Dans presque toutes les espèces animales, chaque individu est tout à fait indépendant quand il est parvenu à sa pleine croissance et il peut ainsi se passer de l’aide de ses congénères. Tout au contraire les humains ont presque continuellement besoin du secours de leurs semblables. Les sociétés modernes définissent des fonctions agricoles, industrielles, politiques, administratives, judiciaires, artistiques, scientifiques de plus en plus sophistiquées au fur et à mesure de l’extension du marché et chacune de ces sphères d’activité se trouve à son tour divisée en de nombreuses spécialités. Cette séparation des professions accompagne la croissance économique, mais éloigne les personnes les unes des autres : au lieu que l’échange reste transparent, entre un nombre limité de personnes qui se connaissent au quotidien, il s’opère de façon anonyme entre des inconnus. Cette division du travail n’est pas l’effet d’une sagesse humaine qui aurait organisé la société d’une façon jugée collectivement plus efficace, mais le résultat d’une augmentation aléatoire des échanges qui a entraîné une spécialisation entre des communautés différentes, à la fois interdépendantes et indifférentes les unes aux autres : il n’y a plus d’humanité rattachée aux cycles vitaux, il n’y a qu’artifice et fragilité.
Le rôle de la conscience collective diminue à mesure que le travail se divise.
Il faut donc entreprendre la non division du travail social,
la Nature redevenant l’interlocutrice privilégiée.