Dépenses contraintes, reste-à-vivre et minimum vital

Dépenses contraintes ? Dépenses incontournables ? Les Gilets jaunes veulent surtout une augmentation de leur pouvoir d’achat pour une extension de leurs désirs personnels de consommation. On se souvient de l’article-portrait d’un couple de gilets jaunes pour lequel les fringues de marques faisaient évidemment partie de l’incontournable. Un article qui avait suscité une belle polémique, parfaitement justifiée, sur l’entreprise de manipulation misérabiliste à laquelle se livrait réseaux sociaux et médias. Pour un écologiste au contraire, le grand débat national devrait aboutir à une définition du minimum vital, préalable à la dynamique d’une sobriété partagée. La problématique est complexe, nous ne sommes plus aux temps de Vauban pour qui le Minimum vital pour une famille ouvrière française en 1707 était le seuil au-dessous duquel la survie n’est plus possible. La ration correspondait à quelques 1500 calories, mélange de blé et d’autres céréales appelé méteil dont la part dans le budget total était presque de 70 %. Aujourd’hui le minimum vital regroupe pour les Gilets jaunes le logement, la nourriture, les abonnements d’électricité et de gaz, l’accès aux services publics, etc. Toute augmentation des prix réduit le « reste-à-vivre », c’est-à-dire ce sur quoi les personnes ont l’impression d’exercer encore un choix.

Un rêveur nommé Alain Trannoy commet sur LE MONDE une tribune* par laquelle «  la personne pauvre, celle qui a du mal à faire face à ces dépenses incontournables, doit dès lors, pouvoir compter sur la solidarité nationale ». Pour lui la notion de reste-à-vivre doit être le pivot de toute la politique redistributive. Le reste-à-vivre devient la base d’imposition au titre de l’impôt sur le revenu. Mais cela devient une usine à gaz, il faudrait tenir compte de la distance entre le lieu de travail et le domicile, du loyer, etc. Sur ce blog biosphere, nous sommes plus incisifs, nous parlons de simplicité volontaire, de réduction des dépenses contraintes, de simplicité volontaire. Trop de personnes considèrent la consommation de viande, la voiture individuelle, l’écran plat et le portable pour chaque membre de la famille comme des dépenses incontournables ! Dans les pays riches, le seuil de pauvreté devient complètement relatif et s’exprime par rapport au niveau de revenu médian de la population ; le minimum vital devient alors indéfinissable et le niveau de besoins indéfini puisque sa base de calcul est variable. Dans un contexte croissanciste d’enrichissement sans frein, aucun dirigeant d’un pays, quel que soit le niveau de vie obtenu, n’a annoncé un projet de stabilisation de la demande de ses nationaux qui pèse pourtant sur les ressources de la planète ; à l’économie de subsistance a succédé la tyrannie de l’excédent.

L’Etat-providence est une invention de Lord William Beveridge qui, en décembre 1942, produisit un rapport : la Sécurité sociale et ses services. Beveridge identifiait « les cinq géants » à terrasser : « Pauvreté, Maladie, Ignorance, Insalubrité, Chômage ». Il proposait de financer la protection sociale par des cotisations sur salaire et la France s’en inspire pour mettre en place la Sécurité sociale. Mais ce Lord est plus proche de l’idée de simplicité volontaire que des familles assistées avec écran plat dans la chambre des enfants : la vision de l’austère économiste, qui prenait un bain glacé tous les matins, était assimilée au minimum vital. L’assistance offerte par l’Etat, préconisait Beveridge, ne devait pas être « généreuse » mais « permettre de survivre », afin de ne pas supprimer l’incitation à la recherche de travail. Dans un contexte de catastrophes écologiques, il nous faut aujourd’hui définir un minimum vital qui aboutisse à un « reste-à-vivre » proche de zéro. L’essentiel est d’arriver à bien vivre de peu et que cette attitude soit généralisée à tous. On retrouverait le schéma mental des sociétés premières dont rien dans le fonctionnement social ne permettait la différence entre le plus riche et le plus pauvre car personne n’y éprouvait le désir baroque de faire, posséder ou paraître plus que le voisin. Les véritables sauvages aujourd’hui, c’est la classe globale qui circule en automobile et détruit l’environnement. C’est même la consommation de ce que nous avons l’habitude d’appeler « ménages modestes » qui pose problème car elle représente un gaspillage au regard des possibilités de la planète. Les humains ne devraient jamais penser en termes de maximum ou de minimum, mais en termes d’optimum global. La manière dont personnellement tu vis et consommes des carburants fossiles a des répercussions tant sur la vie des autres personnes que sur celle des non-humains et des générations futures. C’est la leçon première que devrait recevoir les Gilets jaunes. Limiter l’expansion indéfinie de nos désirs, c’est la seule voie réaliste vers une société d’abondance.

* LE MONDE du 20-21 janvier 2019, « La notion de “reste-à-vivre” doit être le pivot de toute la politique redistributive »

6 réflexions sur “Dépenses contraintes, reste-à-vivre et minimum vital”

  1. « On s’assure que les écologistes consensuels – type carnavalesque : marche pour le climat, petits gestes « écocitoyens » etc. – gardent eux aussi leur distance, incapables de sentir que les « pue-le-diesel », en cherchant la destitution de ceux qui maintiennent le pied sur la pédale d’accélérateur, font plus pour sortir de la course à l’abîme que toutes les pétitions et happenings s’en remettant à la bonne volonté des oligarques et de leur fondé de pouvoir jupitérien, dont toute la politique tient en ce principe : gérer le désastre.  »

    https://lemoinedefroque.home.blog/2019/01/17/quand-le-vent-se-leve-senvole-le-decor-liberal/

  2.  » La manière dont personnellement tu vis et consommes des carburants fossiles a des répercussions tant sur la vie des autres personnes que sur celle des non-humains et des générations futures. C’est la leçon première que devrait recevoir les Gilets jaunes.  »
    Avant de donner ce genre de leçon aux gilets jaunes, je pense que chaque écolo se devrait au moins de savoir ce qu’est l’énergie. Notamment, d’être parfaitement conscient de cette histoire de 500 ou 600 esclaves (se référer à J-M Jancovici).
    D’autre part j’ai déjà dit que les discours écolos quels qu’ils soient (les miens compris) ne pourront être écoutés que lorsque les gens n’auront plus à galérer pour joindre les deux bouts.
    Il ne devrait pas être difficile de comprendre, même pour un écolo, que pour penser à la fin du monde… il ne faut pas à avoir à penser en permanence à la fin du mois.

  3. De toute façons, les conflits iront croissant en France, et même en Europe. En faite au pouvoir ce sont les vieux cons qui raisonnent toujours comme avant qui continuent de diriger. Tous ces pro-immigrationnistes continuent de diriger. Mais au départ, effectivement l’immigration fonctionnait, car un on avait pas encore cumulé trop de migrants, et deux ça fonctionnait parce qu’on était dans une période où notre pays la France et même les pays d’Europe, augmentaient leurs importations d’énergies fossiles d’une année sur l’autre depuis 1945. En plus, on explitait encore des énergies fossiles sur notre propre territoire en plus de celles qu’on importait, alors en période de croissance d’énergies fossiles, et ben effectivement on pouvait importer des migrants chez nous pour écouler ce trop plein d’énergies fossiles…. PUIS, boom en 2001, Baisse d’importations d’énergies fossiles en France puis l’effet fût immédiat dès la première élection venue en 2002 et ça donne Le Pen ! Voilà depuis cette date la France a de moins en moins de ressources fossiles, alors ça va devenir de plus en plus compliqué de chauffer le Q de tout le monde, de chauffer les aliments, d’habiller tout le monde etc ! Et non seulement ça continue de baisser depuis cette date, mais plus jamais non plus une hausse d’énergies fossiles ne surviendra, ça continuera perpétuellement de baisser, donc les conflits ne vont que progresser. Il faut savoir que tous vos systèmes de rémunérations, toutes vos allocations, toutes vos subventions, toutes vos pensions de retraite, bref tout ce que vous appelez vos acquis sociaux ont été inventés, concoctés et votés afin d’être diffusés pendant l’époque des énergies fossiles croissantes, tout ça est essentiellement dû au pétrole, au gaz, au charbon et à l’uranium. Sans les énergies fossiles vos aquis sociaux n’auront jamais vu le jour, autrement dit concernant l’avenir sans énergies fossiles ces acquis sociaux ne pourront pas survivre puisque ce sont ces énergies qui les alimentent ! Effectivement, le gouvernement essaye d’améliorer ce qu’on appelle l’efficacité d’énergies pour faire des économies de bouts de chandelle et faire durer le rêve social un peu plus longtemps (mais j’ai dit un peu plus et non pas beaucoup plus longtemps), car au bout d’un moment, pour obtenir l’efficacité d’énergie, la consommation de ressources pour obtenir l’énergie n’est pas incompressible indéfiniment et de manière infini, il y a des seuils de ressources qu’on ne peut plus baisser au bout d’un moment. Donc, ça va continuer, les conflits vont vraiment perdurer mais aussi gagner en nocivité. En période de décroissance d’énergies fossiles, l’immigration n’est plus possible, on ne peut plus gonfler notre population c’est clair. Le gouvernement n’a plus le choix que de favoriser l’émigration cette fois, il faut désenfler notre population….

  4. Bonjour,
    le vrai problème c’est qu’on a 2.5 /3 millions de chômeurs pour 400 000 offres, alors mêmes que si on considère qu’il y a des fainéants, des offres cachés, il faut aussi considéré qu’il y a des offres utopiques (comprenez qui ne sont pas rémunérés in fine ou qui ne sont pérennes, des fausses offres, des arnaques, des offres du style 10 ans d’expérience mais jeune diplômé payé moins que le smic) on reste quand même dans un rapport de presque 1/8 donc la pressions des salaires est à la baisse. a partir de là on peut faire ce que l’on veut, on a trop de chômage.
    Cordialement

  5. Le mouvement des Gilets Jaunes n’aboutira à rien, car…
    Reprenons au début, au départ le mouvement des Gilets Jaunes a obtenu un large soutien de la population parce qu’il n’y avait qu’une seule revendication = la hausse du carburant. Donc cette hausse de carburant affectait tout le monde, mais pas qu’à l’échelle de l’individu mais aussi à l’échelle des corporations, cette hausse affectait toutes les corporations, enfin presque, sauf une = celle des piétons. Mais c’était largement suffisamment pour obtenir la majorité des soutiens, puisque la majeure partie de la population a au moins un véhicule. Donc, cette hausse de carburant affectait tous les individus, toutes les corporations et toutes les classes sociales…. MAIS, depuis, les Gilets Jaunes ont multiplié les revendications dans leurs cahiers de doléances, au point de proposer des mesures contradictoires comme une demande des hausses de dépenses publiques conjuguées aux baisses d’impôts, mais bon passons, revenons-en à nos corporations, et ben si vous multipliez les revendications, ben cette fois vous n’avez plus le soutien de l’ensemble des corporations et de l’ensemble des classes sociales qui fait que… Un jour un individu peut porter un Gilet jaune tant que les revendications ne portent que sur les hausses de carburant puis le lendemain ce même individu va porter un foulard rouge, un gilet vert, un gilet bleue, un foulard blanc, des chiffons rouges d’extrême-gauche, des étendards noirs d’anarchistes, et bref j’en passe les vertes et les pas mûres… Trop de doléances simultanées a reporté l’ensemble des revendications dans les calendes grecques….. Chaque, individu, chaque corporation, chaque classe sociale reconsidérant le mouvement des Gilets Jaunes. Le problème étant que le gouvernement a réussi à diviser l’ensemble de la population en créant des corporations (sncf, routiers, les cadres, chefs d’entreprise, artisans, enseignants, etc etc) et en donnant des avantages de corporations, donc le système est vicié et corrompu, plus personne ne se soucie de l’intérêt général à l’échelle nationale, mais se soucie de les intérêts de corporation. Par la suite si une corporation a une revendication qui gène le gouvernement, alors celui-ci va se servir d’une autre corporation ou d’autres corporations pour faire contre-poids. Pour s’en sortir, il n’y a que 2 possibilités =
    1/ Éradiquer ce système corporatif, et remettre toutes les choses à plat. Car ce système de corporation est tout sauf égalitaire et à l’encontre de la constitution française concernant l’égalité. Mais ça risque d’être difficile, trop de monde agrippés à ses maigres avantages corporatifs, ils ne se rendent même pas compte qu’ils y auraient à gagner plus en se débarrassant de ce système corporatif, alors ils vont s’agripper comme des moules à leur rocher à leurs maigres avantages corporatifs… Il y a trop de monde d’impliqués dans ce système là pour qu’on puisse s’en débarrasser. Ca ne peut venir que d’un effondrement économique généralisé.
    2/ Assurer une majorité de corporations en votre faveur ! Et là, il va vous falloir faire le tri ! Mais d’abord connaître l’ensemble des corporations et de procéder au tri. Pour vous aider, des personnes ont déjà travailler sur ce sujet comme le sociologue Pierre Bourdieu, de l’Individu à l’État Nation, vous pouvez voir l’ensemble des corporations qui gaufre l’espace qui existe entre l’échelle d’un individu à l’État Nation. Ensuite, il faut revoir la fiscalité, en étudiant toutes les niches fiscales, la liste existe sur le Wiki de toutes les niches fiscales, niches fiscales qui sont distribuées en tant qu’avantage à des corporations, et regardez celle qu’il faut toucher et celles qu’il ne faut surtout pas toucher, pour ne pas vous prendre l’ensemble des corporations dans votre figure…..

    Voilà, tant que vous ne vous situez pas dans le cas 1 ou 2, alors le mouvement des Gilets Jaunes ne mènera à rien !

  6. Il est impératif que sans baisses des salaires le temps de travail soit massivement diminué, diminution qui à l’indispensable réduction de l’usage de l’automobile individuelle est nécessaire.
    Il faut aussi que les salaires soient assez élevés de sorte à ce que sans toucher l’aumône les citoyens aient un pouvoir d’achat qui soit bien plus élevés qu’actuellement. Il faut donc aussi que toute personne ait le droit absolu à l’emploi à vie.
    Il est légitime que sans être indemnisés les grands patrons milliardaires que sont Bolloré et compagnie soient expropriés. Ni le pouvoir d’achat des petites gens ni la décroissance économique ne sont négociables!

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