Francesco Bernardone naît en 1182 dans la ville d’Assise en Ombrie. Fils de famille bourgeoise, il fait les 400 coups avant de trouver sa voie à 23 ans : vivre selon la pauvreté prônée par Jésus. Le père est si furieux qu’il fait pression en traînant son fils en justice, ce qui bien entendu obtient l’effet inverse et incite François à rompre avec sa famille et renoncer à tous ses biens. Malgré l’austérité radicale de son nouveau style de vie, des hommes se mettent à sa suite : l’ordre des Franciscains est né. François d’Assise meurt en 1226, demandant à être enterré le plus simplement possible, « nu sur la terre nue ». Il est canonisé en 1228. Il sera consacré par Rome comme Saint patron de l’écologie.
François d’Assise a réalisé que toute la création forme une grande famille, une sorte de fraternité universelle. Il invite alors tous les humains non seulement à l’amour mutuel, mais aussi au respect de notre mère la Terre, notre sœur la Lune et notre frère le Soleil. Ainsi François devient-il le plus grand révolutionnaire de l’histoire parce qu’il détrône l’humain de son rôle de monarque dans la Nature et proclame le respect de toutes les créatures terrestres. Francesco Bernardone se rapproche ainsi de l’écologie profonde dont le principe de base met à égalité le vivant et le non-vivant : « Le bien-être et l'épanouissement de la vie humaine et non-humaine sur Terre ont une valeur intrinsèque (en eux-mêmes). Ces valeurs sont indépendantes de l'utilité que peut représenter le monde non-humain pour nos intérêts humains. »
Un organisme international civil consacré à la réflexion écologique avait demandé à la Sacrée Congrégation pour le clergé que soit consacrée une figure emblématique. Ce qui fut mis en œuvre par Jean Paul II un an après son accession au pontificat : « Nous déclarons saint François d’Assise patron céleste des écologistes, en y joignant tous les honneurs et privilèges liturgiques qui conviennent. Donné à Rome le 29 novembre de l’an du Seigneur 1979. » Le texte officiel de canonisation souligne que la nature est un don de Dieu fait aux humains, ce qui montre que l’Eglise n’a toujours pas compris le message d’humilité vis-vis de la Nature que propageait François. D’ailleurs dès son vivant il a été régulièrement trahi par l’Eglise qui portait pourtant comme lui le même message des Evangiles. Au lieu d’enseigner la vraie joie par la simplicité volontaire, la fraternité et par dessus tout l’humilité, les porteurs de la parole qu’ils disent divine n’ont fait qu’exalter le culte des apparences et soutenir l’emprise des humains sur la Nature.
L’Eglise catholique et romaine n’est pas du tout en première ligne dans la défense de la planète. Elle se contente de ce geste symbolique et de quelques discours très laconiques : « François a étendu le sens de la fraternité universelle à toute créature, même inanimée : soleil, lune, vent, terre, feu, qu’il appelait frères et sœurs, et auxquels il témoignait une respectueuse affection. (Lettre apostolique du 15 août 1982) » ; « Créées à l’image de Dieu, nous devons le rendre présent au milieu des créatures comme maîtres et gardiens intelligents et nobles de la nature et non comme exploiteurs et destructeurs sans scrupule (à Assise, le 12 mai 1983) » ; « Selon le Povorello d’Assise, la création, œuvre de la Providence divine, rend un précieux service à l’homme : elle lui parle du Créateur dont elle manifeste l’éternel dessein d’harmonie et de paix. C’est pour cela que la nature doit être respectée et conservée, afin qu’en établissant avec elle une relation saine et correcte, on soit amené à contempler le mystère de la grandeur et de l’amour de Dieu (25 octobre 1991). » Il n’y a là que mots creux sous-tendus par un féroce anthropocentrisme révélé entre autres par Jean Paul II lors du discours de Viterbe adressé à 5000 jeunes le 27 mai 1984 : « Le soleil et les étoiles, l’eau et l’air, les plantes et les animaux sont des dons de Dieu qui a ainsi rendu confortable et belle la demeure que, dans son amour, il a préparée pour l’homme sur la terre. »
Ce recours constant à une divinité abstraite et anthropocentrée nous empêche d’avoir un rapport plus direct avec la Biosphère ! Les religions du livre nous amènent dans une impasse, elle ne sont utiles ni pour notre présent, ni pour notre avenir. Saint François d’Assise n’est qu’un cache de l’impuissance totale de l’Eglise en matière d’harmonie avec ce qu’ils appellent la « création divine », une planète qu’on peut ressentir et aimer directement sans l’aide d’un intermédiaire fantasmé. Pour combattre le capitalisme, il est illusoire de conquérir la propriété du capital, il suffit de renforcer nos dispositions intimes qui lui sont le moins favorable : l’altruisme et le sens du partage, la tempérance et la sobriété, la non possession. Que ce soit dans la religion ou en dehors de la religion, quand le chemin est le même, vous allez dans la bonne direction.