« Il arrive que le chef d’un Etat ait-ou adopte- une grande idée : canal, barrage, réseau d’autoroutes, fusées planétaires ou force de frappe - équivalents modernes des Pyramides, de la Muraille de Chine ou du Palais de Versailles. Les « grands travaux » renforcent l’unité nationale, ils impressionnent l’étranger, ils coûtent très cher, ce qui peut attirer le grand capital ou « l’aide généreuse » d’une puissance , et ils porteront le nom de leur initiateur. Décision prise, on la fait « étudier ». Les fonctionnaires chargés de l’exécuter n’y entendent goutte, mais ils disposent d’experts « compréhensifs ». Pas question d’évaluer l’entreprise sur ses mérites réels, bien entendu, ni de la déconseiller si elle est trop risquée, mais seulement de traduire l’idée du Chef en langage d’ingénieurs et en programmes techniques. Ceux qui veulent ne savent pas, et ceux qui savent font ce que l’on veut. Et cela donne le barrage d’Assouan dont on connaît les conséquences catastrophiques pour les paysans égyptiens. »
Cette citation plus que jamais d’actualité est tirée du livre de Denis de Rougemont « L’avenir est notre affaire ». Editions Stock 1977 p. 33.
Denis de Rougemont a milité après guerre pour une Europe fédérale qu’il pensait être la bonne réponse politique à la crise écologique et a présidé dans la années 70 l’association Ecoropa dont faisait partie Jacques Ellul et Bernard Charbonneau.