pétrole offshore, ça commence à bien faire !

Le pic pétrolier est ce point de retournement à partir duquel la production de pétrole commence à baisser inéluctablement. Le géologue américain King Hubbert avait annoncé en 1956 que les Etats-Unis connaîtraient ce pic vers 1970. A l’époque la majorité des experts s’était montrée incrédule. Pourtant le pic de Hubbert a été atteint aux Etats-Unis entre 1971 et 1972. Cela a contribué à expliquer le choc pétrolier de 1973 puisque les pays de l’OPEP pouvaient dorénavant faire pression sur la première puissance mondiale. Un graphique (LeMonde du 16 avril 2008) nous indiquait que la production russe de pétrole avait atteint un sommet en 2007 et commençait à baisser en 2008. Un dirigeant du premier groupe pétrolier privé russe (Loukoil) confirmait que la Russie est dorénavant dans la même situation que le Mexique, l’Alaska et la mer du Nord, trois régions où la production d’or noir décroît fortement depuis des années en raison de l’épuisement des réserves.

Au niveau mondial, la production de pétrole conventionnel baisse depuis 2008 si on en croit un graphique discrètement mis en ligne par le département américain de l’énergie en avril 2009 (source : terraeco de décembre 2009). Le fait est que, en 2007, la production mondiale de pétrole conventionnel a diminué de 0,15 % par rapport à celle de 2006 après avoir augmenté de seulement 0,5 % l’année d’avant. Si on ajoute aux réserves les projets identifiés et les pétroles non conventionnels, le pic pétrolier aura quand même lieu en 2011. Selon d’autres sources (les spécialistes de l’ASPO, Association for the study of peak oil and gas), le pic de pétrole conventionnel fut atteint en 2005. Pour tous les liquides hydrocarbonés (le pétrole non conventionnel), ce fut en 2008. De plus l’énergie nette, celle qui est accessible à l’utilisateur final quand on a soustrait l’énergie utilisée lors de sa production est en diminution constante. Il y a un siècle, il fallait à peu près 1 baril de pétrole pour en mettre 100 dans le réservoir de votre voiture ; maintenant, il faut 1 baril pour en mettre 15 seulement.

L’après-pétrole a donc déjà commencé, mais tout est fait pour nous le cacher. Malgré la marée noire aux Etats-Unis, les pétroliers continueront l’exploitation offshore (titre du Monde du 5 mai 2010). La part du brut extrait en mer représente désormais près du tiers de la production mondiale. On veut chercher le pétrole à des profondeurs abyssales, à – 3000 mètres au Brésil. Pour faire face à l’inéluctable déplétion pétrolière, on va pomper jusqu’aux dernières gouttes ; les ingénieurs font preuve de prouesses techniques pour nous faire croire que la civilisation thermo-industrielle peut encore parier sur la croissance économique. Vanité, vanité, tout cela n’est que vanité face aux contraintes géologiques. L’administration Obama doit décréter d’urgence un moratoire sur l’offshore, l’humanité doit décréter une diminution concertée et drastique de la consommation de pétrole. Il n’y a pas que le réchauffement climatique qui nous menace, il y a aussi le pic énergétique mondial.

13 réflexions sur “pétrole offshore, ça commence à bien faire !”

  1. info du 12 mai 2010

    Depuis que Deepwater Horizon, la plate-forme louée par BP, a coulé le 22 avril, l’ambiance a changé dans le pays sur la question des forages. Au « drill, baby, drill » (« fore, bébé, fore ») des républicains répond désormais le « spill, baby, spill » des écologistes, une référence à la nappe qui se « répand » (« spill ») au large de la Louisiane et qui n’est toujours pas sous contrôle, trois semaines après l’accident.

  2. info du 12 mai 2010

    Depuis que Deepwater Horizon, la plate-forme louée par BP, a coulé le 22 avril, l’ambiance a changé dans le pays sur la question des forages. Au « drill, baby, drill » (« fore, bébé, fore ») des républicains répond désormais le « spill, baby, spill » des écologistes, une référence à la nappe qui se « répand » (« spill ») au large de la Louisiane et qui n’est toujours pas sous contrôle, trois semaines après l’accident.

  3. Bluzzlandguru : un dessin satirique US montrait ce que vous illustrez, un responsable disant « c’est sans danger ! » devant la marée noire ET devant les centrales nucléaires.
    Quand on voit que le chantier Bouygues a dû être fermé pour la première fois de toute l’histoire du nucléaire parce qu’ils n’étaient même pas foutus de couler une dalle de béton correctement et que la réponse du pouvoir est de supprimer ces vilains inspecteurs qui font rien qu’à empêcher le gentil privé d’émarger des bénéfices, ont peut se préparer à une bonne dose de Tchernobyls ou Three Miles Islands !

  4. @ Candide
    La demande de pétrole est en hausse constante, principalement à cause de la croissance des pays émergents. Par exemple la Chine a très peu de pétrole sur son sol et doit l’importer. Le pic pétrolier nous indique que l’offre en quantité va baisser pour des raisons géologiques (épuisement des champs pétroliers) et techniques (difficultés par exemple de l’offshore profond).

    Une offre en baisse confrontée à une demande non élastique car soutenue par une volonté croissanciste, cela va entraîner prochainement une très forte hausse des prix. Ce ne sera plus un choc pétrolier événementiel comme celui de 1973, causé pour des raison politiques (guerre du Kippour), mais un choc structurel, durable, causé par l’écart croissant entre offre et demande : la crise ultime.

  5. @ Candide
    La demande de pétrole est en hausse constante, principalement à cause de la croissance des pays émergents. Par exemple la Chine a très peu de pétrole sur son sol et doit l’importer. Le pic pétrolier nous indique que l’offre en quantité va baisser pour des raisons géologiques (épuisement des champs pétroliers) et techniques (difficultés par exemple de l’offshore profond).

    Une offre en baisse confrontée à une demande non élastique car soutenue par une volonté croissanciste, cela va entraîner prochainement une très forte hausse des prix. Ce ne sera plus un choc pétrolier événementiel comme celui de 1973, causé pour des raison politiques (guerre du Kippour), mais un choc structurel, durable, causé par l’écart croissant entre offre et demande : la crise ultime.

  6. Il n’y a aucune baisse de la demande. La demande est en constante hausse. La hausse est peut-etre moins importante mais elle reste une hausse ! C’est triste mais tout le monde s’en fout de « l’apres »… Il n’y pas « d’apres », ca n’a aucun sens ; il y a juste que je veux faire mes courses MAINTENANT, avoir des bananes MAINTENANT, des tomates MAINTENANT et meme un mixeur-multifonction pour 19,99 € MAXIMUM. Et tant pis si les bananes viennent du Costa Rica, que c’est pas la saison des tomates et que le mixeur est fait par des gosses. De toutes manieres, il doit bien rester assez de petrole pour que j’utilise mon 4×4 jusqu’a mes 80 balais !

  7. Il n’y a aucune baisse de la demande. La demande est en constante hausse. La hausse est peut-etre moins importante mais elle reste une hausse ! C’est triste mais tout le monde s’en fout de « l’apres »… Il n’y pas « d’apres », ca n’a aucun sens ; il y a juste que je veux faire mes courses MAINTENANT, avoir des bananes MAINTENANT, des tomates MAINTENANT et meme un mixeur-multifonction pour 19,99 € MAXIMUM. Et tant pis si les bananes viennent du Costa Rica, que c’est pas la saison des tomates et que le mixeur est fait par des gosses. De toutes manieres, il doit bien rester assez de petrole pour que j’utilise mon 4×4 jusqu’a mes 80 balais !

  8. La baisse de la production n’est-elle pas liée aussi à la baisse de la demande du fait de la crise économique mondiale d’une part, et, d’autre part, à la volonté de certains productions de réduire la production pour faire durer un peu plus longtemps la ressource (et donc en tirer des bénéfices) ?
    Merci de votre analyse.

  9. La baisse de la production n’est-elle pas liée aussi à la baisse de la demande du fait de la crise économique mondiale d’une part, et, d’autre part, à la volonté de certains productions de réduire la production pour faire durer un peu plus longtemps la ressource (et donc en tirer des bénéfices) ?
    Merci de votre analyse.

  10. buzzlandguru

    Oui, mais pourquoi la faute à Obama, le pauvre il n’y est pour rien ?

    Excellente article bien documenté, les pétroliers gèrent parfaitement bien leur boutique et le stock, la production baisse et les prix montent, c’est une « loi naturelle ».
    Et le prix deviendra si exorbitant qu’une nouvelle source d’énergie s’imposera, et son prix ne sera que légèrement inférieur à celui du pétrole, car pourquoi vendre moins cher ce que l’on peu vendre « plein pot ».

    C’est les lois du marché, et alors le marché vas dans le bon sens, mais je suis d’accord avec vous … trop tard, 20 ans plus tôt aurait tellement été meilleur pour tous … reste à souhaiter que nous allons éviter le piège des « nucléistes » et leur « attrape gogo ». Mais Obama n’y est pas pour grand chose.

    Vous avez aimé la dépense du pétrole -> vous allez adorer la dépendance de l’uranium et vos arrière, arrière, arrière petits enfants vous remercierons (?!)
    Et c’est là que l’on jugera Obama par sa gestion de la monté en puissance de l’industrie nucléaire, pas sur la fin de vie du pétrole. Même si les deux sont liés.

    Si sa réponse à un déficit globale d’énergie est la substitution du pétrole par le nucléaire et non [une réduction (par l’optimisation) de la consommation] + [énergie renouvelable => alors problème].

  11. buzzlandguru

    Oui, mais pourquoi la faute à Obama, le pauvre il n’y est pour rien ?

    Excellente article bien documenté, les pétroliers gèrent parfaitement bien leur boutique et le stock, la production baisse et les prix montent, c’est une « loi naturelle ».
    Et le prix deviendra si exorbitant qu’une nouvelle source d’énergie s’imposera, et son prix ne sera que légèrement inférieur à celui du pétrole, car pourquoi vendre moins cher ce que l’on peu vendre « plein pot ».

    C’est les lois du marché, et alors le marché vas dans le bon sens, mais je suis d’accord avec vous … trop tard, 20 ans plus tôt aurait tellement été meilleur pour tous … reste à souhaiter que nous allons éviter le piège des « nucléistes » et leur « attrape gogo ». Mais Obama n’y est pas pour grand chose.

    Vous avez aimé la dépense du pétrole -> vous allez adorer la dépendance de l’uranium et vos arrière, arrière, arrière petits enfants vous remercierons (?!)
    Et c’est là que l’on jugera Obama par sa gestion de la monté en puissance de l’industrie nucléaire, pas sur la fin de vie du pétrole. Même si les deux sont liés.

    Si sa réponse à un déficit globale d’énergie est la substitution du pétrole par le nucléaire et non [une réduction (par l’optimisation) de la consommation] + [énergie renouvelable => alors problème].

  12. De la part d’un correspondant
    Les professionnels du pétrole savent depuis longtemps et disent sans ambigüité que nous sommes au Peak Oil. Ils ont d’ores et déjà anticipé cette réduction et investi dans les énergies alternatives et autres technologies de remplacement, sans pour autant cesser de tenter d’exploiter les ressources existantes jusqu’à la dernière goutte vendable.

    Quant à la régulation de l’exploitation des ressources qu’il faut appeler de nos vœux, je crains que ce ne soit qu’un vœux pieux car je ne crois pas beaucoup en la sagesse humaine en cette matière. J’en veux pour preuve cette expérience vécue au Mexique sur une ressource encore plus fondamentale que l’énergie, à savoir l’eau. Je me souviens que toutes les simulations (modélisations numériques) montraient qu’une ville de un million d’habitant allait vers un assèchement de la ressource d’eau potable du fait d’un sur pompage par les irrigants périphériques. Cela n’a pas empêché les politiques, dûment avertis, de fermer les yeux et de promettre plus d’eau aux irrigants ! D’ailleurs ce type de situation se rencontre tous les jours en France.

    Penser réguler la ressource énergétique mondiale me semble une douce illusion. Ce n’est d’ailleurs probablement même pas dans la pensée d’Obama qui vit dans un pays où la seule régulation qui vaille est le marché ! Cet homme aura-t-il le courage de prendre ce dossier à bras le corps ? Je ne le pense pas quand je vois la façon dont il négocie avec les pétroliers dans l’affaire de la marée noire.

  13. De la part d’un correspondant
    Les professionnels du pétrole savent depuis longtemps et disent sans ambigüité que nous sommes au Peak Oil. Ils ont d’ores et déjà anticipé cette réduction et investi dans les énergies alternatives et autres technologies de remplacement, sans pour autant cesser de tenter d’exploiter les ressources existantes jusqu’à la dernière goutte vendable.

    Quant à la régulation de l’exploitation des ressources qu’il faut appeler de nos vœux, je crains que ce ne soit qu’un vœux pieux car je ne crois pas beaucoup en la sagesse humaine en cette matière. J’en veux pour preuve cette expérience vécue au Mexique sur une ressource encore plus fondamentale que l’énergie, à savoir l’eau. Je me souviens que toutes les simulations (modélisations numériques) montraient qu’une ville de un million d’habitant allait vers un assèchement de la ressource d’eau potable du fait d’un sur pompage par les irrigants périphériques. Cela n’a pas empêché les politiques, dûment avertis, de fermer les yeux et de promettre plus d’eau aux irrigants ! D’ailleurs ce type de situation se rencontre tous les jours en France.

    Penser réguler la ressource énergétique mondiale me semble une douce illusion. Ce n’est d’ailleurs probablement même pas dans la pensée d’Obama qui vit dans un pays où la seule régulation qui vaille est le marché ! Cet homme aura-t-il le courage de prendre ce dossier à bras le corps ? Je ne le pense pas quand je vois la façon dont il négocie avec les pétroliers dans l’affaire de la marée noire.

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