La catastrophe décrite en 2005 par notre blog

3.04.2005 Le pape ou la planète ?

Début 2005, plus de 1300 scientifiques réunis par l’ONU à propos de l’état des écosystèmes de la planète ont rendu leur diagnostic. Selon ce rapport, environ 60 % des écosystèmes permettant la vie sur terre ont été dégradés par l’activité humaine, et cela de façon plus accentuée au cours des cinquante dernières années que dans toute l’histoire de l’homo sapiens. Les humains ont depuis 1945 converti pour l’agriculture plus de terres qu’aux XVIIIe et XIXe siècles réunis. Entre 1750 et 2005, 60 % de l’accroissement de la concentration en gaz carbonique dans l’atmosphère s’est produit seulement depuis 1959. Il s’agit d’une pression telle sur les fonctions naturelles de la planète que la capacité des écosystèmes à répondre aux demandes des générations futures ne peut plus être considérée comme acquise. Les pauvres des zones rurales sont déjà touchés par cette catastrophe parce qu’ils dépendent plus directement des services d’origine éco-systémique. Le verdict est sans appel mais les médias ne lui accordent que quelques brèves. Ce rapport publié et oublié juste avant la mort du pape Jean Paul II s’efface, il paraît plus important de consacrer au décès d’un seul homme des heures et des heures dans les journaux télévisés du monde entier, des pages et des pages dans la presse écrite. Pourtant du point de vue de la Biosphère, cette « disparition » d’un pape n’a aucune signification, aucune valeur si ce n’est la mise à disposition pour les décomposeurs de quelques dizaines de kilos de chair.

Un jour prochain les humains devront choisir entre leur propre culte ou celui de la planète.

16.07.2005 Péril en la demeure

Les humains ont déjà beaucoup de raison d’être inquiets. Il y a les problèmes de l’environnement (réchauffement climatique, perte de biodiversité, épuisement des ressources halieutiques, pollution des sols et des mers, déforestation, pénurie d’eau douce). Il y a aussi les problèmes strictement humains comme la pauvreté, le manque d’éducation, le terrorisme, les pandémies, les catastrophes naturelles. Face à cela, il y a l’insuffisance des règles, qu’elles soient fiscales, monétaires, bioéthiques, policière, commerciales ou canalisant les migrations.

Mais cette liste n’est pas complète, cinq grandes vagues de menace arrivent à l’horizon :

  • Le vieillissement qui creuse déjà des dette énormes et annonce des conflits intergénérationnels.
  • Une nouvelle division internationale du travail qui repose sur les délocalisations tous azimuts.
  • Le coût du pétrole et une probable pétroapocalypse à venir avec un chômage en conséquence.
  • Une géopolitique où s’affronteront les blocs américains, européens et chinois (entre autres !)
  • La montée des idéologies de repli identitaire ou religieux à la mesure d’un stress croissant.

La Biosphère  se demande encore pourquoi les humains ne réagissent pas !

18.07.2005 Catastrophe cosmique

« Notre planète est infestée d’hommes que semblent décidés à saboter l’admirable harmonie de la vie. Ils pourraient bien la ramener à sa stérilité initiale. La Nature a mis en effet au monde une espèce néfaste capable de neutraliser les instincts régulatoires qui assuraient la pérennité de la vie terrestre, une espèce déjà en mesure d’exterminer la vie sur la Terre ». (Hubert
Reeves, in Malicorne)

Pour la Biosphère aussi, l’être humain est une catastrophe cosmique, une seule solution : leur décroissance durable.

8.09.2005 Loi sur l’énergie

Quatre années d’intenses négociations pour une loi américaine sur l’énergie de 1724 pages, adoptée définitivement le 8 août dernier. L’acquisition de SUV (= 4X4) est toujours fiscalement favorisée et les normes pour l’efficacité énergétique des véhicules comme de l’habitat ne sont toujours pas renforcées. On distribue aussi beaucoup de subventions pour les principaux soutiens financiers des républicains ou pour soutenir la production et favoriser la création de nouvelles raffineries. Mais la loi fait complètement l’impasse sur la gestion de la demande alors que dans les transports il n’existe pas de produits économiquement substituables au pétrole. Les mesures en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique sont d’ailleurs inexistantes.

Avec 40 % d’électricité produite à partir du charbon et plus de 5 tonnes de CO2 émises annuellement par habitant (contre 1,8 en France), le gouvernement Bush veut ignorer totalement le poids du mode de vie américain sur la Biosphère. Puisse les catastrophes naturelles s’exacerber aux USA…

12.09.2005 Vous êtes des animaux stupides

La surface dévastée par l’ouragan Katrina est de 235 000 km2, soit près de la moitié de la superficie de la France. Colère et désespoir gagnait en particulier les 300 000 habitants de la Nouvelle-Orléans en attente d’évacuation. Rudolph éclate : « On vit comme des animaux, sans électricité, sans eau, sans toilettes, sans douches, sans rien. Il faut que l’on sorte de là, on devient fous et malades. Ma fille et ses deux petites filles vivent comme des clochardes, c’est insupportable ». S’il est vrai que le cataclysme a révélé le niveau élevé des inégalités et la cruauté des rapports sociaux aux USA, en fait l’ouragan n’est qu’un épiphénomène : les humains sont les premiers responsables de la catastrophe. Dès 1722, on commençait l’édification des travaux d’assèchement de ce qui était un marécage propice à la biodiversité. En 1763, La Nouvelle Orléans n’avait encore que 3200 âmes, mais il y eut ensuite l’explosion urbaine qui avait aujourd’hui besoin de six grandes stations de pompage fonctionnant 24 heures sur 24, même par temps sec !

La Biosphère vous rappelle que les humains sont des animaux parmi les autres qui vivent normalement sans électricité, ni eau courante ou douches privées. Tout cela n’est que le privilège de la classe globale actuelle qui utilise sans limites les ressources naturelles au détriment de beaucoup d’humains, des autres animaux et des écosystèmes : les premiers destructeurs des cycles vitaux sont les habitants de villes dont on croit qu’elles peuvent survivre même en dessous du niveau de la mer !

19.09.2005 Une institutionnalisation de l’eau

La loi française du 3 janvier 1992 a promu l’eau comme « patrimoine commun de la nation » et posé le principe d’une gestion équilibrée des eaux entre les usagers et le respect de la nature. Encore faut-il, pour légiférer en matière environnementale, que la France soit poussée par une Directive-cadre européenne en l’an 2000. Mais il faut encore attendre la loi du 21 avril 2004 pour prétendre atteindre un « bon état écologique » de toutes les ressources en eau, et ce pour 2015 !!! C’est dans ce cadre dévoyé que les citoyens sont amenés à exprimer leur avis sur la gestion de l’eau entre le 2 mai et le 2 novembre 2005. Débat bâclé puisque les Français commencent juste à savoir courant septembre  qu’il existe une consultation nationale!

La Biosphère ne sera pas sauvée par des démarches participatives car plus rien dans la société actuelle n’a le pouvoir de durer quand les politiques s’opposent aux politiques, les scientifiques aux scientifiques, sans parler de l’impossible dialogue entre politiques et scientifiques, opinion publique et réalité. Seule la catastrophe réalisée rassemble, et en matière d’eau elle est déjà là au niveau national et international.

13.10.2005 Processus délibératif

Sur les questions d’environnement, il n’y a pas de décideur, il n’y a que des mécanismes de décision qui font interagir des individus ou des groupes qui ont à la fois des représentations différentes du problème débattu et des poids différents dans la discussion. Donc nécessairement le processus délibératif devient sans fin. Une conférence des citoyens sur un sujet (par exemple les OGM) n’aura que des impacts politiques et décisionnels faibles, que la préparation soit bâclée comme en France ou dure deux années comme en Suisse. Les politiques se contentent d’un affichage de volonté réformatrice en ne s’engageant que pour des actions minimales ou illusoires. En conséquence, un forum de citoyens doit être assuré de durer longtemps car seule la continuité permet les itérations successives nécessaires pour aboutir à un consensus efficace.

La Biosphère ne sera pas sauvée par des démarches participatives car plus rien dans la société actuelle n’a le pouvoir de durer quand les scientifiques s’opposent aux scientifiques, les politiques aux politiques, sans parler de l’impossible dialogue entre scientifiques et politiques, politiques et opinion publique, opinion publique et réalité. Seule la catastrophe réalisée (une pétroapocalypse ?) rassemble. Alors en attendant, que les plus courageux d’entre vous passent à l’action directe !

14.10.2005 Impuissance médiatique

En 1992, une étude australienne a montré que la télévision présentait le sort des victimes de catastrophes sans restituer leur contexte historique et social ; encore plus grave, les évènements étaient présentés comme étant hors de tout contrôle individuel ou collectif. Une autre étude en 1993 sur le traitement du thème environnemental dans la presse écrite française relevait aussi des comportements de dénonciation sans que soit évoqué la possibilité d’une mobilisation populaire. Aujourd’hui encore presse et télévision se caractérisent toujours par une préférence pour des horizons proches et une description d’un univers sur lequel l’emprise de la fatalité est grande, où l’individu est isolé et impuissant, où l’action des pouvoirs publics est insuffisante.

Pourtant des actions individuelles telles que le tri de déchets ou le renoncement à la voiture n’acquièrent un sens que dans le cadre d’une vison collective de la cohésion sociale : le consensus sur la sobriété volontaire n’adviendra qu’à partir du moment où s’instaurera la croyance de chacun en la soumission de tous les autres, c’est-à-dire sous l’emprise de la nécessité de sauver la Biosphère… et les humains par la même occasion.

18.10.2005 Renaissance du nucléaire ?

Depuis la catastrophe de Tchernobyl en avril 1986, on n’avait plus construit de réacteur nucléaire. Aujourd’hui on a oublié l’expérience du passé (l’expérience, une lanterne que les humains ont dans le dos et qui n’éclaire que leur passé), et on croit (la foi, autre caractéristique du cerveau humain), qu’il est absolument indispensable de lutter contre l’effet de serre en construisant de nouvelles centrales. Le premier pays à se lancer dans l’aventure est la Finlande qui a officiellement mis en chantier un EPR (European pressurized reactor) le 12 septembre dernier (mise en service en 2009). Dans trois ans ce sera au tour de la France de commencer à construire un EPR à Flamanville. Pourtant le parlement finlandais avait repoussé en 1993 toute idée d’un cinquième réacteur nucléaire, il ne l’a accepté en 2002 que par 107 voix « pour » et 92 « contre », soit une majorité de 54 % seulement. Pourtant en France, selon le comité des sages issu du débat national sur l’énergie, l’urgence d’une nouvelle construction de réacteur n’était pas clairement démontrée.

La Biosphère sait qu’il faut des centaines d’années de réajustements itératifs pour trouver un équilibre précaire dans un écosystème, les humains croient qu’ils peuvent tout faire dans l’immédiat alors qu’ils ont très peu de réserves d’uranium et que le problème des déchets nucléaires n’est pas encore résolu !

21.10.2005 Relance du nucléaire ?

La groupe français Areva a créé une société commune avec la compagnie d’électricité américaine Constellation dans le but explicite de construire aux USA quatre réacteurs nucléaire EPR. Depuis 1978, aucune tranche n’avait été commandé aux USA. En effet l’opinion publique avait été marquée par l’accident dans la centrale de Three Mile Island (Pennsylvanie) en mars 1979 et par la catastrophe de Tchernobyl en avril 1986. De toute façon le pays possède déjà un parc de 104 réacteur assurant 21 % de sa production électrique, mais G.Bush veut maintenant aller au-delà et plaide : « Plus d’énergie nucléaire rendra notre nation plus sûre et moins polluante. Il est temps pour ce pays de commencer à nouveau à construire des centrales nucléaires (discours du 22 juin 2005) ».

La Biosphère sait qu’il faut des centaines d’années de réajustements itératifs pour trouver un équilibre précaire dans un écosystème, pourtant les humains croient qu’ils peuvent tout faire dans l’immédiat alors qu’ils ont très peu de réserves d’uranium et que le problème des déchets nucléaires n’est pas encore résolu !

4.11.2005 Des plantes indociles

Le colza est un hybride naturel de la navette (Brassica rapa) et du chou (Brassica oleracea) et dans cette lignée, il est donc susceptible de se croiser avec nombre de ses cousins, crucifères ou brassicacées. Des variétés transgéniques de colza qui tolèrent les insecticides pourraient donc donner cette caractéristique à de « mauvaises » herbes au détriment des cultures humaines. Une étude anglaise(Farm scale evaluation) a d’ailleurs démontré que ce n’était pas une simple hypothèse, même si les rares hybrides observés perdaient cette résistances au fil des générations. L’étude insiste cependant sur un autre inconvénient du colza : sur chaque mètre carré cultivé, de 1000 à 6000 graines tombent sur le sol et les repousses sont extrêmement fréquentes, d’autant plus que les graines peuvent demeurer en terre de cinq à dix ans avant de germer.

Quand la rotation des cultures est perturbée par l’exubérance des plantes, quand les humains continuent de disséminer leurs chimères génétiques, la Biosphère prévoit quelques catastrophes agricoles à venir.

16.11.2005 Pédagogie de la catastrophe

Le progrès technique n’est plus un choix de la conscience, mais une drogue à laquelle vous êtes tous accoutumés et à laquelle il est presque impossible de renoncer volontairement : même le militant écologiste au sortir d’une réunion pour sauver la planète retourne le plus souvent chez lui en voiture et non à pied, tourne le commutateur plutôt que d’allumer la chandelle, prend une bière au frigidaire plutôt que d’aller tirer l’eau du puits et regarde la télévision en continuant de pester contre l’abêtissement de la société du spectacle. Seul un échec historique de la civilisation fondée sur l’utilitarisme et le progrès pourrait faire découvrir que le bonheur n’est pas de vivre en grand, mais de vivre bien. Seule une catastrophe du type pétroapocalypse pourra dessiller les yeux de tous ces adeptes plus ou moins fascinés par la technique.

La Biosphère attend, elle est patiente, très patiente, elle existe depuis 3,5 milliards d’années, les homo sapiens depuis 150 000 ans environ, la révolution industrielle depuis 200 ans seulement !

23.11.2005 Dynamique de la crise

Que ce soit au Canada, en Europe ou ailleurs, chaque pêcheur est aujourd’hui individuellement conscient que leur catégorie professionnelle va collectivement à la catastrophe. Mais chaque pêcheur sait également qu’en situation de rareté générale, le poisson qu’il ne prend pas immédiatement sera pris par un autre. Il est donc condamné à pêcher tout ce qu’il peut dans un minimum de temps tout en sachant pertinemment que cela aggrave le processus de catastrophe collective. Alors les Etats côtiers veulent étendre encore plus loin vers le large leur juridiction, mais cela ne suffit pas et ils doivent instaurer des quotas de pêche, puis subventionner une partie de leurs pêcheurs pour les empêcher de pêcher, enfin interdire un jour ou l’autre la pêche à la morue et aux anchois…

Il y a bien longtemps que les humains auraient du comprendre que l’ami des pêcheurs et l’ami des poissons fréquentent le même océan et que l’essentiel n’est jamais la dynamique de la croissance, mais la gestion collective de la stabilité.

29.11.2005 Divergences de PDG

L’environnement n’est pas un sujet de prédilection pour les dirigeants de grandes entreprises, c’est ce que démontre une étude française. S’ils admettent facilement leur ignorance de ces questions, le sujet provoque visiblement chez eux un certain malaise. Pourtant les qualificatifs qu’ils utilisent pour parler de la crise écologique sont éloquents : majeur, extrêmement important, sérieux, question fondamentale, ou même catastrophe. Mais le naturel revient rapidement : « Il n’y a pas lieu de s’inquiéter. La forêt, il y a un bon reboisement. On utilise le plus correctement ce que la planète a à nous offrir. L’eau est beaucoup moins polluée qu’il y a dix ans. L’air aussi, il y a des mesures qui sont prises ». Ils estiment aussi que le problème écologique, c’est avant tout un problème de surpopulation, mais aucun n’identifie le contrôle des naissances comme solution au problème de l’environnement. Les dirigeants, qu’ils soient d’ailleurs chefs d’entreprises ou responsables de partis, continuent à appréhender la tension économie/environnement du point de vue du profit et de l’emploi plutôt que du point de vue de l’environnement et de la démographie.

Pourtant, même si la population occidentale se stabilise, son empreinte écologique est tellement importante qu’il faudrait diviser ces populations par trois ou quatre pour maintenir un niveau de pression acceptable sur les écosystèmes « toutes choses égales par ailleurs », c’est-à-dire en maintenant le reste du monde dans la pauvreté. La Biosphère hurle alors : riches et pauvres, faites moins d’enfants !

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24 janvier 2025, Les villes soumises aux catastrophes

2 réflexions sur “La catastrophe décrite en 2005 par notre blog”

  1. Désolé encore une fois, mais je ne vois pas ce que le pape vient faire là. Sauf bien sûr si ON pense que le pape est une catastrophe. Maintenant si je me mets à la place de cette pauvre Biosphère, je comprends de suite que tous les jours je devrais faire la une de toutes les gazettes. Du matin au soir les niouzes ne devraient parler que de Moi. Et du soir au matin, dans les bars, les gens ne papoter que de Moi. Mais si je me mets à la place du pape, comme de Trump, Manu et Jean Passe, eh ben c’est pareil. C’est marrant ce besoin de se prendre pour le centre et le nombril du monde.
    La Biosphère va mal, certes. Qu’elle se rassure elle n’est pas la seule. En attendant la Terre continue de tourner. Et les gens continuent de ramer, pédaler, biner, creuser, rire, pleurer, aimer, se battre, etc. Bref de vivre. Comme des porcs ou comme ils peuvent, peu importe. (à suivre)

    1. (suite et fin) Que serait le monde si tout le monde passait sa vie à se lamenter, pleurnicher, ressasser en boucle la même chose à longueur de temps ?
      Pour moi il serait terriblement triste. Et même insupportable, ingérable, invivable et tout ce qu’ON voudra. Ne resterait plus alors qu’à aller se pendre, ou se jeter d’une falaise peu importe. Pour le plus grand intérêt de la Biosphère, qui ne va vraiment pas bien, c’est sûr.
      Des catastrophes ce n’est pas ça qui manque hélas. Pensons seulement à Gaza, et aux misérables qui jubilent en voyant ça à la Télé.

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