Rupture écologique par l’égalitarisme

La « transition » écologique est nécessaire et c’est la justice sociale qui la rendra possible. Aussi, tant que les injonctions à la sobriété collective voisineront avec le spectacle du luxe privatisé, la rupture écologique sera source de défiance. La grande bifurcation ne sera possible que si elle est juste ; plus elle sera juste, plus elle sera partagée ; plus elle sera partagée, plus elle sera profonde.

Eloi Laurent : « Il n’est pas inutile de « cibler » les comportements insoutenables (jets privés, voyages lointains à répétition, etc.). Si l’on retient les estimations les plus prudentes, les 10 % les plus fortunés seraient responsables de 40 % des émissions de gaz à effet de serre mondiales, tandis qu’un impôt qui porterait sur leur patrimoine pourrait rapporter en France 25 % des recettes nécessaires au financement des investissements de décarbonation de l’économie. Mais, surtout, une transition humaine est affaire de dynamique sociale, c’est-à-dire de réaction en chaîne enclenchée par un amorçage. Le sociologue américain Thorstein Veblen (1857-1929) a montré, au tournant du XXᵉ siècle, de quelle manière les comportements de consommation ostentatoire de la classe de loisir se répandent par capillarité dans l’ensemble de la société. Pour le dire autrement, il faut d’abord taxer les émissions de luxe avec recyclage social des recettes, plutôt que les émissions de survie sans compensation sociale des prélèvements, comme on l’a fait en 2018, avec pour conséquence la révolte des « gilets jaunes »…

Lire, Théorie de la classe de loisirs de Thorstein Veblen (1899)

Le deuxième nœud, le cœur même de la crise écologique, c’est l’obsession de la croissance. Les programmes de transition envisagés dans les cercles gouvernementaux font l’impasse sur le dépassement de la croissance économique comme horizon social, confondant efficacité et sobriété, misant sur un découplage infondé empiriquement et rabattant trop souvent le bien-être sur le pouvoir d’achat. C’est dans l’articulation entre transition juste et post-croissance que réside l’espoir de maîtriser nos crises écologiques. »

Le point de vue des écologistes partageurs

Antivirus : Attention ceci n’est pas un piège mais une vraie question. Quel est le pourcentage des Français qui n’est pas dans les 10 % les plus riches au niveau mondial ?

Toujours plus surpris : Effectivement les gilets jaunes sont des riches à l’échelle mondiale et devront aussi faire des efforts de sobriété en limitant les odeurs d’essences et de barbecues autour d’eux.

Klaatu Vanuatu : A vue de nez, 30% des Français font partie des plus riches du monde. Cela fait beaucoup de monde. La symbolique de l´effort à exiger des plus riches est certes importante, mais penser qu’eux seuls doivent faire des efforts pour avoir un effet est faux. C´est un vaste mensonge que de faire croire qu´on peut baisser les émissions sans effort de tous. De toute façon on aura quand même droit au réchauffement car les deux tiers de l´humanité s´en tapent car ils aspirent avant tout à un meilleur niveau de vie.

Jean-Charles : Sachant que les Français les plus pauvres sont plus riches que 85% de la population mondiale, il serait légitime qu’ils fassent aussi un effort. N’oublions pas qu’avec les seuls services publics, chaque Français consomme déjà 1,5 tonne de CO2, alors que la consommation globale d’un Français devrait être à 2 tonnes de CO2 pour limiter le réchauffement climatique.

Frog : Au passage, il m’a toujours semblé curieux que les riches et les puissants ne se sentent pas tels qu’ils sont, riches d’ostentation : ils pourraient miser sur leur intelligence, leur leadership, leur qualités humaines, mais non, ils ont besoin surtout de polluer. Cela met pas mal en doute la nature humaine. Bref, le riche de base donne le mauvais exemple alors qu’il lui serait pourtant si facile de se montrer intelligent, audacieux et exemplaire.

Thufyr : Totalement d’accord… l’intelligence et les qualités humaines des riches restent à démontrer. En général on ne fait pas fortune en étant généreux et en démontrant de l’empathie pour le vulgum pecus… Les hargneux contre les zécolos, auront trop chaud et soif comme les autres, sauf s’ils sont très riches… L’ostentation pourrait être taxée avec une TVA « luxe »…

Petit Pierre : C’est un leitmotiv que résoudre les inégalités sociales et financières sauvera la “planète”, ou plutôt notre existence future. Le problème c’est que l’histoire montre que les civilisations successives n’ont jamais réussi à atteindre cet objectif, et les tentatives autoritaires n’ont pas franchement réussis. Le problème est psychologique plus que socio-économique, il nous faut changer d’imaginaire et interdire ce qui nuit à notre prise de conscience. Il y a des actions simples dont personne ne parle pourtant, réduire drastiquement la publicité qui est à la fois un facteur de frustration et facteur de surconsommation. Arrêter les guerres, je sens des sarcasmes à venir… mais je vous le demande, est ce que notre civilisation humaine est capable de rupture écologique si elle est incapable de stopper les guerres ? Il faut rappeler que la constitution des stocks d’armes nucléaires s’est faite en sachant très bien le risque d’autodestruction… cela n’est pas très encourageant.

Michel SOURROUILLE : Depuis le rapport Meadows en 1972, nous savons qu’une croissance infinie dans un monde fini est impossible. Il n’y aura pas d’énergie de substitution aux énergies fossiles. Il faut donc penser l’avenir en termes de sobriété partagée. Penser et construire une société post-croissance égalitaire est indissociable du projet écologiste. La société babouvsite, pourquoi avons-nous cessé de la penser ? Voici quelques pistes de réflexion :

Ce que défend un parti politique traditionnel # Ce que pourrait proposer un parti écologiste digne de ce nom

Priorité à la croissance et risque de récession/dépression # Maîtrise de la décroissance

Acceptation des inégalités de revenus # Revenu maximum autorisé

Appropriation privée privilégiée # Gestion collective des biens communs
Civilisation minière, extractiviste
# Utilisation uniquement de ressources renouvelables
Règne de la concurrence et de la compétition
# Apprentissage de la coopération et du partage
Marchandisation des rapports sociaux, culte de l’avoir
# Valorisation des relations, des liens, de l’être
Mondialisation des échanges et libre-échange
# Démondialisation, relocalisation, monnaies locales
Soutien aux grandes entreprises
# Valorisation des artisans, paysans et PME
Option tout voiture (électrique)
# Dévoiturage et vélo…. etc.

Toujours plus surpris : Pour Darwin, les espèces qui survivent ne sont pas les plus fortes ou les plus intelligentes mais celles qui s’adaptent le mieux aux changements. A bon entendeur !

En savoir plus grâce à notre blog biosphere

Tout savoir sur la « Sobriété » obligée

La décroissance implique la sobriété partagée

Décroissance, sobriété, donc renoncements !

Sobriété mode d’emploi, le livre (Tana éditions)

Tout savoir sur la sobriété démographique

Sobriété énergétique, l’affolement gagne

La Sobriété face à la SURconsommation ?

La Sobriété, liberticide et punitive ????

Le gouvernement s’empare du mot « sobriété »

La sobriété à la mode gouvernementale

2123, Ministère de la Sobriété partagée

6 réflexions sur “Rupture écologique par l’égalitarisme”

  1. – « Tant que les injonctions à la sobriété collective voisineront avec le spectacle du luxe, la transition écologique sera source de défiance […] Pour le dire autrement, il faut d’abord taxer les émissions de luxe avec recyclage social des recettes, plutôt que les émissions de survie sans compensation sociale des prélèvements, comme on l’a fait en 2018, avec pour conséquence la révolte des « gilets jaunes »… » (Eloi Laurent)

    Pour moi c’est une évidence. La théorie de la classe de loisirs de Thorstein Veblen (1899) ne fait d’ailleurs que le confirmer. Et pourtant; que n’a t-ON pas dit, et même ici, au sujet de ces pauvres «gilets jaunes» ! Eh oui là encore le Spectacle ! Celui du luxe, celui de la vulgarité, celui de la Bêtise. Misère misère.

  2. « Jean-Charles : Sachant que les Français les plus pauvres sont plus riches que 85% de la population mondiale, il serait légitime qu’ils fassent aussi un effort »

    C’est une affirmation plus qu’exagérée tout de même ! Les 10% français parmi les plus pauvres de notre pays ne sont pas propriétaires le leur logement, sont souvent locataires d’une cage à lapin ou vivent dans un foyer ! OR, dans la plupart des pays du monde, même parmi les pays les plus pauvres, un part significative de leurs populations sont tout de même propriétaires de leur logement ! Bref, les français parmi les 10% les plus pauvres vivent aussi bien ou aussi mal que la plupart des pauvres dans le monde ! J’aimerai bien connaître les mode de calcul de notre Jean-Charles ? Jean Charles qui ne remet pas en question le train de vie des 10% des français les plus riches à noter au passage ! Est ce un UmPs bien embourgeoisé ?

    1. Antivirus pose une bonne question, à laquelle je suis infichu de répondre.
      Les pauvres, et les misérables, hélas ce n’est pas ça qui manque. Je pense même qu’en les comptant TOUS ils sont quelques 8 milliards sur cette Terre.
      Tant qu’ON ne prendra en compte que le Pognon et la taille des armoires (des avoirs) pour définir ce qu’est un pauvre et un riche, ON n’en sortira pas !
      En attendant, si ON raisonne (ou résonne) comme ça, Jean-Charles a raison.

    2. De toute façon, comme pour le reste, si les modes de calcul de notre Jean-Charles (sic) ne vont pas dans le sens de tes croyances tu n’en tiendras aucun compte. Et puis qu’est-ce qui te permet de dire qu’il ne remet pas en question le train de vie des 10% des français les plus riches ? Quoi qu’il en soit tu disposes de toutes les données.
      Juste quelques sources : Les 1 % les plus riches émettent plus que la moitié la plus pauvre de la population (lepoint.fr – 21/09/2020) – Combien gagnent les habitants de la planète ? (inegalites.fr – 30 AOÛT 2022) – Rapport sur les inégalités en France : fracture sociale, le retour (inegalites.fr – 8 JUIN 2023)
      Je pense qu’avec ça chacun peux déjà se situer, au niveau local (France) comme au niveau global (monde). En ce qui me concerne, je l’ai toujours dit, je suis un petit-bourgeois.
      ( à suivre )

      1. (suite) Le comble serait alors que je me prenne, en plus… pour un gentilhomme.
        – Le Petit-Bourgeois gentilhomme : sur les prétentions hégémoniques des classes moyennes (Alain Accardo – 1ère édition 2003)
        – Ce capitaliste qui vit en chacun de nous. Vie et mort du petit-bourgeois gentilhomme (monde-diplomatique.fr – janvier 2020 )

        Sans s’éterniser sur cette notion très relative au sujet de la pauvreté et de la richesse, on voit bien que cette comparaison entre les 10% de français les plus pauvres et le reste de la population mondiale a elle aussi ses limites.
        Le «Penser global, agir local» des décroissants invite à agir, d’ABORD, pour tenter d’en finir de ces inégalités, de cette indécence, de ce bling-bling, de ces comportements insoutenables (sic Eloi Laurent) que nous avons tous les jours sous les yeux.
        Ce qui serait déjà une bonne chose.

      2. N.B
        L’article précédemment cité “Ce capitaliste qui vit en chacun de nous. Vie et mort du petit-bourgeois gentilhomme“ (écrit par Alain Accardo en 2020) est retranscrit intégralement sur le site quieryavenir.fr

        Extrait : « Le spectre de l’écologie […] En d’autres termes, si on veut vraiment sauver les écosystèmes humains, il faut les sortir du capitalisme. Ou plutôt, il faut sortir le capitalisme du genre humain. Mais le système social capitaliste existe toujours et partout conjointement sous deux formes : l’une objectivée en structures, en institutions et en distributions extérieures, à combattre par toutes les voies traditionnelles de la lutte politique ; l’autre intériorisée et incorporée en un certain type de Sujet, qu’on peut personnifier sous les traits d’un « petit-bourgeois gentilhomme ». Et celui-ci s’est aussi enraciné, à des profondeurs variables, en chacun d’entre nous. »

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