Réparation des dommages écologiques et chaos législatif

L’article 4 de la Charte de l’environnement (2005) indique : « Toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement, dans les conditions définies par la loi. » Mais que dit la loi ? L’article 1382 du code civil est restrictif, “celui dont la faute cause un dommage à autrui est tenu de le réparer« . Nulle trace d’environnement en soi !

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Un nouvel article du code civil est donc en gestation : « toute personne qui cause un dommage grave et durable à l’environnement est tenue de le réparer. » Cette réparation « s’effectue prioritairement en nature », c’est-à-dire par une remise en état du milieu au frais de celui qui l’a dégradé. Ou, si une telle restauration est impossible, par « une compensation financière versée à l’Etat ou à un organisme désigné par lui et affectée (…) à la protection de l’environnement ».

LE MONDE* relate la lente élaboration de cet article. Après le naufrage de l’Erika en 1999, relâchant 20 000 tonnes de fioul lourd sur les côtes françaises, la Cour de cassation avait reconnu en 2012 le préjudice écologique. Le président du conseil général de Vendée dépose alors en mai 2012 une proposition de loi visant à inscrire le préjudice écologique et son indemnisation dans le code civil, afin de lui « donner un fondement juridique incontestable ». Elle sera votée par le Sénat, mais jamais inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée. Or le code de l’environnement reconnaît déjà la responsabilité environnementale depuis une loi de 2008, mais avec des modalités d’application restreintes. Un groupe de travail formule en septembre 2013 dix propositions, ce rapport Jégouzo reste lettre morte. En novembre 2015, la ministre de la justice Christiane Taubira reconnaît qu’elle ne parvient pas à inscrire le texte à l’ordre du jour du Parlement. Le gouvernement bloque toute écologie qu’il considère comme «punitive» pour les finances de l’Etat, et les lobbies industriels s’activent en coulisse pour éliminer tout risque juridique pour les entreprises. Le principe du pollueur-payeur reste un principe respectable du moment qu’il n’est pas respecté !

Encore une fois les considérations économiques l’emportent, la planète continue de se détériorer sous les assauts du court-termisme humain. Notre gouvernement dit «socialiste» n’a encore aucune conscience de l’urgence écologique.

* LE MONDE du 23 janiver 2016, Le Sénat sort le préjudice écologique des limbes