Je regrette vraiment d`avoir eu un enfant

Je me souviens avec émotion du témoignage d’une mère à la Fête des non-parents à Bruxelles en 2011.. elle disait qu’elle regrettait d’avoir eu des enfants. C’était courageux ! Un article de Libération développe aujourd`hui ce sentiment. Quelques extraits :

Elles aiment leurs enfants, mais regrettent d’être mères. A la question «si vous pouviez revenir en arrière dans le temps, avec la connaissance et l’expérience que vous avez aujourd’hui, seriez-vous une mère ?», elles ont toutes répondu non. L’étude «Regretting Motherhood : A Sociopolitical Analysis», publiée à l’hiver 2015 (1), a depuis été commentée partout dans le monde, de la Suisse au Brésil. Le hashtag #RegrettingMotherhood fait un carton auprès des Allemandes. Mais Orna Donath note un invariant : «une exhortation des femmes à se taire». En France, l’étude fait l’effet d’un d’une incongruité anachronique. Nous sommes dans un contexte opposé, les débats portent sur le droit à l’enfant, l’adoption pour les couples homosexuels, la PMA, les mères porteuses. On veut plus d’enfants, toujours plus. Dans un système d`exacerbation du désir, le regret est difficilement envisageable. En Israël, où la mère est une figure majeure, la politique nataliste affichée, le recours à la PMA facilité, le sujet a agité l’opinion une seule semaine avant d’être évacué.

Pour Orna Donath, si son travail choque, c’est aussi lié à la place accordée à la maternité. La dévalorisation sociale du regret, combinée à la survalorisation de la maternité, rend inacceptable le fait qu’une femme puisse regretter sa décision d’être devenue mère. Car, fondamentalement, ce regret indique qu’un autre chemin était possible. Celui de ne pas avoir d’enfant. Le regret, exprimé aujourd’hui, l’est dans un contexte de fécondité maîtrisée qui agit comme une circonstance aggravante. A partir du moment où on a donné le droit aux femmes de gérer leur fécondité, elles ont eu le devoir de le faire. La maternité doit être source d’épanouissement, une étape indispensable à la féminité. Les femmes sont censées aimer ça, il est impensable qu’elles le regrettent. Le message est clair : une vraie femme est nécessairement une mère heureuse

Comme le regret d’être mère, le non-désir d’enfant relève de l’indicible, facteur d’exclusion sociale. Le libre arbitre prend une claque. Voilà donc ce qui fâche, on pense que ce sont des modes de vie choisis alors qu’ils sont grandement déterminés.

(1) In Signs(Journal of Women in Culture and Society, vol. 40).

http://www.liberation.fr/debats/2016/07/10/le-regret-d-etre-mere-ultime-tabou_1465328