CLIMAT. S’adapter, c’est déjà trop tard !

Dès novembre 1976, la Mitre Corporation, un groupe de réflexion d’origine militaire proche de la Maison Blanche, organisait un congrès intitulé « Living with Climate Change ». Dans son préambule, le rapport passait rapidement sur le réchauffement, considéré comme inexorable. Restait à en évaluer les conséquences sur l’économie américaine. C’est impressionnant de prescience ET de désinvolture.

Jean-Baptiste Fressoz : Au Royaume-Uni, un séminaire gouvernemental d’avril 1989 exprimait un point de vue similaire. La première ministre Margaret Thatcher (1979-1990) avait demandé à son gouvernement d’identifier les moyens de réduire les émissions. Les réponses vont toutes dans le même sens : inutile de se lancer dans une bataille perdue d’avance. Juste avant la conférence sur l’environnement de Rio de 1992, l’économiste William Nordhaus démontrait « mathématiquement » le caractère optimal d’un réchauffement de 3,5°C en 2100… il obtiendra le « prix Nobel d’économie » en 2018 pour ses travaux.

Le ministre français de la transition écologique, Christophe Béchu, a annoncé « commencer à construire une trajectoire [de réchauffement] à 4°C » en vue de la fin du siècle, est assez hypocrite. Que l’objectif des 2°C, et a fortiori celui de 1,5°C, soit pour ainsi dire inatteignable. Mais feindre la surprise donne l’impression d’avoir essayé : l’adaptation serait donc le résultat d’un échec, celui de nos efforts de transition. Cette résignation n’a jamais été explicitée, les populations n’ont pas été consultées, surtout celles qui en seront et en sont déjà les victimes.

Le point de vue des écologistes désenchantés

Michel SOURROUILLE : William Nordhaus « prix Nobel d’économie » en 2018, estimait qu’un réchauffement climatique de 3 °C mènerait en 2100 à une perte de PIB de seulement 2,1 % et à une perte de 8,5 % pour une augmentation de 6 °C. La réalité est qu’à 6 °C d’élévation de la température de la Terre, la civilisation thermo-industrielle ne serait plus qu’un vague souvenir et il n’existerait plus aucune institution susceptible de calculer un quelconque PIB – notion qui n’aurait, du reste, plus le moindre intérêt.

Vince : J’avais ouï dire que l’adaptation serait une opportunité de faire du business. Il y a une logique, mais le problème c’est que c’est basé sur une grande méconnaissance des conséquences RÉELLES du changement climatique, qui s’avèrent nettement plus délicates. C’est un système chaotique imprévisible. C’est jouer avec une grenade dégoupillée sans savoir quand et comment elle va exploser.

Raphou : On ne s’adapte pas à une valeur moyenne (temporelle sur une année et géographique sur toute la planète) de +4°C de réchauffement : il faudrait s’adapter à des valeurs extrêmes beaucoup plus fortes, par exemple des pics de chaleur à 55 °C au lieu des 40 °C habituels, il faudrait s’adapter à un effondrement de la bio diversité et donc de la chaine alimentaire, il faudrait s’adapter à un manque d’eau potable chronique.

Ulysse : La question reste de savoir jusqu’où nous pourrons nous adapter ? Les plantes renouvellent l’oxygène de l’air que nous respirons, à 0% d’oxygène pourra-t-on vraiment s’adapter ? Pour information il est normalement de 20 %. La température limite corporelle est de 42,3°C, après vous êtes mort. La canicule tue, l’ont-ils oublié ? Il n’y a pas grand monde qui vit dans les déserts. Dire qu’il faut s’adapter à +4°C est donc trompeur et beaucoup trop optimiste.

Taz : La seule alternative à la décroissance est l’effondrement. En termes d’implosion et de guerre civile, vous verrez (puisqu’on refuse la première) c’est pas mal non plus.

Four Carlton Gardens : Je pense, monsieur Fressoz, que la plupart de mes concitoyens et moi-même sommes aussi responsables que nos dirigeants. Car aurions-nous accepté, durant toutes ces années, de vivre dans la sobriété alors que nous n’avons toujours pas fondamentalement changé nos habitudes en dépit des alertes de plus en plus pressantes ?

Dimitri78 : La politique des écologistes de l’appauvrissement de masse ne fonctionnera pas, les populations humaines refuseront un déclin de leurs niveaux de vies, de leurs libertés de choix de déplacements et des restrictions dures dans leurs quotidiens… la transition douce est donc préférée pour maintenir son niveau de vie avec un pouvoir d’achat maintenu et la liberté de consommer préservée.

S. Praderes : La transition douce me rappelle l’histoire d’un homme qui tombe d’un immeuble et qui se dit : jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien, jusqu’ici tout va bien … Le plus dur, ce n’est pas la chute, c’est l’atterrissage !

Melvin : Oui, Lovelock l’a dit il y a bien plus de 10 ans, c’est plié, foutu, terminato. Alors à quelle vitesse les sociétés occidentales vont se mettre à ressembler à l’Égypte ou la Syrie c’est en fait la question intéressante pour ceux qui cherchent à profiter financièrement de ce changement inéluctable. Mais ça vaut la peine d’essayer de changer les choses, uniquement pour mourir la conscience tranquille, ce qui n’est déjà pas si mal.

Philipp69 : Que l’on aille involontairement (sous la contrainte climatique uniquement) ou semi-volontairement (contrainte climatique+politique de décroissance) vers la sobriété généralisée, c’est-à-dire la rareté et la pauvreté, on n’échappera pas à une ère de violence. Mais on a le choix: soit on se désarme économiquement, industriellement et alors on aura la guerre civile en plus de la guerre entre les nations pour l’accès aux ressources, soit on s’arme économiquement, industriellement et militairement et alors on peut espérer être en moins mauvaise posture. En d’autres termes, soit on est irénique (et on se tire une balle dans le pied), soit on est survivaliste et on se prépare à la violence engendrée par l’ère de la rareté qui vient.

Pierrots : Aucun risque pour les plus riches. Ils mettront la clim à fond et passeront l’été au Groenland. Par contre nous autres, les plus modestes on va morfler.

Taz : Même pour les ultrariches dans leurs bunkers néozélandais ça va être compliqué.

Jean-Pierre M : Continuons à faire des enfants, plus on est de fous, plus on rit…

Dieu : La chronique comme la plupart des réactions semblent considérer qu’il y a là un problème. C’est dû à une surévaluation de l’avenir. Quiconque renonce à tout avenir (qui est au fond une chose du passé) vivra l’esprit tranquille. L’humanité, sous sa forme actuelle, existe depuis 300 000 ans. C’est un beau score ais pourquoi mendier un supplément ? Carpe Diem.

lire, Croissance durable, un oxymore obtient le prix Nobel

12 réflexions sur “CLIMAT. S’adapter, c’est déjà trop tard !”

  1. Une espèce qui ne sait pas s’adapter est une espèce qui disparaît ! L’homme fait partie de la nature et des espèces donc il n’échappe pas à cette règle fondamentale ! S’adapter ou mourir puis disparaître ! S’il est trop tard pour s’adapter alors il y aura des morts en masse et puis c’est tout ! On n’a pas le choix que d’accepter cette règle qui est somme toute naturelle !

    1. Hier, dès le début À 13:47, j’ai dit : « Trop tard pour s’adapter ? Là encore tout dépend de ce qu’on entend par s’adapter. »
      Tu viens donc nous parler d’une règle fondamentale… en somme toute naturelle (sic) pour nous «démontrer» que c’est comme ça, et pas autrement, et puis c’est tout (sic), abracadabra et voilà ! Tu parles donc de l’évolution, de l’adaptation évolutive, bien évidemment tu fais bien la différence entre l’adaptation et l’évolution, tu sais le temps que prend cette dernière, le rôle du hasard là-dedans, notamment dans les mutations ADN et j’en passe, bref là encore tu sais de quoi tu parles. Mais comme finalement tu ne sais pas… s’il est trop tard ou pas… et que tu te contentes seulement d’en faire l’hypothèse (si… ma tante en avait … alors) tes prédictions me laissent un peu sur ma faim. (Fin)

      PS : 5 à 5 => match nul et baballe au centre. 🙂

      1. Par exemple si en France on ne s’adapte pas aux hausses de températures, au lieu de lutter contre un réchauffement climatique qu’on ne peut pas éviter, et ben tous nos arbres vont crever, évidemment ça va créer des réactions en chaîne puisque des espèces vivent dans ces forêts ! Donc ces animaux risquent de mourir aussi ! Bref, il faut commencer par remplacer les arbres actuels (hêtres, chênes, frênes, etc) par d’autres arbres habitués par un climat plus chaud. Ce n’est pas en sautant comme un cabri sur ton canapé à brailler sur les réseaux sociaux « réchauffement climatiques, réchauffement climatique à cause du CO2 » que les choses vont s’améliorer ! Les indiens, les chinois, les africains, les allemands, les américains n’en ont rien à péter de tes commentaires à propos du réchauffement climatique et du CO2, ils ont envie de continuer de brûler des énergies fossiles pour augmenter leur pouvoir d’achat c’est tout !

  2. Trop tard pour s’adapter ? Là encore tout dépend de ce qu’on entend par s’adapter.
    On peut déjà s’adapter, ou faire avec… une idée. Sauf que là encore ça dépend de l’idée.
    Pour certains l’idée que nous serons bientôt 10 milliards est dure à avaler. Quant à celle que plus d’un terrien sur trois sera africain en 2100, alors là je vous dis pas. Dure surtout à avaler, l’idée que tout a une fin, et que la Fête se termine.
    Ensuite la question est de savoir à quoi il convient (ou conviendrait) de s’adapter. Si l’adaptation porte sur +2° voire +3°, et/ou à +20 ou +30 cm pour le niveau des mers, il est évident que ce n’est pas pareil avec +6° et 1 mètre. Et là je rejoins ce que dit Michel SOURROUILLE.
    Et enfin, s’adapter POURQUOI ? Je pense que Jean-Baptiste Fressoz a raison quand il dit :
    – « En réalité, l’adaptation a été très tôt choisie comme la stratégie optimale. »
    ( à suivre )

    1. Michel SOURROUILLE le mentionne également, le POURQUOI n’est rien d’autre que le sauvetage (ou la tentative de sauvetage) de l’économie. Autrement dit du Système.
      Pour moi, nous n’avons rien à gagner à vouloir sauver le Système.
      Je ne fais que le répéter, nous avons au contraire tout à gagner à en changer.
      Pour ça nous devons imaginer autre chose. Pour ça nous devons cesser de raisonner (plus exactement résonner) dans le cadre (de pensée) du Système.
      Bref, pour ça nous avons tout à gagner à décoloniser nos imaginaires.

      Dieu (le commentateur) pense que 300 000 ans c’est un beau score (sic). Pour moi ce n’est qu’un point de vue. Même si je suis POUR le Carpe Diem, je ne le partage pas. L’humanité peut effectivement disparaître (de toute façon elle disparaitra), mais je ne pense pas que son heure soit venue. ( à suivre )

      1. Je ne fais que le répéter, même si l’avenir ne s’annonce pas rose, ni vert, nous devons tout faire pour, qu’un jour… Sapiens soit enfin digne de ce nom.
        Pour ça nous devons sauver ce que nous avons d’humanité. Ou du moins ce qu’il en reste chez certains. Pour ça arrêtons de vouloir construire des murs (de toute façon jamais assez hauts), des bunkers et j’en passe. Arrêtons de noircir plus qu’il n’en faut le Tableau, arrêtons de nous faire peur plus qu’il n’en faut, arrêtons d’en rajouter toujours plus à la Confusion, arrêtons ce petit-jeu malsain qui consiste à nous diviser etc. etc. Tout ça ne va que dans le sens du Système. Bref, faute de pouvoir sauver le Climat et le Système… évitons surtout de pourrir toujours plus le climat.

  3. Lutter contre le changement climatique ? Me faites pas rire .
    Qu’ il soit d’ origine humaine avec son fumeux CO2 ou dû à l’ activité solaire , je vois mal nos grands adeptes de la technocul triomphante inverser le processus que dame nature a initié.😁😁 Vont – ils fabriquer des pompes à CO2 (c’est aux deux) ?
    Game over , dorks

  4. Ça ne sert à rien de vouloir terroriser la population avec des 3°/+4°/+5°/+6° car ce sont des scénarios qui n’arriveront jamais ! Pour la simple et bonne raison qu’il n’y aura jamais assez d’énergies fossiles à extraire pour atteindre de telles températures ! Pour le moment on a atteint +1° depuis L’ère pré-industrielle soit depuis l’année 1800, mais on a déjà franchi le pic pétrolier du pétrole conventionnel pour atteindre un tel résultat de +1°…. Bref, en utilisant l’autre moitié on devrait au pire qu’atteindre une valeur située autour de 2°! Ces scénarios situés entre +3° à +6° ont été considérés en prenant en compte le critère « au rythme de notre consommation actuelle pendant tant d’années ». Hormis que notre consommation actuelle ne pourra jamais être maintenue encore bien longtemps, c’est impossible !

    1. Au fil des années notre consommation d’énergies fossiles va irrémédiablement diminuer, autrement dit les émissions de CO2 ne peuvent que décliner ! Surtout en Europe d’ailleurs puisque nous n’avons quasiment rien en pétrole à extraire et même en charbon il ne reste plus que l’Allemagne et la Pologne pour finir les fonds de tiroir, la France n’a plus rien Au niveau mondial la Russie l’Afrique et les pays du Moyen-Orient et d’Amérique Latine qui nous exportent du pétrole en Europe, vont nous diminuer nos quantités ! En effet, les dernières réserves, ces pays vont vouloir les garder pour eux-mêmes, ben oui puisque ces réserves sont sur leur sol, alors ils vont se servir en premier, et en s’apercevant qu’ils ont franchi le pic, alors à terme ils ne voudront plus nous exporter quoi que ce soit ! Alors faire peur aux français avec ces +3° à +6° est inutile car il n’y en aura jamais assez et les dernières quantités ce ne seront pas nous qui les utiliseront !

    2. – « Ça ne sert à rien de vouloir terroriser la population [etc.] »

      Ben si justement, et c’est vieux comme le monde. Ne va surtout pas croire que la rhétorique de la peur, comme la rhétorique guerrière, ne sert à rien. Toi même, par exemple, quand tu nous parles des croque môsieurs du cannibalisme et patati et patata, tu ne cherches seulement qu’à nous terroriser, tout connement. Sauf que sur ce coup, dans ce nous ce sera sans moi.
      Pourquoi ce besoin de nous faire mourir de peur ? Si ce n’est de rire … 🙂
      Mais pour en revenir au sujet, évite au moins de parler de choses que tu ne sais pas. Ou que tu ne comprends pas. Comme ici au sujet du Climat. Je te l’ai dit X fois, tu es climatologue comme moi. Idem pour agronome, économiste etc. Seulement tu refuses d’écouter ceux qui savent le mieux, de quoi il parlent. Personnellement je n’oserais peut-être pas parier sur le +6. Par contre le + 3 … pourquoi pas ? Surtout évite de répondre.

      1. Mais oui toi tu sais mieux que tout le monde sur tout et le reste ce sont des abrutis ! Surtout que mes propos ont été dits par Jancovici dans l’une de ses conférences ! Ben oui au niveau mondial on a franchi le pic pétrolier conventionnel depuis plusieurs décennies. l’Angleterre et la France n’ont plus de charbon depuis 2008. Et nos fournisseurs en pétrole vont réduire la part des européens progressivement jusqu’à zéro ! Donc oui on n’atteindra jamais les 3° car les ressources fossiles seront épuisées bien avant d’atteindre cette température. Et d’ici ce temps là ce seront les propriétaires des réserves de pétrole et charbon qui continueront de les utiliser ! Alors oui c’est une action stérile que de nous bassiner avec ça en France !

      2. A part que mes histoires de famine et malnutrition ne sont pas un hypothétique scénario de ma part pour faire peur, mais c’est déjà une réalité de ce qui est déjà constaté dans le monde ! Plusieurs centaines de millions de gens sont exposés à la famine et quelques milliards d’habitants déjà exposés à la malnutrition ! Ce n’est pas un hypothétique scénario pour faire peur mais c’est un bilan de famines et malnutrition qui sont déjà à l’œuvre dans le monde ! Ces dernières décennies on a fait reculer la famine dans le monde, mais ce n’est lié qu’aux énergies fossiles en voie de déplétion, donc une solution que très temporaire ! Ensuite ton agriculture biologique dont tu nous bassines pour qu’on la mettre en œuvre en France, ne fonctionne pas puisque nous avons déjà l’exemple du Sri Lanka qui est passé d’une agriculture chimique et fossile à une agriculture biologique avec pour seul résultat la famine en 2022 !

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