Le genre et le sexe, des différences aux inégalités

Le parti écolo EELV s’intéresse aux choses du sexe, il avait programmé lors de ses journées d’été à Marseille l’atelier « le genre pour les nuls ». Le titre était alléchant, nous y avons envoyé un correspondant. Première grosse surprise, nous nous attendions à un public d’homos, de trans et de bi. Que nenni, était venu le tout-venant des écolos. Deuxième surprise, nous n’avons pas du tout parlé de sexualité, mais des inégalités des rôles masculins et féminins dans une tradition toujours bien présente, même en France. L’intervenante, Céline Petrovic est la délégué thématique « genre, sexe et société » d’EELV, mais aussi docteure en sciences de l’éducation. Nous avons donc eu un débat très interactif sur la sociologie du genre. Ce terme est défini comme un concept réaliste et pas du tout comme une « théorie » : c’est un système, une construction sociale qui résulte d’un apprentissage et non d’un déterminisme génétique, inné. Depuis des millénaires, on disait que la différence entre hommes et femmes étaient programmées par la nature. Il y a au contraire un processus observation par l’enfant, puis identification, intériorisation et enfin imitation. Catherine Vidal a par exemple démontré qu’il y avait déterminisme culturel. Or tout ce qui est construit rend possible la déconstruction. La hiérarchisation entre mâle et femelle humaine peut donc être contestée et modifiée.  Ce n’est pas parce qu’on est égalitariste qu’on prône l’identique. La notion de genre permet de se démarquer d’un certain féminisme « essentialiste » qui croit encore à un déterminisme biologique. C’est pourquoi il serait préférable d’avoir à EELV, plutôt qu’une commission féminisme et une autre LGBT (lesbienne, gay, trans et bi), une commission transversale « genre, sexe et société ».

Un article du MONDE* confirme les analyses de Céline Petrovic : « Le genre est un concept utilisé dans les sciences sociales. Il désigne tout ce qui, dans la construction de l’identité dite sexuelle et dans la formation de la division entre les sexes, relève de mécanismes d’ordre social et culturel. Ainsi les transsexuels peuvent-ils affirmer que leur identité de genre ne correspond pas à leur sexe. La notion de genre sert à dénaturaliser la division des rôles dans la société, au travail et au sein de la sphère domestique. Elle permet de montrer qu’elle n’est pas un fait de nature mais de culture. Faire le ménage ou élever des enfants sont des tâches sociales, qu’aucune programmation biologique n’assigne en propre aux femmes… L’objectif de programmes comme l’ABCD de l’égalité est de remettre en question les normes qui font que chaque sexe adopte, dès le plus jeune âge, un certain comportement. Par exemple, les filles, encouragées à jouer à des jeux plus doux, sont plus sages alors que chez les garçons, il est considéré comme normal qu’ils soient plus turbulents. Il ne s’agit pas pour autant de nier la différence des sexes. Ce serait confondre la déconstruction des inégalités avec celle des différences. L’objectif est d’ouvrir le champ des possibles aux deux sexes afin de leur donner les mêmes chances ultérieurement. Pas de les encourager à changer de sexe ou à « choisir » une orientation sexuelle. »

Il n’y a donc pas d’ordre « naturel » dans les inégalités selon le sexe. « On ne naît pas femme, on le devient », écrivait déjà Simone de Beauvoir en 1949. Il n’empêche que l’évolution des espèces a été favorisée par la différence mâle/femelle et que la procréation implique nécessairement le rapprochement des deux sexes. Il y a un ordonnancement culturel, mais il y a aussi les lois de la nature.

* LE MONDE du 15-16 septembre 2013, la théorie du genre, nouvel ennemi de l’ordre « naturel »