1) Dès 1949, King Hubbert (né en 1903) avait énoncé que l’ère de l’énergie fossile s’avérerait brève. Au-delà d’un certain point, tout ce qui reste de ressources fossiles est plus difficile à extraire ; la décrue s’amorce même si de nouveaux puits sont forés. En général le pic de production a lieu lorsque la moitié environ de la quantité accessible de pétrole dans le réservoir aura été extraite. En 1956 Hubbert a pronostiqué que le pic de production de pétrole brut aux Etats-Unis interviendrait entre 1966 et 1972. A l’époque la plupart des économistes, compagnies pétrolières et institutions gouvernementales écartèrent ces prévisions d’un revers de main. Mais le point culminant sera pourtant situé en 1970. En 1916, le ratio énergie récupérée/énergie investie s’élevait à 28 pour 1. En 1985, il était tombé à 2 pour 1 et continue de chuter aujourd’hui. Chaque parcelle de capacité supplémentaire de production dans le monde est maintenant utilisée ou sur le point de disparaître. Dans ses conférences et articles, Hubbert (mort en 1989) souligna combien la société devait changer afin de se préparer à un régime post-pétrole.
En mars 1998, un article de Campbell et Laherrère, « The End of Cheap Oil », a estimé que les réserves mondiales de pétrole conventionnel déclinerait avant 2010. Ils s’appuyaient sur le fait que plusieurs membres de l’OPEP ont surévalué leurs réserves dans le but d’augmenter leur quota d’exportations. Colin Campbell prévoit actuellement que le pic de la production mondiale de pétrole interviendra à peu près en 2008. (in Pétrole, la fête est finie de Richard Heinberg)
2) Réunies au sein d’un groupe de travail nouvellement créé pour alerter le gouvernement britannique de l’impact économique du pic pétrolier mondial à court terme, huit multinationales britanniques viennent de publier un rapport baptisé The Oil Crunch : Securing the UK’s energy future (Crise pétrolière : assurer l’avenir énergétique du Royaume-Uni). Le groupe UK Industry Taskforce on Peak Oil and Energy Security (TFPOES) conclut à la grave menace pour l’économie du Royaume-Uni, et du monde en général, constituée par le déclin de la production de pétrole bon marché et aisément disponible d’ici 2013.
Habituellement réservé aux organisations non gouvernementales, cet avertissement doublé de recommandations provient pour la première fois d’un groupe d’entreprises multinationales représentant un large éventail de secteurs d’activités : transports, énergie, construction, architecture, multimédia, internet. Les entreprises membres du groupe de travail TFPOES sont : Arup, FirstGroup, Foster + Partners, Scottish and Southern Energy, Solarcentury, Stagecoach Group, Virgin Group, et Yahoo.
Faisant un parallèle avec la crise du crédit qui touche actuellement l’économie, Jeremy Leggett, Président et fondateur de Solarcentury, membre du groupe TFPOES, a déclaré : « Les réserves « toxiques » pourraient bien devenir pour l’industrie pétrolière ce que les produits dérivés toxiques sont devenus pour le secteur financier. Après avoir été incapables d’anticiper la crise du crédit, nous ne devons pas reproduire la même erreur avec la crise pétrolière. » On peut envisager la « toxicité » des réserves de pétrole sous trois angles.
Réserves « toxiques »
1 - D’une part, il est à craindre qu’une partie de ces réserves dites « prouvées » ont été surestimées.
2 - Une autre partie, bien que présente dans le sous-sol, risque de ne pas être exploitable à temps pour répondre à la demande en raison d’investissements moindres de la part des industriels.
3- Enfin, les vastes réserves de sables bitumineux sont particulièrement toxiques du point de vue de l’effet de serre.
En effet, « nous ne pouvons surtout pas éluder le changement climatique alors que nous tentons de remédier à la fin du pétrole bon marché. » souligne le chef de file du club d'entreprises TFPOES.