Si les êtres vivants avaient été créés par Dieu au commencement du monde, comment pouvait-on imaginer que cette création divine ait pu comprendre des êtres assez imparfaits pour qu’ils puissent s’éteindre totalement. L’extinction des espèces était donc impensable. Or la très grande majorité des espèces ayant vécu sur la Terre depuis l’origine des êtres vivants est aujourd’hui éteinte. Les fossiles sont notre unique source d’information à ce sujet. Pas la religion.
1/4) Un exemple d’extinction, les dinosaures
Il y a eu cinq grandes extinctions en masse au cours des temps géologiques. Pour donner une échelle de grandeur, celle de la fin du permien, il y a quelque 251 millions d’années, en aurait supprimé jusqu’à 90 %. On estime que la grande crise de la fin du Crétacé, il y a 65 millions d’années, qui fut fatale aux dinosaures, a éliminé environ 70 % des espèces qui vivaient alors.
Un impact météoritique a injecté dans l’atmosphère des quantités gigantesque de poussières, formant une couverture assez opaque filtrant de façon très importante la lumière solaire. Or les végétaux ne peuvent subsister sans la photosynthèse. Le dépérissement du monde végétal a provoqué une rupture de la chaîne alimentaire, provoquant l’extinction des herbivores, puis des carnivores se nourrissant de ces derniers. Les espèces animales qui résistèrent le mieux à la catastrophe furent celles qui ne dépendaient pas directement pour leur survie de végétaux vivants, en particulier les petits animaux terrestres insectivores ou les vers consommateurs de la matière organique de l’humus. On a estimé qu’aucun animal strictement terrestre pesant plus de 25 kilos n’a survécu à l’extinction. Pourtant la période de crise catastrophique qui affecta le monde vivant fut de relativement courte durée, pas plus de quelques années, si ce n’est moins.
Le malheur des dinosaures a fait le bonheur des mammifères. Les petits mammifères étaient en effet bien présents il y a 65 millions d’années. Ils se sont adaptés et ont vu leur taille s’accroître. Les espèces se transforment au cours du temps, pour donner d’autres espèces. En ce qui concerne les mammifères, la durée moyenne d’existence d’une espèce, sur les vingt derniers millions d’années, serait de 2,33 millions d’années. Pour autant que l’on sache, il n’existe plus aujourd’hui d’espèces animales ayant déjà été présentes au temps des dinosaures. En revanche, toutes les espèces animales et végétales qui peuplent le monde actuel descendent d’espèces antérieures. Y compris bien sûr l’espèce humaine.
2/4) Disparition de l’espèce humaine ?
Toutes les espèces étant vouées à disparaître, comment la nôtre pourrait-elle échapper à cette règle inexorable révélée par la paléontologie ? Si les humains ne s’anéantissent pas eux-mêmes dans un conflit nucléaire, comment l’humanité risque-t-elle de finir ? On peut envisager que les activités humaines, par accumulation de leurs effets néfastes, ne finissent par rendre la planète inhabitable.
Mais les espèces peuvent aussi se transformer en une autre espèce. Cette éventualité semble être rarement évoquée sous le prétexte que, dans l’espèce humaine, l’évolution culturelle a complètement pris le pas sur l’évolution biologique. En réalité rien n’est moins sûr ; il est peu probable qu’Homo sapiens se soit complètement affranchi des contraintes de la sélection naturelle qui pèse sur tous les êtres vivants. Il serait sans doute téméraire d’affirmer que cette espèce, dont les plus anciens représentants connus remontent à quelque 20 000 ans, a cessé d’évoluer et de se transformer.
3/4) Extinctions par la faute de l’espèce humaine
Lorsque deux espèces ayant des modes de vie similaires, exploitant les mêmes ressources naturelles, se retrouvent dans le même habitat, elles entrent en concurrence et, en général, l’une finit par l’emporter sur l’autre et provoquer sa disparition.
La coïncidence entre l’extinction du dodo et la colonisation de l’île Maurice par les humains est trop claire pour que l’on n’établisse pas une relation de cause à effet entre les deux événements.
En Amérique du Nord, les bisons sont estimés à 75 millions d’individus à l’arrivée des Européens. En 1884, il ne subsistait plus qu’environ mille bisons.
La population de bisons européens, protégée d’abord par les rois de Pologne, puis par les tsars, se maintient jusqu’à la Première Guerre mondiale. Les bisons furent décimés par les belligérants. Le dernier survivant fut tué en 1921.
Le pigeon migrateur d’Amérique du Nord vivait en colonies comptant des centaines de milliers d’individus. Lors des migrations jusqu’au Mexique, les vols pouvaient atteindre plusieurs milliards de pigeons. Le dernier pigeon migrateur mourut le 1er septembre 1914 au zoo de Cincinnati.
C’est une espèce animale, Homo sapiens, particulière par son abondance et sa répartition géographique mondiale, qui provoque la disparition de nombreuses autres espèces. D’où l’idée d’une « sixième grande extinction » qui serait en train de se produire.
Cette sixième extinction se distingue des grandes extinctions en masse des temps géologiques par un type de globalité différent : l’homme détruit les espèces « une par une », voire l’une après l’autre. Mais les disparitions ne s’en accumulent pas moins et c’est à juste titre que l’on peut s’inquiéter de la diminution de la biodiversité qui est en train de se produire.
Les modes d’extermination sont variés : la chasse, l’introduction de nouvelles espèces entrant en compétition avec la faune indigène, la destruction ou la pollution des habitats.
L’humanité est aussi en passe de modifier l’environnement sur une grande échelle. L’augmentation en pourcentage des gaz à effet de serre dans l’atmosphère, du fait des activités humaines, et son corollaire, le réchauffement climatique, n’est pas sans rappeler des épisodes survenus au cours de l’histoire de la Terre. Les changements induits sont peu-être trop rapides pour que les espèces aient le temps de s’adapter.
4/4) L’humanité qui lutte contre l’extinntion de certaines espèces
En principe, on pourrait se dire que toutes les espèces vivantes ont droit à la même sollicitude, et doivent être également protégées si elles se trouvent menacées. Dans la pratique certains espèces suscitent plus facilement la compassion que d’autres, par exemple le panda.
Parmi les arguments en faveur des parcs zoologiques figure le rôle qu’ils jouent pour tenter de sauver des espèces menacées. On peut citer maints exemples d’animaux qui subsistent encore aujourd’hui parce qu’un certain nombre d’individus ont pu être conservés en captivité, alors que l’espèce s’éteignait à l’état sauvage.
En 1987, le gouvernement américain décida la capture de tous les condors sauvages subsistant encore ; ils n’étaient que 22. Après un élevage en captivité, ils furent réintroduit dan le milieu naturel en 1991. Aujourd’hui il existe près de 200 condors en liberté.
Commentaire sur ce livre
A la fin de la lecture, nous ne pouvons que ressentir un sentiment de frustration. Eric Buffetaut revient dans ses dernières lignes sur la responsabilité des humains dans le mécanisme actuel d’extinction des espèces. Mais il ne cerne pas les responsabilités ni n’envisage les moyens d’échapper au massacre actuel. Dommage !
(éditions Le Cavalier Bleu)