Transgressons une légalité écocidaire !

Le temps des simples marches, trop peu suivies d’effets, est révolu. Seule la désobéissance civile pourrait faire bouger les lignes. Est-ce la bonne solution ?

Sevin Rey-Sahin : Le samedi 16 avril, dans l’entre-deux-tours de la présidentielle, plus de 1 500 militants du mouvement écologiste Extinction Rebellion (XR) ont investi les abords de la porte Saint-Denis pendant trois jours pour dénoncer l’« inaction climatique » du pouvoir – ce « feu qui dévore notre avenir » – et « imaginer une autre démocratie que celle que l’on nous impose ». On l’a vu avec les “gilets jaunes”, pour être entendu, il faut être en capacité de bloquer économiquement un pouvoir sourd à la réalité bioclimatique. Le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes a été abandonné à la suite de plusieurs années d’occupation et de confrontation avec les forces de l’ordre. Il faut parler de légitimité face à « une violence d’Etat qui rend la planète encore plus inhabitable ». A la différence d’Extinction Rebellion, qui bloque les grandes capitales, investit des aéroports, asperge de sang le siège du Medef, ou de Greenpeace, qui occupe, entre autres, des centrales nucléaires, le mouvement Soulèvements de la Terre promeut un mode d’action plus locale avec un effet direct et brutal sur les projets jugés « écocides ».

Cet article du MONDE soulève l’animosité de commentateurs ! On croyait les abonnés de ce quotidien plus ouvert au débat légalité/légitimité. On leur répond point par point.

Orion : Donc ils perdent une élection démocratique dans les urnes, et ils veulent passer outre en imposant par la force leur vision sociétale. Une dérive factieuse certaine contre la République.

Biosphere : la conception d’Orion est une vision restrictive de la démocratie. L’élection n’est qu’un aspect d’un système complexe qui garantit la liberté de manifester. Les mouvements sociaux ont toujours été à la pointe du changement social, sans cela la société se fige, même si elle est injuste.

PMF : Par certains côtés, on voit là ressurgir une forme de luddisme, on casse tout avec la prétention de réfléchir après. Tout ceci est bien vain. Sauf pour faire parler de soi. Mais c’est peut-être le but.

Biosphere : Le luddisme, PMF, c’est en Angleterre au XIXe siècle la résistance des artisans à domicile contre l’extension des manufactures. Ils ont brisé des machine qui détruisaient leur gagne-pain. Si ce mouvement avait réussi, la révolution industrielle n’aurait pu avoir lieu avec les conséquences qu’on connaît aujourd’hui, l’épuisement des ressources fossiles et le réchauffement climatique au détriment des générations futures.

Peps72 : Léon Trotski dans « Terrorisme et Communisme » (1920) expliquait la même chose, et avec son ami Lénine ils ont tué quoi, entre 2 et 3 millions d’innocents (une paille en somme)…

Biosphere : Renvoyer au communisme comme le fait Peps72 est une comparaison qui ne tient par la route. D’abord parce que le communisme est un idéal qui n’a pas pour uniques représentants Lénine et Staline. Ensuite parce que le mouvement écologiste s’appuie sur des réalités biophysiques et non sociales, à savoir les perturbations qu’inflige la société industrielle aux équilibres naturels.

Paul RIOU : Au nom de leurs idées, ils sont prêts à mettre en place un nouveau fascisme. Menaces, violences, refus du débat… c’est ainsi que Mussolini prit le pouvoir en Italie il y a un siècle. Des groupuscules violents comme Extinction Rébellion sont dans la logique du Duce.

Biosphere : En fait beaucoup trop de commentateurs dont Paul Riou n’est qu’un exemple parmi d’autres, relire les commentaires précédents, atteignent le point Godwin. Ils suivent les traces de Luc Ferry qui atteignait le point Godwin en 1992 dans son livre « le Nouvel Ordre écologique ». Sa comparaison de l’écologisme avec le nazisme était significative d’un refus de l’analyse argumentée.

Jacques81 : Ceux qui veulent « plus de radicalité » ou « transgresser la légalité » devraient savoir que la violence est toujours néfaste car une action entraîne une réaction ; quand un manifestant prendra une flash-balle il sera intarissable sur les violences policières …

Biosphere : Il ne faut pas dire le contraire de la réalité, Jacques81, le mouvement écologiste est d’essence non-violente. Par contre la violence d’État par CRS interposé signifie l’absence de sensibilité écologique d’un gouvernement quand il réprime férocement des manifestants écolos. C’est le déni gouvernemental de l’urgence écologique qui fait en sorte que la non-violence peut se transformer en violence, par exemple par la destruction de biens nuisibles à la planète. Crever les pneus d’un SUV, est-ce de la violence ?

Jacques81 : Avez-vous vu ces écolos d’opérette en Arabie ou en Chine avec Greta en tête ? Non parce qu’ils savent ce qu’ils y risquent. Mais en Europe tous les coups anti-démocratiques sont permis, la justice est compatissante à leurs émotions. Ils se croient dans le camp du Bien, les djihadiste aussi, Poutine aussi !

RobinsonLeon : En transgressant la loi dans les pays européens qui sont à la pointe de la démocratie, ces « activistes » ne risquent rien. C’est facile… Qu’ils aillent donc faire la même chose en Chine, ou en Inde, je serais curieux du résultat…Pour ces délinquants, le terme d’écofasciste me parait approprié.

Biosphere : Même argumentation de Jacques81 et RobinsonLeon ! Rappelons qu’il y a des écologistes qui risquent leur emploi et même leur vie dans des pays totalitaires, Ensuite l’amalgame « écolo, djihadiste et Poutine » n’a aucune signification ; il y a en effet une grosse différence entre se croire dans le camp du Bien et agir réellement pour le Bien commun. Enfin il ne faut pas parler d’écofascisme, mais au contraire de contre-violence en agissant contre une société thermo-industrielle qui est en train de broyer les gens et qui porte atteinte non seulement aux générations futures, mais aussi à la biodiversité. Atteindre le point Godwin, c’est le contraire d’une réflexion démocratiquement menée.

-Alazon- : On peut parler d’écofascisme. L’objectif clairement affiché par ces militants est d’imposer par la force à la majorité ce qui est refusé dans les urnes. Tout démocrate sincère doit défendre, si besoin les armes à la main, nos principes contre cette sédition. On ne saurait mieux illustrer que l’écologisme ce n’est pas que la défense des petites fleurs et des grenouilles, mais une idéologie mortifère à placer au même plan que les pires déviations intellectuelles de l’histoire.

Biosphere : Ce commentateur, pseudo Alazon, est un spécialiste de l’insulte envers toute pensée écologique, ses commentaires en ce sens sur lemonde.fr sont innombrables. Il est amusant de voir que contre des manifestants écolos, il ne voit qu’une solution, renforcer l’État policier.

Jean Kaweskars : La police doit être imaginative en les aspergeant de liquide puant, poisseux et indélébile. ça calmera vite ces petits fachos.

Biosphere : Il est vraiment inquiétant de voir cette agressivité renouvelée contre des militant en lutte contre le réchauffement climatique… Il n’y a aucune argumentation, seulement la volonté de faire taire toute voix discordante et pourtant légitime. Rappelons que les actions dures des écolos sont souvent traitées par la justice, mais que si on a raison au fond, on peut transforme le procès en procès politique, en procès contre l’inaction écologique des gouvernements .

Pm42 : Oui, on connaît le discours, il a donné les Brigades Rouges et autres joyeusetés… Et comme toujours, la gauche bourgeoise confortable est fascinée par les extrêmes, la violence, tout ce qui la fait frissonner un peu et lui fait croire qu’elle fait autre chose que de la résistance à la terrasse du Flore (ou ce qui en tient lieu de nos jours).

Biosphere : La similitude entre tous ces commentaires anti-écolos, c’est de défendre la violence de la société thermo-industrielle en laissant croire que ce sont les anti-systèmes qui sont violents. C’est caractéristique de ceux qui sont en faute, ce n’est jamais eux les coupables, c’est toujours les autres.

1 réflexion sur “Transgressons une légalité écocidaire !”

  1. La désobéissance civile pour faire bouger les lignes … Est-ce la bonne solution ?
    Tout dépend du rapport de force. 1 500 manifestants (militants de XR) ça ne pèse rien du tout. C’est que dalle ! Ce genre de numéro donne juste quelques lignes dans les merdias, et en fin de comptes ces «désobéissants» passent pour des tarés, des nazis et j’en passe.
    Ce serait 1,5 million, voire 5 millions, on peut toujours rêver, là ça serait différent. Mais bon. En attendant, casser des vitrines et pisser sur l’Arc de Triomphe pour dire NON à l’Ordre Etabli, et/ou pour dire NON à la hausse des prix, à la retraite à 65 ans etc. etc. ce n’est pas politiquement correct. Ni écologiquement correct. Bref, ça ne se fait pas !
    Par contre, crever des pneus de SUV, ça oui. Misère misère !

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