Le blé, c’est bien plus complexe qu’un homo sapiens

Parmi l’ensemble du monde vivant, le Blé possède un des génomes les plus complexes, environ 17 Gpb (giga paires de bases, soit 17 milliard). C’est 5 à 6 fois la taille du génome humain. De son côté l’amphibien mexicain Axolotl, une espèce de salamandre, possède un génome dix fois plus gros que celui des humains. Végétaux et animaux, homo sapiens compris, ont la même origine, des acides aminés qui se sont complexifiés et répliqués grâce à leur ADN. Mais notre nombre démesuré et nos capacités technologiques démentielles nous ont fait oublier nos origines : sur la biomasse terrestre, seuls quelques pour-cents sont des animaux sauvages, environ un quart sont des humains et tout le reste, environ les trois quarts, sont des animaux vivants destinés à l’élevage.

Pour Frans de Waal*, il existe beaucoup plus de similitudes que de différences entre les humains et les animaux. Le nier pose des problèmes : « J’ai baptisé ce déni « anthropodéni ». Il nous empêche d’apprécier objectivement qui nous sommes en tant qu’espèce. Je crains que le fait de considérer notre espèce comme tellement extraordinaire ne soit la cause fondamentale des problèmes écologiques que nous connaissons actuellement. Nous pensons à l’humanité comme si elle était séparée de la nature et seule dans le cosmos. Pourtant, nous sommes une partie intégrante de la nature, et nous ne pouvons pas continuer à piller la Terre. Nous sommes aussi dépendants de cette planète que toutes les autres créatures. Quand on voit à quel point les animaux agissent comme nous, ont les mêmes réactions physiologiques, les mêmes expressions faciales et possèdent le même type de cerveau, n’est-ce pas étrange de penser que leurs expériences intérieures sont radicalement différentes des nôtres ? »

L’animalisme n’est pas un anti-humanisme, c’est simplement un constat de réalité biologique. L’intelligence des plantes ou la sensibilité des animaux font actuellement le présentoir des librairies. La science a depuis longtemps démontré que les plantes sont des êtres conscients d’eux-mêmes, doués de mémoire, capables de communiquer entre elles et avec d’autres formes de vie. Les réflexions éthiques ont contribué à reconnaître les animaux comme des êtres doués de sensibilité, voire comme des sujets ayant des droits. L’animal a des intérêts liés à ses besoins de base et des préférences individuelles. Le risque aujourd’hui, c’est que nous basculions dans un monde purement utilitaire, où la nature et les animaux sont vus comme de simples ressources. La question animale nous force à critiquer un modèle de développement fondé sur l’exploitation sans limites des autres vivants. Un tel monde conduit à la marchandisation de tout, à l’exploitation de l’homme par l’homme, à la barbarie. Il faut mettre des limites à ce qu’il est décent ou pas de faire dans l’élevage ou dans l’exploitation des sols et sous-sols. L’animalisme est un autre humanisme, un humanisme de l’altérité.

* LE MONDE science du 30 janvier 2019, « Nous n’avons plus aucune excuse pour continuer à traiter les animaux comme nous le faisons »