NDDL, la violence symbolique de l’écologie politique

L’écologie politique ne peut que condamner fermement les jets de pierre et de cocktails Molotov contre les gendarmes agissant à Notre-Dame-Des-Landes. L’écologie politique veut agir autrement pour faire avancer la conscience collective de l’urgence écologique sans agresser physiquement les personnes. La réalité de la dévastation de la planète par les agissements humains est suffisamment établie pour que l’écologiste puisse expliquer à n’importe quelle personne la gravité de la situation ; tous les habitants sur terre ont vocation à devenir écologistes, notre avenir est commun. Il faut surtout essayer de convaincre. Même si certains de nos propositions font partie de l’écologie « punitive », la violence des idées n’est pas une véritable violence. Mais l’imaginaire croissanciste de la société actuelle rend nécessaire l’usage de moyens plus frappants que la simple discussion, l’élaboration de manifestes ou la mise en pratique d’une sobriété personnelle qui servirait d’exemple à suivre. C’est pourquoi la guérilla juridique menée à NDDL depuis des années était indispensable. Les associations de défense de environnement reconnues peuvent ester en justice contre les atteintes à la nature. Il faut mettre en œuvre l’article 2 de la Charte (constitutionnalisée) de l’environnement : « Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement. » L’autre leçon de NDDL, c’est l’invention de la ZAD (zone à défendre), l’occupation d’un site pendant des années pour empêcher la réalisation d’un grand projet inutile. S’interposer physiquement contre des « mal-faisants » est une autre caractéristique de l’action non-violente. Entrer dans une certaine illégalité à un moment donné peut être justifié par la légitimité des buts, Gandhi et Martin Luther King ont montré la voie.

Les militants écolos peuvent aller plus loin, porter atteinte aux biens du moment que cela présente une valeur symbolique compréhensible par tous ceux qui veulent réfléchir plus profondément. Les actions de Greenpeace d’intrusion dans une centrale nucléaire, les interpositions musclées de Sea Shepherd pour lutter contre les chasseurs de baleine, les détériorations des « casseurs de pub », les actions de sabotage contre la construction d’une ligne à grande vitesse… relèvent de cette modalité. Certains militants pourraient aller encore plus loin et se situer dans le cas limite de l’écoterrorisme. Au nom de la « contre-violence », Françoise d’Eaubonne avait participé à la lutte contre l’énergie nucléaire en commettant avec d’autres un attentat à l’explosif le 3 mai 1975 contre la centrale de Fessenheim, retardant de quelques mois son lancement.

La violence se compose de multiples facettes, comme la non-violence. L’écologie politique se refuse à toute violence contre les personnes car cela ne peut être accepté par une large partie des membres d’une société démocratique. Il a fallu plus de quarante années de terrorisme armé pour que le groupe séparatiste basque ETA se rende compte qu’une volonté d’autonomie territoriale ne vaut pas les 800 morts que cela a provoqués. N’oublions jamais que toute agression physique à court terme contribue à empêcher la réduction de la violence à long terme. Alors, quelle part de violence réside dans la non-violence ? Un discours non conventionnel peut déjà heurter profondément des personnes et être pensé comme une forme de violence. Pas grave, l’esprit humain est normalement ouvert à la reconsidération de ses préjugés. Par contre la non-violence active pourrait aller jusqu’à détruire des choses matérielles qui portent réellement atteinte au bien commun, à la biodiversité et/ou aux générations futures. Si les dirigeants de notre société n’étaient pas si inertes face aux ravages de la société thermo-industrielle, il serait agréable de s’en tenir à l’action de base, la libre discussion pour faire avancer l’intelligence collective face à l’urgence écologique. Mais ce n’est pas la montée rapide des périls qui doit nous inciter à vouloir mort d’humains car la fin est dans les moyens comme l’arbre dans la semence.

Analyse de Michel Sourrouille sur le blog JNE

6 réflexions sur “NDDL, la violence symbolique de l’écologie politique”

  1. Le 22 mai 2018, une cinquantaine d’opposants radicaux encagoulés se sont attaqués aux forces de l’ordre à proximité du lieu-dit La Lande de Rohanne, en leur jetant notamment des cocktails Molotov et des projectiles. Pour se dégager, les forces de l’ordre ont répliqué par des jets de grenade. C’est à ce moment-là qu’un homme de 30 ans a eu la main arrachée en ramassant une grenade offensive GLI-F4.
    Commentaire de Titus31 sur lemonde.fr : Évidemment c’est très regrettable pour le blessé. Mais enfin revenons au ba-ba : si je suis illegalement ici, que je me cagoule et que j’attaque les forces de l’ordre, je peux supposer qu’il peut m’arriver des ennuis.

  2. Comment pourrions nous ne pas être d’accord avec les fondements et les vertus de la non violence, le LARZAC a gagné en empruntant cette ligne. Mais lorsque l’on analyse le parcours d’une des figures incontournables de cette admirable lutte,salarié depuis de l’écologie,on constate que la non violence mène aussi à l’opposé des discours, des écrits.
    Alors violence, non violence, politique, toutes ces options ne nous mènent que dans des impasses, avec au final beaucoup de déception et le fardeau de la trahison si difficile à digérer.
    Alors arrêtez la télé et faites votre jardin, sinon votre conscience finira par se consumer

  3. Avant de condamner fermement la violence côté zadistes, tout écolo d’autant plus non-violent se devait de commencer par condamner tout aussi fermement la violence du gouvernement. Et en rajouter comme le fait marcel ne va certainement pas pas dans le bon sens, ça c’est juste le moins qu’on puisse dire.
    Nous sommes tombés dans un paradoxe, nous condamnons systématiquement les violences, du moins certaines, et nous nous accommodons des autres dont nous nous faisons en quelque sorte les complices. Si on est convaincu de la toxicité du Système, si on souhaite réellement en finir avec cet ordre établi, a fortiori si on veut changer le monde… nous devons tordre le cou à cette idée reçue selon laquelle seule la violence d’État serait légitime, autrement dit que seuls les plus forts auraient le monopole de la violence. Ceux qui s’en croient ne devraient pas oublier que depuis qu’on a inventé la poudre il n’y a plus d’hommes forts. Même si elles sont étroitement liées ne confondons pas non plus la haine et la violence. Quelle est la pire des deux ? Pour savoir, bien sûr il faut réfléchir… Quoiqu’il en soit la violence devrait toujours être un moyen de dernier recours.
    Maintenant, même si elle est préférence à la violence, il faut voir que la non-violence (active) a comme toute chose ses limites. Depuis le temps, nous voyons bien ce que donnent tous ces défilés gentiment organisés avec banderoles et flonflons, en général rien du tout. L’adversaire ne peut réellement prendre au sérieux les revendications de ces actions non-violentes que s’il sait que ces paisibles et festifs activistes peuvent parfois être violents. Et pour cela il faut malheureusement que de temps en temps ils en fassent la démonstration.
    Bref ce n’est pas blanc ou noir, et les zadistes récalcitrants ne sont certainement pas tous des « dégénérés d’extrême gauche seulement intéressés par la castagne » … et ils ne se foutent certainement pas tous du « combat environnemental » … au contraire, je pense même qu’ils s’en soucient beaucoup plus que tant d’autres qui font seulement semblant de se battre.

  4. Que l’ on veuille empêcher la construction d’ un aéroport parfaitement inutile et qui détruirait toute une flore et une faune riches , je le comprends et l’ approuve totalement mais que l’ on s’associe avec tous les dégénérés d’ extrême gauche , là je ne comprends plus . Ils se foutent du combat environnemental , seuls les intéressent la destruction de la société et la castagne avec les poulets.

  5. « N’oublions jamais que toute agression physique à court terme contribue à empêcher la réduction de la violence à long terme. » Oui, c’est vrai, tout autant que le célèbre lieu commun : « la violence engendre la violence ».
    Rien que là, puisque sur le long terme elles s’avèrent toujours contre-productives, à quoi servent alors toutes ces matraques, toutes ces armes ? Sauf que ce n’est peut-êtres si évident que ça, et qu’en même temps, nous ne sommes jamais à une contradiction près. Comme si nous ne savions pas que la violence avait plusieurs visages, que la pire était probablement la plus hypocrite, la plus sournoise, celle qui se cache derrière la loi et les institutions, autrement dit la violence du Système.

    Ceci dit et pour ne rester que sur NDDL, qu’est-ce donc qui a provoqué la colère et la violence de ces zadistes … bien pépères jusque là ? Mais quelle est donc cette mouche qui les a piqué ? Petite analyse, à tête reposée.
    Même vu avec des lunettes de zadistes on pourra reconnaître que les pelles mécaniques qui ont délicatement démonté leurs habitats précaires ont toujours fait en sorte de ne blesser personne, que les grenades gentiment envoyées par leurs assaillants n’étaient même pas quadrillées, bref que tout ça était gentil.
    On pourra même penser que tout ça c’était juste pour rire, que tout ce bruit et toute cette fumée ne visaient qu’à enfumer le gogo qui regarde TF1, lui faire croire qu’il vit toujours dans un État de droit et qu’il peut dormir tranquille. Ça aussi c’est un point de vue qui peut se défendre.
    On pourra même soutenir que les forces de l’ordre envoyées par le gouvernement Macron-Hulot n’ont jamais usé de la violence, on pourra même penser qu’elles ont usé (et abusé) de la non-violence active.
    Voilà ce qui arrive quand on ne sait plus ce que « se battre » veut dire.

  6. « N’oublions jamais que toute agression physique à court terme contribue à empêcher la réduction de la violence à long terme. » Oui, c’est vrai, tout autant que le célèbre lieu commun : « la violence engendre la violence ».
    Rien que là, puisque sur le long terme elles s’avèrent toujours contre-productives, à quoi servent alors toutes ces matraques, toutes ces armes ? Sauf que ce n’est peut-êtres si évident que ça, et qu’en même temps, nous ne sommes jamais à une contradiction près. Comme si nous ne savions pas que la violence avait plusieurs visages, que la pire était probablement la plus hypocrite, la plus sournoise, celle qui se cache derrière la loi et les institutions, autrement dit la violence du Système.

    Ceci dit et pour ne rester que sur NDDL, qu’est-ce donc qui a provoqué la colère et la violence de ces zadistes … bien pépères jusque là ? Mais quelle est donc cette mouche qui les a piqué ? Petite analyse, à tête reposée.
    Même vu avec des lunettes de zadistes on pourra reconnaître que les pelles mécaniques qui ont délicatement démonté leurs habitats précaires ont toujours fait en sorte de ne blesser personne, que les grenades gentiment envoyées par leurs assaillants n’étaient même pas quadrillées, bref que tout ça était gentil.
    On pourra même penser que tout ça c’était juste pour rire, que tout ce bruit et toute cette fumée ne visaient qu’à enfumer le gogo qui regarde TF1, lui faire croire qu’il vit toujours dans un État de droit et qu’il peut dormir tranquille. Ça aussi c’est un point de vue qui peut se défendre.
    On pourra même soutenir que les forces de l’ordre envoyées par le gouvernement Macron-Hulot n’ont jamais usé de la violence, on pourra même penser qu’elles ont usé (et abusé) de la non-violence active.
    Voilà ce qui arrive quand on ne sait plus ce que « se battre » veut dire.

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