L’agriculture paysanne, basée sur l’énergie solaire par assimilation chlorophyllienne, donnait en énergie plus qu’elle ne coûtait. Il n’en est pas de même pour l’agro-industrie. Alors que les rendements à l’hectare ont constamment augmenté, on constate que l’agriculture affiche un bilan énergétique négatif : elle consomme désormais beaucoup plus d’énergie fossile non renouvelable qu’elle ne crée de calories. Si on intègre la transformation agro-alimentaire et le transport des produits agricoles, le bilan est encore plus négatif. En fait, si on supprimait les subventions au gazole non routier pour les tracteurs, la presque totalité des techno-agriculteurs feraient faillite.
Mathilde Gérard : Le secteur agricole représente au moins 15 % de la demande mondiale en énergies fossiles et 40 % de la consommation de produits issus de la pétrochimie, notamment sous forme d’engrais de synthèse et d’emballages en plastique. Aucun objectif de neutralité carbone ne sera tenable si cette dépendance n’est pas réduite. L’alimentation reste un des relais de croissance pour les énergies fossiles. L’essor des aliments ultratransformés nourrit cette dépendance. Mais l’instabilité géopolitique mondiale entraîne déjà une montée des prix de l’énergie, qui pourrait se répercuter sur les cours des denrées alimentaires. Pour les 2,8 milliards de personnes qui n’ont pas les capacités de se payer une alimentation adéquate, les conséquences seraient dramatiques.
Si l’on arrêtait de subventionner les combustibles fossiles injectés dans les systèmes alimentaires, soit 2 500 milliards de dollars par an, cela laisserait beaucoup d’argent pour reconstruire un système plus résilient.
Le point de vue des écologistes paysans
– Selon Vaclav Smil, chercheur dans le domaine de l’énergie, 20 % de tous les êtres humains, soit plus de trois milliards de personnes, survivent grâce aux engrais azotés, le principal ingrédient de la Révolution verte qui a boosté le secteur agricole dans les années 1960.
– L’agrocarburant peut émettre plus de CO₂ que le pétrole si on remplace la forêt pour y pourvoir .
– Une exploitation céréalière des plaines d Argentine, pour être autonome en énergie, doit consacrer entre 20 à 30 % de sa surface à la production d agrocarburant type huile de colza.
– Si on doit revenir à la traction animale pour les travaux des champs, il faut savoir qu’il y a un siècle la nourriture des animaux consommait 25% des céréales produites.
– Quand on regarde les surfaces consacrées à la production pour la consommation de viande, on est déjà à ce chiffre de 25 %.
– Produire avec la traction animale nourrie sur place ne produit que très peu de CO2 contrairement à l’importation d’urée, d’engrais, de pesticides.
– Seule l’agriculture bio émet beaucoup moins de carbone car les engrais, l’urée etc.. peuvent être produits sur place en mêlant élevage et culture.
– Cultiver des plantes pour les réservoirs plutôt que pour les assiettes aggrave la crise alimentaire mondiale.
– ne pas mourir de faim dépend de l’équilibre (ou non) entre la production agricole et le nombre de bouches à nourrir.
Pour en savoir plus grâce à notre blog biosphere
Les illusions de la productivité agricole
extraits : Pour calculer un indice statistique globalisé du rendement, il faut faire le rapport production/intrants : combien de calories ont été utilisées pour produire, combien de calories délivrent les champs cultivés. L’agriculture est normalement une illustration parfaite de l’échange constant entre matière et énergie. Basée sur l’assimilation chlorophyllienne, elle devrait donner plus qu’elle ne coûte puisqu’elle transforme l’énergie du soleil et les éléments de la terre. C’est ce qui a été fait pendant plusieurs millénaires, ce n’est plus le cas aujourd’hui de l’agriculture productiviste qui doit investir sous forme d’hydrocarbures deux fois plus d’énergie que ce qu’on récolte. Plus globalement, on peut montrer que l’énergie consommée par l’ensemble de la chaîne alimentaire, compte tenu du processus de transformation et de la distance parcourue par les produits agricoles, représente 10 fois l’énergie restituée sous forme de calories utilisées pour l’alimentation humaine. Et encore, nous n’avons pas développé sur la détérioration par l’agriculture productiviste des sols et du climat…
Ehrlich, Borlaug, démographie et semences
extraits : Norman Ernest Borlaug, initiateur de la révolution verte, lançait cet avertissement lors de son discours de réception du prix Nobel de la paix en 1970 :
« Nous sommes face à deux forces contraires, le pouvoir scientifique de la production alimentaire et le pouvoir biologique de la reproduction humaine. L’homme a fait des progrès fantastiques, depuis quelques temps, pour ce qui est de maîtriser potentiellement ces deux puissance opposées. La science, l’esprit d’innovation, la technologie lui ont livré des matériaux et des méthodes qui permettent d’augmenter de façon substantielle et parfois spectaculaires, les réserves alimentaires. L’homme a acquis les moyens de réduire avec efficacité et humanisme le rythme de la reproduction humaine. Il utilise ses pouvoirs pour augmenter le rythme et l’ampleur de la production alimentaire. Mais il n’exploite pas encore de façon adéquate son potentiel pour limiter la reproduction humaine… Il n’y aura pas de progrès durable, dans la guerre contre la faim, tant que les gens qui luttent pour augmenter la production alimentaire et ceux qui luttent pour contrôler la fécondité humaine n’auront pas uni leurs forces. »…
Oui, mais on a du mal à en prendre conscience tant les rayons de nos supermarchés débordent de nourriture.
Bof… Non, je dirais plutôt que tout le monde le sait.
Quoi donc ? Eh ben que l’alimentation est très dépendante des énergies fossiles !
Comme le sont les transports, le logement, le bâtiment, l’industrie, le tourisme, les distractions, les futilités, les gaspillages etc. etc. Sans oublier la Croissance, l’Emploi, les innovations, l’eau au robinet et la santé. Tout quoi.
Bref, rien de nouveau sous le soleil.
Savoir une chose et en avoir conscience profondément sont une chose différente, les rayons pleins nous font oublier ce que nous savons bien.
Mes grands-parents n’utilisaient ni tracteur, ni engrais, ni pesticide, mais n’avaient ni voiture, ni téléphone, ni vêtements Shein ! Qu’en penses la génération Z ?
Les aliments ultra-transformés dans les régimes alimentaires sont liés au mode citadin avec des personnes qui préfèrent regarder TikTok plutôt que cuisiner ou aller au Food-Truck plutôt que de préparer sa gamelle … c’est un choix de vie !
Les miens non plus, n’avaient ni tracteur, ni voiture, ni téléphone, ni vêtements Shein !
C’était une autre époque. S’ils étaient nés un siècle plus tôt, nos jeunes Z auraient vécu comme nos grand-parents. Et probablement pensé pareil. En 14 eux aussi seraient partis en chantant, la fleur au fusil. Qu’ils soient des villes ou des champs peu importe, certains auraient toutefois compris que ce sont les gros qui font la pluie et le beau temps. Aujourd’hui plus que jamais ce sont eux qui nous dictent nos goûts, qui font leur lois, etc. Finalement de ce côté là rien n’a changé. Mais aujourd’hui, la génération Z accepterait-elle, comme il y a un siècle… d’être envoyée au casse-pipe ?