Un constat terrifiant, deux initiatives en découlent

Un monde bâti sur du sable : La Terre est un système fini. L’idée semble évidente, pas pour Jean-Baptiste Say : « Les ressources naturelles sont inépuisables, car sans cela nous ne les obtiendrions pas gratuitement. Ne pouvant être ni multipliées ni épuisées, elles ne sont pas l’objet des sciences économiques (Traité d’économie politique, 1803) ». Après un bon siècle de croissance exponentielle, l’activité humaine est en passe de liquider des millions d’années d’accumulation de minerais, de combustibles fossiles et de biodiversité. La question du sable est l’une des mille façons de réaliser que nous touchons les limites de notre planète. Deuxième ressource la plus consommée après l’eau, le sable est encore perçu comme inépuisable. Mais son exploitation est telle que cette ressource se raréfie sensiblement (…) L’histoire de l’extraction du sable est l’une de celles qui, en creux, racontent la folle expansion humaine. La nature n’est pas qu’un décor, elle est la condition nécessaire de notre survie sur cette planète.*

Initiative du gouvernement suédois : Il n’avait plus été imprimé depuis 1987. Plus de trente ans plus tard, le petit manuel du parfait résistant suédois, intitulé « En cas de crise ou de guerre », fait son grand retour. Remis au goût du jour, le fascicule de vingt pages sera envoyé à partir du 28 mai à 4,8 millions de foyers (sur 10 millions d’habitants). Dans le scénario envisagé, l’électricité, le chauffage et l’eau courante sont coupés ; le réseau de téléphonie mobile, Internet, les transports et le réseau bancaire ne fonctionnent plus. L’objectif : pouvoir survivre une semaine, sans aucune aide extérieure. La brochure regorge de conseils : vivres à stocker, signaux d’alerte à reconnaître, ou bien encore comment construire une cabane dans son salon pour lutter contre la chute rapide des températures. « Nous devons nous préparer à faire face quand la société ne fonctionne plus comme elle le devrait », explique Christina, responsable de l’édition du livret.**

Initiative d’un collectif français : Des censures ont été décidées au nom du droit de propriété et de la liberté d’entreprendre, déduits par le Conseil constitutionnel de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Au XVIIIe siècle, ces principes ouvraient aux nouveaux citoyens la possibilité de s’affranchir de toute forme de despotisme. Étonnante déformation de ces droits nés pour émanciper le sujet, devenus, par l’interprétation qui leur est donnée, des moyens offerts aux plus puissants de s’opposer au bien commun et à l’exercice de leurs libertés par les plus humbles ! Face à la démesure, il appartient à l’Etat de droit d’assurer une souveraineté alimentaire, protéger la biodiversité, lutter contre le changement climatique ou encore abolir le privilège des puissants à se soustraire à l’impôt. Une réforme de notre Constitution est devenue une urgence qui prendrait cette forme au sein de l’article 34 de notre Constitution : « La loi détermine les mesures propres à assurer que l’exercice du droit de propriété et de la liberté d’entreprendre respecte le bien commun. Elle détermine les conditions dans lesquelles les exigences constitutionnelles ou d’intérêt général justifient des limitations à la liberté d’entreprendre et au droit de propriété. »***

* LE MONDE science du 6 juin 2018, Un monde bâti sur du sable

** LE MONDE du 6 juin 2018, La Suède renoue avec sa doctrine de « défense totale »

*** LE MONDE du 30 mai 2018, Inscrire le bien commun dans la Constitution

1 réflexion sur “Un constat terrifiant, deux initiatives en découlent”

  1. thèse : Karl Marx reprochait aux droits de l’homme de n’être « rien d’autre que les droits du membre de la société bourgeoise, c’est-à-dire de l’homme égoïste, de l’homme séparé de l’homme et de la communauté ».
    antithèse: Une tribune* de quinze « intellectuels » (Luc Ferry, Michel Onfray) sacralise au contraire l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen établissant la propriété comme « un droit inviolable et ­sacré » : « Avant de vouloir pénétrer notre Constitution, le « bien commun » a envahi le débat ­public. Mais le bien commun est assez flou pour se prêter ­aisément à tous les détournements politiques. Qui le définit ? On commence par le bien commun et on finit par le ­Comité de salut public. La révolution de 1789 a fait le pari de la ­liberté individuelle, en donnant au citoyen des droits qui lui permettent d’échapper à la pression du groupe et à la tyrannie de la ­majorité… »
    synthèse: En fait il ne faut pas tronquer l’article 17 qui limitait les privautés du « sacré individuel » au nom de l’intérêt général : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité. »
    * LE MONDE idées du 16 juin 2018

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