Le Comité consultatif national d’éthique ne sert à rien

Qui a le droit de vivre et qui a le devoir de mourir ? Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a été créé en 1983 pour mieux baliser le terrain, il n’est pas décisionnaire. Sa synthèse publiée le 4 juin n’est pas non plus un sondage, elle ne reflète pas le sentiment général des Français. Le président du CCNE, Jean-François Delfraissy, observe que « des opinions divergentes se sont exprimées » sur l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes. Sur la fin de vie, il y a désaccord entre ceux qui veulent conserver la législation actuelle et ceux qui veulent aller plus loin. La ministre de la santé, Agnès Buzyn, a déjà dit que la question de la fin de vie ne figurerait pas dans la future loi de bioéthique. Par contre certaines valeurs sont très majoritairement partagées, en particulier l’attachement à l’autonomie des personnes et à la non-commercialisation du corps humain. Cette dernière a toujours existé fortement en France et cela continue, contrairement à d’autres régions du monde où elle est remise en cause. L’objectif était seulement de retranscrire de façon neutre ce que le CCNE avait entendu de la part de ceux qui ont participé aux états généraux. Sur certains sujets, des positions militantes se sont exprimées.*

De toute façon les avis sur les questions sociétales divergent autant entre les philosophes qu’entre les individus lambda. L’éthique c’est du toc quand il n’y a plus de références communes dans une société, ce qui est le cas aujourd’hui. Ni les religions, ni aucun autre texte plus ou moins sacralisés ne peuvent donner de lignes de conduite incontestables. Les procédures démocratiques, elles-mêmes contestables, définissent temporairement ce qui paraît le plus acceptable étant donné l’état présent de l’opinion publique. Le consensus durable est impossible car chacun aura ses raisons d’avoir raison contre tous les autres. Il faudrait donc prendre la question éthique autrement.

Où sont les limites, limite de l’intervention de l’État sur nos vies, limite de l’utilisation des techniques, limite aux intérêts économiques et financiers ? On ne pourra pas définir de limites dans le cadre de délibérations sociales glorifiant la toute-puissance de l’espèce humaine, de ses désirs, de ses fantasmes. Il faut donc faire appel à des contraintes externes, celles qui sont imposées par la nature. L’activisme humain perturbe toutes les lois de la nature, les cycles de l’eau, du carbone, du phosphore, et même celles de la naissance et de la mort. Donner la vie malgré sa stérilité n’est que l’aboutissement d’une civilisation techno-industrielle qui donne aux humains la possibilité d’échapper à l’équilibre naturel dynamique qui empêche une espèce de proliférer continuellement au détriment de son milieu. L’avenir n’est pas à obtenir un enfant à tout prix, mais à faire moins d’enfants. L’avenir n’est pas à vivre 1000 ans, mais à savoir reconnaître et accepter quand vient l’heure de notre mort. Nous devrions avoir la lucidité de pouvoir choisir les techniques qui nous mettent en conformité avec les lois de la nature. Si nous ne le faisons pas, la pénurie énergétique nous obligera de toute façon à aller vers une « éthique » plus proche de nos aptitudes physiques directes sans passer par les structures médicales, institutionnelles ou technologiques. Il y a des techniques dures comme le DPI (diagnostic préimplantatoire) et les mères porteuses. Il y a des techniques douces comme le préservatif ou le stérilet. Il y a des techniques dures comme les soins palliatifs reliés à des tuyaux. Il y a le droit de mourir dans la dignité, en toute simplicité.

* LE MONDE du 6 juin 2018, Comité d’éthique : « Il n’y a pas de consensus sur la procréation médicalement assistée »

1 réflexion sur “Le Comité consultatif national d’éthique ne sert à rien”

  1. Les lois de la nature ? Mais de quoi parle t-on ici ? Pas de la gravité, ni de l’entropie, mais de cette loi qui fait que la vie est une maladie mortelle sexuellement transmissible. Vaste sujet sur lequel, là non plus, nous ne serions pas fichus de trouver un consensus (à la c..). Et pour cause, je ne pense pas que les rats ou les p’tits zoziaux, et encore moins les robots, se posent ce genre de questions. Mais il se trouve que l’homme lui, il se les pose. Pourquoi, là n’est pas le sujet, il se les pose, ainsi soit-il ! Et qu’il en soit encore ainsi pendant des siècles et des siècles ! Tant que nous continuerons à réfléchir sur la vie, sur la mort, sur le sens de tout cela, nous pourrons dire que nous sommes encore humains. En tous cas, sacré phénomène que cet animal qui dit-on serait… dénaturé. Là aussi il y a débat.
    En attendant de savoir, certains spécimens rêvent de vivre mille ans pendant que d’autres nous racontent qu’il faut savoir accepter l’heure de sa mort. Les premiers n’ont pas peur de trouver le temps un peu long, les autres doivent évidemment refuser de se soigner lorsqu’ils sont malades, ils se doivent de laisser faire Dame Nature. Leur seul point commun, c’est que les uns et les autres n’ont pas peur du ridicule.

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