principe de précaution

Jean Yves Nau s’interroge dans Lemonde du 13.08.2008 sur la science quand elle est muette. Avec la problématique de l’effet à long terme des faibles doses (radiations nucléaires, ondes électromagnétiques, la taurine dans le Red Bull…), les enquêtes n’aboutissent pas à des conclusions unanimes, le doute s’installe. D’où la pertinence du principe de précaution que JY Nau traite avec condescendance « d’indéfinissable ». Voyons les choses de plus près.

J.Y.Nau n’a certainement pas eu le temps de lire la Charte de l’environnement constitutionalisée en France qui définit officiellement ce principe dans son article 5 : « Lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incertaine en l’état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d’attributions, à la mise en oeuvre de procédures d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ».

Beaucoup de spécialistes enfermés dans leur discipline ont jugé cet article dangereux. Avant même les débats parlementaires en France, l’Académie des sciences morales avait émis des réserves sérieuses : ce projet « aurait des conséquences scientifiques, industrielles et même politiques puisqu’il irait à l’encontre des principes qui fondent notre démocratie représentative ». Les Académies des sciences et de médecine craignaient que l’inscription de ce principe dans la Constitution n’ait des conséquences désastreuses », et le quotidien Le Monde traitait dans un éditorial le principe de précaution de principe de frilosité. De son côté, le Medef a réaffirmé sans surprise son opposition sous prétexte d’un effet dissuasif sur la recherche et l’innovation. Ce ne sont pas ceux qui parlent d’autorité qui ont raison.

 Avec le principe de précaution, il s’agit en effet d’aller bien au delà du cercle étroit des techno-scientifiques, il s’agit de remettre la recherche et son application au service de l’humanité et de la planète (l’environnement). Il ne faut pas seulement s’interroger sur le degré d’innocuité sanitaire d’une technique, il s’agit de savoir si la société qui en résulte est viable ou non, raisonnable ou non. L’énergie à domicile fait-elle la satisfaction intérieure ? L’utilisation du portable accroît-elle la joie de vivre ? Boire du Red Bull améliore-t-il la richesse de la vie communautaire ? Tous les gens éclairés savent que la réponse ne peut qu’être négative. En définitive la techno-science n’a pas augmenté le degré du bonheur dans nos sociétés programmées, tout au contraire a-t-on déjà mesuré « scientifiquement ».