misère contre pauvreté

Il y a la théorie libérale. Avec l’élection d’Alan Garcia en 2006, le pays semblait opter pour une rupture radicale avec le libéralisme ; il n’en est rien. Le parti au pouvoir, l’Alliance populaire révolutionnaire porte mal son titre. Le gouvernement préfère signer un traité de libre-échange avec les Etats-Unis et accorder des privilèges aux grandes entreprises minières que s’occuper du peuple. Pour Alan Garcia, lors de la grande grève de juillet 2007, « C’est le communisme qui est derrière ces actes de violence ». Le chef de l’Etat péruvien a même autorisé la mobilisation de l’armée aux côtés des forces de police. Tout cela place naturellement le Pérou sur le chemin d’un investment grade (notation du risque d’investissement) modéré, tant convoité par les économies émergentes. Il y a une forte croissance économique, 8 % en 2006 et 9,6 % entre mai 2007 et avril 2008. Si cette tendance se maintenait, cela devrait permettre de réduire le niveau actuel de pauvreté de 50 % à 40 % d’ici à la fin du mandat du gouvernement en place.

 

Mais il y a la triste réalité : la croissance économique libérale marche sur le champ des ruines sociales. Les syndicats et les fonctionnaires ont été mis au pas, maintenant c’est au tour des  agriculteurs. Le décret-loi 1015 affaiblit le principe de propriété collective (LeMonde du 10.07.2008). Pour faciliter l’investissement privé, une entreprise voulant acquérir des terres communales pourra le faire avec la majorité des voix des membres de la communauté et non plus les deux tiers. Comme on sait que l’argent fait tourner la tête, autant dire que l’identité culturelle des communautés vernaculaires ne restera bientôt qu’une expression vide de sens. Il parait que la propriété communale participe au « retard » économique du pays, on sait pertinemment que la propriété privée va entraîner les inégalités et la misère. Nous retrouvons en accéléré au Pérou le même mouvement que lors des enclosures (XVIe au XVIIIe siècle) en Angleterre. Le gouvernement péruvien fait baisser artificiellement le niveau de pauvreté (monétaire) en accroissant les profits du capitalisme mondial  sans se soucier de la destruction du lien social.

 Mais le lien marchand ne pourra jamais remplacer la chaleur de vivre des communautés traditionnelles…