Thorstein Veblen nous présente la comédie humaine, la rivalité puérile des adultes en quête d’argent, de gloire et de prestige, jamais capables d’atteindre un but qui fuit à mesure qu’ils en approchent puisque ce but se définit non pas en soi mais par rapport aux conquêtes des autres : « Pour s’attirer et conserver l’estime des hommes, il ne suffit pas de posséder simplement richesse ou pouvoir ; il faut encore les mettre en évidence. En mettant sa richesse bien en vue, non seulement on fait sentir son importance aux autres, mais encore on affermit les raisons d’être satisfait de soi. L’homme comme il faut consomme à volonté et du meilleur, en nourriture, boissons, narcotiques, parures, divertissements. Comme on signale sa richesse en consommant ces produits plus parfaits, on en tire grand honneur. On l’appelle ici gaspillage parce que cette dépense n’est utile ni à la vie ni au bien-être des hommes. Mais aux yeux d’un économiste, ce genre de dépense n’est ni plus ni moins légitime qu’un autre. S’il a choisi ce genre de dépenses, la question est en effet tranchée : c’est qu’il y trouve relativement plus d’utilité que dans des formes de consommation sans gaspillage.
Cette tendance fait que les besoins humains tendent à être illimités, et que la richesse n’est jamais jugée suffisante. C’est ainsi que les objecteurs de croissance tendent à expliquer la richesse, la pauvreté, et donc la persistance des inégalités sociales. Pour eux, lutter contre la pauvreté est donc un leurre, puisque c’est une lutte sans fin : pour répondre à la question sociale, les objecteurs de croissance proposent plutôt de s’attaquer à la misère et à la richesse.