effet de serre

Laurent Fabius, un converti du climat ? On n’y croit pas

« L’année dernière, Fabius ne parlait que de diplomatie économique. Cette année, il n’a que le climat à la bouche »*. En visite en Arabie saoudite, Laurent Fabius a glissé quelques mots sur le climat, invitant le premier producteur de pétrole au monde à « repenser son mix énergétique ». Il aurait du parler du prix du pétrole, beaucoup trop bas pour que nous pensions à limiter nos émissions de gaz à effet de serre. Chaque mois il fait un tour du monde : son empreinte carbone explose tous les plafonds. Il devrait passer par skype, et participer sans bouger à des conférences internationales depuis son fauteuil de ministre des affaires étrangères. Il va présider la 21e Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP 21 ou Conférence des parties), accueillie en France du 30 novembre au 11 décembre 2015. C’est la fonction qui crée le bonhomme, Fabius n’a rien d’un écolo. Quand il a été nommé en mai 2012, il ne voulait pas de la COP en France et ne se souciait pas des questions environnementales. Laurent Fabius n’est pas un « converti » à l’écologie, il pratique l’opportunisme, cette maladie structurelle de la classe politique.

Rappelons qu’en 2000, le gouvernement Jospin avait présenté un programme de lutte contre le changement climatique qui avait rapidement sombré tandis que Fabius supprimait la vignette automobile, un impôt progressif qui aurait instauré un certain malus sur les émissions de carbone. En 2003 Fabius avait fait fort, faisant écrire que le PS deviendrait « le premier parti écologiste de France » (LE MONDE du 7.01.2003). Mais les Verts traversaient à l’époque une période de fortes turbulences et Fabius voulait récupérer la mise. Opportunisme ! Lors du Congrès de Reims (14 au 16 novembre 2008), Fabius osait cette phrase dans sa contribution générale : « Certains ont longtemps prétendu qu’une croissance exponentielle infinie dans un monde qui ne l’est pas était possible. Nous affirmons avec force que la croissance économique et l’impératif écologique constituent un seul et même enjeu. » Il part d’un postulat irréfutable (les limites de la croissance) pour en déduire l’inverse, que la croissance (et donc les émissions de GES) est encore possible et nécessaire. C’est un croissanciste !

Depuis qu’il est devenu ministre, il n’a pas changé, toujours aussi aveugle face au réchauffement climatique. Il faut dire qu’il est à la fois ministre des affaires étrangères ET du développement international. Croissanciste toujours ! Le 8 janvier dernier, Laurent Fabius prônait devant un comité inter-ministériel l’adoption d’un objectif « zéro carbone – zéro pauvreté » et le rapprochement des agendas internationaux pour le climat et des Objectifs mondiaux pour le développement, qui doivent désormais être « durables ». On ne voit pas du tout comment un programme de « développement/croissance » peut être durable, sauf à décroître très fortement dans les pays riches, ce qui n’est pas du tout à l’agenda du PS ! En novembre 2014, sa présentation aux entreprises de la Conférence Climat était désastreuse : « L’état d’esprit est que cette COP21 ne soit pas une conférence des contraintes, parce que l’une des raisons pour laquelle cette affaire ne marche pas, c’est que nous donnons le sentiment aux gens que l’on va multiplier les contraintes. » Croire que les milliards de CO2 émis avec une très grande légèreté par une grande partie de l’humanité va disparaître sans faire d’efforts est un acte de foi, pas une stratégie.

L’écologie ne doit être ni punitive, ni positive, elle doit être réaliste. On peut déjà dire et redire que la COP 21 à Paris va être un échec, ni Hollande, ni Ségolène, ni Fabius n’ont mesuré les véritables enjeux écologiques.
* LE MONDE du 15 avril 2015, Laurent Fabius, un converti du climat

Lien de plus en plus étroit entre démographie et climat

« La démographie reste un facteur très important dan l’évolution de la crise climatique. Car s’ils n’avaient de si grandes populations qu’ils veulent légitimement sortir de la pauvreté, les gouvernements chinois et indien ne construiraient pas autant de centrales à charbon chaque année…. Comme beaucoup d’observateurs l’ont souligné, la croissance exponentielle de la population humaine au vingtième siècle est en grande partie liée à l’exploitation des combustibles fossiles qui a permis l’utilisation d’engrais artificiels, de pesticides et de pompes pour l’irrigation.

Il existe toutefois une autre raison pour laquelle l’histoire de l’évolution humaine et le nombre total d’êtres humains aujourd’hui sont importants en ce qui concerne la question de la survie des espèces alors que la planète se réchauffe. Une des stratégies de la survie des espèces menacées par le réchauffement climatique consistera à migrer vers des zones plus propices à leur existence. Mais nous sommes maintenant si nombreux, occupant tant d’espace sur la planète que nous nous trouvons sur leur chemin. Dans le passé, les espèces pouvaient simplement se déplacer, mais elles sont maintenant piégées aux confins d’habitats qui sont pour la plupart figés par notre présence. Il y a encore plus ironique à propos de ce phénomène. L’expansion des groupes humains dans le monde entier et leur croissance à l’ère de la civilisation industrielle ont été telles qu’il est maintenant difficile pour des réfugiés climatiques d’aller vers des climats plus sûrs et habitables. D’autres êtres humains vont se trouver sur leur chemin.

Le rythme lent du changement climatique avait permis dans le passé à la population relativement petite de se déplacer, et c’est ce qu’elle a fait au cours des nombreuses variations de température dans le passé. La population est maintenant trop nombreuse pour se déplacer en masse. »

Dipesh Chakrabarty (Quelques failles dans la pensée sur le changement climatique)
In « De l’univers clos au monde infini » (recueil de textes de différents auteurs)
Editions Dehors, 2015

Miguel Arias Cañete et le climat, le fiasco prévisible

L’objectif des Vingt-Huit de réduire d’au moins 40 % leurs émissions d’ici à 2030 n’est qu’un effet d’annonce. Pour en juger, il suffit de lire les réponses au MONDE* de Miguel Arias Cañete, commissaire européen à l’action climatique et à l’énergie.

Pourquoi l’Europe s’est-elle orientée vers un marché du carbone et non vers une taxe carbone ?
Miguel Arias Cañete : Nous avons mis en place un marché du carbone pour lancer un signal aux entreprises. Si ce signal est puissant, il sera plus facile d’avancer vers la décarbonisation. Des pays comme la Chine ou les Etats-Unis ont eux aussi leur marché carbone, mais notre modèle est le plus organisé au monde, avec son mécanisme de droits d’émission diminuant année après année.
Commentaire de Michel Sourrouille : Il est significatif que le commissaire européen ne dit absolument rien sur la taxe carbone pourtant contenue dans la question. Cela veut dire que le meilleur moyen de diminuer nos émissions de gaz à effet de serre, le signal prix constitué par une taxation du carbone, n’est plus une mesure envisagée au niveau européen. Rappelons aussi que le marché du carbone a été inventé au début des négociations sur le réchauffement climatique par les Américains pour qu’on ne prenne pas de mesures contraignantes. Or les USA, après avoir obtenu toutes les compromissions qu’ils voulaient (marchandisation de l’effet de serre, bluff des puits de carbone…) ont abandonné le protocole de Kyoto dès qu’il s’agissait de signer. D’une certaine manière un marché carbone pourrait renchérir l’utilisation des énergies fossiles, donc limiter la consommation. Mais le passé plaide contre cette méthode qui dépend de décisions politiques, l’attribution de quotas, et d’un contexte socio-économique. Avec la crise financière de 2008, le prix du CO2 s’était effondré : 25 euros la tonne en 2008, 7 euros en 2012, puis 5 euros en avril 2013. Comme le Parlement européen avait rejeté une proposition de la Commission européenne de restreindre le nombre de « permis de polluer » pour relever le cours du CO2, le prix de la tonne avait frôlé les 3 euros. Aujourd’hui encore, le prix du carbone fluctue en Europe depuis 18 mois entre 5 et 7 euros la tonne, ce qui est beaucoup trop faible. Loin des propositions de la commission Rocard de juillet 2009 : « Il faut atteindre en 2030 un prix du gaz carbonique émis de 100 euros la tonne en démarrant à 32 euros. »

Comment l’Europe espère-t-elle atteindre son objectif de 40 % de réduction de ses émissions globales ?
Miguel Arias Cañete : Notre objectif de 40 % a besoin du développement des énergies renouvelables. Nous devons faire aussi d’importants efforts d’efficacité énergétique. Il nous faut également développer les infrastructures de recharge pour populariser les voitures électriques. La Commission est en train de finaliser un paquet transport pour lancer la voiture électrique à l’échelle européenne.
Commentaire de Michel Sourrouille : le scénario négawatt se décline normalement en trois temps : sobriété, efficacité, renouvelables. Pour le commissaire européen, l’idée de sobriété passe complètement à la trappe. Or la réduction de nos besoins est pourtant le moyen le plus efficace de diminuer nos émissions de gaz à effet de serre. Notons aussi que le potentiel maximum des énergies renouvelables est bien moindre que notre consommation actuelle basée sur les énergies fossiles. Enfin l’efficacité énergétique, c’est-à-dire des prouesses technologiques plus ou moins réalisables, restera de son côté une cause minime d’économie d’énergie. De toute façon l’idée d’un passage aux voitures électriques montre que Miguel Arias Cañete ne comprend rien à la problématique de l’énergie. L’électricité n’est pas une source d’énergie, il faut la produire. La voiture électrique n’est donc pas du tout neutre en tant que bilan carbone au niveau mondial. Cela présuppose aussi que nous ne changeons rien à nos habitudes de mobilité. La sobriété énergétique n’est toujours pas à l’ordre du jour.

L’union européenne vient de décider de renforcer ses infrastructures gazières…
Miguel Arias Cañete : Oui, car nous devons faire face à un problème de sécurité énergétique important. La situation géopolitique nous contraint à trouver des sources complémentaires aux importations de gaz en provenance de Russie. Il existe d’autres sources, l’hydraulique, le nucléaire, le gaz de schiste. Chaque Etat reste autonome dans le choix de son mix énergétique.
Commentaire de Michel Sourrouille : Comme l’ensemble de nos dirigeants actuels, le commissaire européen n’envisage qu’une politique de l’offre et pas une politique de réduction de la demande d’énergie. Si une source d’énergie manque, on en trouvera d’autres ! Or le recours au nucléaire et au gaz de schiste pose d’innombrables problèmes que Miguel Arias Cañete laisse complètement de côté. Enfin l’autonomie énergétique proclamée de chaque pays européen montre qu’il ne pourra pas y avoir d’homogénéité dans la vision européenne d’une conférence climatique : il faudra s’aligner sur le moins-disant, réalité fort différente des proclamations chiffrées.

Le président de la Commission, Jean-Claude Juncker, veut faire de l’Europe la championne du monde des énergies renouvelables. Est-ce réaliste, avec des pays fortement dépendants des énergies fossiles ?
Miguel Arias Cañete : La croissance des énergies renouvelables suppose de gros efforts d’interconnexion électrique, d’infrastructures, de capture et stockage du carbone. Il est impossible de faire une substitution absolue d’un jour à l’autre. Le charbon et le gaz vont rester pour des années encore une source d’énergie pour l’Europe.
Commentaire de Michel Sourrouille : Cette réponse est déjà un aveu d’échec. La civilisation de l’après-carbone n’est pas pour demain, et ce n’est pas la conférence sur le climat à Paris en décembre prochain qui changera la donne. Il faudra attendre le prochain choc pétrolier pour enfin prendre conscience que notre mode de vie actuel n’est pas durable. Comme le marché carbone ne fonctionne pas, comme la taxe carbone est mise aux oubliettes par nos gouvernants, comme on est incapable de raisonner en terme de sobriété énergétique, le rationnement par une carte carbone deviendra inéluctable quand la pénurie se fera sentir. C’est ce que nous prévoyons sur notre blog depuis 2009.

* LE MONDE du 31 mars 2015, « Le rendez-vous de Paris sur le climat sera crucial »

article initialement paru sur le site JNE des journalistes pour la nature et l’environnement
http://jne-asso.org/blogjne/?p=25091

Climat, inefficacité de la procédure délibérative de l’UE

De tous ceux qui n’ont rien à dire, les plus agréables sont ceux qui se taisent. Ainsi de l’Union européenne (UE) qui vient de présenter sa contribution à la lutte contre le réchauffement climatique. L’engagement de l’UE reprend en fait, sans rien y ajouter, l’objectif que se sont fixé les Vingt-Huit en octobre 2014 : une réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre « d’au moins 40 % » d’ici à 2030. Un cap assorti, mais de façon non contraignante, de 27 % d’économies d’énergie et de 27 % de renouvelables dans le mix énergétique, à la même échéance*. Blabla, blabla puisqu’on fera ce qu’on voudra.

De toute façon la procédure démocratique est telle qu’on passera son temps à sauter d’une réunion à l’autre sans jamais rien décider. La « feuille de route pour Paris », dévoilée par la Commission de Bruxelles, n’est encore qu’une proposition qui doit être validée par les Vingt-Huit. Le texte pourrait être entériné par les ambassadeurs de l’UE, ou, en cas de désaccord par le conseil des ministres de l’environnement. En cas de litige persistant, il reviendra aux chefs d’Etat de s’accorder ensemble. Il y a de fortes chances que le marathon diplomatique se poursuive ainsi le plus longtemps possible. La position européenne devra en outre rejoindre les engagements mondiaux. Un autre interminable marathon en perspective qui se poursuivra bien entendu sans résultat tangible bien après la conférence de Paris en décembre prochain. Même si on arrivait à définir internationalement une « diminution des émissions mondiales d’au moins 60 % par rapport aux niveaux de 2010 d’ici à 2050 », cela ne voudrait pas dire que la théorie serait suivie d’une pratique. Le débat international n’est rien en soi, il s’agit même d’un débat globalisé qui nous empêche d’agir. « La dictature, c’est ferme ta gueule ; la démocratie, c’est cause toujours » (Coluche, le comique qui avait raison). Nous attendons la solution d’en haut alors qu’elle vient d’abord de nous-même.

Les citoyens du monde, simples consommateurs ou chefs d’entreprise, ne se sentent pas tellement concernés par la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Pourtant ils sont bien la cause première de ces émissions. Or il n’est pas facile de changer ses habitudes. Toujours des gens qui prennent la voiture plutôt qu’un vélo et qui surchauffent appartements et lieux de travail. Toujours des entreprises qui produisent biens et services inutiles. Puisque toute la production actuelle ou presque nécessite la combustion de combustibles fossiles, il faudrait consommer moins, beaucoup moins, pour produire moins, toujours moins. Il ne faut pas prendre l’avion, il faut se rapprocher de son lieu de travail pour y aller à pied, manger de saison et beaucoup moins de viande, ne plus produire de gadgets, etc. C’est à chacun de nous de diminuer ses besoins, et ce sera dur. Il faut réduire nos besoins personnels et modifier notre mode de vie. C’est ce que devrait dire et répéter François Hollande ou Ségolène Royal. Ils préfèrent parler de croissance verte plutôt que de taxe carbone, pourtant le meilleur moyen d’inciter à économiser l’énergie fossile.
* Le Monde.fr | 26.02.2015, L’Europe présente sa contribution à la lutte contre le réchauffement

Climat, alimentation, agriculture, question démographique

Le réchauffement climatique menace la sécurité alimentaire. Or l’alimentation est un complémentaire obligé de l’analyse démographique et réciproquement.

Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), il faudra accroître de 70 % la production alimentaire dans les trente-cinq prochaines années afin de nourrir les neuf milliards d’humains que comptera la planète en 2050, contre sept milliards aujourd’hui. Or, le réchauffement climatique fait peser de fortes incertitudes sur l’agriculture. Le cinquième rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC), rendu public en novembre 2014, a souligné que les dérèglements climatiques auront des impacts sur tous les aspects de la sécurité alimentaire. A commencer par la quantité d’aliments produite : sans réel effort d’adaptation, les rendements des grandes cultures (blé, riz, maïs…) pourraient diminuer de 2 % par décennie. Cette baisse prévue des rendements de certaines denrées de première nécessité, à laquelle s’ajouteront les pertes de cultures causées par des événements météorologiques extrêmes plus fréquents et plus intenses, fait peser un risque de hausse et de volatilité croissante des prix alimentaires. De plus ces baisses de productivité seront plus sévères dans les zones tropicales, les plus exposées au changement climatique et déjà affectées par l’insécurité alimentaire*.

Dans son discours au 52e Salon de l’agriculture à Paris, le président François Hollande a repris l’antienne du défi que doit relever l’agriculture, c’est-à-dire « nourrir la planète » où plus de 800 millions de personnes ont faim**. Or l’agriculture contribue au réchauffement climatique. Selon les données publiées par l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), les activités agricoles ont représenté 18 % des émissions de gaz à effet de serre en France en 2012. Sa contribution est faible dans les émissions de carbone, avec 3 % du total. Mais elle est écrasante pour le protoxyde d’azote (86,6 %) N2O, et pour le méthane (68 %), deux gaz dont le potentiel de réchauffement est respectivement 300 et 25 fois supérieur à celui du CO2. Le protoxyde d’azote est lié à l’usage de produits fertilisants pour les cultures. Le méthane aux émissions des ruminants. Les solutions sont connues, revenir à une agriculture biologique qui émet moins de GES et manger beaucoup moins de viande. Mais la solution structurelle à cette problématique alimentation/climat, même s’il est un peu tard pour la mettre en oeuvre efficacement étant donné l’inertie de l’évolution démographique, c’est de promouvoir le planning familial et la maîtrise de la fécondité dans tous les pays.

La COP 21 à Paris ne devrait pas se contenter de parler de la relation climat/alimentation, il se devrait d’aborder aussi la relation climat/alimentation/démographie… L’écologie politique, c’est savoir reconnaître l’interdépendance entre tous les éléments de la biosphère.

* Le Monde.fr | 21.02.2015, Le changement climatique menace la sécurité alimentaire mondiale
** LE MONDE ECONOMIE du 22-23 février 2015, Le climat s’invite au Salon de l’agriculture

Climat, économie contre écologie et Sud imitant le Nord

La question n’est pas de définir des limites d’émission en alignant des chiffres abstraits comme la limite des 2 °C. Mais plutôt d’essayer de penser et de définir une économie mondialisée et un mode de développement qui seraient sobres en carbone. L’article du MONDE* l’écrit, « Il faudrait cesser de séparer la question climatique du monde réel ». Or le monde réel est allergique à la question climatique. Aux conférences internationales règnent les shadoks. Les Etats-Unis et les pays émergents ne veulent pas d’un « partage du fardeau » climatique. Ni aucun autre pays si ce n’est les petites îles comme les Maldives… qui seront bientôt englouties. Ce qui compte, ce sont les rapports de force et les intérêts particuliers. C’est l’économique qui supplante l’écologique, c’est le conflit entre Sud et Nord, pays « en voie de développement » contre pays anciennement développés.
L’organisation de l’économie mondiale se joue dans des arènes comme l’Organisation mondiale du commerce (OMC) où il n’est pas question de climat. Quand on discute du traité transatlantique de libre-échange, on ne se préoccupe pas du climat. Pourtant le libre-échange, qui tire la croissance économique, est bien facteur d’émissions de gaz à effet de serre supplémentaires. Le protectionnisme est un mot actuellement tabou. Et quand on traite directement du climat dans une conférence internationale, il n’est pas question de réguler le commerce. Ce hiatus, Stefan Aykut et Amy Dahan l’appellent « schisme de réalité »**.

Le deuxième problème qui fait du processus de négociations une véritable « fabrique de la lenteur », c’est le fait que le monde est scindé en deux : le Nord d’un côté et le Sud de l’autre. Les uns veulent réduire le moins possible leurs émissions de CO2, les autres s’accordent le droit de les augmenter le plus possible pour rattraper leur retard de développement sur le Nord. C’est le triste résultat du « discours d’investiture » que le président Truman devait prononcer début 1949. Un fonctionnaire suggéra d’ajouter une extension aux nations défavorisées de l’aide technique jusqu’ici apportée à quelques pays d’Amérique latine. Ce public relations gimmick (hochet médiatique). Au lendemain du discours présidentiel, la presse américaine fit ses gros titres sur le « Point IV », même si personne, pas même le président, ne pouvait en dire plus que ce que chacun avait lu : « Quatrièmement, il nous faut lancer un nouveau programme qui soit audacieux et qui mette les avantages de notre avance scientifique et de notre progrès industriel au service de l’amélioration de la croissance des régions sous-développées. Plus de la moitié des gens de ce monde vivent dans des conditions voisines de la misère. Leur vie économique est primitive et stationnaire. Leur pauvreté constitue un handicap et une menace tant pour eux-mêmes que pour les régions les plus prospères… Une production plus grande est la clef de la prospérité et de la paix. » C’est la première fois que l’adjectif « sous-développé » apparaît dans un texte destiné à une pareille diffusion. Cette innovation terminologique introduisit un rapport inédit entre « développement » et « sous-développement », à la source du blocage actuel des négociations sur le climat : tout le monde a voulu se « développer », c’est-à-dire faire de la croissance économique, et donc brûler le plus possible de ressources fossiles.

Face ce double blocage, économique contre écologique et Sud qui veut faire comme le Nord, il reste la voie étroite de la limitation volontaire (et un jour ou l’autre forcée) de nos besoins : bientôt nos chambres ne seront plus chauffées !

* LE MONDE du 18 février 2015, « Il faut cesser de séparer le climat du monde réel »
** Gouverner le climat ? du sociologue Stefan Aykut et de l’historienne des sciences Amy Dahan (Presses de Sciences Po, 750 p., 23 euros)

Climat, bientôt nos chambres ne seront plus chauffées

Le climato-scepticisme perd du terrain. Selon un sondage réalisé par l’institut Ipsos* entre le 19 et le 26 janvier 2015, les Français sont 80 % à penser que ce changement est « dû en grande partie à l’activité humaine ». Mais sur quoi s’appuie les 20 % qui considérant qu’il est « dû en grande partie à des facteurs naturels ». Ce n’est pas un doigt mouillé qui donne « l’impression » à 89 % des Français que le climat a changé au cours des vingt dernières années. On ne peut pas constater personnellement une augmentation de la température moyenne du globe. C’est la multiplication des émissions à la télévision et des articles dans les journaux qui modifient les points de vue des sondés. Mais seulement 22 % des Français « savent précisément de quoi il s’agit » à propos de la conférence mondiale sur le climat (COP 21) qui se tiendra en décembre 2015 à Paris. On attend surtout des « innovations » et les « pratiques vertueuses » des entreprises. Notre société croit aux miracles. Cependant 71 % des Français pensent qu’ils « peuvent agir personnellement à leur niveau ».

Le Français n’ont aucune idée des efforts qu’il faudrait accomplir si on veut enrayer les perturbations climatiques. Les « familles à énergie positives » restent un mouvement marginal. Qui d’ailleurs connaît l’ADEME malgré ses diverses campagnes pour aider à maîtriser notre consommation d’énergie. Tout autour de moi je ne vois encore que des gens qui ne changent pas leurs habitudes. Toujours des gens qui accélèrent en voiture et qui surchauffent appartements et lieux de travail. Il n’est pas facile de diminuer les émissions de gaz à effet de serre. Presque toute la production actuelle nécessite la combustion de combustibles fossiles, il faut consommer moins, beaucoup moins. Il ne faut pas prendre l’avion, il faut remplacer sa voiture individuelle par la marche et le vélo, manger de saison et beaucoup moins de viande, etc. Ce n’est pas aux entreprises « d’ouvrir la voie pour permettre aux consommateurs d’adapter leur comportement ». C’est à chacun de nous de diminuer ses besoins, et ce sera dur.

Qui a conscience que la vie des générations antérieures sera bientôt la nôtre ? Dans l’ancien pavillon de chasse des ducs de Lorraine, devenu la résidence familiale de Ségolène Royal, la seule chambre chauffée était celle des filles. Les frères de Ségolène s’habillaient à l’abri sous leur édredon, tant l’hiver lorrain était froid**. Le père de Marisol Touraine a accepté que ses enfants grandissent différemment de lui, qui fut élevé dans une famille de médecins où l’on n’allumait pas le chauffage dans les chambres. Bientôt nos chambres ne seront plus chauffées. Ce ne sera pas tellement parce que le climat s’est réchauffé, mais parce que l’énergie sera hors de prix et les perturbations climatiques mondiale extrêmes.
* lemonde.fr | 10.02.2015, Changement climatique : des solutions existent pour 9 Français sur 10
** Même les politique ont un père d’Emilie Lanez (Stock 2015)

Les Shadoks aux conférences internationales sur le climat

Les conférences sur le climat, une histoire de Shadoks : des négociations pour préparer des négociations qui prépareront des négociations, etc… Bientôt en fin d’année 2015 la 21ème conférence à Paris… sans compter les rounds intermédiaires. Ainsi cette réunion à Genève démarrant le 8 février censée « préparer le texte du grand accord ».* Et pendant ce temps-là, on le pompe le pétrole, comme des Shadoks, et on le brûle, et les gaz à effet de serre s’accumulent, et le climat dérape déjà. Nous ne pouvons pas faire confiance aux conférences internationales qui ont déjà montré amplement leur impuissance. La responsable climat de l’ONU Christiana Figueres l’avoue: « Nous espérons que les gouvernements seront capables de travailler ensemble pour produire un texte plus gérable. Ce n’est jamais garanti. » Il s’agit d’un débat globalisé qui nous empêche d’agir, on attend la solution d’en haut alors qu’elle vient d’abord de nous-même. Il faut réduire nos besoins personnels, modifier notre mode de vie. C’est ce que démontre le scénario négaWatt.

Nous ne reprendrons dans son Manifeste négaWatt de 2012 que la plus importante des méthodes, la sobriété. La notion de sobriété nous invite à nous interroger personnellement sur nos besoins, sur leur importance réelle ou supposée, ainsi que sur les priorités que nous pouvons établir entre eux. Nous pouvons définir une hiérarchie qui passe des besoins vitaux aux essentiels, puis indispensables, utiles, convenables, accessoires, futiles, extravagants et inacceptables. Chacun peut se livrer à l’exercice pour lui-même, en famille ou au travail, de façon à prendre conscience de l’impact de tel ou tel achat ou comportement. Rien ne sera possible sans une adhésion pleine et entière de tous nos concitoyens. Il s’agit de faire jouer à plein ce qui est la contre-partie indissociable de notre liberté : notre responsabilité !

Prenons l’exemple de nos besoins de mobilité individuelle. Le principe de sobriété nous incite à les réduire en essayant de nous rapprocher de notre lieu de travail. Nous pouvons aussi recourir à un mode doux de déplacement, marche, vélo, rollers, trottinette… La sobriété dimensionnelle nous incite à éviter toute surpuissance inutile dans le choix d’un véhicule. La sobriété coopérative repose sur la mise en commun pour réduire les besoins : mutualisation des équipements, autopartage, co-voiturage, auto-stop. La sobriété d’usage consiste à limiter le niveau et la durée d’utilisation d’un appareil, conduite douce par exemple. La sobriété ne s’applique pas qu’à nos comportements individuels, elle doit guider nos choix collectifs, notamment l’aménagement de l’espace.
* Le Monde.fr avec AFP | 08.02.2015 A Genève, 195 pays planchent sur le futur accord sur le climat

Climat : l’économie deviendrait-elle écologique ?

A en croire Christian de Perthuis, « L’économie est l’un des outils les plus efficaces pour combattre le changement climatique »*. Responsable dès 2002 de la mission climat de la Caisse des dépôts et consignations, il est déjà perspicace : « S’il n’y a pas de ruptures technologiques dans la façon dont nous produisons et utilisons l’énergie, on ne pourra pas à la fois maintenir le niveau de vie des pays développés, accroître celui des pays en développement et limiter dans des niveaux raisonnables les risque climatiques. Lorsque la nature aura envoyé trois ou quatre ouragans comme Katrina, cela fera forcément réagir les sociétés. » Il affirmait aussi : « Il faut mettre une nouvelle valeur dans l’économie, à savoir le prix qu’on accorde à la protection du système économique, le prix du carbone ». Les choses ont évolué, trop lentement.

Sur ce blog, nous écrivions en 2013 : « Censé remettre au gouvernement des préconisations sur l’alignement de la taxation du carburant diesel sur celle de l’essence et l’introduction d’une composante « carbone » dans la fiscalité énergétique, le comité pour la fiscalité écologique n’est pas parvenu à dégager un consensus (LE MONDE du 15 août 2013, Désaccords autour de la fiscalité verte ). Son président, Christian de Perthuis, suggère un rattrapage de un centime par an sur le litre de diesel. Un centime seulement ? Actuellement, le diesel est taxé à 0,65 euro le litre contre 0,86 euro pour le sans-plomb : un rattrapage en vingt ans et plus ! Deuxième proposition, un coût final de 20 euros la tonne de CO2 en 2020. Loin des propositions de la commission Rocard de juillet 2009 : « il faut atteindre en 2030 un prix du gaz carbonique émis de 100 euros la tonne en démarrant à 32 euros. »

Christian de Perthuis propose à juste titre une réflexion de long terme : « Notre modèle n’est plus néoclassique, il intègre la pollution comme un facteur de production à court terme, via sa tarification : à court terme il faut de la pollution pour produire dans le cadre actuel, mais on a un facteur de rétroaction qui fait que plus on pollue à court terme plus je peux produire mais plus je détruis ma capacité productive à moyen et long terme. » Nous sommes dans une logique de tragédie des biens communs… à l’échelle de la planète : « Notre village, c’est la planète et notre prix communal l’atmosphère. Comme l’usage de cette atmosphère est gratuit, nous sommes donc en train de détruire notre bien commun. » Christian de Perthuis voit une solution : « En France aujourd’hui il y a une majorité de citoyens qui estiment à tort ou à raison qu’on paye trop d’impôts. Si on explique qu’en répartissant différemment l’imposition entre d’un côté les pollutions (à taxer) et de l’autre des facteurs de production en baissant les impôts qui pèsent dessus il y aura une adhésion. »

Mais comme la ministre Ségolène royal ne veut pas d’une « « écologie punitive », même pour les poids lourds, et que son président François Hollande n’a aucun sentiment écologique, la fiscalité écologique restera au point mort en France. A plus forte raison au niveau international.
* http://alternatives.blog.lemonde.fr/2015/02/05/leconomie-est-lun-des-outils-les-plus-efficaces-pour-combattre-le-changement-climatique/

La COP 21, un débat globalisé qui nous empêche d’agir

Il est vain d’attendre des conférences sur le climat une réponse collective au changement climatique. La conférence des parties (COP), qu’elle se réunisse à Copenhague, Lima ou Paris, ne peut pas avoir de conséquences concrètes. La raison principale, c’est que les politiques ne s’y expriment pas au nom de l’équilibre général de la planète, ils représentent les intérêts à court terme de populations particulières. Le GIEC a produit son premier rapport sur les changements climatiques en 1988 et depuis aucun pays n’a jamais adopté de mesures significatives pour limiter les émissions de GES. Les Etats-Unis n’ont pas signé le protocole de Kyoto en 2001, ils ont nié l’origine anthropique du réchauffement climatique, ils ont toujours privilégié le niveau de vie des Américains. Les Américains ne peuvent se passer de leurs bagnoles et de leurs grandes maisons, les Canadiens veulent exploiter leurs sables bitumineux du Canada, le pouvoir d’achat des Français n’est pas négociable, ni l’enrichissement des Chinois, ni le développement des pays émergents. Les sociétés qui vivent à l’occidentale poursuivent un rêve contradictoire et suicidaire : jouir sans entraves des applications impressionnantes des ressources fossiles, et être aveugles aux conséquences fâcheuses de la perturbation climatique qui en découle.

L’autre raison, c’est qu’un changement de comportement ne se décrète pas d’en haut. Des scientifiques estiment que la concentration atmosphérique de dioxyde de carbone (CO2) ne doit pas dépasser une valeur située quelque part entre 350 parties par million (ppm) et 450 ppm. La teneur moyenne actuelle est d’environ 400 ppm, soit au beau milieu de la ligne rouge. Qui s’en soucie ? Il faut, jusqu’à 2050, s’abstenir d’extraire et de brûler la plus grande partie des réserves fossiles si l’on veut éviter la surchauffe de la planète. Qui s’en soucie ? Pour éviter la catastrophe climatique, nous savons quand nous sommes bien informés qu’il faudrait diviser par quatre d’ici 2050 les émissions de gaz à effet de serre, ce qui voulait dire diviser par deux notre consommation d’énergie. Mais cela restait abstrait. Qui comprend que cela remet complètement en question son mode de vie personnel ?

Le 8 janvier dernier, Laurent Fabius prônait devant un comité inter-ministériel l’adoption d’un objectif « zéro carbone – zéro pauvreté » et le rapprochement des agendas internationaux pour le climat et des Objectifs mondiaux pour le développement, qui doivent désormais être « durables ». Ces déclarations d’intention ne servent absolument à rien si le citoyen de base ne se sent pas concerné. Nous ne pouvons réussir internationalement une COP que si nous commençons à nous impliquer personnellement (par exemple participation généralisée aux « familles à énergie positive ») et à réussir localement (par exemple mise en œuvre d’un plan climat territorial). Les solutions existent, individuelles et collectives. Elles s’appellent sobriété partagée, rationnement bien expliqué, taxe carbone aujourd’hui, carte carbone demain, soutien par l’Etat central des communautés locales cherchant leur autonomie alimentaire et énergétique, adoption de techniques douces aux humains et à la nature, généralisation d’une agriculture biologique, conversion des intellectuels du tertiaire à l’artisanat, entraînement à la réponse non violente en toutes circonstances, rejet des actions militaires, considération des acteurs absents (générations futures et non-humains), maîtrise de la fécondité, etc. Le pire n’est jamais certain, mais il est probable.

(résumé d’une analyse de Michel Sourrouille parue initialement sur le site JNE des journalistes pour la nature et l’écologie)

La COP 21, un débat global qui nous empêche d’agir

Climat : les trois chiffres clés, zéro / zéro / cent

A Lima au Pérou la lutte contre le changement climatique est dans l’impasse, comme d’habitude…. Lire commentaire ci-dessous. Pour Greenpeace*, la route à suivre est pourtant simple. Elle tient en trois chiffres clés : zéro. zéro. cent.

Zéro fossiles : le rapport du GIEC montre qu’il est indispensable de stabiliser les concentrations atmosphériques de gaz à effet de serre – et donc de réduire drastiquement nos émissions. Limiter d’ici la fin du siècle la hausse des températures à 2 °C suppose aussi de réduire les émissions mondiales entre 40 % et 70 % d’ici 2050 et de les ramener à un niveau proche de zéro, d’ici la fin du siècle. C’est pourquoi, selon les recommandations de l’Agence Internationale de l’Énergie, les réserves de charbon, de pétrole et de gaz qui n’ont pas encore été exploitées doivent rester dans le sol. Pour cela, il faudra une réorientation massive des investissements vers les énergies renouvelables dans les décennies à venir. Il faut donc que les négociations sur le climat actent explicitement le début de la fin de l’ère des énergies fossiles.

Zéro fausses solutions :

pour faire baisser les émissions de GES, la sortie des fossiles est la seule solution. Les autres options ne sont que des subterfuges : nucléaire, capture et stockage de carbone, géo-ingénierie, agrocarburants ou encore la compensation et les marchés du carbone… Il est urgent de changer de modèle énergétique mais sans se tromper de direction.

Cent : 100% d’énergies renouvelables!

Pour remplacer les combustibles fossiles et enclencher une mutation de nos sociétés qui soit juste et respectueuse du climat, nous avons toute une panoplie d’alternatives. Mais avant tout, nous devons renforcer notre efficacité énergétique, c’est-à-dire la façon dont nous stockons, transportons et utilisons l’énergie, de façon à en perdre et à en gaspiller le moins possible. Sur d’autres fronts, nous devrons aussi stopper la déforestation et rendre la production alimentaire plus durable. Le potentiel des ENR est quant à lui loin d’être exploité ! Chaque région du monde peut produire assez d’énergie renouvelable pour couvrir 2,6 fois ses besoins…
La transition vers une énergie 100 % renouvelable peut contribuer à garantir un accès universel à l’énergie d’ici à 2030, objectif que s’est fixé l’ONU, et donc à aider les populations les plus démunies.

Agir contre les changements climatiques, tout en aidant les populations les plus vulnérables à s’adapter est un devoir moral pour les pays les plus riches.

Source :http://energie-climat.greenpeace.fr/climat-vers-100-denr-pour-100-des-populations?utm_source=email&utm_medium=newsletter&utm_term=recette,COP20&utm_campaign=Climate&__surl__=Igehx&__ots__=1417860826999&__step__=1

A Lima le climat agonise, en 2015 à Paris c’est l’euthanasie

La prolifération humaine et cette bande de pillards qui exploite sans vergogne la nature se retrouvent bien démunis devant l’inéluctable : une perturbation climatique d’ampleur géologique. La conférence sur le climat s’achève le 12 décembre à Lima : « Elle est entrée dans l’épais brouillard qui est devenu sa marque de fabrique. »*

Comment mettre à l’unisson 195 pays sont présents et des équipes de négociation qui peuvent dépasser importantes 200 diplomates. Tout est une question de taille. Leopold Kohr le rappelait dans The Breakdown of Nations (1957) : « Il semble qu’il n’y ait qu’une seule cause derrière toutes les formes de misère sociale : la taille excessive. Partout où quelque chose ne va pas, quelque chose est trop gros. » Le secrétaire d’Etat John Kerry, n’a fait qu’un passage éclair à Lima. Pour les américains une seule chose compte, préserver leur niveau de vie par la dilapidation des ressources fossiles. Et puis c’est toujours la faute des autres : « Nous n’avons plus de temps. Plus de 50 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre proviennent des pays en développement. Ils doivent agir. » Les pays en développement se contentent d’exiger un futur accord pour « l’adaptation au changement climatique » car ils réclament « leur droit à se développer de manière équitable ».

                La France va recevoir le prochain sommet sur le climat en décembre 2015. Les Français sont inaudibles à Lima et leur loi sur la transition énergétique ne fait même pas la part du colibri**. L’échec est programmé !

* LE MONDE du 13 décembre 2014, A Lima, les négociations sur le climat patinent

** Dans La part du colibri, l’espèce humaine face à son devenir, Pierre Rabhi rappelle l’enseignement de la légende amérindienne du colibri : « Un jour, dit la légende, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux terrifiés et atterrés observaient, impuissants le désastre. Seul le petit colibri s’active, allant chercher quelques gouttes d’eau dans son bec pour les jeter sur le feu.

Au bout d’un moment, le tatou, agacé par ses agissements dérisoires, lui dit : « Colibri ! Tu n’es pas fou ? Tu crois que c’est avec ces quelques gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ? » « Je le sais, répond le colibri, mais je fais ma part. »

Comprendre l’équation de KAYA avec un blog du MONDE

En résumé : Même si Meadows a récemment réaffirmé qu’il était trop tard pour l’humanité, comprendre l’équation de Kaya, qui permet de dynamiser les rapports entre les composantes d’un écosystème, est primordial pour penser l’avenir. La fameuse équation porte le nom de l’économiste japonais Yoichi Kaya qui propose cette représentation dans son ouvrage Environment, Energy, and Economy : strategies for sustainability paru en 1993. Elle illustre et met en relation l’influence et le poids de l’activité humaine en termes d’émission direct de gaz à effet de serre, sans considérer par ailleurs l’impact de la déforestation ou le fait qu’un océan qui se réchauffe absorbera moins de Co2. En d’autres termes, elle traduit les flux d’émissions de gaz à effet de serre.

CO2 = (CO2 : KWh)  x (KWh : dollars) x (dollars : Population) x Population = CO2

On y trouve d’abord le contenu carbone d’une unité d’énergie, ensuite la quantité d’énergie requise à la création d’une unité monétaire, puis la richesse par personne et finalement la taille de la population. Le premier terme de l’équation appelle à réduire les émissions de carbone dans notre production d’énergie. L’indicateur suivant reflète la quantité d’énergie nécessaire à la création d’une unité monétaire : il illustre alors le volume d’énergie requis pour la confection d’un produit ou l’accomplissement d’un service. Imaginer un monde ou la création de valeur monétaire n’est pas uniquement le reflet d’une transformation qui fait appel à une source d’énergie relève du casse tête. Exemple ? Les jardiniers à la pioche ou bien encore les coiffeurs à ciseaux. Que vient faire le pouvoir d’achat (dollars : Population) dans une histoire d’émission de gaz à effet de serre ? Il s’agit de faire face à la réalité : au niveau mondial, une augmentation globale de la richesse par habitant aura mécaniquement – considérant les autres paramètres constants – une conséquence à la hausse sur les émissions de gaz à effet de serre. L’équation de KAYA nous amène donc a repenser jusqu’au partage des richesses. C’est finalement un phénomène fréquemment observé, que celui des personnes aux revenues élevées, sont en mesure d’accéder à une variété d’activité et un certain confort qui leur confie une empreinte écologique au dessus de la moyenne.

Les questions d’éthique viennent aussi à la rencontre du dernier paramètre de l’équation, la population. Dennis Meadows a des mots difficiles à entendre dans sa compréhension de ce paramètre : « Il n’y a que deux manières de réduire la croissance de l’humanité : la réduction du taux de natalité ou l’accroissement du taux de mortalité. Laquelle préféreriez-vous ?  » Récemment, cette interrogation a été abordée dans un essai collaboratif coordonné par Michel Sourrouille, Moins nombreux, plus heureux (l’urgence écologique de repenser la démographie) dont le titre évocateur laisse supposer la position de l’auteur sur cette question au centre de toute réflexion écologique.  Parmi les professeurs, chercheurs on y trouve l’atypique Théophile de Giraud écrivain anti-nataliste dont une intervention (1:16:00) peut-être trouvé suivant ce lien, et l’ancien député européen Yves Cochet qui avait proposé de réduire les allocations familiales à partir du troisième enfant.

Pour être plus complète, la question démographique devrait être abordée au cas par cas quand on regarde le caractère hétérogène de la puissance énergétique disponible -donc indirectement des émissions de gaz à effet de serre- dans le monde.Le Quatari moyen dissipe 30kW, l’Américain 10kW, l’Européen 5kW, le Chinois 2kW, L’indien 0,5kW et le Sénégalais 0,3kW.Spécifiquement pour les émissions de gaz à effet de serre, le cabinet Carbone 4 a créé une application permettant de mettre en pratique l’équation Kaya. Elle permet de supposer l’évolution de la Terre dans un futur plus ou moins lointain en contrôlant l’évolution de chaque ratio. Comme on le voit, chaque facteur est dépendant de la totalité de l’équation et une hypertrophie de l’un des facteurs ne peut être équilibrée que par une diminution radicale d’un autre facteur. Si la population globale de la Terre augmente à raison de 5 % par an, la résilience n’est possible qu’en diminuant à -5 % le PIB par personne par an, l’énergie par PIB de -2 % par an et le contenu Co2 de l’énergie à -1 % par an. D’autres configurations sont possibles, mais toutes impliquent des sacrifices.

Nous l’aurons compris, une discussion point par point n’a de sens que pour sensibiliser la population à une compréhension précise du problème. Chaque paramètre ayant son importance, il faut considérer chacun des facteurs pour atteindre l’objectif de réduction globale d’émission de gaz à effet de serre.

Source : http://lecentiemesinge.blog.lemonde.fr/2014/11/30/kaya/

L’équation de KAYA, une approche globale des émissions de Co2 liées aux activités humaines

Stéphane Foucart ne croit plus en l’action politique

En résumé : « Spectaculaire conversion de François Hollande à la cause climatique ? Il faut se méfier des effets d’annonce lorsqu’il s’agit d’environnement : c’est le terrain privilégié des paroles en l’air et des promesses non tenues… En matière d’environnement et de climat, les roulements de tambour ne sont souvent là que pour introduire un air de pipeau… L’action de Jacques Chirac n’a rien produit qui fût à la mesure de ces paroles : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. La nature, mutilée, surexploitée, ne parvient plus à se reconstituer, et nous refusons de l’admettre. La Terre et l’humanité sont en péril, et nous en sommes tous responsables. »… Le mandat de Nicolas Sarkozy a été caractérisé par une inflation verbale aussi constante dans son intensité que versatile dans son orientation.

Même les accords internationaux, pour spectaculaires qu’ils puissent paraître, doivent être considérés avec méfiance… Le 12 novembre, la Chine et les Etats-Unis signaient ainsi un accord bilatéral sur le climat unanimement qualifié d’historique : plan de réduction de leurs émissions, sans rien de contraignant ! Les propriétés radiatives du CO2 n’ont que faire de la politique : selon les calculs de Chris Hope, l’accord sino-américain nous place en réalité sur la trajectoire d’un réchauffement de 3,8 °C d’ici à la fin du siècle. Assourdi par les tambours, le monde entier n’a pas réalisé que ce n’était qu’un air de pipeau : ce qui a été accueilli avec tant d’enthousiasme n’était autre qu’une promesse de désastre. »*

Quatre commentaires seulement sur lemonde.fr dont voici le plus significatif : « Un article qui fera sans doute moins de buzz que la prétendue victoire de N. Sarkozy élu à la direction de l’ UMP et le score stalinien de MLP à la tête du FN. » Les humains ne s’intéressent qu’aux choses immédiates, pas à leurs générations futures. Mais les humains sont aussi à l’image de ce qu’en font les médias : un théâtre d’apparences. Même LE MONDE nous mène au pipeau. Sa « Une », le même jour que l’article de son journaliste Stéphane Foucart, titrait en gros : « Le Pen, Sarkozy, Hollande : la bataille de 2017 est lancée. » Le long terme pour ce journal « de référence », c’est seulement la prochaine échéance électorale qu’il juge importante!

* LE MONDE du 2 décembre 2014, Climat : tambours et pipeau

François Hollande quitte les habits du climatosceptique

François Hollande, un croisé du climat ? La révélation est tardive, il était surtout connu pour ses exhortations à une impossible croissance. Lors de son passage en Nouvelle-Calédonie, le chef de l’Etat se veut prémonitoire : « Il y a les guerres d’aujourd’hui que nous devons faire cesser, mais sur le climat, il y a une autre guerre qui se prépare. Cette guerre, nous la faisons, parfois involontairement, par notre négligence coupable, aux générations futures. » « Il y a deux ou trois ans je n’aurais peut-être pas parlé comme ça », reconnaît-il en petit comité. Il a rencontré les experts du GIEC : « Au début, on ne croit pas que ça soit possible mais ils apportent des projections qui sont effrayantes. Ce sont des cataclysmes qui se préparent, la biodiversité qui disparaît… » Il fait comme s’il n’était pas au courant qu’il y a des conférences internationales sur la question depuis vingt ans.

Nous laissons la parole aux commentateurs sur lemonde.fr* qui représentent sans doute une intelligence collective en formation :

aurélien Leblay : « Au début, on ne croit pas que ça soit possible mais ils apportent des projections qui sont effrayantes. Ce sont des cataclysmes qui se préparent, la biodiversité qui disparaît… » Atterrant de voir qu’il lui ai fallu attendre 2014 pour prendre conscience de cet enjeu global, majeur, inévitable. Il lisait quoi avant, picsou magazine?

Elémentaire : Il serait pour le moins surprenant que FH n’endosse pas pour l’occasion l’habit du chevalier blanc ! C’est la France qui organise la réunion réchauffement climat. A moins de vouloir un échec de cette réunion et se faire griller la couenne été comme hiver sur les rives de Seine, il faut souhaiter pleine réussite à cette rencontre et à FH.

Kronos : On ne peut plus accorder la moindre confiance à ce caméléon de la politique politicienne. il a tellement menti : un jour ennemi de la finance puis devenu amoureux de la bonne finance, redresseur démenti de l’inversion de la courbe du chômage, voyant le taux de croissance tel un mirage, promettant la pause fiscale en augmentant sournoisement les taxes… Bref, sa conversion à l’écologie sent l’entourloupe électoraliste.

ricardo uztarroz : Pas une révélation mystique mais bien, conformément à ce qu’il est jusqu’au bout des ongles, de l’opportunisme le plus cynique. Du climat, il s’en tapait et s’en tape sauf que maintenant cela lui paraît comme une planche de salut. Mais les conversions soudaines sont suspectes et personne ne se laissera duper par le prêche de ce nouveau croisé. Non, Flamby, tu ne nous duperas pas. Avec cette conversion, tu coules. La noyade s’accompagne d’une euphorie puis d’une béatitude, dit-on.

Lucine : En tournée au Canada tout récemment, Hollande a encouragé les entreprises françaises à investir dans les schistes bitumineux. Cynisme total ou schizophrénie psychiatrique ?

Cassandra : Il est allé à Alberta au Canada, sans état d’âme sur exploitation du pétrole bitumineux hautement polluante. Et n’a pas d’état d’âme non plus sur la construction d’un oléoduc pour apporter ce pétrole en Europe. Et il poursuit avec obstination l’enfouissement des déchets nucléaires à Bure (projet de loi Macron)… Son engagement, c’est babillage et verbiage.

Nicotine : Pourquoi ne pas prendre une mesure emblématique. Interdire les jets privés ou les yachts par exemple qui sont des gros contributeurs en rejets de CO2 pour le seul plaisir d’une minorité. Une telle décision donnerait un élan décisif au delà des mots tant répétés.

Hedwig Horn : Et aujourd’hui on reporte les nouvelles normes sur la constructions de bâtiments à l’usage d’habitation de 3 ans !

* lemonde.fr du 20 novembre 2014, Hollande part en guerre sur le climat

Le Fonds vert pour le climat, une mascarade sinistre

La conférence internationale de Cancun s’était terminé politiquement le 11 décembre 2010 sur du greenwashing. Les pays développés promettaient de l’argent, un « Fonds vert » qui permettrait aux pays en développement de s’adapter au changement climatique. Il faut attendre quatre années pour que ce Fonds vert soit à l’étape berlinoise doté de moyens. 21 pays se sont engagés à verser 9,3 milliards de dollars (7,4 milliards d’euros) lors de la première réunion de capitalisation du fonds. Il reste du chemin à parcourir pour atteindre les 100 milliards de dollars par an d’ici 2020 annoncés en 2009. Mais le Canada et l’Australie ont déjà décidé de ne pas ouvrir leur porte-monnaie. Et nous savons pertinemment que les promesses d’argent des Etats n’engagent que ceux qui y croient. « Les pays en développement tenteront d’obtenir que le financement à long terme de la lutte contre le changement climatique fasse l’objet d’engagements concrets dans l’accord qui pourrait intervenir à Paris en décembre 2015. »*

Les conférences internationales ne servent que d’alibi, les gouvernements font semblant de faire quelque chose depuis trop de temps. C’est en 1988 que l’ONU a créé le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) chargé de faire une synthèse des études scientifiques sur cette question. Depuis, et ce malgré les climatosceptiques, la hausse mondiale des températures d’origine anthropique est bien renseignée et les effets néfastes sur l’humanité (et le reste de la biosphère) seront très importants. Face à ce péril, la réponse des Etats est minable. La convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques avait été signée en 1992 lors du sommet de la Terre à Rio de Janeiro. Elle devait entrer en vigueur le 21 mars 1994. En 1997, rien n’avait bougé. Les signataires de la convention-cadre adoptent le protocole de Kyoto, avec établissement d’engagements contraignants de réduction. Rien n’a bougé, les États-Unis (juillet 2005) et l’Australie se sont déclarés non-signataires.

Vingt deux ans après le sommet de la Terre, le président français François Hollande s’aperçoit que le réchauffement climatique c’est grave, « Ce sont des cataclysmes qui se préparent, la biodiversité qui disparaît… ». Il est vrai qu’il doit préparer la prochaine conférence internationale sur le climat à Paris en 2015. Il s’y prend bien tard, il sait que de toute façon rien ne bougera. Nous risquons un réchauffement qui pourrait atteindre probablement 4 °C en moyenne, c’est-à-dire un bouleversement total du climat planétaire. Autant dire que l’adaptation pour 9 à 10 milliards d’humains ne sera pas possible. François Hollande n’est pas un bon chef d’Etat. Il n’est pas le seul dans ce cas !

* Le Monde.fr | 20.11.2014, Le Fonds vert pour le climat récolte 9,3 milliards de dollars

Climat et pétrole nous entraînent vers l’état de guerre

« Une perturbation importante du climat serait source de guerre ». Cette déclaration de François Hollande au sommet du G20 n’est qu’une minuscule ébauche d’une prise de conscience politique de la gravité de la situation actuelle. En effet il est déjà clair que les guerres du climat ont déjà commencé. Stéphane Foucart dans sa chronique planète* envisage cette explication pour la Syrie et l’Irak, sécheresse et explosion démographique se conjuguent pour aviver les tensions. Harald Welzer, dans Les guerres du climat montrait que c’était le cas au Darfour : « Une étude de l’UNEP (United Nations Environment Programme) de juin 2007 résume ainsi la situation au Darfour : les problèmes liés à l’environnement, combinés avec un accroissement exorbitant de la population, créent les conditions-cadre de conflits violents qui éclatent le long de frontières ethniques. C’est-à-dire que des conflits qui ont des causes écologiques sont perçus comme ethniques. Le déclin social est déclenché par un effondrement écologique, mais la plupart des acteurs ne le voient pas. »

                Il y a de fortes chances que cet effondrement ne va pas seulement toucher des pays périphériques, mais aussi ce qu’on appelle aujourd’hui les « grandes puissances » ; il sera certainement civilisationnel, nous faisant aller vers des âges obscurs. Harald Welzer envisage le blocage de nos démocraties centralisées face à une menace future : « La diffusion mondiale d’un modèle de société fondé sur la croissance et l’épuisement des ressources font apparaître comme irréaliste qu’on limite à deux degrés seulement le réchauffement d’ici le milieu du siècle. Et c’est là un résumé qui s’appuie seulement sur l’aspect linéaire des choses, sans tenir compte des processus non linéaires susceptibles d’aggraver radicalement le problème climatique – si, par exemple, le dégel du permafrost dégage du méthane en quantités énormes. Il peut y avoir des effets de dominos encore insoupçonnables… De même la logique des processus sociaux n’est pas linéaire. » De toute façon d’autres éléments vont entrer en jeu bien avant que les perturbations climatiques ne deviennent critiques.

Dès 2005, Yves Cochet pouvait parler de pétrole-apocalypse : « La hausse du cours des hydrocarbures ne sera pas un simple choc pétrolier, ce sera la fin du monde tel que nous le  connaissons… Dans les pays industrialisés, l’alimentation du consommateur est le dernier maillon d’une chaîne agroalimentaire dominée par la délocalisation et la désaisonnalisé… Suite au pic pétrolier, les pays importateurs souffriront de pénurie, ce qui les entraînera vers l’effondrement économique et social. Où aller pour trouver à boire et à manger ? Nous n’avons plus de parents fermiers à la campagne chez lesquels nous réfugier comme nous l’avons fait au cours de la débâcle de 1940. Nous n’avons plus un ailleurs inexploré comme l’avaient jadis quelques hordes, émigrant massivement lorsque la pression démographique sur le territoire traditionnel dépassait sa capacité de charge écologique. Que nous restera-t-il hormis la violence ? Il n’existe qu’une demi-solution : la sobriété immédiate… »

* LE MONDE du 18 novembre 2014, Le climat et la guerre

Ségolène Royal supprime l’écotaxe, c’est n’importe quoi

On ne dirait pas que la prochaine conférence internationale sur le climat aura lieu à Paris en 2015. La ministre de l’écologie, Ségolène Royal, vient de suspendre « sine die » le dispositif de l’écotaxe, simples prémices d’une véritable taxe carbone. Cet abandon en rase campagne est condamné aussi bien par des socialistes (l’ex-secrétaire d’Etat aux transports Frédéric Cuvillier, le président de la commission du développement durable de l’Assemblée, Jean-Paul Chanteguet) que par les écolos. Nous laissons la parole aux commentateurs sur lemonde.fr qui sont aussi consternés que la biosphère par cette décision.

Icarus : Voilà, une réforme visiblement utile, sur laquelle tout le monde (miracle !) politique était d’accord. Aujourd’hui, il est sage de la suspendre… Triste pays.

Jacques Boulan : Feu l’Ecotaxe était une mesure phare du Grenelle de l’environnement. En rendant le transport de marchandises plus coûteux, elle visait à rendre le transport ferroviaire et fluvial plus compétitif et à favoriser la production locale. L’objectif était de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Cette mesure a été votée par le Parlement exceptionnellement quasi unanime. Qui se rappelle qu’il s’agissait de lutter contre le dérèglement climatique ?

Jason : Un ministre ne peut pas revenir sur un texte voté. Le gouvernement n’applique donc pas les textes votés par le parlement. C’est un problème majeur et justifie une saisie du conseil constitutionnel.

PC : en disant sur RMC et BFM-TV que « cette taxe n’était ni juste, ni réaliste, ni efficace », Ségolène Royal dit exactement le contraire de la vérité. Cette taxe était juste, réaliste et efficace. Augmenter les péages autoroutier revient à faire payer les automobilistes, qui polluent peu et ne dégradent pas le réseau, et à favoriser le report des camions sur le réseau secondaire, ce qui accroîtra la pollution et entraînera des coûts d’entretien colossaux. L’écotaxe était une solution à forte valeur ajoutée écologique et innovante… trop pour la France et ce gouvernement en lambeaux !

Sarah py : Désigner coupable une profession qui n’est qu’un intermédiaire était un non sens. Imaginer une taxe d’une telle complexité était une folie dont seule est capable une bureaucratie . C’est sur la conscience de chacun qu’il faut agir , c’est notre responsabilité de chacun dans nos actes quotidiens à agir : consommer local, refuser la grande distribution, ils sont nombreux ces actes : ce ne sera pas du gasoil taxé mais du non consommé : c’est là l’essentiel !

Kickaha @ Sarah py : compter sur la vertu des citoyens pour faire avancer les états c’est faire preuve d’indigence intellectuelle….les citoyens ne sont pas vertueux par nature.. comme toujours l’État démissionne et se défausse de sa responsabilité sur les citoyens…

Le naïf : Il faut réformer, mais pas le statut des notaires, des médecins, des taxis, des fonctionnaires, des footballeurs, des salariés, des banques… Concernant les routiers qui furent des acteurs importants dans le passage de Allende à Pinochet, on peut un peu comprendre la timidité du pouvoir.

Marie Claire : J’en ai marre de la pollution, marre de mal respirer et des crises d’allergie respiratoire des enfants de ma famille, marre du pullulement du cancer dans mon entourage professionnel. J’espérais qu’une écotaxe massive dissuaderait la circulation routière. Et les lâches qui nous gouvernent nous abandonnent pour 10.000 ou 20.000 Bretons hurlants !

Emilio Aba : Une question sans mauvaise intention : Sarkozy, ou quelqu’un des siens, a-t-il déjà expliqué pourquoi cette taxe votée en 2008 n’a pas été déjà appliquée ?

source : Le Monde.fr avec AFP | 09.10.2014, « Erreur désastreuse », « incroyable gâchis »… la fin de l’écotaxe horripile les écolos

Croissance économique=émissions de gaz à effet de serre

La croissance est l’ennemie du climat, ceux qui affirment le contraire sont des menteurs. Le médiatique Paul Krugman assure que la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre et la croissance économique sont parfaitement compatibles*. Il vitupère contre le « désespoir climatique », il croit l’humanité capable de fixer un « prix mondial au carbone », il espère que le photovoltaïque ne coûtera presque rien… C’est un prêtre de la croissance économique récitant ses mantras. Il occulte le fait que nous avons déjà dépassé les limites biophysiques de la planète.

Il ne peut pas y avoir une croissance « intelligente », il n’y a qu’une croissance qui brûle les derniers stocks de pétrole et de charbon, provoquant par là même le réchauffement climatique. La hausse des émissions de dioxyde de carbone (CO2) se poursuit à un rythme effréné et coïncide avec le plus pessimiste des quatre grands scénarios de développement imaginés par la communauté scientifique. En 2013, la combustion des ressources fossiles (pétrole, gaz, charbon) et les cimenteries ont émis quelque 36 milliards de tonnes de CO2, en hausse de 2,3 % par rapport à 2012. La Chine était même devenue, en 2008, le premier émetteur mondial de CO2, devant les Etats-Unis ses émissions par habitant ont désormais surpassé celles de l’Union européenne. Malgré toutes les conférences internationales sur le  climat, les émissions de gaz à effet continuent d’augmenter et les Chinois sont même devenus les premiers par habitant pour la dilapidation du carbone. Pour 2014, on anticipe une augmentation de 2,5 % des émissions de CO2 toutes sources anthropiques confondues, ce qui placerait l’année en cours au-dessus du seuil symbolique des 40 milliards de tonnes de CO2 émises par les activités humaines**.

Les économistes comme Paul Krugman veulent nous faire croire au miracle et empêchent ainsi la venue d’une sobriété partagée. Ils préparent (in)consciemment l’enfer sur terre… De toute façon l’imminence du prochain choc pétrolier va mettre tout le monde d’accord  puisque la croissance sera définitivement en berne.

* LE MONDE du 28-29 septembre 2014, La croissance est-elle l’ennemie du climat ?

** LE MONDE du 23septembre 2014, Un Chinois émet désormais plus de CO2 qu’un Européen

LE MONDE, notre réfrigérateur, le changement climatique

L’éditorial du MONDE* croit qu’il y a un changement de climat sur le climat : « Citoyens, entreprises, grandes villes exercent une pression croissante et encourageante sur les dirigeants politiques. » Malheureusement LE MONDE veut faire croire que la transition vers une civilisation bas carbone se fera sans douleurs : « La réorientation n’est pas l’ennemi de la croissance… La lutte contre les émissions de gaz à effet de serre peut se faire sans dégâts majeurs pour les économies. » Car l’illusion du MONDE sur les miracles technologiques est omniprésente : « Photovoltaïque, stockage de l’énergie, réseaux intelligents n’attendent que les investisseurs pour être déployés. » Le journal rejoint en cela Jeremy Rifkin** pour qui la troisième révolution industrielle a commencé : « L’Europe doit investir dans de nouvelles infrastructures de réseaux d’énergie intelligents… » LE MONDE et Jeremy nous trompent en occultant que la lutte contre le réchauffement climatique ne dépend pas d’abord des Etats et du progrès technique, mais de notre comportement quotidien.

                Nous préférons un autre concept de Jeremy Rifkin, celui du mal froid*** : « Le problème de l’ère globale, c’est que nous sommes connectés si intensément avec les choses à travers le monde que les conséquences de notre comportement personnel peuvent être immorales – on pourrait parler de « mal froid » (Cold Evil). Nous ne le savons pas parce que nous ne réfléchissons pas en termes d’implications fondamentales de notre comportement sur autrui. Il va nous falloir commencer par développer une approche systémique.. Les droits universels de l’homme perdent leur sens s’ils ne font pas l’objet de leçons et de formations dès l’enfance pour que nous comprenions comment notre comportement dans un monde dense et interdépendant affecte forcément quelqu’un d’autre ou quelque chose d’autre. » Par exemple, personne ne veut réfléchir au fait que, lorsqu’on fait fonctionner son réfrigérateur, on participe ainsi au réchauffement climatique.

Pourtant c’est bien le cas, c’est ce que démontre Arnaud Parmentier**** : « Troquer son réfrigérateur basse consommation contre un garde-manger grillagé est la meilleure manière de lutter contre le réchauffement climatique… La disparition des chlorofluorocarbones CFC a amélioré la coche d’ozone… Mais leur remplacement par des hydrofluorocarbures HFC, si elle n’affecte pas la couche carbone, contribue horriblement au réchauffement climatique… » Une conférence internationale sur le climat n’a pas pour vocation de changer notre mode de vie. C’est seulement une danse pour la pluie, une incantation illusoire censée éloigner les calamités. Les politiques doivent être courageux, nous expliquer qu’il va falloir nous passer du réfrigérateur et du climatiseur, de la voiture individuelle et du chauffage central. Ils ne le feront pas parce que nous ne pouvons pas assumer notre responsabilité individuelle dans les désastres collectifs. Nous subirons donc les événements au lieu de les maîtriser… L’espèce humaine  n’est pas aussi intelligente qu’on le dit.

* LE MONDE du 25 septembre 2014, changement de climat sur le climat

** LE MONDE éco&entreprise du 25 septembre 2014, « La troisième révolution industrielle a commencé »

*** http://www.fondation-vision.ch/visionmedia/article.aspx?id=262&rdr=true&LangType=1036

**** LE MONDE du 25 septembre 2014, Sus aux réfrigérateurs