Enfin un point de vue de médecins qui va à l’essentiel sur l’aide à mourir et qui ne devrait pouvoir être remis en question par personne ayant une fibre démocratique. Regardez l’évolution sociétale, le droit de vote des femmes, l’accès à la contraception, à l’avortement, à la lutte contre la douleur, à l’obligation de consentement éclairé des patients, à l’interdiction de l’obstination déraisonnable. La liberté de choix est une référence de plus en plus vivante.
François Blot et Bernard Kouchner : « La loi fondatrice du 4 mars 2002* avait sanctuarisé les droits des patients : être informés loyalement, consentir de façon éclairée, pouvoir refuser. Plusieurs décennies de luttes pour la reconnaissance de l’autonomie, des valeurs et des préférences des patients, de leur libre arbitre, autorise aujourd’hui à inscrire l’ultime demande dans cette lignée. Une grande loi de liberté serait digne du pays qui a rédigé la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. La transgression est déjà largement pratiquée mais cachée sous le tapis : nous parlons de reconnaître un acte jusqu’alors arbitraire et clandestin. A nous, soignants, de rester à notre juste place, au service du patient et de ses proches. Aux médecins de sortir la tête de leur ligne de nage et ne plus faire uniquement ce pour quoi on les a élevés (le cancérologue, une chimiothérapie de plus ; le réanimateur, une ventilation artificielle qui dure ; le chirurgien, une énième intervention ; le médecin de soins palliatifs, l’accompagnement jusqu’au bout, et quoi qu’il en coûte, d’un patient qui demanderait qu’on le laisse tranquille).
La médecine accompagnera enfin une évolution de la société qu’elle a jusqu’alors surtout subie (vérité dite au malade, années 1950 ; pilule et avortement, années 1970 ; consentement aux soins, années 2000 ; sédation profonde et continue, années 2010…). Dispensons-nous des accusations d’intégrisme, ou à l’inverse d’individualisme, d’ultralibéralisme, d’utilitarisme, de validisme, d’économies sur le dos des vieux ! Demain, ce cadre légal garantira le respect de chacun (soignants opposés à l’aide à mourir, notamment) dans sa conscience et ses convictions. Mais, surtout, faisons que ce patient, ou bien plutôt cette femme ou cet homme, soit libre de décider sa fin et non le médecin à sa place. »
Quelques points de vue complémentaires
– Enfin des soignants qui affirment la nécessité pour les médecins de respecter l’opinion des patients.
– Le médecin doit être celui qui soulage la souffrance et non celui qui la prolonge.
– On pourrait aussi parler d’acharnement palliatif dans certains cas, non ?Pourquoi exclurent les troubles psychiatriques du champ d’application de la nouvelle loi ?
– j’ai 81 balais et je veux, si on me détecte une maladie dégénérative, pouvoir mourir entouré des miens.
– Rajouter de la vie aux jours et non l’inverse devrait être une évidence pour qui se soucie de l’Autre.
– Qu’est ce que « la liberté »? Vous avez toute votre vie pour en écrire la rédaction.
* Annexe documentaire sur la loi Kouchner
LOI n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades
Art. L. 1111-2. – Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus.
« Art. L. 1111-4. – Toute personne prend, avec le professionnel de santé et compte tenu des informations et des préconisations qu’il lui fournit, les décisions concernant sa santé.
Le médecin doit respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de ses choix. Si la volonté de la personne de refuser ou d’interrompre un traitement met sa vie en danger, le médecin doit tout mettre en oeuvre pour la convaincre d’accepter les soins indispensables.
« Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment.
« Lorsque la personne est hors d’état d’exprimer sa volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance prévue à l’article L. 1111-6, ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté.
« Le consentement du mineur ou du majeur sous tutelle doit être systématiquement recherché s’il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision.
« L’examen d’une personne malade dans le cadre d’un enseignement clinique requiert son consentement préalable.
« Art. L. 1111-6. – Toute personne majeure peut désigner une personne de confiance qui peut être un parent, un proche ou le médecin traitant, et qui sera consultée au cas où elle-même serait hors d’état d’exprimer sa volonté et de recevoir l’information nécessaire à cette fin. Cette désignation est faite par écrit.
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000227015/

Tous unanimes, l’Union bouddhiste de France, les évêques orthodoxes de France, la Grande Mosquée de Paris, le grand rabbin de France, la Fédération protestante de France, les évêques de France. Contre la loi sur la fin de vie, ils dénoncent une « régression éthique, sociale et médicale… La seule existence d’une telle option peut induire chez des patients une culpabilité toxique, celle d’être un fardeau ».
Je note qu’il n’y a aucune référence religieuse dans ce front commun des religions. On parle de « culpabilité toxique » alors que les confessions des fidèles reposaient sur la culpabilisation. Rappelons que se masturber n’est pas un péché et que décider personnellement de mourir n’est pas un péché. Par contre donner la mort sur un champ de bataille est un péché mortel, et pourtant les Églises ne disent rien contre ceux qui font la guerre.
Les députés ont approuvé le 24 mai la création d’un délit d’entrave à l’aide à mourir, caractérisé par le « fait d’empêcher ou de tenter d’empêcher » de « pratiquer ou de s’informer » sur ce sujet, tout en renforçant la peine encourue : deux ans de prison et 30 000 euros d’amende, pour la calquer sur celle concernant l’IVG.
Ce délit sera constitué en cas de perturbation de « l’accès » aux lieux où est pratiquée l’aide à mourir, « en exerçant des pressions morales ou psychologiques », « en formulant des menaces ou en se livrant à tout acte d’intimidation » à l’égard des patients ou des professionnels de santé.
5 conditions requises pour qu’un malade puisse prétendre au droit à l’aide à mourir (vote législatif du 20 mai) :
– La personne doit avoir atteint au moins 18 ans.
– Être de nationalité française ou résider de façon stable et régulière en France.
– Atteint « d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qui engage le pronostic vital, en phase avancée » ou « terminale ».
– Présenter une souffrance physique ou psychologique » qui est « soit réfractaire aux traitements, soit insupportable selon la personne.
– La personne doit être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée.
Autant dire que l’expression du libre choix est très très encadrée !
– » Très peu de patients nous disent vouloir mourir et bien moins encore le redisent quand ils sont correctement soulagés et accompagnés. Beaucoup, en outre, veulent signifier bien autre chose que la volonté de mourir lorsqu’ils demandent la mort. Vouloir mourir signifie presque toujours ne pas vouloir vivre dans des conditions aussi difficiles. Et demander la mort parce qu’on souffre, est-ce vraiment un choix libre ? »
( 12 raisons de dire non à l’euthanasie – laviepaslamort.fr/ )
La liberté de choix est peut-être une référence de plus en plus vivante (sic), mais cela ne veut finalement pas dire grand chose. Déjà je pense que nous avons fait le tour de ce concept de libre choix (pressions de la société etc.). Ensuite ce n’est pas parce que nous obtenons toujours plus de libertés (?) que ça va nécessairement dans le Bon Sens.
Par exemple… si j’ai envie de me faire greffer une zigounette à la place du nez, et une paire de burnes à la place de mes oreilles (d’âne), parce que c’est la mode… et que j’estime que je le veau bien… est-ce que ce nouveau droit irait dans le Bon Sens ?
Plus sérieusement… comment alors reprocher à certains de vouloir changer de sexe ?