l’avait dissous pour avoir incité « à la commission de sabotages et dégradations matérielles, y compris par la violence ».

Christophe Ayad : C’est un sérieux camouflet qu’a infligé le Conseil d’Etat à Gérald Darmanin. Les juges ont estimé qu’il existait « un doute sérieux quant à la qualification de provocation à des agissements violents à l’encontre des personnes et des biens retenue par le décret de dissolution ». Les juges administratifs ont ramené tout ce débat à du droit et aux faits. Y avait-il « urgence » à suspendre cette dissolution ? Et y avait-il des « doutes sérieux » sur la légalité de l’action en cause ? Sur le second point, qui avait donné lieu à de longs échanges à l’audience, les juges argumentent plus précisément :


« Si le décret contesté fait grief au collectif Les Soulèvements de la Terre de provoquer à des agissements violents à l’encontre des personnes et des biens, il ne résulte pas des pièces versées ni des éléments exposés à l’audience que ce collectif cautionne d’une quelconque façon les violences à l’encontre des personnes. S’agissant des violences alléguées à l’égard des biens, il ressort que les actions promues par Les Soulèvements de la Terre ayant conduit à des atteintes à des biens se sont inscrites dans les prises de position de ce collectif en faveur d’initiatives de désobéissance civile et de “désarmement” de dispositifs portant atteinte à l’environnement, dont il revendique le caractère symbolique, et ont été en nombre limité. Eu égard au caractère circonscrit, à la nature et à l’importance des dommages résultant de ces atteintes, les actions reprochées au collectif ne peuvent pas être qualifiées de provocation à des agissements troublant gravement l’ordre public. »

La secrétaire nationale d’Europe Ecologie-Les Verts, Marine Tondelier, a réagi la première : « La justice a joué son rôle de rempart… C’est un gouvernement qui est condamné par la même justice française pour “inaction climatique”, qui n’arrive pas à s’attaquer au problème et qui, pour créer une sorte de diversion, préfère s’attaquer au messager. » A l’opposé, le président du Rassemblement national, Jordan Bardella, a jugé que « par son incompétence, le gouvernement vient d’offrir sur un plateau à l’extrême gauche une victoire sur l’Etat ».

Le point de vue des écologistes activistes

Philémon Frog : Dissoudre un collectif de 150 000 personnes, des militants écologistes mais surtout des citoyens français, des paysans, des scientifiques, etc, c’est faire porter sur toutes ces personnes les éventuelles exactions commises par quelques-unes. Dès lors que le gouvernement est dans la totale incapacité de trouver des incitations du collectif conduisant à des actes répréhensibles, la décision de dissolution était une mesure purement arbitraire. C’est une atteinte extrêmement préoccupante aux libertés d’association et de manifestation. Le juge a d’ailleurs souligné le risque d’atteinte à ces libertés, indiquant clairement comment il statuera sur le fond cet automne, sauf élément nouveau.

Narrabeen : La décision du CE ridiculise les pleureuses effarouchées d’une démocratie soi-disant violée, d’un régime qui glisserait rapidement vers un fascisme à la limite du génocidaire. La Justice a très bien fonctionné, elle a statué sur le sujet… imaginez-vous une quelconque opposition de la Justice à une décision d’Erdogan ou de Poutine ?

Bates : Aux contributions réjouies après le jugement du Conseil d’État, j’ajoute ma propre satisfaction et je veux rappeler que si l’“écoterrorisme” existe en effet, il s’agit évidemment du terrorisme CONTRE l’écologie, que l’État soutient trop souvent, comme dans le cas des mégabassines.

CDA: Contre-violence légale : « lutter contre la bétonisation, l’artificialisation et l’accaparement des sols, en vue de la protection des terres nourricières, de l’eau et des autres ressources naturelles », c’est dans la loi. C’est juste que le gouvernement n’arrive pas à s’y tenir.

Marredesc : Par contre, il n’y avait aucun doute quant à la qualification d’agissements violents avec préméditation par les forces de l’ordre à l’encontre des personnes à Sainte Soline.

Dance Fly : Il ne doit pas y avoir de 2 poids 2 mesures: tu dissous les Soulèvements de la Terre alors tu dissous aussi la FNSEA et toutes les organisations au sein desquelles des individus se livrent à des actes de violences sur des personnes ou des biens publiques et/ou privés.

Nemorosa : Ça fait 80 ans et plus que les capitalistes consuméristes individualistes bétonneurs artificialiseurs plastifieurs cupides jouisseurs se « promènent bon enfant dans la campagne » et saccagent tout pour des résultats hideux et mortifères pour le vivant

Aelsa : Dans la mesure où la pollution pour des siècles des sols et des eaux, la mise en danger de la vie des citoyens par l’usage de produits toxiques dans les cultures ou la préparation des aliments, la destruction d’écosystèmes qui entraînent une extinction de masse à un rythme sans précédent dans l’histoire de la Terre, l’élevage dans des conditions concentrationnaires d’animaux par millions et des actes de torture pratiqués à leur encontre, la captation de biens communs pour le profit de quelques-uns, et j’en passe, sont parfaitement légaux, et défendus en toute impunité par des exactions auprès desquelles l’arrachage de trois brins de muguet est une aimable promenade champêtre, je pense qu’on est malheureusement assez loin de voir l’ordre établi trembler sur ses bases avec cette décision, certes d’une justesse inattendue, du Conseil d’Etat.

Fouilla : Le réchauffement climatique aura probablement, à terme et au niveau mondial, des conséquences bien plus graves que la 2ème guerre mondiale et les gouvernements restent les bras ballants. Et donc dissoudre ces mouvements c’est un peu comme dissoudre la Résistance il y a 80 ans, stupide et vain.

Sauf qui Peut : Comme la terre va immanquablement se soulever contre nous, Darmanin n’y pourra rien; il n’entrera donc pas dans les livres d’histoire, sauf en tant que contre-révolutionnaire !

En savoir plus grâce à notre blog biosphere

21 juin 2023, Dissolution SLT en conseil des ministres

extraits : Les terroristes sont ceux qui massacrent des centaines de km 2 de nature ou polluent abondamment l’environnement. Pas ceux qui cassent 3 machines ou bloquent un chantier. Pour ce gouv. Il vaut mieux tuer l’avenir de nos enfants au nom du capital, que de résister pacifiquement aux atteintes à la nature pour sauver l’humanité…

9 juin 2023, Violence, contre-violence et dissolution

extraits : il y a plusieurs sortes de violences à ne pas confondre. Il y a la violence du système thermo-industriel qui nous a enfermé dans une impasse, réchauffement climatique, extinction de la biodiversité, stress hydrique, etc. Face aux entreprises destructrices du vivant, il y a la contre-violence de quelques militants qui défendent les générations futures contre cette agression. Et puis il y a la violence d’État qui soutient la violence de ce système croissanciste aveugle…

2 Avril 2023, « Nous sommes les Soulèvements de la terre »

extraits :Trois cents personnalités, dont Philippe Descola, Cyril Dion, Annie Ernaux et Adèle Haenel ont décidé de rendre publique leur appartenance aux Soulèvements de la terre…

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Fragments de vie, fragment de Terre (suite)

Cette autobiographie de Michel SOURROUILLE, « Fragments de vie, fragment de Terre (Mémoires d’un écolo) », est éditée chaque jour par épisode sur ce blog biosphere tout au cours des mois de juillet et août.

la difficulté de la résilience locale

Comment créer une communauté de résilience ? Il s’agit de réunir tous les acteurs locaux, aussi bien individuels que collectifs, associatifs et politiques. C’est dans le cadre de la commission énergie de Charente Nature que nous avons constitué début 2011 un groupe de pilotage. J’ai proposé cette  plate-forme d’action qui a été acceptée :

1) notre objectif : instaurer un territoire de résilience

– une démarche logique : Les jumeaux hydrocarbures (pic pétrolier et réchauffement climatique) nous imposent une descente énergétique. Il ne s’agit pas de catastrophisme, mais d’une réalité. Le meilleur moyen est de tendre localement à l’autonomie alimentaire et énergétique. Seule l’énergie renouvelable est durable.

– une démarche non idéologique : il y a un intérêt commun à adopter une telle voie, quelle que soit l’appartenance politique des habitants d’un territoire. Agir ensemble sur son territoire implique décentralisation en acte, mais aussi soutien de l’Etat à ce mouvement.

– une démarche pragmatique : le territoire doit élaborer un plan d’action de descente énergétique (Pade), ce qui peut rejoindre des pratiques locales existantes (plan climat local, AMAP, SEL, MAB, Velocity, point info-énergie, jardins partagés…). Il s’agit d’instaurer une dynamique collective.

2) un changement technique : usage de techniques douces

– doux à la nature : application du principe du berceau au berceau, c’est-à-dire un nouveau modèle économique où la notion même de déchets est bannie au profit de cycles fermés. Il faut suivre l’exemple de la nature qui opère selon un métabolisme au sein duquel le déchet n’existe pas.

– doux à la société : utilisation d’une spécialisation limitée et d’appareillages simplifié ; renouveau de la paysannerie et de l’artisanat ; principe de coopération et non de concurrence.

– doux politiquement : il s’agit d’instaurer une démocratie locale, sachant que seul le local est durable. L’avènement d’un territoire de résilience ne peut se faire qu’avec la participation de tous.

3) un changement culturel

– limitation des besoins : les limites de la planète, qui ne se mesurent pas seulement au gaspillage des ressources fossiles, imposent une sobriété joyeuse et l’abandon du culte de la croissance.

– changement de valeurs : pour une éthique de la Terre qui combine respect de la nature (de ses cycles, des différentes formes du vivant…) et défense des intérêts des acteurs absents (générations futures, non-vivants, habitants des autres territoires)

Les ouvrages de référence commencent à se multiplier : Les Ecovillages de Jonathan Dawson (2006) ; Manuel de transition de Rob Hopkins (2010) ; comment sortir de la société de consommation (World Watch Institute, 2011). Les communautés de résilience commencent à être connues des partis politiques. Le parti EELV a même publié un texte qui va (un tout petit peu) dans le sens de ce que propose notre groupe Angoulême-résilience : «  Tout comme le réchauffement de la planète, la rareté à venir, la décroissance proche et rapide de la ressource en énergie fossile et en pétrole ont été annoncées depuis longtemps par les écologistes (…) Les écologistes proposent :

– D’encadrer et de réformer les marchés carbone,

– et en particulier les mécanismes de développement propre. Le soutien à d’autres mécanismes d’action publique tels que les projets de gestion communautaire doit devenir prioritaire afin d’intégrer des objectifs comme la protection des peuples premiers, la préservation de la biodiversité, la souveraineté alimentaire, et des solutions innovantes (ville en transition…). Ces systèmes innovants alternatifs pourraient à terme se substituer au système de marché carbone. »

source : http://eelv.fr/le-projet/

Mais une communauté de résilients ne peut fonctionner durablement que si la philosophie de ses membres possède une homogénéité suffisante, centrée sur la simplicité volontaire. En janvier 2012, nous avions décidé dans le cadre d’Angoulême-résilience de mettre en commun nos pratiques personnelles d’économie d’énergie. Quatre d’entre nous ont donné le dossier d’isolation de leur maison. J’ai voulu montrer qu’il fallait aller plus loin :

« Personnellement je pense que nous devons nous entraîner à vivre de peu, à vivre comme un Amish, la religion en moins. J’ai depuis qu’il m’en souvient toujours vécu le plus simplement possible. Je suis un enfant d’après-guerre, élevé dans un contexte de pénurie, avec un père artisan–tailleur qui avait des mortes saisons, sans beaucoup de client. Il fallait faire attention à tout, je faisais au minimum. Depuis, j’ai toujours choisi de me domicilier près de mon lieu de travail pour y aller à pied, je mange moins de viande et je mange moins, je refuse le portable et la carte bancaire, je ne pars pas en avion et limite mes excursions, etc. Il nous faut limiter au maximum notre poids sur la planète. La vie dans une communauté autonome s’accompagne nécessairement de la simplicité personnelle la plus grande possible. Le bonheur résiderait dans la simplicité totale et l’autarcie, se suffire à soi-même. Il n’y a de limites à notre sobriété heureuse que la force de nos convictions. Une communauté de résilience ne peut se concevoir que si ses membres sont vertueux. »

Gros émoi, les réactions sont vives. Les copains me comprennent en théorie, mais pas en pratique. Pour l’instant, personne ne se sent concerné par le fait de vivre sans portable, sans carte bancaire et sans voyage au long cours… Mais tant que nous n’aurons pas personnellement changé de mode de vie, l’avenir sera aux innombrables conflits. (la suite, demain)

Une vision d’ensemble de cette autobiographie :

Mémoires d’un écolo, Michel SOURROUILLE

00. Fragments préalables

01. Un préalable à l’action, se libérer de la religion

02. Une pensée en formation, avec des hauts et des bas

03. En faculté de sciences économiques et sociales, bof !

04. Premiers contacts avec l’écologie

05. Je deviens objecteur de conscience

06. Educateur, un rite de passage obligé

07. Insoumis… puis militaire !

08. Je deviens professeur de sciences économiques et sociales

09. Du féminisme à l’antispécisme

10. Avoir ou ne pas avoir des enfants

11. Le trou ludique dans mon emploi du temps, les échecs

12. Ma tentative d’écologiser la politique

13. L’écologie passe aussi par l’électronique

14. Mon engagement associatif au service de la nature

15. Mon engagement au service d’une communauté de résilience

16. Ma pratique de la simplicité volontaire

17. Objecteur de croissance, le militantisme des temps modernes

18. Techniques douces contre techniques dures

19. Je deviens journaliste pour la nature et l’écologie

20. Une UTOPIE pour 2050

21. Ma philosophie : l’écologie profonde

22. Fragments de mort, fragment de vie

23. Sous le signe de mon père

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