Définir anthropocentrisme, biocentrisme, écocentrisme

« Au nom d’une conception inspirée par l’écocentrisme et le biocentrisme, on propose d’éliminer la différence ontologique et axiologique entre l’homme et les autres êtres vivants, considérant la biosphère comme une unité biotique de valeur indifférenciée. »

(Discours de Jean-Paul II au Congrès Environnement et Santé, 24 mars 1997)

– L’attribution d’une considération morale exclusive aux seuls êtres humains est qualifiée d’anthropocentrisme. Parce que seuls certains êtres humains sont dotés de rationalité morale, les valeurs sont fondamentalement anthropogéniques ; elles sont générées par des êtres humains.

(philosophie de la biodiversité – petite éthique pour une nature en péril de Virginie Maris)

– Différentes théories morales proposent d’inclure l’ensemble des êtres vivants dans la sphère des individus méritant une considération morale directe. On parle alors de biocentrisme. Paul Taylor considère que tout être vivant est un centre-téléologique-de-vie. Les organismes vivants ont leur finalité, ils possèdent un bien qui leur est propre, l’accomplissement de leurs fonctions biologiques, qu’ils poursuivent par leurs propres moyens. Selon l’égalitarisme biocentrique, tous les êtres vivants ont la même valeur, et cette valeur nous impose le respect.

(philosophie de la biodiversité – petite éthique pour une nature en péril de Virginie Maris)

– Le biocentrisme  comme le pathocentrisme (l’antispécisme), s’ils remettent en cause l’anthropocentrisme, restent cependant tributaires d’une approche individualiste de la considérabilité morale. Or la protection de la biodiversité s’intéresse surtout à des entités supra-individuelles, comme les espèces ou les écosystèmes. Les tenants de l’écocentrisme invitent à prendre en compte dans la délibération morale ces entités globales. Elles ont, comme les êtres vivants, un bien propre qu’il est possible de promouvoir ou d’entraver par nos actions, et qui devrait donc nous imposer certaines obligations morales. Dans le préambule de la Convention sur la diversité biologique, les 189 pays signataires se déclarent conscients de la « valeur intrinsèque » de la biodiversité. La diversité biologique a une valeur intrinsèque, indépendamment de sa valeur instrumentale ou utilitaire.

(philosophie de la biodiversité – petite éthique pour une nature en péril de Virginie Maris)

– L’écocentrisme met l’accent sur l’interconnexion des formes de vie au sein d’un tout complexe et harmonieux. Poussant cette logique à l’extrême, l’écologie profonde considère que les espèces et leurs habitats, en plus de leur valeur pour l’homme et de leur valeur en tant qu’éléments essentiels d’un tout, ont une valeur dite « intrinsèque », c’est-à-dire inhérente, par elles-mêmes et pour elles-mêmes.

(l’écologie pour les nuls de Franck Courchamp)

– Le sociocentrisme conduit à ne voir dans l’environnement qu’un mode de problématisation de la société et dans la nature qu’un endroit où se promener. L’environnement, dans une telle perspective sociocentriste, c’est nous, ce n’est pas la nature. Le sociocentrisme s’accomplit ainsi en socionombrilisme. On arbitre un conflit d’experts comme une crise politique entre factions rivales, niant qu’il puisse y avoir des repères objectifs. En fin de compte, le sociocentrisme justifie aussi bien la négligence que l’autoritarisme du vrai. Le meilleur moyen d’éviter les dérives sociocentristes serait, selon Serres, de s’inspirer d’une alliance, une façon de se lier, ou de se relier, à la nature.

(Du bon usage de la nature – pour une philosophie de l’environnement de Catherine et Raphaël Larrère)