Le socialisme peut-il s’accaparer l’écologie ?

Première indication. Le Parti Socialiste n’a jamais été écolo. C’est un parti productiviste dont les fondamentaux économiques ressemblent à ceux de la droite : volonté de croissance du PIB, souci de compétitivité internationale, mépris des contraintes écologiques. En novembre 2008, le pôle écologique du PS avait présenté une motion d’orientation politique lors du Congrès de Reims : « pour un parti socialiste résolument écologique ». Il a obtenu un score ultra-minoritaire (1,59 % des voix) et complètement disparu depuis. C’était la croissance qui était déjà dans toutes les têtes à ce congrès. On connaît le sort donné dès le début de la présidentielle Hollande à Nicole Bricq : ministre socialiste de l’écologie, elle est débarquée à peine nommée (elle voulait modérer en Guyane les ardeurs extractivistes). Il en a été de même pour Delphine Batho, jetée parce qu’elle exigeait un budget normal pour l’écologie.

Deuxième indication. Un parti « social-écologiste » n’ a aucun avenir car l’écologie se situe au-delà du dualisme traditionnel, il ne se positionne « ni à droite ni à gauche ». A droite les conservateurs, au centre les réformiste et à gauche les révolutionnaires ? Cette simplification a du plomb dans l’aile. D’abord à cause de l’ambiguïté de ce qu’est la gauche, qui est un terme fourre-tout ; trotskysme, communisme, social-démocratie, social-libéralisme, autogestion, planification impérative, relance par l’offre ou relance par la demande, tout cela se dit à gauche. Et le productivisme comme le consumérisme sont à la fois ET de droite ET de gauche. La vérité, essentielle et compréhensible par tous et toutes, c’est que l’écologie politique veut rassembler tous les citoyens sans exception puisque par exemple le consumérisme ou la question nucléaire concernent l’ensemble des citoyens.

Patrick Vieu, ancien conseiller de François Hollande, croit encore au parti social-écologiste :  Le socialisme et l’écologie politique reposent sur des hypothèses fondamentalement divergentes. L’écologie politique s’inscrit d’abord en faux contre l’anthropocentrisme qui fait de l’homme le maître et possesseur d’une nature conçue comme une « ressource » utile. Elle récuse le modèle productiviste engendré par un capitalisme prédateur à l’origine des désastres écologiques actuels, et dénonce l’autonomie de la technique moderne qui, par un processus auto-entretenu, expose l’humanité au risque de sa propre destruction… Le socialisme tombe sous le coup de ces critiques, sa vision des rapports de l’homme à la nature ne le distingue guère de l’idéologie libérale. Comme le libéralisme, le socialisme a toujours lié l’idéal d’autonomie à celui de l’abondance matérielle. L’humanisme, qui constitue l’ADN du socialisme, exclut de reconnaître des droits à des entités non humaines. L’écologie est une réalité métapolitique qui sur-détermine les questions politique, économique et sociale. C’est ici que le socialisme doit opérer, au prix d’un travail théorique, sa mutation idéologique. S’il est vrai que sur une planète malade il n’y a ni droits humains ni justice sociale qui vaillent, que vaudrait une planète saine sans droits humains ni justice sociale ? C’est pour n’avoir jamais à répondre à cette question que le socialisme doit être l’écologie du XXIe siècle. »

Cette conclusion d’une argumentation bien construite est étonnante ! Les socialistes seraient donc les seuls à même de porter le projet écologiste faute de quoi il n’y aurait plus ni justice sociale ni droits humains ? En réalité, comme c’est très bien dit dans l’article, les socialistes et les écologistes ont des visions du monde très différentes, qui sont de fait en concurrence. Quand Ségolène Royal dégaine le concept d’écologie punitive ou quand Anne Hidalgo veut baisser les taxes sur l’essence, elles tuent dans l’œuf la fiscalité écologique. Avec les écologistes institutionnels, pas sûr qu’on arrive à bon port, mais avec les socialistes ce sera encore le doublement des salaires et l’écologie à la ramasse. L’illusion d’un conglomérat social-écologiste a déjà montré ses limites sous la houlette du tandem Hamon/Jadot en 2017 ! Verra-t-on la même figure de style avec le couple Jadot/Hidalgo à marier en 2022 ?

Pour en savoir encore plus avec notre blog biosphere :

30 mars 2021, En 2022, tous les partis seront verts !

27 mars 2017, un parti social-écologiste ou bien ni droite ni gauche ?

28 février 2017, EELV + PS, en marche vers un parti social-écologiste ?

30 mai 2015, Le PS peut-il devenir un vrai parti social-écologiste ?

9 mars 2011, PSE, Parti Socialiste Européen, Parti Social-Ecologiste ?

29 août 2010, PS, parti social-démocrate ou social-écologiste ?

11 réflexions sur “Le socialisme peut-il s’accaparer l’écologie ?”

  1. Didier BARTHES

    Compte tenu des résultats du socialisme dans l’Histoire, à titre personnel, je préférerais qu’on ne le laisse pas s’accaparer de l’écologie.

    1. Bien sûr, si vous ne regardez que les résultats négatifs du socialisme dans l’histoire, je comprends. Seulement le Socialisme ce n’est pas seulement ces régimes ou ces partis qui s’en sont revendiqués (ex. national-socialisme). Le Socialisme (ou Communisme) ce sont des idées. Ou alors une utopie, si vous préférez. Cette organisation idéale, ce monde idéal, reste à construire. Et vous pouvez l’appeler comme vous voulez, mais en tous cas pas Capitalisme (accumulation sans fin des richesses, du capital), ni libéralisme (la loi de la jungle, le renard dans le poulailler).

  2. Le socialisme peut-il s’accaparer l’écologie ?
    Pour répondre à cette question il faut connaître un tant soit peu l’histoire du socialisme. Marx et Engels sont incontournables, bien sûr ils ne sont pas les seuls. Mais il faut aussi se défaire des idées reçues. Seulement tout ça exige de se faire violence. Lire tout ça prend du temps, comprendre les idées c’est encore autre chose. Ce qui fait que nous avons tendance à ne retenir que ce qui va dans le sens qui nous intéresse. C’est le meilleur moyen d’être dans l’erreur et de s’y complaire. Heureusement nous avons des gens qui ont déjà fait ce travail d’analyse. L’erreur étant de prendre pour argent comptant les points de vue des uns et des autres, là encore nous devons les lire en faisant preuve d’esprit critique.
    «Socialisme et écologisme » (sur wikirouge.net) n’est pas sans intérêt, ça peut nous aider à voir les choses autrement. Pour finalement nous aider à répondre à cette question.

    1. Le socialisme est un capitalisme d’état, il ne diffère en rien du capitalisme privé sur le fait que ce soit une idéologie productiviste et croissantiste ! La seule différence entre capitalisme d’état par le socialisme et le capitalisme privé, c’est de désigner qui sont les propriétaires des moyens de production ! Mais dans les deux cas, c’est très productiviste et non écologique !

      1. – Le mot socialisme recouvre un ensemble très divers de courants de pensée et de mouvements politiques, dont le point commun est de rechercher une organisation sociale et économique plus juste.

        – Le capitalisme désigne un système économique et par extension l’organisation sociale induite par ce système. Il peut être défini par deux caractéristiques principales : la propriété privée des moyens de production ; une dynamique fondée sur l’accumulation du capital productif guidée par la recherche du profit.

        – En géométrie euclidienne, un cercle est une courbe plane fermée constituée des points situés à égale distance d’un point nommé centre.
        – En géométrie euclidienne, un carré est un quadrilatère convexe à quatre côtés de même longueur avec quatre angles droits.

  3. – « Les marxistes révolutionnaires que nous sommes […] avons une conception de l’histoire des sociétés humaines, y compris de leur impact sur leur environnement naturel, qui nous fait penser que le vrai problème est avant tout dans la nature des rapports économiques et sociaux qui régissent ces sociétés humaines, en particulier à l’époque du système capitaliste. Ces problèmes dits « écologiques », de rapports de l’homme avec l’ensemble de ce qui fait son milieu, ne sont pas plus « neutres » que les autres problèmes, pas plus indépendants de la structure de notre société. Car, comme l’écrivait déjà Friedrich Engels il y a un siècle, « qu’il s’agisse de la nature ou de la société, le mode de production actuel tient uniquement compte du résultat immédiat et manifeste », c’est-à-dire du profit capitaliste.

    1. [suite] Pour nous, c’est ce mode de production capitaliste qui est en cause y compris dans la façon de gérer, ou plutôt de dilapider, polluer, détériorer de façon peut-être irréversible – c’est vrai – le milieu dans lequel vivent les êtres humains.
      Cela nous différencie des courants et mouvements politiques se réclamant de l’écologie qui, s’ils accusent parfois et dans le meilleur des cas différents aspects du fonctionnement du système capitaliste, ne vont pas plus loin dans la recherche des responsabilités de fond.»
      ( lutte-ouvriere 13/12/1996 : Le communisme, l’écologie et les écologistes )

  4. – « L’écologie est à notre siècle ce que le socialisme fut au précédent: le mouvement de l’espoir et de l’émancipation politique pour une société et un monde meilleurs. En ce sens l’écologie n’est pas seulement l’héritière de la gauche, elle est son avenir. La vraie gauche dans notre pays, celle dont Hollande, Valls et tant d’autres hiérarques du PS annoncent ou voudraient provoquer la mort, cette gauche sincère qui n’a pas oublié que son adversaire est la finance sait aussi que l’écologie doit être au cœur de son projet politique. »
    ( huffingtonpost.fr 11/11/2016 : Si Jean Jaurès vivait aujourd’hui, il serait écologiste )

  5. Parti d'en rire

    – Première réponse, premier point de vue : Oui, bien sûr !
    Vu qu’elle se conjugue désormais à toutes les sauces, qu’elle est devenue une véritable marie-couche-toi-là, qu’elle se fait prendre à gauche, à droite, par devant, par derrière, par dessus, par dessous etc. n’importe qui et n’importe quoi peut s’accaparer l’écologie (politique).

    – Deuxième réponse, deuxième point de vue : Vous pouvez répéter la question ?
    Késako le socialisme ? De quoi parle-t-on ? De Hollande, de Valls, de Jaurès, de Marx, Engels, Trotski … faudrait savoir. Dis Papa, et Tonton il était quoi celui-là ? Trotskiste, socialiste, écologiste, de gauche, de droite, entre les deux etc. au-dessus peut-être ?

    1. – Autre réponse en accord avec les 2 autres : Cette question n’a aucun sens.
      D’abord parce que le Parti socialiste (PS) n’incarne pas l’idée du socialisme, surtout aujourd’hui. Ensuite parce que l’idée même de l’écologie, entendue comme idéologie, ne veut plus rien dire non plus. C’est l’époque qui veut ça (Confusion, nihilisme).
      Les idées ne font pas seulement l’Histoire, elles ont leur histoire. Elles naissent, se développent, se transforment, parfois ou souvent en quelque chose qui n’a plus rien à voir avec l’original. C’est ainsi que cette très vieille idée, celle de la nature, et en suivant celle de sa vénération, de sa protection, a très vite conquis tous les esprits, tous les partis. Pareil avec l’idée de Dieu, associé par certains à la Nature. Ou encore avec celle de la Liberté, l’Utopie etc.

      1. Après ce n‘est qu’une question de religions. On y croit parce qu’on a besoin d’y croire. Et/ou on n’y croit pas parce qu’on ne peut pas y croire.
        En attendant, pour moi une chose reste certaine. On ne pourra jamais dissocier le social de l’environnement.

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