Les pionniers d’un monde sans guerre

Dire la vérité sur les objecteurs de conscience

Longtemps poursuivis pour insoumission, désertion ou refus d’obéissance, les objecteurs sont des réfractaires au service armé pour raison de conscience. Albert Einstein voyait en eux « les pionniers d’un monde sans guerre » (Message envoyé aux participants du IIIe congrès de l’Internationale des résistants à la guerre (WRI) réunis à Lyon en 1931). Son message a été relayé par l’avocat Jean-Jacques de Felice.

Albert Einstein (citations à partir de « Comment je vois le monde », 1934)

– Sans désarmement, pas de paix durable.

– Nous aurons le destin que nous aurons mérité.

– Il est plus facile de désintégrer un atome qu’un préjugé.

– Le nationalisme est une maladie infantile. C’est la rougeole de l’humanité.

– L’effort d’unir sagesse et pouvoir aboutit rarement et seulement très brièvement.

– Une situation pacifique ne s’instaure que dans la compréhension et l’indulgence réciproques.

– Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal, mais par ceux qui les regardent sans rien faire.

– Pour être un membre irréprochable parmi une communauté de moutons, il faut avant toute chose être soi-même un mouton.

– On détermine la vraie valeur d’un homme, en notant, en premier lieu, à quel degré et dans quel sens il est arrivé à se libérer du Moi.

– J’ignore la nature des armes qu’on utilisera pour la prochaine guerre mondiale. Mais pour la quatrième, on se battra à coup de pierres.

– Peu d’êtres sont capables d’exprimer posément une opinion différente des préjugés de leur milieu. La plupart des êtres sont même incapables d’arriver à formuler de telles opinions.

– Je méprise profondément ceux qui aiment marcher en rangs sur une musique : ce ne peut être que par erreur qu’ils ont reçu un cerveau ; une moelle épinière leur suffirait amplement.

– Il ne convient pas que chaque contemporain se contente d’attendre et de critiquer. Il doit servir la cause aussi bien qu’il le peut. Le sort de l’humanité en général sera celui qu’elle méritera.

– L’État est créé pour les hommes et non l’inverse… L’État doit être notre serviteur, et nous n’avons pas à en être les esclaves. Cette loi fondamentale est bafouée par l’État quand il nous contraint par la force au service militaire et à la guerre.

– L’État exigeant de ses citoyens le service militaire, se voit obligé d’exalter en eux le sentiment nationaliste, base psychologique des conditionnements militaires. À côté de la religion, l’État doit glorifier dans ses écoles, aux yeux de sa jeunesse, son instrument de force brutale.

– Celui qui veut développer le sentiment international et combattre le chauvinisme national, doit donc combattre le service militaire obligatoire. Le service militaire obligatoire doit être combattu parce qu’il constitue le foyer principal d’un nationalisme morbide.

– La pire des institutions grégaires se prénomme l’armée. Je la hais. Si un homme peut éprouver quelque plaisir à défiler en rang aux sons d’une musique, je méprise cet homme. Il ne mérite pas un cerveau humain puisqu’une moelle épinière le satisfait. Nous devrions faire disparaître le plus rapidement possible ce cancer de la civilisation.

– Ma responsabilité dans la question de la bombe atomique se traduit par une seule intervention : j’ai écrit une lettre au Président Roosevelt. Le risque universel causé par la découverte de la bombe. Mais les savants allemands s’acharnaient sur le même problème et avaient toutes les chances de le résoudre. J’ai donc pris mes responsabilités.

– Je refuse de séjourner dans un pays où la liberté politique, la tolérance et l’égalité ne seront pas garanties par la loi. Je maintiendrai cette attitude aussi longtemps que nécessaire. Par liberté politique je comprends la liberté d’exprimer publiquement ou par écrit mon opinion politique et par tolérance, j’entends le respect de toute conviction individuelle.

– Je hais violemment l’héroïsme sur ordre, la violence gratuite et le nationalisme débile. La guerre est la chose la plus méprisable. Je préférerais me laisser assassiner plutôt que de participer à cette ignominie. Et pourtant, je crois profondément en l’humanité. Je sais que ce cancer aurait dû depuis longtemps être guéri. Mais le bon sens des hommes est systématiquement corrompu. Et les coupables se nomment : école, presse, monde des affaires, monde politique.

Jean-Jacques de Felice (1928-2008) est un avocat français, ancien vice-président de la Ligue des droits de l’homme de 1983 à 1996. Cet infatigable combattant des droits de l’homme fut lui aussi un objecteur de conscience. Il demanda à bénéficier du statut des objecteurs dès la promulgation de la loi du 21 décembre 1963. Il avait effectué son service militaire dans le nord de l’Allemagne en 1951-1952 ; alors sous-lieutenant de réserve, il fut l’un des 227 Français qui, après le service actif, furent légalement reconnus objecteurs. Il prit ainsi une part déterminante à la longue lutte qui permit d’obtenir d’abord une timide reconnaissance du droit à l’objection, puis son élargissement, pour finalement le faire considérer au niveau européen comme un droit essentiel de l’homme.

Jean-Jacques de Félice a été le principal avocat des objecteurs. Dès la guerre d’indépendance algérienne, surtout dans les décennies 1970 et 1980, et jusqu’à la fin de la conscription en 2001, il en a défendu des dizaines. Pratique résolue, déterminée, d’un avocat militant, bien sûr. Et surtout, en ce qui concerne les objecteurs, une inlassable volonté de dépassement du droit. Car l’objection est contestation permanente, ainsi que l’écrit Pierre Sablière en conclusion de sa thèse de droit public : « L’objection de conscience est par essence révolutionnaire et la révolution ne s’enferme pas dans un statut. Selon Jean-Jacques de Félice, « la loi c’est la règle du jeu, il n’y pas de démocratie sans loi. Mais il n’y a pas de loi réellement valable si elle n’obéit pas à des valeurs. Donc la démocratie, elle impose certaines lois, et la loi aussi est faite pour être critiquée et modifiée. Ce qui m’intéresse, c’est d’aller vers des modifications de la loi qui deviennent la règle du jeu de nos sociétés mais en obéissant à certaines valeurs. Il faut aborder librement les vraies questions – la défense militaire pour quoi, contre qui – avec quels moyens (arme nucléaire = prise d’otages = terrorisme d’État, armes chimiques, bactériologiques, économiques), l’idée de nation armée […]».

« Moi, ce qui m’animait le plus, c’était l’utopie à long terme, c’est-à-dire le dépassement du droit écrit-il dans un texte de juin 2006 intitulé précisément « Incontournable utopie » :

« Par réalisme, je crois à l’Utopie. Tout simplement parce qu’elle peut être la réalité de demain, si nous le voulons. Les exemples abondent : défaite de l’Apartheid en Afrique du Sud, suppression des tribunaux militaires, inscription d’un droit au logement dans nos textes, etc. Qui pourrait soutenir que ces luttes éminemment nécessaires n’étaient pas totalement utopiques, vouées à l’échec, combattues par une large majorité de l’opinion publique ? Elles ont cependant été suggérées et voulues souvent par quelques personnes seules, réalisées par celles et ceux qui se sont mobilisés, qui ont crié souvent dans le désert et ont fini par se faire entendre car, chacun le comprend au fil du temps, ils avaient raison. Il nous appartient de faire changer la loi, de lui donner un contenu plus humain et plus fraternel. Seuls les utopistes ont ce regard vers des lointains apparemment inaccessibles : ils cherchent souvent en tâtonnant mais tentent, avec raison, de réaliser ce qui a été justement rêvé !

NB : La loi du 28 octobre 1997 met en place la professionnalisation totale des armées françaises, avec la « suspension » du service militaire. Les derniers appelés sous les drapeaux sont libérés le 30 novembre 2001, les objecteurs en service civil en juillet 2002.

10 réflexions sur “Les pionniers d’un monde sans guerre”

  1. Didier BARTHES

    Plus les hommes sont serrés (et à 8 milliards ils le sont) plus les contraintes sont fortes et les conflits probables.
    La prochaine fin de la majorité de nos ressources d’énergies fossiles alors que nous en voulons de plus en plus rend quasi impossible la fin des conflits
    Ils existent depuis 30 000 ans, je n’imagine pas qu’ils cessent dans un monde toujours plus contraint.

    1. Si vous ne pouvez pas imaginer… alors ne cherchez pas plus loin, le Problème est là.
      – “ Seuls les utopistes ont ce regard vers des lointains apparemment inaccessibles  »
      (Jean-Jacques de Félice)

  2. Aujourd’hui c’est à une autre douloureuse question qu’ON se heurte… celle d’un monde sans guerre. D’un côté ceux qui en rêvent… parmi eux « les pionniers », les pacifistes et autres non-violents en tous genres… de l’autre ceux qui voient la guerre comme quelque chose de naturel, dans les gènes de l’Homme. Sans oublier ceux qui l’aiment, la guerre.
    Et là encore à quoi bon discuter, à quoi bon les oppositions frontales… si ce n’est pour déclencher une nouvelle guerre ?

    1. Des philosophes, des religieux et autres idéologues ont longtemps cherché la définition du BIEN !
      J’ai trouvé une définition très pertinente et objective du BIEN : Même s’il arrive parfois que les hommes puissent être altruistes, malgré tout chacun agit pour son BIEN avant tout !

      Bref, chacun se bat pour ce dont il croit et aspire ! Finalement chacun a sa propre définition du bien, ce qui est bien pour moi ne l’est pas forcément pour toi et réciproquement, ce qui est bien pour toi ne l’est pas forcément pour moi. Cependant il y a tout de même une constante commune entre tous les individus, on se privilégie soi-même avant tout, ensuite sa famille et ses amis, puis ses compatriotes. En tout cas, les notions d’intérêts et de plaisirs sont à coupler au bien, car ces biens selon ces notions qu’on va définir ce qui est bien pour soi !

      1. En l’occurrence puisque nous n’aspirons pas au même bien, il est évident qu’il y aura éternellement des conflits, ta vision du bien consiste à ce qu’il y ait toujours plus de migrants en France, et moi mon bien consiste à ce qu’il y en ait de moins en moins.

  3. « Les pionniers d’un monde sans guerre »

    Un monde sans guerre ça n’existera jamais ! C’est simple à comprendre, la jalousie fait partie de la nature humaine, la jalousie est une caractéristique de l’être humain qui est plus ou moins prononcée selon les individus. D’ailleurs, la guerre ne peut pas être abolie par les partis de gauche, puisque par définition la gauche cultive la jalousie parmi ses électeurs, la gauche excite la jalousie parmi ses électeurs ! D’ailleurs la gauche appelle ça la lutte des classes ! La gauche prononce même des contradictions, l’existence du racisme mais dit en parallèle que les races n’existent pas, or comment le racisme peut il exister si les races n’existent pas ? La gauche organise aussi la plupart des manifestations en France, manifestations qui se terminent en affrontement avec les Crs, et des blackblocs par exemple. Puis les gauchos idolâtrent Robespierre, qui instaura la terreur pendant la révolution française.

    1. Bref, les exemples ne manquent pas et la liste ci-dessus n’est pas exhaustive, mais je n’aurai jamais assez de place pour tout mentionner. En tout cas, les pionniers d’un monde sans guerre ne viendra jamais de la gauche, soyez en certains ! Les exemples en attestent déjà.

      De toute façon, toutes les espèces peuvent devenir agressives lorsque les ressources viennent à manquer ! Et avec les déplétions des énergies fossiles qui s’annoncent bientôt, autant dire qu’un monde sans guerre ne sera pas pour les 21 et le 22 èmes siècles ! Surtout qu’il existe une particularité humaine par rapport aux autres espèces, c’est le train de vie ! Chaque humain s’habitue à son train de vie, s’habitue aussi très facilement quand son train de vie augmente. Cependant il n’en est pas de même lorsque le train de vie baisse ! Les humains détestent voir leur train de vie baisser, et cette situation leur fait aussi augmenter leur agressivité, et vont tenter d’agir pour récupérer leur train de vie plus élevé !

      1. Futur panier à crabes géant

        Démonstration qui semble échapper à certains un peu rousseauistes bisounoursiens (homme naturellement bon mais corrompu par la société)
        Bien sûr que les diverses pénuries à venir le rendront féroce et brital

    2. Heureusement que tu parles un peu de la guerre, juste pour dire qu’un monde sans guerre ça n’existera jamais ! Tout le reste c’est surtout pour parler de tout autre chose que l’article à commenter.

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