écologie appliquée

Grenelle 2 : l’enfumage est dissipé

Notre société thermo-industrielle n’est pas du tout préparée à l’ère de l’après-pétrole. Il faut une énorme marée noire pour que Barack Obama commence à se pencher sur la question. Pourtant les Lloyds, premier assureur mondial de risque, s’inquiètent : « Même avant que nous atteignions le pic pétrolier (ndlr : le moment où la production entamera un déclin irréversible, c’est-à-dire en ce moment), nous pourrions assister à une pénurie de pétrole à cause de la hausse de la demande d’énergie en Asie. » Mais en France, nous faisons comme si demain allait être pareil qu’avant-hier, on prévoit toujours la construction d’autoroutes et de lignes TGV, même au détriment de la biodiversité. La trame « verte et bleue », censée protéger la biodiversité, diminue comme peau de chagrin : le texte initial prévoyait la « compatibilité » des infrastructures avec les schémas régionaux de cohérence écologique. Le texte final, en fin de navette, stipule qu’elles devront seulement les « prendre en compte », sans aucune obligation (LeMonde du 18 juin). Le Grenelle va de renoncements en renoncements.

Le parti socialiste émet sur le Grenelle 2 un communique de presse (18 juin 2010) qui se veut assassin :  « Les parlementaires UMP ont confirmé et encore aggravé en Commission Mixte Paritaire les renoncements du Grenelle de l’environnement. Qu’il s’agisse des nombreux obstacles de procédure et des seuils infligés à l’éolien, de la non opposabilité des trames verte et bleue aux infrastructures linéaires de l’Etat, de l’usage des produits phytosanitaires dans l’agriculture, l’accord conclu entre les sénateurs et les députés UMP n’a sauvé ni le contenu ni l’honneur de la loi Grenelle 2. Les parlementaires UMP ont emboîté le pas au Président de la République. « Toutes ces histoires d’environnement, ça commence à bien faire » avait-il déclaré au salon de l’agriculture. Le Parlement a fermé le ban !

Le problème, c’est que si le PS était au pouvoir, connaissant les parlementaires socialistes comme on les connaît, la trame verte aurait été enterrée et l’ère de l’après-pétrole resterait un slogan vidé de son sens. Quant aux parlementaires américains, ils sont encore bien plus loin d’un véritable plan climat…

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la philo au bac, aujourd’hui et demain

La philosophie est restée une discipline rébarbative dont l’utilité et l’intérêt nous échappent. Cette matière scolaire dénature son étymologie philo-sophia, « amour de la sagesse ». Les trois incontournables de la discipline philosophique, la liberté, la vérité et la justice, n’ont jamais incité les professeurs et leurs élèves à militer contre l’aliénation, les oxymores et les inégalités ; on se contente de réciter ses classiques morts il y a déjà fort longtemps. Si la mission de la philosophie consiste à nous débarrasser de nos illusions afin de nous aider à mieux vivre, pourquoi n’est-ce pas une critique en règle du système capitaliste libéral qui nous mène de plus en plus vite contre le mur formé par les limites de la planète ? Pourtant les quelque 500 000 candidats aux baccalauréats général et technologique 2010 ont entamé les épreuves ce jeudi 17 juin avec la philosophie.

Le philosophe Ollivier Pourriol croit actualiser son métier en sortant sortir un livre sur le foot, Eloge du mauvais geste. Ainsi, le coup de tête de Zidane ne serait pas seulement un mouvement incontrôlé, commis sous l’emprise de la colère, mais « un geste fou, réalisé avec une technicité d’ingénieur ». Zidane ne frappe pas Materazzi à la tête mais au cœur, « siège du courage et de la colère ». Cantona, en donnant un coup de pied inouï à un supporteur qui l’insulte, n’est pas simplement une brute épaisse. Il « donne une leçon de morale ». En « Diogène des stades », il se jette « comme un chien enragé sur l’imbécile qui a eu le malheur de croiser le chemin de son exigence. Cantona philosophe à coups de crampons ». N’importe quoi, comme si frapper quelqu’un était excusable, comme si le foot-spectacle pouvait servir d’exemple pour rechercher la sagesse alors que c’est une vaste entreprise d’intoxication des masses.

Nous conseillons aux maîtres-philosophes de se pencher plutôt sur la philosophie de l’écologie, seul domaine où ils pourraient encore apporter quelque chose aux lycéens. Voici quelques lectures possibles :

2010 Crise écologique, crise des valeurs (Défis pour l’anthropologie et la spiritualité) sous la direction de Dominique Bourg et Philippe Roch (Labor et fides)

2009 Ecosophies, la philosophie à l’épreuve de l’écologie (MF) auteurs français et américains

2009 Crise éthique, éthique de crise ? (Entropia n° 6)

2007 La fin de l’exception humaine de Jean-Marie Schaeffer (Gallimard)

2004 La perte des sens (recueil de textes d’Ivan ILLICH) Fayard

1997 Du bon usage de la nature (pour une philosophie de l’environnement de Catherine et Raphaël Larrère (Flammarion 2009)

1991 Philosophie de la crise écologique de Vittorio Hösle (Wildproject, 2009)

1976 Ecologie, communauté et style de vie d’Arne NAESS (MF, 2008)

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lettre ouverte à Edgar Morin

Edgar, tu nous invites à résister, d’accord, mais à qui, à quoi ? Tu vaudrais décoloniser l’imaginaire, parfait, mais lequel ? Tu nous invites seulement à « épouser les combats de notre temps » (LeMonde du 11 juin 2010). Un peu court, pour un grand intellectuel hors norme. De ton temps, puisque tu es né en 1921, il était assez facile de savoir à quoi résister, le nazisme, la guerre coloniale en Algérie, le communisme stalinien. Mais aujourd’hui, alors que les générations présentes sont menacées d’une amnésie généralisée,  ton interview ne nous aide pas beaucoup à savoir à quoi résister ! Dans notre société dont tu soulignes la complexité, la publicité habille en blanc même les idées les plus révolutionnaires, les entreprises habillent en vert l’environnement et la nature, les politiques retournent leur veste ! Alors, que faire ? « Fonder une éthique qui articule la poétique au prosaïque » ? Des mots, juste des mots ! Quand, comme tu nous le conseilles, nous avons pu percevoir les deux aspects contradictoires d’un même combat, en fait nous n’avons pas progressé !

Nous pensons sur ce blog que c’est la démarche de Xavier Renou qui est la meilleure, intégrative et efficace. Avec d’autres, il a créé en novembre 2006 le collectif « les désobéissants », un réseau informel de militants de l’action directe. Parce qu’ils voulaient se battre pour la défense de la vie et de la justice sociale, il ont décidé de s’organiser en un groupe de volontaires et d’activistes prêts à agir de manière directe et non violente aussi souvent que nécessaire/possible. Ils constataient le cloisonnement et la concurrence entre les activistes militants. Mais, que nous soyons altermondialistes ou anti-mondialisation libérale, protecteurs du requin ou amoureux de la biosphère, anticapitalistes ou antiproductiviste, antinucléaires ou casseur de pub, écoguerriers ou faucheur d’OGM, malthusiens ou néo-luddite, objecteurs de conscience ou objecteur de croissance, nous agissons tous dans la même direction, avec un objectif commun, réaliser une société plus juste et plus durable.

La convergence des militants est difficile, chacun a ses mots d’ordre et sa propre organisation. En respectant l’autonomie de chacun, les désobéissants se contentent de proposer des occasions de rencontres au cours de stages. On peut alors s’entraîner ensemble aux méthodes et techniques de l’action directe non-violente, on échange des idées. Il était nécessaire de donner aux activistes ces opportunités de formation. Edgar, pour résister et combattre, tu devrais nous parler des désobéissants, de leurs stages et de leur site http://www.desobeir.net/. Merci Edgar.

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la décroissance est à vendre

Un peu de pub pour Casseurs de pub, rebaptisé « La décroissance ». D’abord quelques extraits en vrac pour critiquer la religion de la croissance :

Les obèses de la croissance, ces riches qui n’ont de cesse ici et ailleurs de ridiculiser les modes de vie traditionnels…Dans les médias, une meute de chiens de garde, journalistes, économistes, publicitaires, répètent en boucle ce couplet : « Sortez du troupeau du productivisme et ce sera le goulag, la peste et le choléra »… Au moins les dévots des temps anciens admettaient qu’ils défendaient une religion. Ceux du scientisme sont pires : ils n’ont même pas cette conscience… Les économistes parlent de « décollage » des Etats grâce à la croissance en les comparant avec des avions. L’image est juste en ce sens que les Etats perdent progressivement pied avec la réalité terrestre… Les Etats fonctionnent à l’image des personnes endettées qui ne peuvent concevoir le futur  que si demain elles gagnent davantage qu’aujourd’hui… Le scénario noir du chaos social se poursuivra tant que nous ne sortirons pas de la croissance, qu’elle soit noire, bleue, orange, rose, rouge ou verte.

Et puis cette histoire du canadien Conrad Schmidt : « Je me suis dit que si je me débarrassais de ma voiture,  et que je me rendais en vélo au boulot, j’allègerais mon empreinte sur l’environnement. Résultat, outre le fait que j’étais plus en forme, je me suis retrouvé avec un surplus de 400 dollars par mois, parce qu’une bagnole, ça coûte cher. Et la question s’est posé de ce que j’allais faire de cet argent en plus. Si je me paye un voyage en Europe, ça revient au même, je continue de nuire. La consommation est donc exclue. De la même façon, si je m’offre des massages ou des cours d’espagnol, comme est-ce que, eux, mon masseur et mon prof, vont-ils dépenser cet excédent de revenu ? Sans doute qu’ils seront moins scrupuleux que moi et qu’ils vont accumuler des biens inutiles qui viendront aggraver la situation. Conclusion, soit je détruis ce fric, je le brûle, soit je m’achète du temps. A partir de ce moment, j’ai commencé à travailler seulement quatre jours par semaine, puis j’y ai pris goût, et me suis investi dans la communauté, j’ai quitté mon job, j’ai fait des films, écrit des bouquins… »

Le numéro de juin de la Décroissance, le journal de la joie de vivre, est en vente dans les kiosques …

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Maurice Lévy, le fric et le mensonge

Y’en a qui manquent pas d’air ! Le même jour, 28 mai, nous apprenons que Maurice Lévy s’épanche dans LeMonde pour s’exprimer à la place des nouvelles générations et d’autre part qu’il devrait bientôt quitter ses fonctions de président du directoire de Publicis avec un package de départ de 25 millions d’euros. Maurice croit que les jeunes sont habités par l’idée que les ressources  de la planète sont limitées. C’est tout le contraire, les agences de publicité ont réussi à  rendre les  jeunes cervelles disponibles pour boire du Coca-cola, le plus de coca-cola possible. Maurice croit que la génération montante veut refonder les principes nés avec la révolution industrielle alors qu’elle ne rêve que du dernier Ipad à la mode. Maurice croit que nos enfants sont « révolutionnaires »  alors que sa dépolitisation a été programmée. D’ailleurs Maurice dévoile la supercherie vers la fin de son trop long article : « Nous, publicitaires, devons réinventer le rêve que nous offrons aux consommateurs. » Comment mieux avouer que les jeunes ne sont rien et que la publicité fait tout ; c’est Publicis qui invente le rêve et formate la jeunesse. En prime, Maurice avoue qu’il n’y a pas de changement à attendre, il parie encore et toujours sur une « croissance forte et de solides profits ». Il justifie ainsi son package perso ! Pas un mot de Maurice sur les limites de la planète, il s’en fout Maurice, il va pouvoir la piller avec ses 25 millions d’euros gagnés sur de pauvres jeunes publiphiles qui « devront apprendre à renouer avec ce qui fait la force du capitalisme : la réussite individuelle ».

LeMonde a donc offert à Maurice Lévy une tribune truffée de lieux communs (le 11 septembre, l’élection d’Obama, l’éthique du capitalisme…) pour faire le panégyrique de la croissance capitaliste au nom d’une jeunesse imaginaire. Il est vrai que LeMonde dépend aussi des publicitaires. Mais si la jeunesse n’était pas intoxiquée grave par la publicité, elle exigerait la suppression de Publicis et la confiscation immédiate des 25 millions de Maurice…

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Zapetero, Papandréou, la fin du national-socialisme

C’est un virage à 180 degrés pour des partis socialistes qui ont toujours conspué la rigueur ; les Premiers ministres Papandréou et Zapatero ont prévu une cure d’austérité sans précédent. Après la Grèce, l’Espagne a diminué le salaire des fonctionnaires et geler les  retraites (LeMonde du 19 mai). Encore récemment le 5 mai, Zapatero soutenait que « ce n’est pas une bonne chose d’accélérer la réduction du déficit ». Une semaine plus tard, il déclare le contraire devant les parlementaires : « En cohérence avec l’évolution de la réalité, le gouvernement a pris l’engagement d’accélérer la réduction du déficit ». Ce discours réaliste est une bonne chose, il rompt avec la logique nationale-socialiste de pillage des ressources mise en place par les partis socialisants (populistes ou populaires).

Le philosophe Hans-Dieter Klein avait avancé l’idée en 1989 que la politique mondiale contemporaine possède une structure profondément « nationale-socialiste ». Ce qu’il y a de terrifiant dans cette association, c’est évidemment le spectre du national-socialisme allemand ainsi que la suggestion pleinement assumée indiquant qu’il ne s’agit pas d’un égarement anormal de ce siècle infâme, mais bien de la manifestation parfaitement logique de son épouvantable essence. Lorsque les besoins de sa population s’accroissent de façon anarchique, l’Etat national-socialiste doit effectivement tenter de prélever les éléments nécessaires à l’assouvissement de ces besoins là où la résistance est la plus faible. Dans cette optique, deux options majeures sont à la disposition de ces Etats : d’une part la nature, d’autre part les nations encore régies par des rapports de type féodal (les peuples du tiers-monde). Parallèlement, on affirme que, puisqu’elles n’existent pas encore, les générations à venir ne peuvent prétendre à aucun droit. La contradiction fondamentale repose sur le fait que ces pilleurs bafouent à l’échelon international des principes moraux qu’ils appliquent à l’échelon national (l’égalité).

Il ne fait aucun doute que la structure nationale-socialiste de l’économie mondiale actuelle implique que la pacification sociale à l’intérieur de l’Etat s’accomplissait grâce à une exploitation conjointe de la nature et du tiers-monde, et se traduisait ainsi par une aggravation de la crise écologique. Il fallait changer cette politique, les politiques de rigueur sont donc un bon signe. Qu’en pense le parti socialiste français ?

Pour en savoir plus, lire Vittorio Hösle, Philosophie de la crise écologique (1991)

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j’ai peur d’être écolo

J’ai été torturé, il me fallait manger mon repas en une minute et demie, je ne pouvais ni lire ni écrire, mon procès a eu lieu à huis clos… je m’appelle Wu Lihong. Ce résumé d’un article du Monde (11 mai 2010) montre qu’être militant écologiste peut être dangereux. Pourtant Wu Lihong ne faisait que dénoncer la pollution des eaux par des usines  chimiques, il se contentait d’alerter l’agence chinoise de protection de l’environnement, il avait raison. Mais nous sommes en Chine, cela n’arrivera pas chez nous !

Au Mexique Ignacio Chapela avait mis en évidence une contamination du maïs par des transgéniques dans un article publié dans Nature. Les prises de position de Chapela cadraient mal avec une carrière dans la respectable institution de Berkeley, désormais plus tournée vers les grands partenariats avec le secteur privé que vers la contestation politique. La titularisation de Chapela lui a été refusée au cours de l’année 2003. Les lanceurs d’alerte (Whistleblowers) risquent leur emploi pour « sonner l’alarme », même la notoriété n’empêche pas la répression. James Hansen, climatologue célèbre pour avoir déclaré en 1988 devant une commission du sénat américain que la sécheresse qui dure ne relève pas de la variabilité naturelle du climat, mais des activités humaines, subit en 2005 des représailles sous Bush : « La censure est devenue intense, m’empêchant de m’exprimer dans les médias », raconte James Hansen. Il ne peut parler qu’à condition qu’un responsable des affaires publiques de la NASA surveille la conversation. Et en France, patrie de la liberté d’expression ? La Fondation Sciences Citoyennes a récemment lancé une campagne de soutien au professeur Gilles-Eric Séralini qui est actuellement victimes de vives pressions de la part de Monsanto, de l’EFSA (Autorité européenne de sécurité des aliments) et de l’AFBV (Association française des biotechnologies végétales) suite à la publication de contre-expertises des études de Monsanto sur trois maïs génétiquement modifiés. Que les difficultés économiques se systématisent et la répression anti-écologique se fera chinoise.

                La frontière entre dénonciation écologique et réalité économique est un mythe. Les lanceurs d’alerte ont besoin d’une protection qui s’inspire par exemple des dispositions de la loi de 2007 relative à la lutte contre la corruption. Ce texte introduisait dans le code du travail une disposition visant à protéger les salariés qui prennent l’initiative de dénoncer de bonne foi des faits de corruption ou de trafic d’influence qu’ils sont amenés à constater dans le cadre de leurs fonctions. Corinne Lepage avait rendu en 2008 un rapport sur l’information environnementale, l’expertise et la responsabilité. L’information du public y est considérée comme un devoir, ce qui implique un « devoir d’alerte », accompagné de la création d’un « délit de rétention d’information quand le risque est avéré ». Un tel délit aurait été appliqué dans le passé aux cigarettiers qui disposaient d’études sur les dangers du tabac et les ont dissimulées. Mais même si une protection était votée, le militant écolo qui dit la vérité prendra un risque.

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Grenelle 2 : la revanche des lobbies

La gauche ne vote pas la loi Grenelle 2, les arguments ne manquent pas. La revanche des lobbies s’est en effet traduite par des régressions et des trahisons inacceptables :

– Le nucléaire était hors-Grenelle, nous disait-on. Mais non, le gouvernement lui-même a introduit, à l’article 94 quater, l’abandon des enquêtes publiques en considérant qu’un « accroissement significatif » de rejets radioactifs n’est pas une « modification notable » d’une installation nucléaire.

L’article 34 de la loi, en prétendant encadrer l’installation des éoliennes, ajoute des contraintes (classement ICPE, schémas régionaux, obligation des cinq mâts…) à des contraintes antérieures. Finies les éoliennes communales et coopératives adoptées par les citoyens, les agriculteurs et les institutions d’un village, place aux grands groupes financiers seuls capables d’investir dans des centrales éoliennes. C’est la mort du petit éolien.

– La mention « haute valeur environnementale » (HVE) des exploitations agricoles est finalement un leurre destiné à entraver la progression de l’agriculture biologique. Pire, les cultures OGM pourront bénéficier de l’appellation HVE !

Des dizaines d’autres reculs ou refus disqualifient le texte Grenelle 2 : la taxe carbone est abandonnée, l’étiquetage carbone est repoussé, les PLU intercommunaux sont rejetés, la technologie peu fiable et très chère de stockage du carbone est encouragée, les abeilles et les apiculteurs ne sont pas protégés des insecticides, la promotion d’une journée végétarienne par semaine est refusée, la prise en compte du pic pétrolier est totalement absente…

(résumé d’un communiqué d’Yves Cochet)

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Grenelle2 : démocratie et lobbies

Les lobbies n’ont que le pouvoir qu’on leur prête. Les agriculteurs, les transporteurs routiers, les industriels demandent des aménagements du Grenelle2 « au nom de la crise économique ». Comme nos parlementaires sont garants de nos intérêts à long terme, ils ne peuvent écouter l’expression de ces intérêts catégoriels. Prenons un autre exemple, l’énergie éolienne : stop ou encore ? (cf. contre-enquête du Monde du 4 mai). Les lobbies du nucléaire anti-éolien s’agitent d’un côté, les professionnels des énergies renouvelables de l’autre. Des parlementaires dignes de leur mandat feraient taire cette vaine dispute. Ils devraient soutenir en priorité une politique volontariste d’économies d’énergie, objectif qui n’a pourtant aucun lobby à ses côtés ; seuls les objecteurs de croissance et les partisans de la simplicité volontaire, considérés encore comme des marginaux, vont dans ce sens. Ces parlementaires soutiendraient aussi les énergies renouvelables décentralisées contre le nucléaire et les centrales thermiques. Il y a des ordres de priorité qui s’imposent, le long terme contre le court terme, un mode de vie durable contre un niveau de vie insoutenable, etc.

Nous n’avons pas besoin de changer les structures de la démocratie française, il suffit que la réflexion de nos élus se modifie. Que ce soit au niveau national ou local, un élu doit prendre conscience qu’il n’est pas simplement le porte-parole de ses administrés, il est aussi l’avocat des tiers-absents : les générations futures, les habitants des pays pauvres, les non-humains, tous ceux qui ne peuvent participer aux assemblées délibératives. Les citoyens du monde présents et futurs doivent se sentir représenter par des hommes et des femmes au fait des enjeux économiques, sociaux et écologiques de leur époque. Si cette prise de conscience généralisée n’advient pas, nous résoudrons nos problèmes de façon non démocratique…

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Avec ou sans George Soros

200 économistes contre les dogmes du marché : la biosphère est encore ignorée !

Réunis à Cambridge, des chercheurs hétérodoxes réunis par George Soros plaident pour une révolution théorique, seule capable d’engendrer une vraie réforme. Sauf que George lui-même avoue ne pas avoir d’opinion tranchée sur ce que serait une « bonne réforme » et que les avis des spécialistes ne brillent pas par leur clarté !

Pourtant la base du raisonnement est amplement partagée, les équilibres « naturels » du marché n’existent pas ; c’est au contraire l’instabilité qui caractérise le jeu de l’offre et de la demande. Le processus de fixation des prix par le marché est par essence irrationnel et le comportement des acteurs intrinsèquement contingent. Il n’y a pas de juste prix, mais un prix conventionnel fixé par le cadre institutionnel et le rapport de force entre acteurs. C’est d’ailleurs à cause de cette domination légale des uns sur les autres que jaillit le profit, c’est-à-dire le gain des uns aux détriments des autres. C’est pourquoi dans ce système de « liberté » économique, les inégalités sont en hausse. La rigueur et l’austérité économique sont imposées à la périphérie, les bulles spéculatives bénéficient à ceux qui sont bien placés. Les bonus versés par Goldman Sachs équivalent aux revenus des 224 millions de Terriens les plus pauvres. Lorsqu’il s’agit de combattre la pauvreté, tout le monde est d’accord. Mais si l’on parle de réduire les inégalités, c’est la peur d’avoir à partager qui l’emporte.

Mais il ne suffit pas de parler des inégalités. Ces économistes hétérodoxes passent à côté de l’essentiel. Ce qui importe aujourd’hui, c’est que l’économie conventionnelle a complètement détérioré depuis deux siècles les équilibres de la nature. Que faire ? Constater d’abord que les inégalités de salaire, l’existence de dividendes ou de profit basé sur le patrimoine de rapport ne fait qu’exacerber le poids de l’activité humaine sur les ressources naturelles. Comprendre ensuite qu’une société durable ne peut fonctionner sur un registre trop grand de complexité car cela favorisera toujours les profiteurs et les abus. Envisager enfin notre avenir en termes de communautés restreintes vivant de façon autonome, dans le respect des autres communautés humaines et non humaines.

Source de documentation : LeMonde économie (27 avril 2010)

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voile intégral et principe de précaution

Les « libéraux » qui contestent le principe de précaution nous font passer des frissons dans le dos. Ils ne se sont pas encore rendus compte que la société thermo-industrielle est devenue extrêmement dangereuse, que ce soit pour des raisons écologiques, économiques ou sociales. Analysons l’actualité relatée par LeMonde du 29 avril.

Au niveau écologique, la marée noire dans le golfe du Mexique montre que la poursuite de l’exploitation off-shore du pétrole n’est pas une mince affaire. Obama avait élargi les autorisations de forages pétroliers en haute mer (LeMonde du 2 avril), la réalité des risques lui inflige un démenti cinglant. En Inde, la filière du recyclage échappe à tout contrôle, des déchets nucléaires se retrouvent même dans les villes. Que ce soit en Inde ou ailleurs, personne ne sait vraiment quoi faire des déchets radioactifs sauf à reporter le risque sur les générations futures qui ne profiteront même pas du nucléaire civil faute d’uranium !

Au niveau économique, le risque de contagion de la crise grecque fait paniquer les marchés financiers. Les économistes libéraux se sont accommodés pendant des décennies de l’ampleur croissante des déficits publics, négligeant le risque systémique et déjà « surpris » par le tsunami financier de 2008 causé par l’endettement des ménages américains. Le spectre d’un nouveau choc bancaire est encore accentué par la formation d’empires comme Goldman Sachs. La garantie de refinancement public donnée aux établissements « too big to fail » accroît les possibilités de défaillance du système. Le capitalisme vit à crédit, c’est un risque majeur.

Au niveau social, François Fillon confirme le calendrier du projet de loi contre le voile intégral ; le texte sera (aussi) « basé sur les motifs de sécurité ». Ainsi raisonnent les politiques, soutien du libéralisme économique : polariser l’attention du public sur les choses inessentielles, financer les dettes et permettre le pillage des ressources naturelles.

Une société minière qui dilapide le capital naturel (pétrole, uranium, etc.) est une société qui court à la catastrophe. Une société minière qui s’accompagne d’une spéculation financière effrénée accroît encore le risque de catastrophe. Une société minière spéculative qui endort les masses par de faux débat accroît le risque de totalitarisme pour gérer les catastrophes économiques et écologiques. Le principe de précaution devrait être au cœur de nos prises de décision individuelles et collectives.

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porter la burqa ou conduire, il faut choisir

Le gouvernement français fait fort. Il veut interdire la burqa mais il protège la liberté de rouler en bagnole. Quelle contradiction ! La France est théoriquement le pays de la liberté de faire ce que l’on veut, quand on veut, où l’on veut. Jusqu’à présent le port de la burqa est autorisé et la minijupe n’est pas interdite. C’est bien ! Jusqu’à présent les courses automobiles sont autorisées et le 4×4 n’est pas interdit. C’est mal ! La liberté n’est jamais un droit absolu, tout droit s’oppose à un autre droit, tout droit entraîne des devoirs, toute liberté doit s’accompagner du sens des limites, toute liberté d’action présuppose le sens des responsabilités. Nous nous rappelons encore cette exclamation de la journaliste Nathalie Brafman : « Même si elle dort pratiquement tout le temps au parking, la voiture, c’est la liberté. Et la liberté, ça un prix ! » Oui, la liberté a un prix et nous n’en avons plus conscience.

Il y a des arbitrages à faire entre les différentes urgences, entre la liberté et la sécurité par exemple. Mais le tout sécuritaire empiète forcément sur nos libertés. Et le libéralisme économique propose la liberté, mais pour les patrons d’entreprise et ceux qui sont solvables. Comment trancher entre des principes contradictoires ? Il nous semble qu’un principe premier pourrait nous guider : « Avoir une souveraineté sur moi-même est la clé de la liberté, éviter tout dommage à autrui en est la contre-partie nécessaire. » Porter la burqa est une liberté, d’ailleurs reconnu par le principe de laïcité ou séparation entre les affaires publiques et les idées religieuses. Porter la burqa porte-t-il atteinte à autrui ? Dans les cas déjà définis par la loi où nous avons besoin de contrôler l’identité d’une personne. Conduire une voiture porte-t-il atteinte à autrui ? Oui parce que la généralisation de la voiture individuelle n’est pas possible. Oui parce que le réchauffement climatique perturbe tous les écosystèmes et les conditions de vie qui en découlent. Oui parce que les générations futures ne pourront plus disposer du pétrole, ressource non renouvelable. Nous ne devrions pas avoir la liberté de prendre le volant.

Qu’une personne porte la burqa ne gêne qu’elle-même, dans ses mouvements et dans sa vision du monde. Qu’une génération entière veuille rouler en automobile, et cela nous précipite vers une crise écologique majeure.

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traiter enfin les questions qui fâchent

La recomposition institutionnelle de la gauche est déjà difficile ; à plus forte raison sa recomposition idéologique. Nous savons déjà qu’elle sera sociale ET écologiste, mais le contenu ressemble encore à ce que dit la droite, croissance verte et compétitivité. Les voix discordantes sont encore minoritaires. Des membres du pôle écologique du PS viennent de signer le 20 avril un point de vue dans lemonde.fr : « Gauche et écologie : traiter enfin les questions qui fâchent ». Bravo !

Le propos est à la limite du supportable pour le système, par exemple : « Nul ne nie plus aujourd’hui la nécessité d’une transition écologique conduisant à un modèle de développement plus sobre. Sur cette base, il faudra déterminer ce qui fait précisément débat, par exemple l’évolution de certaines activités, comme l’industrie automobile. » Déjà le pôle avait osé un communiqué de presse anti-F1 le 13 mars dernier : « Ce week-end a lieu la reprise du championnat du monde de F1. A l’heure du changement climatique et de l’épuisement des hydrocarbures, la question de l’existence de telles courses automobiles mérite d’être posée. » Bravo, bravo !!

La question écologique, société de frugalité, sobriété énergétique, fiscalité écologique généralisée, arrêt des déficits publics… deviennent de véritables enjeux. Christophe Caresche, Géraud Guibert, Philippe Plisson veulent un vaste débat démocratique aboutissant à un contrat de gouvernement réunissant socialistes, écologistes et Front de gauche. Bravo, bravo, bravo !!!

Mais l’urgence écologique, par exemple l’imminence du pic pétrolier mondial, nécessite une recomposition institutionnelle et idéologique de la gauche très très rapide. Nous n’avons plus le temps de laisser du temps au temps. Il manque encore une grande gueule écolo au sein du PS pour faire passer médiatiquement le message. La gauche a besoin d’un Jaurès de l’écologie.

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frilosité du principe de précaution ?

Le principe de précaution n’est pas un principe d’anxiété (éditorial du Monde du 21 avril), il permet au contraire de lutter contre les dérives de notre société thermo-industrielle. Cet éditorial préfère assimiler mesures de précaution et société régressive, diabolisant le principe de précaution. Nous nous rappelons encore les résistances des « spécialistes » avant même les débats parlementaires de 2005 sur sa constitutionnalisation en 2005. Selon l’Académie des sciences morales, ce projet « aurait des conséquences scientifiques, industrielles et même politiques puisqu’il irait à l’encontre des principes qui fondent notre démocratie représentative » ?? Les Académies des sciences et de médecine craignaient que l’inscription de ce principe dans la Constitution n’ait des conséquences « désastreuses », et même le quotidien LeMonde traitait dans un éditorial du 26 avril 2004 le principe de précaution de principe de frilosité. De son côté, le Medef avait réaffirmé son opposition sous prétexte d’un effet dissuasif sur la recherche et l’innovation. Nous nous rappelons aussi avec quelle condescendance Jean Yves Nau traitait le principe de précaution « d’indéfinissable » alors qu’il s’interrogeait dans LeMonde du 13 août 2007 sur la problématique de l’effet à long terme des faibles doses (radiations nucléaires, ondes électromagnétiques, taurine dans le Red Bull…). Nous nous rappelons encore les propos de Baverez prônant une « bonne » écologie qui « se démarque d’une conception absolutiste du principe de précaution pour se réconcilier avec la science et le progrès. » (Les Echos du 16 octobre 2007). Nous nous rappelons particulièrement la diatribe du professeur Michel Godet contre les « Khmers verts pour qui la disparition de l’homme blanc occidental serait une bonne nouvelle » et sa conclusion : « Si on appliquait le principe de précaution, on ne ferait pas d’enfants ! » (LeMonde du 13 décembre 2007).

Nous sommes en 2010 et le principe de précaution est entré dans les mœurs. Les « spécialistes » au service de l’économie dominante se font moins virulents. Le complexe agro-chimico-industriel n’avait jamais voulu appliquer le principe de précaution, certaines personnes en ont déjà payé le prix : effets du distilbène, de l’amiante, de la maladie de Creutzfeld-Jacob… Nous avons dorénavant compris qu’avec le principe de précaution, il s’agit de « mettre les avancées scientifiques et technologiques au service des hommes et de la planète. Le mérite du principe de précaution est de permettre de faire des choix collectifs, à travers l’arbitrage des choix politiques, qui subordonnent l’acceptabilité des risques, inséparables du développement de la science, à l’utilité des innovations et à la légitimité de leur utilisation » (article 4 de la Déclaration de principes  du parti socialiste, 2008). Il ne s’agit pas seulement de s’interroger sur le degré d’innocuité sanitaire d’une technique ou d’une pratique, il s’agit de savoir si la société qui en résulte est viable ou non, raisonnable ou non. Le tourisme par avion fait-il le bonheur ? Aller marcher quinze jours en Ethiopie, est-ce raisonnable ? La liberté de déplacement vaut-elle une forte émission de gaz à effet de serre ? Tous les gens éclairés savent que la réponse ne peut être que négative.

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Europe en panne, biosphère en capilotade

Ce blog entend se placer à l’avant-garde, au nom de l’intérêt général et de la défense des générations futures, contre les enjeux économiques de court terme. « L’Europe entendait se placer à l’avant-garde, au nom de l’intérêt général et de la défense des générations futures, contre les enjeux économiques de court terme. Attitude courageuse, mais difficile tant elle heurte les industriels. (Editorial du Monde, 20 mars) » Ce que l’Union européenne ne peut faire contre le réchauffement climatique (à Copenhague) ou en faveur du thon rouge (à Doha), ce blog biosphere ne peut sans doute pas grand chose de plus. Mais comme on est entre nous, nous pourrions réfléchir un peu plus profondément ensemble. Nous pensons que les lecteurs de ce blog pourraient tomber d’accord sur le fait que privilégier les intérêts à court terme est une impasse. Nous pensons aussi, contrairement à l’éditorial du Monde, que « le droit au développement pour repousser les contraintes environnementales » va à l’encontre des intérêts à long terme de l’espèce humaine. Nous pensons enfin que les accords internationaux ne sont possibles que si les citoyens rendent nécessaires ces accords.

Les écolo-consommateurs qui décident personnellement de limiter leurs déplacements en voiture individuelle luttent contre les émissions de gaz à effet de serre. Beaucoup de citoyens agissant ainsi et Copenhague aurait été un aboutissement, pas un échec ! Les écolo-consommateurs japonais qui décident de ne plus consommer de thon rouge soutiennent la pérennité de cette espèce. Beaucoup de citoyens agissant ainsi et Doha aurait été un aboutissement, pas un échec ! Il n’y a pas besoin de conférences internationales pour poser les problèmes que nous pourrions déjà résoudre par la simplicité volontaire. Mais le culte des intérêts à court terme, soutenu par des lobbies, des Etats et la masse de la population, rendent possible une future dérive fasciste prenant prétexte de l’écologie. L’écologie politique pratiquée suffisamment à temps par des individus responsables empêche le totalitarisme. La dérive croissanciste du capitalisme libéral  mondialisé nous entraîne vers le totalitarisme.

 

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quel parti pour Corinne Lepage ?

Comment s’engager politiquement, avec qui militer ? Autant l’engagement associatif paraît facile, France Nature Environnement, Greenpeace, Réseau sortir du nucléaire, etc., autant déterminer quel parti politique choisir pour faire avancer la cause écologique est devenu un véritable casse-tête. Pour les herboristes de droite comme pour les naturalistes de gauche, il est évident que la nature est apolitique. La candidature de René Dumont aux présidentielles de 1974 n’était pas étiquetée politiquement, elle était poussée par le mouvement associatif, les Amis de la Terre principalement. Les Verts se positionnent à l’origine « ni droite, ni gauche ». Aujourd’hui que les crises écologiques ne peuvent plus être ignorées par les politiques, tous les partis se disent écologistes, droite et gauche confondue. Alors, dans quel parti  un écologiste convaincu devrait-il militer ?

Prenons l’exemple de la députée européenne Corinne Lepage, ancienne ministre de l’environnement classé à droite qui annonce sa démission du centre-droit MoDem (LeMonde du 18 mars).

 Corinne Lepage croyait avec le MoDem élaborer un projet qui permette un développement soutenable. Elle s’est trompée, elle a soutenu un homme qui a pour seule ambition l’élection présidentielle. Corinne Lepage a soutenu la liste Europe Ecologie en Alsace, la seule région où les écologistes avaient une chance de devancer le PS. Mais la multiplicité des courants écologistes présentés aux électeurs en Alsace n’a pas permis d’atteindre cet objectif. Alors Corinne Lepage travaille à la constitution d’un « grand rassemblement », une chimère poursuivie par tous ceux qui veulent un front uni de gauche, un parti unique à droite, un parti centriste prépondérant, ou un parti écologiste conquérant.

L’écologie n’entre pas dans le cadre politicien, elle cherche l’harmonie entre l’homme et la nature, et les élections ne sont qu’un des moyens de poursuivre dans cette voie. Chaque groupe humain possède des individus réfractaires à la société thermo-industrielle, et d’autres qui soutiennent le mode de vie occidentalisé destructeur des équilibres. C’est là la véritable séparation politique. Peu importe que l’écologiste s’engage dans tel ou tel parti du moment où il se range aux côtés de ceux qui ont conscience des limites contre ceux qui n’ont aucune conscience. Aux électeurs de déterminer dimanche prochain celui ou celle des listes régionales qui aura la plus grande sensibilité écologiste pour nous assurer un avenir durable.

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on nous prend pour des cons

Les climato-sceptiques nient par leur propagande cette évidence : il  faut diminuer les émissions de gaz à effet de serre d’origine anthropique. Les élites médiatisées, en proclamant la nécessité du développement-croissance, nient cette évidence : l’humanité a déjà dépassé les possibilités d’accueil de la biosphère. Les démographes patentés, polarisé par le vieillissement (mondial) de la population, nient cette évidence : il y a un décalage inquiétant entre la croissance de la population mondiale et le potentiel de ressources alimentaires. Jean-Pierre Guegan est l’un des rares démographies qui ose enfourcher le cheval de bataille de la planification familiale en Afrique (LeMonde du 12 mars) : « Une croissance de 2,5 % à 3 % du taux de fécondité, ce qui est le cas aujourd’hui dans une quinzaine de pays d’Afrique subsaharienne, est insoutenable. » Pourquoi donc le discours apparent dans notre société peut-il à ce point nier l’évidence ?

Parce que le discours sur l’effondrement ne peut être tenu par les responsables économiques et politiques, qui, à la place qu’ils occupent, sont soumis aux contraintes de l’interaction spéculaire (« relatif au miroir », mimétisme). La société est un système de représentations croisées entre individus : je me représente la manière dont les autres se représentent les choses et moi-même. Ce  mimétisme constitue ce qui garantit l’unification des sociétés. Mais aussi leur marche au pas de l’oie vers le désastre, socio-politique ou écologique. Un individu soumis à la dictature ne se demande pas s’il veut renverser le régime, mais seulement s’il le ferait au cas où un certain nombre d’autres le feraient aussi. De nombreux exemples historiques montrent qu’ainsi un régime détesté de (presque) tous s’impose et se maintient plus longtemps qu’un régime légitimé par une majorité. C’est parce qu’il y a interaction spéculaire que les climato-sceptiques, les élites médiatisées et les démographes patentés peuvent faire aujourd’hui la loi.

Néanmoins, la pensée unique peut aussi s’effondrer rapidement tellement sont imprévisibles les dynamiques sociales dues à l’interaction spéculaire. On nous prend pour des cons, mais nous pouvons réfléchir. Montrons l’exemple, soyons écolos.

 

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Ecologie et régionales

Quelle est la place de l’écologie dans la bipolarisation de la vie politique française ? Pour Eric Loiselet, membre fondateur du pôle écologique du PS, animateur de la motion B (pour un parti socialiste résolument écologiste) lors du Congrès de novembre 2008, adjoint national auprès de la secrétaire à l’environnement Laurence Rossignol, les choses étaient claires : l’urgence écologique devait être prise en compte par le PS. Mais la motion B n’a eu aucun succès lors du vote des militants, et la commission nationale à l’environnement a depuis lors un encéphalogramme plat. Loiselet s’est donc envolé vers Europe Ecologie, on pourrait le comprendre. Corinne Lepage, ancienne ministre de l’environnement, récupérée par le Modem pour les présidentielles, juge maintenant que « nous pouvons construire une maison commune des écologistes, des démocrates et des humanistes ». Faisant fi des accusations de « déloyauté » lancées par François Bayrou (LeMonde du 10 mars), il s’agirait de mettre fin à la bipolarisation de la scène politique. Mais le positionnement de chacun pour les régionales n’est qu’un épiphénomène ; les transfuges ne placent pas la bipolarisation là où elle se trouve.

Sans doute le clivage qui marque depuis la Révolution française la séparation entre une droite conservatrice et  cléricale et une gauche républicaine et progressiste est-il obsolète. Sans doute l’opposition entre la droite et la gauche est-elle en décalage croissant avec l’urgence écologique. Mais faut-il rappeler que les représentants du capitalisme comme ceux du socialisme ont toujours manifesté une foi inébranlable dans les vertus d’un progrès menant l’humanité vers le bien être matériel et la paix entre les hommes. Cette croyance au progrès, marqué pourtant par des totalitarismes et des massacres, entre dans une crise idéologique majeure. Les repères se brouillent, la droite a même confisqué à la gauche le monopole du progressisme et de l’engagement écologique. Car l’écologie est transversale, elle ne peut être revendiquée par aucun parti. Un troisième pôle politique, représenté principalement par les Verts (Europe-Ecologie), peut sans doute faire réfléchir l’électorat et accélérer une prise en compte de l’urgence écologique. Mais la distinction essentielle ne se trouve plus dans une appartenance à la droite, la gauche ou une alternative, elle se trouve à l’intérieur de chaque parti, à l’intérieur de chaque militant, à l’intérieur de chaque citoyen : il y a notre part « moderniste » qui revendique un système économique sans limites, et notre réflexion profonde qui commence à savoir que nous avons déjà franchi les limites de la biosphère et qu’il faut changer de chemin…, pas de parti !

 

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les transfuges des régionales

Les élections régionales donnent l’occasion d’une recomposition politique. Eric Loiselet, socialiste premier fédéral de Haute Marne, est devenu tête de liste d’Europe Ecologie en Champagne-Ardenne. Stéphane Gatignon, maire communiste de Sevran, est devenu tête de liste en Seine-Saint Denis. Est-ce le signal d’une vague écolo en France ? Nous pourrions d’abord dire que c’est le signe de la décomposition de nos élites qui vont toujours là où le vent souffle. Autrefois il s’agissait de rester dans le même parti qui servait de tremplin électoral. Aujourd’hui, en ces temps incertains, on change de parti comme de chemise. Cela correspond aussi au fait qu’Europe Ecologie n’était pas très regardant sur la force des conversions écolo de son affichage : « Ce mouvement est aveuglé par la peopolisation et la recherche de starisation pour leurs listes » (Alain Bucherie).

On peut d’ailleurs dire du socialiste Loiselet qu’il véhicule un écologisme mou : « Loin d’être des partisans de la décroissance, du retour à la bougie et de la dépopulation, les Verts veulent retrouver le chemin du développement économique et de la dynamique démographique » (AFP, 1er février 2010). On peut dire du communiste Gatignon qu’il a encore du mal à parler d’écologie, car sa vraie nature, c’est d’être communiste. Et un bon communiste est toujours imprégné du productivisme marxiste (c’est le même que le productivisme social-libéral).

Comme l’exprime Simon Charbonneau, un vrai écologiste sait distinguer la décroissance subie de la décroissance choisie. En ce qui concerne la première catégorie, il faut rappeler que la croissance de nos biens matériels produits par l’industrie entraîne la décroissance de nos biens matériels naturels. Il s’agit d’une logique imparable qui explique l’appauvrissement de la biodiversité, l’épuisement des ressources naturelles, l’uniformisation de nos paysages. Une décroissance choisie implique au contraire une remise en question complète de la performance technologique et économique et de l’accentuation de la mobilité des hommes et des marchandises. De telles perspectives impliquent une réflexion politique totalement nouvelle que ne peuvent porter pour le moment ni Loiselet, ni Gatignon.

Source documentaire :

Loiselet : Mensuel La  décroissance (mars 2010), Europe Ecologie ou le triomphe de la société du spectacle

Gatignon : Quotidien LeMonde  (9 mars 2010), Du rouge au vert

 

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l’illusionniste Cohn-Bendit

Daniel Cohn-Bendit, dans un dialogue récent avec Luc Ferry, raisonne comme la droite : « Pour être intelligente, large et mobilisatrice, je pense que l’écologie doit oublier ce que j’appelle la définition apocalyptique. Il y a là un danger de mises entre parenthèses de la démocratie. » Dany croit par exemple qu’il faut cultiver « l’attrait démocratique » à propos de la dégradation climatique. Des mots, des mots ! La démocratie réelle ne peut pas être un système politique dans lequel on traite les citoyens comme de grands enfants auxquels il faut cacher les réalités sordides. D’ailleurs, dans l’éditorial La mer, le risque (leMonde du 3 mars), c’est clair : « Entre 1999 et 2006, ce sont près de 10 000 logements qui ont été bâtis en zones inondables sur l’ensemble du territoire. C’est le cas, notamment à la Faute-sur-mer (ndlr : au nom prédestiné). En Vendée, le risque était connu. Là encore, il a été occulté, comme si l’on voulait écarter la perspective du pire, et se persuader que les catastrophes n’arrivent qu’aux autres. »

Il en est de Cohn-Bendit comme des promoteurs immobiliers, pour eux l’apocalypse n’est pas possible ; La preuve, ils disent que ce n’est pas possible. Mais l’écologiste Cohn-Bendit oublie ses classiques : lorsqu’on s’est à ce point éloigné du réel, le meilleur moyen de le faire revenir est d’agiter la menace de la catastrophe. La catastrophe met en cause l’idée même de maîtrise, en inversant brutalement les rapports entre l’homme et la nature : le partenaire oublié revient en force, manifeste avec éclat sa présence. Jean Pierre Dupuy montre que l’on peut argumenter en faveur d’« un catastrophisme éclairé ». Jean-Pierre Dupuy descend en flamme l’idée démocratique dans une société manipulée : « Le pouvoir d’attraction d’une opinion croit avec le nombre d’individus qui la partagent. On conçoit que les effets de la polarisation mimétique en soient d’autant accentués. Mais l’imitation généralisée a le pouvoir de créer des mondes parfaitement déconnectés du réel. » Il parle aussi des  catastrophes en zones inondables : « Le malheur est notre destin, mais un destin qui n’est tel que parce que les hommes n’y reconnaissent pas les conséquences de leurs actes. »

En définitive, Jean-Pierre Dupuy pense l’inverse de Cohn-Bendit : « L’heuristique de la peur, ce n’est pas de se laisser emporter par un flot de sentiments en abdiquant la raison ; c’est faire preuve d’une peur simulée, le révélateur de ce qui a pour nous valeur incomparable. Hans Jonas écrit dans Le Principe Responsabilité : « La peur qui fait essentiellement partie de la responsabilité n’est pas celle qui déconseille d’agir, mais celle qui invite à agir ». Le débat démocratique au sujet des nouvelles menaces va porter de plus en plus sur les limites que les sociétés industrielles vont devoir s’imposer à elles-mêmes, en coordination les unes avec les autres, ou bien c’est un écofascisme terrifiant qui risque d’imposer sa loi à la planète. » »

Source documentaire :

Pour un catastrophisme éclairé de Jean-Pierre Dupuy (2002)

Daniel Cohn-Bendit/Luc Ferry in mensuel terraeco de mars 2010

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