Le livre de François Laval, sous-titré « un défi pour l’humanité », n’est pas fait par un militant comme il le reconnaît explicitement. L’auteur est un géologue attentif aux problème de notre société qui écrit dans une maison d’édition consacrée à la pensée écologique, Sang de la Terre. François Laval ne décrit pas une énième fois l’état désastreux de la planète, mais d’abord les illusions de l’écologisme militant : « Les écologistes engagés ressassent les mêmes chansons protestataires ou dogmatiques… »
Car pour lui, l’essentiel est dans la malfaisance du système capitaliste devant lequel l’Etat est impuissant, endetté, avec la menace de la pénurie d’énergie. Dans l’avenir proche, entre 2012 et 2015 selon J.-M. Jancovici, l’épuisement du pétrole rendra impossible la remise en marche du système capitaliste. Le mode de vie actuel disparaîtra, remplacé par la frugalité inévitable. Car « l’homme obstinément fixé sur le progrès indéfini trouvera enfin sa limite devant le réel matériel atteint directement… Cette limite sera l’instant de vérité. »
Son pessimisme sur l’homme occidentalisé est total, une société de pénurie nous attend. Car de l’analyse de la trajectoire de l’homme, il résulte que le monde a progressé sur des monceaux de cadavres, relançant le mouvement de la fourmilière, la plupart du temps jamais rectifié. Comme beaucoup d’entre nous, conscients de l’impasse actuelle, il ne peut que souhaiter que l’homme devienne vertueux dans la nécessité : puisque la catastrophe globale est devant nous, nous sommes obligés de tout faire pour l’éviter. On retrouve ainsi l’enseignement de Jean-Pierre Dupuy, Pour un catastrophisme éclairé.
Si on pouvait résumer en un seul mot cet ouvrage dense de François Laval, ce serait la « lucidité »… pour penser autrement. Par exemple promouvoir la relocalisation des activités, la proximité des lieux de travail et de résidence, la production agricole et artisanale, le recours aux techniques anciennes : il faudra reconstruire la communauté villageoise. François Laval retrouve sans le dire l’idée de communautés de résilience, un mouvement qui commence à faire son chemin parmi les écologistes.
(édition Sang de la Terre)