Trois milliards de terriens contre une poignée d’obèses : le numéro 18 (avril 1974) de la Gueule ouverte se centre sur la surpopulation :
« De plus en plus, nous serons obligés de penser globalement, au niveau planétaire, en termes de détérioration du milieu naturel et de ressources globales disponibles. Nous préférons donc une approche écologique de la question démographique. Mais la quasi-totalité des philosophies, des religions, ou des idéologies politiques ont été natalistes. La régulation des naissances s’est heurtée à une formidable coalition du passé : catholicisme, communisme, islam, nationalisme, tabous sexuels, etc. Voyez ces politiciens illuminés qui préconisent en France les 100 millions d’habitants comme si le nombre était garantie de bonheur accru. Contemplez ces dirigeants des pays en voie de développement qui magnifient leur vertigineuse ascension démographique. Admirez comment ceux qui prodiguent les conseils de modération à ces pays sont souvent ceux-là mêmes qui prônent la natalité chez eux. En France les natalistes les plus indécrottables, on les connaît, Michel Debré, Alfred Sauvy, Jérôme Monod, le Dr Tremblay et autres irresponsables de « Laissez-les vivre ».
La croissance démographique est peut-être moins un problème matériel immédiat qu’une question de valeurs : quel est le sens de la vie humaine dans un monde surpeuplé, encombré ? Cette vie a déjà commencé, on quitte la ville où l’on vit en troupeau, pour se retrouver en troupeau sur les lieux de vacances. Il finit par naître une pensée de troupeau, et nous savons tous que le troupeau postule le berger. L’homme qui pense librement n’aura plus sa place dans la société de demain, il n’aura même plus la possibilité d’aller vivre ailleurs parce qu’il n’y aura plus d’ailleurs.
En définitive le dilemme est clair : soit nous complaire dans notre délire actuel et « après nous le déluge », soit prendre délibérément, lucidement les mesures qui s’imposent :
- contraception libre et gratuite, autorisation légale de la vasectomie ;
- suppression de tous les textes répressifs relatifs à l’avortement ;
- suppression des encouragements à la natalité (allocations familiales), suppression de la prime à la naissance ;
- Dire aux couples qu’au-delà de deux enfants, ils contribuent directement aux catastrophes futures ;
- Recours à une éducation en vue de la stabilisation démographique. »