La pauvreté est essentiellement relative : elle ne peut être définie que comme un manque par rapport à quelqu’un d’autre. La misère, en revanche, est objective : est miséreux celui dont les besoins fondamentaux (manger à sa faim, avoir un toit, etc.) ne sont pas satisfaits. La lutte contre la pauvreté est souvent présentée comme la réponse prioritaire à la question sociale, tant sur le plan national qu’international. Mais qu’est-ce au juste que la pauvreté ? Beaucoup d’objecteurs de croissance se réfèrent à André Gorz pour répondre à cette question. Selon lui, "pas plus qu’il n’y a de pauvres quand il n’y a pas de riches, pas plus il ne peut y avoir de riches quand il n’y a pas de pauvres : quand tout le monde est « riche » personne ne l’est ; de même quand tout le monde est « pauvre ». À la différence de la misère, qui est insuffisance de ressources pour vivre, la pauvreté est par essence relative." Pour paraphraser encore cet auteur, on peut dire qu’au Vietnam, on est pauvre quand on marche pieds nus ; qu’en Chine, on est pauvre quand on n’a pas de vélo ; qu’en France, on est pauvre quand on n’a pas de voiture, et qu’aux États-Unis, on est pauvre quand on n’en a qu’une.
Serge Latouche pointe l’absurdité du concept de pauvreté en renversant l’analyse : pourquoi définir la pauvreté comme un manque et pas la richesse ? En effet, la richesse pourrait être définie comme "un manque de clairvoyance, un manque de vertu ou de solidarité, un manque de sens de la justice sociale ou un manque de compassion." Par sa frénésie d’accumulation matérielle égoïste qui s’apparente à une fuite en avant, la richesse présente, selon les objecteurs de croissance, un "caractère pathologique".