Une armée telle que je l’aime

Créée par les Alliés dix ans après la fin de la seconde guerre mondiale, l’armée allemande avait été pensée pour combattre le moins possible. Aujourd’hui Berlin veut la rendre « apte à la guerre », mais l’institution résiste, plus motivée à juste raison par la paix plutôt que par la guerre.

Quatre-vingts ans après la fin de la seconde guerre mondiale, les codes, les missions, les usages et la culture de l’armée restent ceux qui furent imaginés au sortir du conflit pour s’en démarquer. Comme le résume un expert allemand, « de même que le nucléaire est une arme de non-emploi, la Bundeswehr est une armée de non-emploi ». En 1955, lorsqu’elle est créée sous l’influence des Alliés désireux de la faire contribuer à la défense de l’Europe de l’Ouest, la feuille de route est claire : la rupture avec la Wehrmacht doit être totale. Les uniformes sont redessinés sur le modèle de ceux des armées américaine et britannique. Le pas de l’oie est supprimé, les défilés ont disparu. La Bundeswehr a été conçue « comme un pouvoir civil ». Pour intégrer l’armée, les ex-responsables de l’armée du IIIe Reich devaient notamment déclarer que la tentative d’attentat visant Hitler, le 20 juillet 1944, n’était pas une trahison, mais un acte héroïque. »

La nouvelle armée est sévèrement corsetée, subordonnée au pouvoir politique et contrôlée par le Parlement, qui doit donner son feu vert à toutes les opérations et – depuis 1981 – à toutes les dépenses de plus de 25 millions d’euros. Surtout, elle a vocation à n’intervenir que dans un cadre international – celui de l’OTAN – et jamais en position de leadership. Deux principes prévalent : ne jamais intervenir seuls, mais toujours en multilatéral, et éviter d’utiliser la force. Lorsqu’elle participe à des opérations, c’est toujours avec un mandat de l’OTAN, des Nations unies ou de l’Union européenne, pour des missions de maintien de la paix ou d’évacuation, menées dans un cadre très contraint

Le statut du soldat est aboli. Celui-ci devient un « citoyen en uniforme », libre de s’exprimer publiquement et même d’adhérer à un parti politique. L’objectif est de lui donner les moyens de désobéir s’il juge les ordres contraires à la Loi fondamentale. L’idée est que les soldats doivent savoir pourquoi ils se battent. Ils ont non seulement le droit, mais aussi le devoir de désobéir si nécessaire. Cela oblige les deux parties à réfléchir, celui qui donne les ordres et celui qui les reçoit. Quant à la notion de « patrie », elle est supprimée, toute référence à la nation étant désormais connotée. Le contraste avec l’époque nazie, où tout ce qui concernait l’armée faisait l’objet d’une glorification, ne pouvait pas être plus grand. Les soldats allemands sont dépourvus de « culture tribale », ce culte de la tradition dont leurs homologues français raffolent. Les chants militaires ont aussi peu à peu disparu de la Bundeswehr. La voix des militaires, bien que non soumise au devoir de réserve, demeure difficilement audible. Des municipalités s’élèvent régulièrement contre les campagnes d’information menées dans les établissements scolaires par des officiers, lesquels sont confrontés à des difficultés chroniques de recrutement.

Pour le ministre de la défense Boris Pistorius en octobre 2023, La Bundeswehr doit pourtant devenir « apte à la guerre » (kriegstüchtig). Le chancelier, Friedrich Merz, a promis d’en faire, à grand renfort d’argent public, l’« armée la plus puissante d’Europe sur le plan conventionnel ». Il est prêt à porter à 5 % du produit intérieur brut, contre 2 % aujourd’hui.

(source : En Allemagne, la Bundeswehr, l’armée qui ne voulait pas faire la guerre)

Le point de vue des écologistes désarmants

Le fait que les militaires allemands soient appelés à réfléchir, à penser par eux-mêmes avec possibilité de désobéissance, à se comporter normalement en mission, sans fétichisme masculiniste, sans commémoration guerrière, ni défilé glorifiant les armes, que toute l’armée soit dirigée vers la défense, non violente si possible, et qu’on considère que la guerre devrait être évité, c’est tout simplement du bon sens! S’interposer et porter assistance dans le cadre multilatéral, avec le moins de dégâts possibles, ce sont les deux seules missions qu’une armée devrait poursuivre, le reste ce sont des crimes commis à la demande de dirigeants avides.

Adoptée en 1949, le préambule de la Loi fondamentale de la République fédérale d’Allemagne stipule que le « peuple allemand » est « animé de la volonté de servir la paix du monde ». Être pour la paix ne signifie pas être une proie facile pour les agresseurs. Si tu veux la paix, prépare la paix, prépare toute une nation aux technique de résistances, non violentes si possible. En France, un président d’envergure internationale mettrait les forces armées françaises à disposition de l’ONU : notre pays ne chercherait plus à préserver une défense armée nationale, elle serait directement partie prenante d’une instance internationale ayant pour objectif premier le maintien de la paix et de la sécurité dans le monde. Notre pays pourrait ainsi assurer d’une façon indirecte sa propre sécurité : pourquoi attaquer un pays qui se veut le garant de la paix universelle ? En intervenant militairement dans une région quelconque du monde, une future armée mondialisée ne peut imposer une société civile, mais au moins, elle tient en respect les dictateurs, les revendications ethniques et les pays sans gouvernement.

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La fin du pacifisme pour Les Écologistes ?

extraits : Deux visions de la militarisation avancent en parallèle au sein du parti renommé « Les Ecologistes » : créée il y a un an, une commission défense militariste cohabite désormais avec la commission Paix et désarmement, créée en 1984 lors de l’AG fondatrice des Verts.Si les Écologistes agissaient dans la lignée de leur engagement historique pour la non violence, ils demanderaient politiquement à ce que, lors de la Journée Défense Citoyenneté obligatoire pour tous les jeunes, il y ait un module sur la défense civile non violente ainsi qu’une possibilité pour les jeunes de se déclarer lors de cette journée objecteur de conscience….

10 réflexions sur “Une armée telle que je l’aime”

  1. @ DIDIER BARTHES 3 JUIN 2025 À 19:33 :
    Votre aversion pour le rouge (communisme) n’est un secret pour personne. En campant sur vos vieux clichés vous vous interdisez de décoloniser votre imaginaire, et donc l’exploration d’autres possibles. C’est dommage.
    – « Manger mal, c’est penser pauvrement, non par manque de moyens, mais par réduction des possibles. » (les écologistes à la diète 2 juin 2025)

    Comparez les deux fameux livres noirs si ça vous amuse, mais n’essayez pas de m’embarquer dans un « débat » sur les chiffres des victimes des uns et des autres. C’est ridicule.
    – Liste des pays par dépenses militaires (Wikipédia)

  2. Didier BARTHES

    Il faudrait quand même nuancer cet article en faveur de l’armée allemande en faisant remarquer que son « pacifisme » (c’est un peu pareil pour le Japon) est largement facilité, et même tout simplement rendu possible, par le parapluie américain.
    C’est un peu comme l’Islande qui n’a quasiment pas d’armée, en fait un grand frère la protège, alors dans ces conditions, c’est facile de paraître gentil.

    1. C’est vrai. Toutefois il faut reconnaître que tous les peuples n’ont pas le même rapport à la guerre. Leur histoire y est bien sûr pour quelque chose. Seulement, comme je le dis à 12:32, tout évolue.
      – En Allemagne et au Japon, le crépuscule de l’idéal pacifiste (le MONDE 25 mai 2023)

  3. Saluons aussi les efforts de l’Allemagne pour débarrasser son armée de la Peste Brune.
    Seulement tout évolue, même cette armée, qu’il ne faudrait quand même pas prendre pour un modèle. Même si elle est constituée de citoyens («citoyens») et non pas de soldats (décérébrés), cette armée ne peut-être qu’à l’image de son pays. De son peuple, de ses dirigeants, ses intellectuels, artistes etc. Or le pacifisme des Allemands lui aussi évolue, et pas forcément dans le bon sens. Les idées pourries (extrême-droite) progressent, là encore c’est dans l’air du temps, ça pue. Les évènements en Ukraine accélèrent ce tournant enclenché il y a déjà un bon moment (au moins 10 ans) en matière de réarmement. ON entre donc «dans une nouvelle ère», dixit Olaf Scholz le 27 février 2022. Et donc là encore c’est la Course, c’est à celui qui y con sacrera le plus de Pognon, qui aura la plus grosse, etc.
    – Le chancelier Friedrich Merz veut que l’armée allemande soit « la plus puissante d’Europe sur le plan conventionnel » (Le MONDE 15/05/2025)

    1. (suite) Tout ça rappelle une époque sombre. Les Allemands ont peut-être fini par oublier leur histoire… Et pendant ce temps il y en a qui se frottent les mains. Business as usual.
      – En Allemagne, l’industrie de l’armement a le vent en poupe (Le MONDE 19/02/2025)

      N’oublions pas que la guerre c’est bon pour les Affaires, et donc pour la Croissance :
      – L’Allemagne relance sa croissance en annonçant des investissements massifs pour se réarmer (rts.ch 6 mars 2025)
      D’un côté comme l’autre du Rhin, et ailleurs également, c’est toujours la même chanson. Chanson économique ou chant militaire c’est pareil.
      En attendant ne perdons pas de vue les profiteurs de guerre. Les salauds ce sont eux !
      – « Quand les riches se font la guerre, ce sont les pauvres qui meurent. » (Jean-Paul Sartre)

      Bref, tout ça ON le sait. Mais ça ne fait rien…

      1. C’est vrai que les très communistes Corée du Nord et Chinois sont pacifistes, leurs armées sont conçues pour faire de l’humanitaire et du social selon nos très socialo-communistes français, qui ont transformé la France en Corée de l’Ouest !

        1. misère misère !

          Aucun doute, t’es vraiment le champion de l’argumentation. Et pile poil dans le sujet, comme d’habe. Je te laisse imaginer une armée avec des types comme toi. Une armée telle que tu l’aimes quoi.

      2. Didier BARTHES

        Quand même Michel C votre attaque systématique contre le capitalisme néglige le fait (et ce n’est pas un détail) que les pays les plus militarisés ont été et sont toujours les pays communistes.

        1. Monsieur Barthès… vous n’allez quand même pas vous rabaisser à me servir la même daube que celle de notre champion à 14:25. Je lui ai répondu mais c’est encore coincé dans les tuyaux. Comparez les deux fameux livres noirs si ça vous amuse, mais n’essayez pas de m’embarquer dans un « débat » sur les chiffres des victimes des uns et des autres.
          – Liste des pays par dépenses militaires (Wikipédia)

        2. Didier BARTHES

          Le problème cher Michel C est que cela est vrai, je répète, les pays les plus militarisés sont les pays communistes, je suis désolé si cela ne correspond pas à votre imaginaire.

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