En 68, avant Sarkozy
L’écologie en France vient tout droit de mai-68. Et ce sont les militants d’associations qui l’ont inventée et fait vivre. En 1969, à peine six ans après la création du parc de la Vanoise, des promoteurs désirent installer un vaste domaine skiable. L’affaire déclenche un tollé, des centaines de milliers de « contestataires », comme on dit à l’époque, signent une pétition. Et Pompidou finit par reculer. Cette victoire change tout : jusqu’alors l’écologie était aux mains de sociétés savantes gérées par de timides naturalistes, désormais la voilà défendue par de grandes associations régionales et nationales. En 1971 naît la Frapna, Fédération Rhône-Alpes de protection de la nature, et les Amis de la Terre, en 1976 le ROC (Rassemblement des Opposants à la Chasse), en 1977 le bureau français de Greenpeace … Chantal Jouanno veut aujourd’hui planter des mellifères sur le bord des routes pour maintenir les abeilles : c’est une idée que FNE avait proposée voilà plus de vingt ans, en mai1988.
La première grande manif écolo en France est une manif antinucléaire : en juillet 1971, à l’appel de Pierre Fournier, pas moins de 15 000 marcheurs se rassemblent contre la centrale nucléaire de Bugey. La France n’est alors presque pas nucléarisée : elle ne compte que huit petits réacteurs graphite-gaz. Robert Poujade, qui occupe le poste tout juste créé de ministre de l’environnement, se déclare même contre l’électricité nucléaire. « Société nucléaire, société policière ! », scandent les manifestants, plus de 60 000, réunis à Malville en juillet 1977. Plus de 100 000 manifestants fêtent la fin de la procédure du projet Plogoff le 24 mai 1980. Lorsque les Verts se constituent en parti, en janvier 1984 à Clichy, c’est d’ailleurs sur le nucléaire que se fait le clivage déterminant : téléguidé par Mitterrand, Brice Lalonde propose aux écolos d’abandonner l’opposition au nucléaire et de s’allier aux centristes. Il ne rallie même pas un dixième des suffrages. Là-dessus, le 26 avril 1986, Tchernobyl.
En roux libre (Cohn-Bendit)
Quarante ans après, mais-68, l’ancien leader gauchiste est encore à la mode. Né le 4 avril 1945, Dany le Rouge s’éloigne en douceur de ses idéaux révolutionnaires et se sensibilise à la cause environnementale. A la fin des années 70, il se rapproche des Grünen allemands et de Joschka Fischer. En 1989, il est élu sous l’étiquette écolo au conseil municipal de Francfort, puis c’est l’aventure européenne à partir de 1994.
Les Verts viennent le chercher en 2009 pour conduire la liste Europe Ecologie en Ile de France. Avec Eva Joly en numéro 2, il fait un carton en parlant quasi exclusivement d’Europe. Son but affiché : transformer l’essai des européennes, et inscrire Europe Ecologie comme la 3ème force politique française.
Ca commence à bien vert (Sarkozy)
Sarkozy n’est pas tombé dans la vertitude quand il était petit. En 2001, il n’accorde pas une ligne au sujet dans « Libre », son autobiographie de 400 pages post-traumatisme balladurien. S’il évoque le naufrage de l’Erika, c’est au détour de considération sur son goût pour le sport, parce que la marée noire a touché la côte où il a l’habitude de rouler à bicyclette l’été. Même ignorance du sujet en 2006, avec « Témoignage », livre confession destiné à asseoir sa candidature présidentielle. Dix lignes sur 281 pages pour souhaiter que le ministre de l’écologie ait de « vrais leviers d’action ». Mais la campagne de 2007 va transformer le candidat. Puisque le durable est à la mode, il en sera le prophète. Chirac était vert, il le sera davantage. La victoire venue, Sarko tient promesse. Le Grenelle est un succès à l’automne 2007.
Mais trois ans après, le Grenelle 2 n’a toujours pas été approuvé par le Parlement. Le 6 mars 2010, Sarko lâche au Salon de l’agriculture : « Je voudrais dire un mot de toutes ces questions d’environnement. Parce que là aussi, ça commence à bien faire. »