Il faut soigneusement distinguer l’évolutionnisme social de l’évolutionnisme biologique, lié aux travaux de Darwin. Le premier est une philosophie de l’histoire, fondée sur une hypothèse non vérifiable, d’ordre téléologique (les évènements s’enchaînent selon une finalité prédéterminée), alors que le second constitue une explication, reposant sur de multiples observations, qui permet de comprendre l’évolution des espèces vivantes, sans que celle-ci n’obéisse à aucune nécessité interne. Sur le plan politique, l’évolutionnisme social permettait de donner une légitimité à la nouvelle vague de colonisation.
De même que Christophe Colomb avait conquis l’Amérique au nom du Christ et de l’évangélisation, la colonisation se présentait désormais, grâce à la SDN, comme une « mission sacrée de civilisation ». La formule n’était pas innocente car elle reportait l’objectif final dans la sphère du religieux, de la mission et du sacré. Loin de sacrifier à l’intérêt national, la colonisation n’était –elle pas une entreprise tout entière tournée vers le « bien-être matériel et moral des indigènes » s’inscrivant dans le progrès général de l’humanité ?
(le développement, histoire d’une croyance occidentale de Gilbert Rist)