Ségolène Royal, une ministre de l’écologie incompétente

La méthode pour réconcilier les Français avec l’écologie est facile, il suffit de faire plaisir. Lors de sa première conférence de presse* en tant que ministre de l’écologie, Ségolène Royal promis de créer 100 000 emplois en trois ans. Il suffirait d’appliquer la méthode Hollande, favoriser les entreprises :  « Il nous faut apporter la sérénité avec une fiscalité stabilisée. C’est comme cela que les PME et les PMI pourront se déployer…Il y a des entreprises qui font des profits, eh bien tant mieux. » Elle a condamné taxes et contraintes : « Si les gens font les choses par envie et par plaisir, cela marche. » La mutation énergétique ne devra pas coûter cher aux Français, le pouvoir d’achat sera préservé. Elle a donc évité tous les sujets qui fâchent, en particulier le diesel et le nucléaire. Et la hausse des factures d’électricité sera limitée. Mais parler d’écologie sans douleur et sans efforts est une tromperie manifeste. Un « désir d’écologie » se mérite, forcément. Face aux désastres environnementaux qui s’amplifient de jour en jour, un/e ministre de l’écologie devrait préparer un « état de guerre », Blood, Toil, Tears and Sweat comme le disait Churchill, sans verser de sang bien entendu.

                  Malheureusement une personne comme la Royal s’entoure de personnes qui pensent comme elle. Admirons la composition du cabinet ministériel de Ségolène en ignorant tous les pantins qu’elle a ramenés du Poitou-charentes. Une directrice du Cabinet, Elisabeth Borne, diplômée de l’Ecole polytechnique et de l’école nationale des Ponts et chaussée qui a travaillé au  groupe Eiffage, groupe européen du BTP : les Grands travaux inutiles sont encore devant nous. Son « Conseiller spécial » Jean-Louis Bianco était ministre de l’Équipement, du Transport et du Logement en 1992. A l’énergie, un Ingénieur général des ponts (et chaussées), à la biodiversité une Ingénieure générale des ponts (et chaussées), ce qui confirme notre sentiment, on n’est pas prêt de comprendre que « bâtir », c’est surtout détruire. Il y a bien sûr un Conseiller chargé de la « croissance verte », cet oxymore qui a remplacé de façon moins subtile l’oxymore « développement durable ». Une lueur d’espoir avec Adélaïde Colin, ex-directrice de la communication de Greenpeace, nommé Conseillère stratégie et communication de Ségolène… mais nous croyons que ce sera plutôt de l’écologie de la communication, par définition superficielle.

A peine nommée ministre, Ségolène Royal prônait une écologie « positive », ou plutôt le refus d’une « écologie punitive ». Pour l’intérêt de la biosphère et de nous tous, l’écologie n’est ni « positive » ou « punitive », elle se doit tout simplement d’être réaliste. Pour que tous les hommes aient le même pouvoir d’achat que les Français, il faudrait 3 planètes ; c’est ça la réalité écologique. Le dernier résumé à l’usage des décideurs du GIEC est clair : la stabilité et la sécurité dans le monde sont menacés à moyenne échéance. Dans ce contexte, la ministre de l’écologie va devoir préparer la prochaine conférence à Paris sur le réchauffement climatique. Il faudra que Ségolène explique qu’il faudra émettre moins d’émissions de gaz à effet de serre. Cela veut dire aussi instituer une taxe carbone sur tout ce qui nous permet aujourd’hui de gaspiller l’énergie fossile. Cela veut dire qu’il faudra beaucoup moins rouler en voiture individuelle, moins se chauffer, moins manger de viande, moins consommer, ne plus partir en vacances au loin, etc. Ségolène aura-t-elle le courage de sa fonction ? Ses débuts montrent le contraire. L’écologie des égoïstes à la mode Royal, c’est la catastrophe assurée.

* LE MONDE du 27-28 mai 2014, La méthode de Ségolène pour réconcilier les Français avec l’écologie

2 réflexions sur “Ségolène Royal, une ministre de l’écologie incompétente”

  1. Le fond de l’air de nos sociétés libérales est au comblement des désirs et à l’escamotage des difficultés. Ne rien voir, ne rien entendre, produire des droits, des concepts, des objets qui bouchent les manques, les peurs, les doutes…On voit là aussi, la faillite du politique et les limites de la démocratie au moins en matière de défense de la terre

  2. Développement durable et croissance verte sont grammaticalement des oxymores et politiquement des escroqueries.
    La messe est dite, puisqu’aucun responsable ne veut l’admettre, nous subirons donc le choc de l’effondrement. Il faudrait, il est vrai, à un responsable politique un courage énorme pour professer ce qu’écrivent de plus en plus de spécialistes de l’environnement. Nos personnages politiques sont-ils malhonnêtes ? Incompétents ? Peu courageux ? Il est difficile de juger, que ferions-nous ? Que pourrions-nous faire à leur place ?
    La nature se moquera bien des subtilités dans la définition des responsabilités morales. Elle nous dira que nous n’avons tout simplement pas su admettre l’impossibilité d’une croissance infinie dans un monde qui ne l’est pas. Elle nous dira aussi que nous avons eu tort de nous croire propriétaires de la Terre. Elle le dira dans ses mots à elles, des mots et des maux tellement forts qu’il faudra peut-être plusieurs centaines de milliers d’année à la surface de la Terre pour s’en remettre. Nous comprendrons alors, si nous sommes encore là, que le temps de la nature et le temps des hommes n’est pas le même, et qu’à la fin c’est toujours le premier qui l’emporte.

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